Marie-Anne, professeure d’économie-gestion en lycée professionnel dans l’académie de Poitiers :
« Il ne faut pas se mentir, 90 % de nos élèves ne choisissent pas réellement une filière professionnelle. Ils se retrouvent en filière professionnelle car on les pousse doucement vers cette “voie de garage” pour ne pas totalement arrêter les études ou ne pas sortir du système scolaire sans le moindre diplôme… En tant que PLP, nous sommes aussi confrontés au décrochage scolaire. Forts de ce manque de confiance en eux, nos élèves décrochent ‘au pire’, ou n’arrivent pas à trouver une réelle motivation au ‘mieux’. Comment dans ces conditions pouvons-nous leur redonner confiance en eux et surtout ne pas les perdre ? Le bac professionnel a évolué en passant sur un cursus de 3 ans. Et il faut bien l’avouer, cela n’a pas vraiment eu l’effet escompté. L’idée était sans doute intéressante mais nous sommes nombreux à regretter l’époque du BEP en deux ans suivi du bac en deux ans. Cela permettait à ces jeunes de mûrir leur projet, de gagner en maturité, de reprendre confiance en eux. Les entreprises avec lesquelles nous travaillons nous le disent également. C’est très compliqué d’accueillir en entreprise des jeunes qui ont tout juste 15 ans… D’où une difficulté encore plus angoissante pour les PLP : que vont devenir les lycées pros avec cette annonce ou ces bruits de couloir qui voudraient en faire des centres d’apprentissage ? Je n’ai strictement rien contre l’apprentissage, bien au contraire. J’ai commencé à enseigner en CFA et j’ai pu constater que les apprentis sont souvent plus matures que nos élèves de lycée professionnel, plus impliqués. Etre apprenti, c’est un rythme de travail soutenu mélangeant cours et vie en entreprise. Mes élèves de lycée professionnel ont déjà tellement de mal à trouver leur stage car rédiger un CV et une lettre de motivation, effectuer des recherches, se présenter à un entretien sont déjà des tâches insurmontables ! Mais trouver un maître d’apprentissage, pour certains, cela relève de la mission impossible ! Malgré tout, et même si nous sommes très critiqués, décriés voire parfois rabaissés, je crois sincèrement que nous sommes la dernière chance de beaucoup d’élèves qui n’ont plus foi en eux, qui sont prêts à décrocher, et contre toutes ces difficultés, j’ai envie de continuer à me battre ! »