Nouvelle 28 : quel gâchis !

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C’était lors d’un mois de février dans une grande ville, au Canada. Il faisait très froid et les rues étaient presque toutes désertes. Seules les personnes les plus courageuses ou alors celles qui n’avaient pas le choix pour le travail par exemple sortaient dehors et donc étaient amenés à vaincre ce climat plutôt glacial. Paul et Marie, comme tous les mercredis, s’étaient donnés rendez-vous au parc après leur entraînement de hockey sur glace. En ce mois de février, il faisait beaucoup trop froid pour s’installer sur leur banc préféré, celui qui se trouvait sous le vieil érable. Alors, ils décidèrent de marcher d’un bon pas dans les allées du parc pour se réchauffer. Marie était plutôt une fille calme et pleine d’ambition, elle était très généreuse. Contrairement à son ami Paul qui, lui, était très gentil mais ne partageait jamais. Il gardait tout pour lui sous forme de réserves.

*

– Allez Paul ! s’écria Marie qui semblaient beaucoup plus courageuse.

– Il fait si froid, j’ai les pieds et les mains gelées, répondit Paul.

– Paul, j’ai une idée ! Courrons derrière les écureuils, proposa Marie qui s’était déjà élancée en tirant Paul par la main.

Ils ne tardèrent pas à rencontrer un groupe d’écureuil qui avaient osé s’aventurer hors de leur tanière par ces temps, afin sûrement de déterrer leurs provisions constituées pendant l’automne.

En les suivant, c’était avec grand étonnement qu’ils découvrirent que tous les écureuils se dirigés vers un fourré, dont l’entrer étaient fermés par une barrière qui était actionné par un écureuil portant un petit costume de douanier ne semblant laisser entrer que ses congénères dotés d’un laisser-passer. Paul et Marie, n’en revenant pas, décidèrent de se cacher non loin du fourré afin d’observer cette scène surréaliste. Les deux amis n’eurent qu’une idée alors : entrer dans ce fourré eux aussi pour voir ce qu’il s’y passait.

*

Lors de la pause du petit gardien à longs poils Paul parvint à s’infiltrer en se hissant en toute discrétion en-dessous de la barrière. Pendant ce temps Marie surveillait l’entrée du monde mystérieux. À son arrivée, Paul s’installa à une terrasse de ce qui semblait être un salon de thé. C’est alors tout naturellement de sympathiques écureuils vinrent s’attabler à ses côtés.

– Bonjour petit, comment t’appelles-tu ? demanda l’un d’entre eux.

– Je m’appelle Paul.

– Et bien Paul, je vous conseille fortement de commander notre boisson lactée à base de noisettes et de glands, conseilla un petit écureuil à l’air malicieux.

– Merci pour votre conseil que je vais m’empresser de suivre.

Sitôt commandé, sitôt servi ! Le breuvage avait l’air succulent et savoureux. Un peu de chantilly en guise de décoration. Tout cela donna très envie à Paul qui s’empressa de l’engloutir à l’aide de la paille. Tout à coup, Paul ne se sentit pas très bien. Plus le temps passait, plus il se sentait lourd et tassé puis il se mit à rapetisser. Une fourrure rousse et blanchâtre commençait à apparaître petit à petit. Quatre petites pattes apparurent, soudain surplombées de petites griffes. Son nez s’effaça peu à peu pour laisser place à un fin museau. Puis ses yeux devinrent de petites billes bien rondes. Enfin, une queue apparut. Paul comprit : en buvant cette boisson gland et noisette, il s’était alors transformé en écureuil. D’abord stupéfait, il se mit à crier et à pleurer à chaudes larmes…

*

– Calme-toi Paul, on va tout t’expliquer. Il y a une raison à ta transformation tu sais, s’exprima l’un des petits écureuils attablés.

– Mais je ne suis pas un écureuil moi, je suis un humain et puis laissez-moi ! Je veux rentrer chez moi !!!!

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– Paul, reprend un second écureuil, ta vilaine curiosité t’a poussé à franchir la barrière de notre petit monde secret alors que tu n’y étais pas autorisé. Comprends maintenant pourquoi tu te retrouves changé en écureuil. Vivre cette expérience devrait te rendre meilleur. Paul, nous avons le regret de t’annoncer que tout comme nous autres, les écureuils, tu es un être cupide. Tu veux t’enrichir à tout prix dans la vie, tu n’en as jamais assez. Tu mets en resserve des quantités supérieures aux besoins de chacun, des tas de choses dont tu n’as même pas besoin. Tu collectionnes, tu gardes pour toi, tu deviens égoïste par peur de manquer. Comme nous le faisons pour chaque personne, comme toi, nous devons te faire changer de comportement. Seulement à cette condition, tu pourras reprendre ta forme humaine, sinon tu resteras toute ta vie vivre ici dans ce corps écureuil.

Paul écouta attentivement tout ce que ces petits êtres avaient à lui dire.

*

Environ deux semaines étaient passées. Paul était toujours au pays des écureuils… Lassé de ramasser des tonnes de noisettes et de glands chaque jour, il regrettait d’être comme ça. Il vivait désormais comme eux mais ne souhaitait qu’une chose : retrouver son apparence et rentrer chez lui. Tous ses proches étaient très inquiets, mais seule Marie savait où il était mais elle ne pouvait le dire à personne et s’en voulait beaucoup de l’avoir laissé partir. Chaque jour, à la même heure, elle retournait voir là où elle l’avait vu la dernière fois. Mais un beau jour elle le vit sortir du fourré comme s’il ne s’était rien passé. Elle se posa beaucoup de questions surtout quand elle vit qu’il avait les cheveux roux…

– Paul, mais où étais-tu passé ? s ‘écria Marie

– Marie ! Je vais tout t’expliquer, lui répondit Paul.

Sur le chemin du retour Paul lui raconta tout.

– Maintenant je comprends pourquoi tu as été attiré par ce fourré. C’était ton destin pour devenir quelqu’un de meilleur, dit Marie.

– Peut être bien. Un jour ce sera sûrement toi qui y iras dans un autre monde, là où il y aura un animal qui s’identifie à tes défauts, répondit Paul.

– Oh ! Non ! cria Marie stupéfaite. Je vais changer avant !

Marie trouvait qu’il avait changé. Il était devenu quelqu’un de généreux et n’était plus cupide.

Dans sa quête de posséder toujours beaucoup, l’homme s’empresse de constituer des réserves afin de ne pas manquer, au point de faire du gâchis.

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