DÉLIT DE DIFFAMATION
Cour d’appel de Poitiers
8 décembre 2016
Les faits :
Madame A, journaliste et salariée du Journal du Sud-Ouest, personne physique, Monsieur P, représentant du Journal du Sud-Ouest, employeur de Madame A, sont accusés par Monsieur F, personne physique, conseiller municipal, de diffamation.
En effet, peu de temps après les attentats de Paris de 2015, Mme A a assisté au conseil municipal de La Rochelle. Madame A a relaté qu’avant que le conseil municipal débute, une minute de silence a été respectée et la Marseillaise a été chantée. Lors de ce dernier évènement, Monsieur F n’est pas resté debout comme les autres personnes mais s’est assis.
Madame A a reporté ces faits dans le Journal du Sud-Ouest le 24 novembre 2015. Il considère qu’il y a eu atteinte à sa qualité d’élu et sa vie personnelle. Il a donc intenté une action pour diffamation en tant que citoyen devant le tribunal correctionnel de La Rochelle. Ce tribunal a estimé qu’il n’y avait pas diffamation contre un citoyen et que Madame A a bénéficié du principe de “liberté de la presse”. Monsieur F a donc interjeté devant la Cour d’appel de Poitiers.
Problème de droit :
Monsieur F a-t-il été attaqué en tant que particulier ou en tant qu’élu ?
Y a-t-il eu diffamation à l’encontre d’un simple citoyen ou bien d’un élu ?
Argument de l’accusation :
Dans cette affaire, le problème portait sur la règle de droit utilisée par Monsieur F. En effet, son action se fondait sur l’article 32 de la loi de 1881 protégeant les citoyens de la diffamation. La justice estimait qu’il était mis en cause en tant que conseiller municipal et non de citoyen et que de fait cela relevait donc de l’article 31, sa demande était de fait non recevable.
Sur le fond de l’affaire, il n’est pas contesté par Monsieur F qu’il s’est assis durant le chant de la Marseillaise. Il a agi alors en tant que conseiller municipal, convoqué à conseil, et non en tant que simple particulier d’ailleurs lorsqu’il a porté plainte contre Edition Sud-Ouest il s’est adressé à Madame A en disant “vous portez atteinte à ma dignité et à ma qualité d’élu”. De plus, des témoins affirment que Monsieur F leur a demandé de l’accompagner au conseil comme élu. Il a d’ailleurs fait un discours condamnant les attentats en tant qu’élu, représentant de la communauté musulmane. Monsieur F dit ne pas pouvoir se lever à cause de problèmes de santé, pourtant il est resté debout durant son discours en tant qu’élu. Les faits relatés dans l’article concernaient donc bien son attitude en tant qu’élu municipal et pas en tant que simple citoyen.
Argument de la défense :
Monsieur F a agi en tant que particulier et non en tant que conseiller municipal. La minute de silence et le chant de la Marseillaise ont eu lieu avant le début du conseil municipal.
Il reconnaît s’être assis car il a des problèmes de santé qui ne lui permettent pas de rester debout longtemps, cela ne venait pas d’une mauvaise volonté.
Il se dit attaqué à cause de sa foi musulmane alors qu’avant le conseil municipal, il avait pris la parole au nom de la communauté musulmane pour dénoncer l’horreur des attentats et montrer son opposition.
Dans l’article il est bien écrit que la minute de silence et la Marseillaise se sont déroulées avant le Conseil, donc les faits relataient un événement extérieur au conseil municipal, il était alors un citoyen.
L’avocat fait référence à la jurisprudence de la Cour de Cassation de 1971 et de 2009.
Règles de droit :
La diffamation est une infraction pénale définie comme l’allégation ou l’imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé »
Loi du 29 juillet 1881 :
Tout en consacrant la liberté de la presse, la loi du 29 juillet 1881 en limite l’exercice et incrimine les abus tels que la diffamation
art 5 : “Tout journal ou écrit périodique peut être publié sans déclaration ni autorisation préalable, ni dépôt de cautionnement.”
art 29 : « toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation”
art 30 : La diffamation commise par l’un des moyens énoncés en l’article 23 envers les cours, les tribunaux, les armées de terre, de mer ou de l’air, les corps constitués et les administrations publiques, sera punie d’une amende de 45 000 euros.
art 31 : Sera punie […], la diffamation commise par les mêmes moyens, à raison de leurs fonctions ou de leur qualité, envers […] un dépositaire ou agent de l’autorité publique, […].
art 32 : La diffamation commise envers les particuliers par l’un des moyens énoncés en l’article 23 sera punie d’une amende de 12 000 euros.
Décision du juge :
Mis en délibéré et jugement rendu le 26 janvier 2017
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