Stendhal et Albert Camus ont chacun choisi dans leurs romans, Le Rouge et le Noir et l’Etranger , de dresser le portrait de deux héros qui devient des meurtriers. Julien tu épar amour et par dépit , la première femme qu’il a aimée et Meursault assassine un inconnu sur une plage car il s’est senti menacé. Les romanciers terminent leur récit par le procès de leurs héros .
Comparons ces deux extraits : notons tout d’abord que les deux accusés avouent leur crime et ne cherchent pas à minimiser la portée de leur geste; En effet, julien s”accuse d’avoir commis un crime atroce: “attenter aux jours de la femme la plus digne de tous les respects, de tous les hommages (ligne 5) ; Il va même jusqu’à affirmer qu’il a “donc mérité la mort “ à la ligne 9 . De la même manière, Meursault ne se révolte pas et semble même s’ennuyer durant la plaidoirie de son avocat mais , à la différence de Julien, il ne s’exprime pas et semble très détaché de ce qui se déroule dans la salle : ” tout ce que je faisais d’inutile dans ce lieu m’est alors remonté à la gorge et je n’ai eu qu’une hâte , c’est qu’on en finisse ..” ligne 32. Les deux accusé sont conscients d’avoir déjà été jugés et condamnés : Julien parce qu’il est un paysan jugé par des gens riches qui appartiennent à une classe supérieure à la sienne et Meursault parce que son avocat lui semble ridicule et sans talent. ” il m’a paru qu’il avait beaucoup moins de talent que le procureur” . Les deux accusés semblent donc résignés à subir leur sort mais leur attitude face au public est différente;
En effet, Julien prend la parole et exprime “tout ce qu’il avait sur le coeur “ligne 20 , sans rien dissimuler de la gravité des faits qui lui sont reprochés ; il avoue la préméditation , le repentir et le respect qu’il avait pour sa victime ; il réussit à émouvoir la salle : “toutes les femmes fondaient en larmes ” ligne 23 ; Alors que Meursault semble , au contraire devenir de plus en plus indifférent à son propre jugement : “j’ai eu l’impression que tout devenait comme une eau incolore où je trouvais le vertige.” ligne 25. Le romancier nous donne le point de vue de l’accusé et nous fait vivre le procès à travers ses sensations pour le moins étranges: “c‘est à peine si j’ai entendu mon avocat s’écrier , pour finir , que les jurés ne voudraient pas envoyer à la mort un travailleur honnête perdu par une minute d’égarement. ” l 35. L’avocat de l’accusé cherche lui clairement à défendre son client en évoquant un geste de folie.
Alors que Stendhal rend pathétique l’intervention de son héros qui semble se trouver des circonstances aggravantes et affronte la sentence avec bravoure : “je ne vous demande aucune grâce “, dit -il ligne 5: “la mort m’attend: elle sera juste” l 6; Meursault lui semble un peu étranger à son propre jugement et très peu concerné par ce qu’on lui reproche; Ce qui rend le texte étrange car on a parfois l’impression qu’on parle de quelqu’un d’autre que lui. Ces procédés d’écriture permettent de traduire l’indifférence globale du héros pour le monde et pour la vie.
Ecoutez la plaidoirie de Julien dans le film tiré du roman …