Jeudi 9 novembre 2023, les élèves de terminale HLP, engagés dans le Prix Jean Monnet des jeunes Européens, rencontrent au lycée l’auteur Joseph Incardona, en lice avec son roman Les Corps solides.
Voici comment Clara a choisi de partager ce temps d’écoute et d’échange :
Qui est Joseph Incardona ?
Joseph Incardona, âgé de 54 ans est mi-suisse, mi-italien. Il maitrise bien le français car il a notamment passé 5 ans à Bordeaux. Lors de la rencontre, il a parlé de son éducation et de ce à quoi il pensait lorsque lui-même était en terminale. Il explique qu’il n’avait pas la moindre idée de ce qu’il voulait faire plus tard ; alors il est parti à Sciences Po pour faire des études de journalisme. Il se voyait grand reporter, mais comme il travaillait dans des petits bourgs où il ne se passait jamais grand-chose, il a commencé à écrire des histoires fictives pour alimenter ses articles. Après un temps, son patron est venu le voir et lui a dit : « vous feriez mieux d’aller écrire des romans plutôt que d’être là ! », et c’est ce qu’il a fait. C’est à partir de là que son aventure en tant qu’auteur a commencé. Des souvenirs remontèrent dans sa famille, lui apprenant qu’il écrivait des BD quand il était enfant. Cependant, il avoue avoir failli abandonner le projet d’être écrivain, car pendant cinq à six ans, les éditeurs lui renvoyaient ses manuscrits et ses proches lui disaient d’abandonner. Mais il ne put se résoudre à arrêter d’écrire car dit-il, « je suis ravi d’aller écrire comme un enfant d’aller jouer ». Et c’est grâce à sa persistance que paraît son premier livre, Le cul entre deux chaises, puis Une saison en enfer. Il ajoute que lorsqu’il écrit, il ne fait aucun plan, car il faut qu’il se surprenne pour garder la magie de l’écriture.
Un écrivain est avant tout un lecteur
Il nous parle aussi de la lecture, qu’il trouve tout aussi importante, car un écrivain est aussi et avant tout un lecteur. Il ajoute que l’important est de trouver des écrivains qui nous font écho, que ce soit par leur style d’écriture, leurs idéaux et bien d’autres choses. Il nous parle de son roman, Les Corps Solides, qui n’a pas eu la chance d’être l’heureux vainqueur du Prix Jean Monnet des jeunes Européens 2023. Ce roman sur la dignité où Léo et Anna sont les protagonistes que nous suivons est particulièrement vibrant. Joseph utilise un proverbe pour qualifié Léo : « l’enfer est pavé de bonnes intentions », et cela parce qu’il tente d’aider sa mère mais que, sans s’en rendre compte, il complique encore plus les choses. Cette relation sincère entre le fils et la mère ramène de l’humanité dans ce bas monde.
Mentir pour dire le vrai
“Un livre est un moment de notre vie » explique Joseph. « Avec le recul on peut regretter comment ça a été fait, comment ça s’est terminé, mais cela est aussi dû au fait que ce n’était pas la même époque, que nous étions différent à ce moment là. »
L’écriture, c’est du travail, chaque auteur à sa propre manière de faire, il la qualifie notamment de “vocation, nécessité, raison d’être”, et cela parce que l’écriture, qui peut devenir l’histoire, est une vision du monde, un style, une musique. Chaque livre et chaque histoire doivent être écrits de manière différente, c’est une façon de se renouveler. Joseph utilise une métaphore pour l’expliquer : « dans le monde, il y a des romans Big Mac, les mêmes partout, que l’on change de pays ou non, et des romans Andouillettes, qui diffèrent. » Un auteur peut donc choisir de se consacrer à une seule catégorie ou de toucher à tout, tout en se laissant porter par son imagination. Il ajoute aussi que dans la littérature de fiction, on ment pour dire le vrai. De plus, en écrivant, on peut être dans un état de transe, c’est comme si les personnages prenaient possession eux-mêmes de leur vie à travers l’écrivain.
À notre question « que feriez-vous si un jour vous n’aviez plus l’envie d’écrire ? », il répond : “l’écriture, c’est comme une histoire d’amour. Le jour où l’amour n’est plus là, cela ne sert à rien de s’accrocher, il faut le laisser et passer à autre chose. »
Au moment de clore la rencontre, il consacre un moment à donner quelques conseils pour les élèves qui pourraient devenir des auteurs plus tard. Il conseille de trouver un éditeur avec lequel on se sent bien et libre, car cela permet plus d’options, et n’oblige pas à faire des concessions à tout bout de champ. L’avis d’un professionnel est aussi mieux que l’avis d’un proche, car celui-ci ne sera pas objectif et il aura un avis d’amateur. Lorsque l’on écrit, l’idéal c’est qu’il n’y ait pas d’artifice parce que le détail dans l’œuvre révèle beaucoup de choses. Il ajoute aussi suite à une question d’une élève, qu’il peut arriver aux auteurs d’utiliser Internet pour trouver des noms pour les personnages, visualiser un lieu et le décrire par exemple.