Le dormeur du val (Par Antonin)

Le dormeur du val

 

C’est un trou de verdure ou chante une rivière

Accrochant follement aux herbes des haillons

D’argent ; ou le soleil, de la montagne fière

Luit: c’est un petit val qui mousse de rayons.

 

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,

Et la nuque baignant dans frais cresson bleu,

Dort; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,

Pâle dans son lit vert ou la lumière pleut.

 

Les pieds dans les glaïeuls , il dort. Souriant comme

un enfant malade, il fait un somme :

Nature, berce – le chaudement: il a froid.

 

Les parfums ne font pas frissonner sa narine;

Il dort dans le soleil, la main sur la poitrine

Tranquille. Il a deux trous  rouges au coté droit.

 

Arthur Rimbaud