Question d’interprétation littéraire à partir d’un extrait de l’Emile de Jean-Jacques Rousseau .
Rousseau, écrivain et philosophe des Lumières, réfléchit dans son Essai intitulé Emile ou de l’éducation, aux fins de l’éducation . Il nous fait partager sa définition des visées de l’éducation, tout au long de cet ouvrage dans lequel il tente de construire des modèles éducatifs efficaces : quels sont les modèles éducatifs envisagés par Rousseau et comment contribuent -ils à façonner l’homme ? Nous étudierons , dans un premier temps, ce qu’est l’enfance pour l’auteur avant d’évoquer les trois sources éducatives et le but ultime de toute éducation.
Le verbe façonner et la comparaison avec la croissance des plantes montre que la culture est une sorte de terreau dans lequel l’homme doit être plongé pour pouvoir, grandir se développer et atteindre sa maturité . En effet, le petit homme nait démuni afin qu’on s’occupe de lui et qu’on “songe à l’assister ” ; Ce faisant, on lui permet de connaître ses besoins et en y répondant, on lui apprend à se servir de ce que la nature lui a donné . L’éducation nous procure ce qui nous fait défaut à la naissance : la force et surtout le jugement qui vont nous permettre d’exploiter nos facultés naturelles. Rousseau expose ici sa théorie de la perfectibilité qui montre qu’ à la différence de l’animal, qui obéit à son instinct , le petit homme s’il reçoit de la nature “le développement interne de ses facultés et de ses organes ” ne peut apprendre à s’en servir seul ; Le concours d’un autre homme est nécessaire pour lui montrer quel usage il peut faire des dons reçus de la nature; Rousseau considère donc l’enfance comme une étape déterminante ,et nécessaire dans la construction du futur adulte.
Ainsi, l’écrivain distingue trois modèles éducatifs : la Nature ou état de Nature qui “ne dépend point de nous ” , les choses c’est à dire la somme des événements auxquels nous sommes confrontés et les leçons que nous en tirons et les maîtres. Or, selon le philosophe , nous ne pouvons agir ni sur la Nature et ce qu’elle nous a attribué par la naissance , ni complètement sur les choses, les objets qui nous entourent . Cette éducation des choses , il la définit comme les leçons tirées des expériences à propos des objet qui nous affectent . Il désigne ainsi la manière dont nous faisons face aux épreuves, aux deuils ou aux joies.Même si ces expériences sont universelles , chaque homme sera amené à réagir différemment , en fonction de son tempérament et de sa sensibilité. Rousseau en vient donc à la conclusion que la forme d’éducation que nous maitrisons le mieux est celle que délivrent les maîtres à leurs disciples. Même s’il admet qu’il est impossible de pouvoir totalement contrôler les discours auxquels sera exposé l’enfant , dans son entourage.
Pour que notre éducation soit réussie, il faut que ces trois sources convergent et qu’elles visent la même fin. Elles doivent être en accord les unes avec les autres et tendre vers le même but ; C’est à cette seule condition qu’on peut dire d’un homme qu’il est bien élevé et qu’il a reçu une bonne éducation. Si l’observation de la nature contredit la culture livresque et si les acquis des expériences vont à l’encontre de la morale enseignée , alors l’homme sera divisé , mal élevé. Seul un homme qui reçoit une éducation “cohérente “ tend à son accomplissement ou pour le dire autrement , “il va seul à son but ” La difficulté principale pour Rousseau c’est que nous sommes incapables de contrôler la totalité du processus éducatif . Il lui paraît alors essentiel , de tourner tous nos efforts vers la nature afin de l’intégrer pleinement dans le modèle éducatif global . Le philosophe craint que la société et la culture pervertissent l’enfant car il pense que l’homme est naturellement bon ; Il est donc très important de tenir compte de ce paramètre dans l’éducation et de préserver cet état naturel de “pureté “chez les enfants . L’homme peut , en effet, s’approcher d’une éducation parfaite mais il n’est jamais certain de pouvoir l’atteindre car cet accomplissement dépend , en partie de cet état de Nature .Ainsi Rousseau emploi le terme art pour définir la nature de l’acte éducatif qu’il distingue d’une science à cause justement de cette part aléatoire . Mais aujourd’hui, on parle des sciences de l’éducation pour désigner les techniques au moyen desquelles on construit les actes éducatifs.
En conclusion, Rousseau a démontré la complexité de l’éducation et la difficulté d’être bien élevé . Il distingue également la cause motrice de l’éducation de sa cause finale; La cause motrice ( la raison première ) est de permettre la survie de la race humaine et la cause finale de toute forme d’éducation (ou le but ) est de permettre à l’homme de s’accomplir . Kant lui aussi considère que la bonne éducation doit permettre à l’homme de développer ses dispositions au bien. Des enfants bien élevés deviendront des hommes meilleurs et permettront de transformer le monde et l’avenir. Condorcet, en homme des Lumières partagera le même avis ” en répandant les lumières, écrit -il, vous ferez naître ces vertus publiques qui seules peuvent affermir et honorer le règne éternel d’une paisible liberté “