Albert Guilet lors de son témoignage au collège Jeanne d’Arc de Surgères
Albert Guilet est né le 6 avril 1939 à Apremont en Vendée dans une famille de paysanne. Après son certificat d’études il travaille à la ferme, c’est là qu’il est convoqué au service militaire en 1959 au 5ème régiment de Dragons à Périgueux. En novembre, c’est le départ pour l’Algérie. Il est affecté à Kenadva dans le désert au 26ème régiment de Dragons dans un centre radio PC (poste de commandement). Il effectue différentes tâches : de garde, d’embuscade, de corvée de poubelles. Il devient radio télégraphiste puis formateur.
En 1960, il passe brigadier et part pour l’extrême sud saharien dans la 3ème compagnie du génie. Son travail consiste à assurer les liaisons radio et à écouter son réseau précédent car au Maroc les services radios algériens arrivent à décoder les messages utilisés en opération. Il quitte l’Algérie après 20 mois de service.
Lire – Autobiographie d’ Albert Guilet
” Je ne parle jamais [de la guerre], ma famille n’en parle jamais et mes petits-enfants aussi ne me posent pas de questions.”
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Propos recueillis par les élèves de 3ème du collège Jeanne d’Arc de Surgères le 10 mars 2017 auprès de Albert Guilet, ancien combattant durant la Guerre d’Algérie.
Qu’est-ce qu’un opérateur radio ?
Le travail d’un opérateur radio c’est le morse. Le morse ce sont des points et des traits que l’on émet avec le doigt. Pour cela on utilise un manipulateur. Pour être émetteur radio il faut savoir gérer son matériel, savoir que l’émetteur est en dessous et le récepteur au-dessus. J’ai eu des stagiaires radio à qui j’enseignais la radio. J’envoyais et interprétais des messages de trafics, les ordres que donnaient les généraux (ex: se rendre à tel endroit..). J’étais chef de station.
En quoi consistait votre métier en radiotélégraphie?
Ma formation a duré quatre mois au lieu de deux, ce qui m’a permis de rester en France deux mois de plus. Le morse est un langage constitué de points et de traits qu’on émet avec les doigts, moi je devais écrire 900 signes par minute. Je devais aussi m’occuper de la gestion c’est-à-dire à bien aligner l’émetteur et le récepteur, on appelle cela l’interrelation. J’arrivais à former des jeunes en deux mois.
Avez-vous eu des blessures de guerre et si oui vous en êtes-vous remis?
Non je n’ai jamais été blessé durant la guerre et je n’avais pas peur, mais en revanche on ne savait jamais ce qui pouvait nous attendre.
Avez-vous fait de bonnes rencontres en Algérie ?
Oui, j’avais de bonnes relations avec mes camarades puisque nous étions 24h/24 ensemble.
Saviez-vous déjà parler algérien avant d’arriver en Algérie ?
Je n’avais jamais parlé algérien auparavant, il y a plusieurs langages en Algérie comme l’arabe et le berbère ce qui a compliqué la compréhension de la langue mais j’ai quand même appris certains mots de base sur place.
Vous arrive-t-il de parler de la guerre au quotidien?
Je n’en parle jamais, ma famille n’en parle jamais et mes petits-enfants aussi ne me posent pas de questions. Je ne me plaignais pas.
Cela n’a pas été trop difficile de voir tous ces enfants dans la misère ?
Nous n’avions pas vraiment le temps de les voir. Nous n’étions pas préparer à une telle misère. Les enfants étaient pieds-nus pour jouer au ballon et la terre était remplie de bouts de verre cassé. Par générosité nous leur donnions du saucisson provenant de nos boites de rations. Mais nous ignorions les interdits de leur religion, ils nous les jetaient à la figure. Sur le chemin nous rencontrions souvent des hommes sur leurs ânes et des femmes qui marchaient derrière en portant des charges imposantes.
Quand vous êtes revenu, avez-vous mis du temps à vous habituer à ne plus être en guerre et à recommencer à vivre en France ?
Oui j’ai mis un peu de temps, au début j’étais « paumé ». En deux ans et demi la vie avait beaucoup changé en France, par exemple il n’y avait plus ce qu’on appelait “les assemblées de quartier”. Puis on finit par s’habituer.