En 1915: de grandes offensives coûteuses pour percer le front allemand.

   Lors des offensives de 1915, les forces françaises, font reculer les Allemands à partir de la Marne. En mai 1915, lors de l’offensive près d’Arras au nord-ouest d’Angres, le 68è Régiment d’infanterie composé de berrichons mais aussi de Poitevins prennent  d’assaut une redoute allemande près de Notre Dame de Lorette. Nous avons retrouvé un extrait du « carnet » d’un jeune Lieutenant de Sommières du Clain, située au sud du département de la Vienne. Ce carnet a été longtemps conservé aux Invalides à Paris.

L’histoire de la mort du Lieutenant Luquiaud a été relaté par le journaliste Paul Gsell qui a rendu public le journal en question dans un petit ouvrage publié en 1916. 

Ainsi, dans ce recueil, Gsell raconte que Le 3ème bataillon du 68è devait être relevé, quand, un éclat d’obus tranche horriblement le visage du Lieutenant Luquiaud. Tout le bas de la figure est enlevé: la bouche les deux mâchoires, le nez. Il ne reste que le front et les yeux au-dessus d’un trou pourpre. Le lieutenant tombe et son ordonnance le soldat Saturnin Poupard lui noue à la hâte un bandage, le prend dans ses bras et fraternellement l’emporte en arrière. Voilà le mourant dans une tranchée française en attendant que les infirmiers l’enlèvent. Mais il ne durera pas jusque-là. Il s’éteindra le soir même à l’hôpital militaire de Noeux-les-mines.

Voilà donc le mourant dans une tranchée française. Il ne peut parler. Il regarde ceux qui l’entourent, et ces braves gens le cœur déchiré tiennent leurs yeux obstinément attachés sur son visage de cauchemar. Le lieutenant s’agite, sa gorge siffle. Le sergent Mérigaud devine qu’il voudrait écrire. ll lui tend un carnet et un crayon. C’est celui sur lequel le sergent a inscrit les noms de ses hommes. En face de chaque nom, l’adresse de la personne qu’il faudra prévenir  si le soldat meurt. Dans ces pages Luquiaud écrit des phrases vraiment émouvantes. Les soldats qui sont là, attendent en silence les écrits du muet. Il écrit d’abord ces mots :

-Merci a tous ceux qui ont combattu avec moi.

Puis sa pensée se porte vers sa famille et son village :

-Vous direz à mes parents que j’ai toujours fait mon devoir.

Il veut tourner les pages du carnet mais ses doigts ensanglantés tachent le papier. Il continue cependant :

…. Prévenir ma famille Luquiaud, Belle-vue par Sommières.

Les lettres sont très mal formées car la main est défaillante, mais dans un sursaut d’énergie il écrit en grosses lettres :

Je meurs heureux.

Cependant, le lieutenant ne veut pas qu’on l’éloigne du combat, et jusqu’à son dernier souffle il tient à stimuler par la vue même de son martyre la bravoure de ses compagnons, notamment en leur écrivant l’ordre de ne pas l’emporter. Le jeune officier désire témoigner son amitié reconnaissante au soldat qui lui était le plus dévoué, à son ordonnance :

-500 francs de mon argent pour Poupard

(Le brave Poupard ne devait lui survivre que quelques mois.)

Puis son ultime phrase :

500 autres pour les pauvres de chez moi.

Carnet 1

carnet 2

carnet 3

carnet 4

carnet 5

Les soldats écrivent abondamment à leur famille. c’est le cas d’Henri Maugis. Souvent les soldats  se contentent d’écrire simplement que leur santé est bonne de façon laconique, pour dire, en fait, qu’il sont simplement vivant malgré la dureté des  combats.

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