Emile Zola est souvent présenté comme le chef de file du mouvement littéraire appelé naturalisme qui prolonge et amplifie les ambitions du réalisme . Dans la préface de Thérèse Raquin , l’un de ses premiers romans, paru en 1868, il rappelle aux lecteurs ses objectifs : “j’ai voulu étudier des tempéraments et non des caractères…j’ai choisi des personnages souverainement dominés par leurs nerfs et par leur sang , dépourvus de libre-arbitre, entraînés à chaque instant de leur vie par les fatalités de leur chair ; Thérèse et Laurent sont des brutes humaines : rien de plus ” .A 26 ans , Zola a commencé à définir sa vision de l’écriture et du rôle de l’artiste dans la société, dans un article intitulé notamment Mes haines où il recense ce qu’il déteste : haine du dogmatisme, de l’immobilisme, du didactisme et de la médiocrité. Mais de quelle manière un roman peut -il incarner le programme de l’écrivain ?
Le concept de naturalisme : le mot n’a pas été inventé par Zola mais son sens s’est transformé; Il désigne, à son époque, le travail des peintres qui choisissent des sujets de la vie quotidienne et les peignent dans un cadre rural comme Courbet ou Millet ; Zola l’utilise pour les écrivains qui tentent d’appliquer dans leurs œuvres une méthode scientifique ; les corps par exemple, seront décrits d’un point de vue organique et biologique ; Le romancier doit donc observer , analyser et reproduire des faits en adoptant un point de vue scientifique. Il doit chercher une vérité générale dans la représentation des comportements humains et des passions. Zola considère l’écrivain comme un anatomiste de l’âme et de la chair qui dissèque l’homme.
La réception du roman: sous- titré, dans sa première version sous forme de nouvelle , Un mariage d’amour, le roman provoque de vives critiques et certains journalistes affirment qu’il est répugnant allant jusqu’à le comparer à “une flaque de boue et de sang “ . Alors que des critiques lui reprochent son immoralité, d’autres saluent son audace et la férocité des passions qu’il tente d’analyser. En effet , Zola se fonde sur des thèses scientifiques qui tentent de démontrer la force du désir et l’influence du milieu sur l’hérédité notamment.
Une étude physiologique : les personnages du roman appartiennent à des tempéraments humains reconnus dès l’Antiquité ; ces tempéraments sont définis par les humeurs qui , selon les Anciens ,circulent dans notre corps : la lymphe, la bile , le sang et les nerfs ; le type lymphatique représenté par Camille se distingue par sa mollesse ; le type nerveux est incarné par Thérèse et mélangé à une ascendance africaine et il ne se révèle que sous l’emprise de la passion et Laurent incarne le type sanguin; il a d’emblée pour l’héroïne ” une beauté sanguine” ; Ce dernier subira ensuite l’influence de la femme qui le détraquera nerveusement .Zola dépeint les corps sans fard et la violence de leurs rapports que ce soit dans la violence conjugale, le meurtre ou le spectacle de la mort .
Un roman noir et un roman construit comme une tragédie: le jeune écrivain mélange différentes influences ; La première est celle du roman noir , avec quelques visions fantastiques , des hallucinations qui proviennent des cerveaux détraqués des héros et une atmosphère macabre; Il donne également à son roman des aspects tragiques notamment dans la construction des péripéties; D’abord il expose les faits , présente le décor et les personnages avant de les mettre en actions sous l’effet d’une crise et de révéler le dénouement tragique en deux étapes . Les décors du roman jouent un rôle important et renvoient à la présence de la mort.
Les sources du roman et la genèse : Zola écrit d’abord une courte nouvelle sur un couple d’amants qui tuent le mari gênant et décide ensuite de développer cette histoire afin d’en faire un roman . Il ajoute des éléments fantastiques empruntés au roman noir comme le chat , la vieille paralytique témoin muet et surtout il y introduit des éléments théoriques sur le rôle du milieu et l’influence des tempéraments . Il jette alors les personnages dans un drame violent pour ne plus voir en eux que la bête humaine .
Après ce roman, Zola se lancera dans la composition des 20 volumes des Rougon-Macqaart, une série de romans qui explore le destin sur deux générations des deux branches familiales : Les Rougon, des hommes ambitieux qui feront fortune dans l’immobilier comme Aristide Saccard dans la Curée ou dans la politique comme son excellence Eugène Rougon, frère du précédent mais que le scandale éclaboussera et les Macquart, une famille qui comptera de nombreux criminels : Gervaise , l’héroïne de l’Assommoir mourra alcoolique et misérable ; Ses enfants : Nana, Etienne et Claude deviendront les héros malheureux de trois romans qui explorent le monde de la prostitution, des mines de charbon (Germinal ) et des artistes peintres; dans la Bête Humaine en 1890, Zola reprendra certains thèmes déjà évoqués dans Thérèse Raquin , écrit 25 ans plus tôt comme la violence du tempérament et le meurtre du mari par un couple adultère.
Romancier et artiste engagé: en 1894, la condamnation du capitaine Dreyfus fait réagir Zola qui prend la défense de cet homme injustement accusé : Il publie alors un réquisitoire dans l’Aurore sous le titre J’accuse ; Condamné à un an de prison, il s’exile à Londres jusqu’au suicide du commandant Henry qui entrainera la révision du procès de Dreyfus; De retour en France, il meurt en 1902 dans des conditions étranges ; Il sera transféré au Panthéon.
Le roman : résumez l’intrigue en 40 mots. Faites une fiche comparative des éléments utilisés pour décrire physiquement les trois personnages principaux . Qui sont les personnages des soirées du jeudi et quel rôle jouent-ils dans l’intrigue ? Quelle est la durée du roman ? Relevez des éléments symboliques des lieux et notamment du passage où se trouve le magasin de Thérèse, qui connotent la mort ou la prison.