Nous avons assisté, le 1er décembre 2015, à la représentation donnée au théâtre de la pièce de Marivaux, Arlequin poli par l’Amour, mise en scène par Thomas Jolly (1). Nous avons trouvé cette pièce très dynamique, vivante, accessible et universelle. En effet, la mise en scène est très riche avec un décor féérique et subtil agrémenté de guirlandes, d’éclairs lumineux, d’ampoules, de cotillons, de ballons et de masques blancs de la commedia dell’arte. L’humour de situation est très présent et est renforcé par des costumes décalés, ridicules avec parfois des traits exagérés, mais toujours bien dosés. Le rythme de la pièce est soutenu grâce notamment aux scènes qui s’apparentent à de la comédie musicale ou à du cabaret et qui donnent une belle énergie aux personnages et également avec la musique, « punchy », entraînante et pop, qui est à la fois contemporaine et dans « l’air du temps ». La lumière est très recherchée avec un jeu de contraste distinct entre les deux femmes « rivales » (la fée et la bergère) qui montrent les deux personnalités extrêmes de ces deux personnages, à savoir le machiavélisme, la jalousie possessive, la colère et à l’opposé la naïveté, la candeur, l’honnêteté et la fraîcheur. Nous avons apprécié la qualité de jeu des acteurs qui se donnent à fond et qui ont cherché à fouiller les traits de caractères et la personnalité de chacun de leurs personnages. C’est comme si en construisant leurs personnages, les acteurs s’étaient questionnés sur leur propre parcours de vie et leurs désirs (qui je suis, où je vais, en faisant quelles choix ?…) Ils cheminent et s’interrogent ensemble en finissant par évaluer progressivement ce que peut être une relation de pouvoir avec ses plans diaboliques. Du début à la fin, nous n’avons pas eu envie de quitter la salle ; bien au contraire, nous avons même eu parfois l’envie de les rejoindre sur scène.
Pari réussi du metteur en scène qui a souhaité rendre « récréatif» ce spectacle revisité : nous en avons pris plein les yeux et plein les oreilles ; nous restons convaincus que malgré les trois siècles qui nous séparent de la version originale, écrite par Marivaux, en 1720, cette pièce moderne, fougueuse et actuelle, qui « célèbre l’innocence de la jeunesse », nous a touché en plein cœur !
(1) Thomas Jolly a obtenu le Molière de la mise en scène en 2015.