Dans le cadre de la seconde partie de notre programme de spécialité , consacré aux représentations du monde; nous nous sommes inspirés du modèle d’ une partie du roman de Sylvain Tesson Dans les forêts de Sibérie . Ce récit, qui prend la forme d’un journal de bord, raconte l’exil volontaire d’un homme en proie à des questions existentielles. Cet homme qui es sent puissamment attiré par les forets du grand Nord, a choisi de se retirer, quelques mois, au fond des forêts de Sibérie, au bord du lac Baïkal. Cette aventure est l’occasion d’écrire un journal dans lequel il relate à la fois son quotidien ( ce qu’il fait, qui il voit , ses lectures , la météo du jour, les changements du temps ) mais également ses humeurs et ses pensées; Un peu à la manière de Montaigne qui notait ses états d’âme au fil des pages de ses Essais, Sylvain Tesson s’efforce de trouver sa place dans le monde et le sens de sa vie en affrontant la solitude et le dépaysement . Quels étaient les objectifs de ce travail d’écriture et de réflexion ? Comment concevoir votre journal personnel ?
Le critère de présentation permettra à certains d’obtenir 4 points : cahier, carnet, croquis, dessins, notes . qualité de l’écriture également ( choix d’une police, de la dactylographie , effets de style ) . Quelques journaux sont particulièrement réussis dans ce domaine. Un deuxième aspect du travail consistait à créer des événements variés qui devraient servir de points de départ à la réflexion sur soi ; Il pouvait s’agir de rencontres avec des humains ou des animaux ( un ourson, un kiwi ) , de mésaventures comme une panne d’essence , un vol de nourriture , une averse torrentielle, ou plus graves une maladie, un accident . Enfin, le dernier critère , de loin, le plus important reposait sur la qualité des réflexions et des pensées du personnage; Ce séjour est avant tout , pour le personnage , l’occasion de réfléchir et de nous faire partager sa vision du monde, ses doutes, ses peurs et ses espoirs. Il s’agissait donc de construire une représentation du monde en observant les défauts de la société, ce qui nous donne parfois envie de la fuir ou ce qui nous manque au contraire quand nous sommes loin de tout . L’ennui oui mais à condition qu’il permette d’amener à des considérations sur les causes du désœuvrement du personnage ;il était important que le personnage réfléchisse à ce qui lui manque, ou à ce qu’il fuit et cherche à répondre aux questions soulevées justement dans le cadre de ce séjour.
Voilà un aperçu des possibilités mises en oeuvre dans vos journaux .
Lieu géographique | Exploitations possibles | Evénements | Observations principales | Sentiments dominants | Questions |
Ile mystérieuse | beauté de la nature / introspection
rencontre avec l’Autre |
piqué par un scolopendre | un lien qui unit la faune et la flore | la volonté de briser le cocon familial pour se trouver
maturité |
Sommes nous à l’image de la société ?
comment devenir l’homme que j’ai toujours rêvé d’être ? |
cabane de pêcheurs | réfléchir à ses liens avec sa famille | le froid, la difficulté à supporter les autres ( épisode de la supérette ) | la mer, le ciel bleu , la pluie qui permet de méditer , les mouettes | une sorte d’incompréhension face à soi-même et examen de se relation avec autrui
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est-ce que je me tiens compagnie ? peut on être seul avec soi-même ?
pourquoi est ce que je me sens vide ? la misanthropie est -elle un danger ? |
Espace | expérience de l’apesanteur ? vie dans une navette spatiale ( nourriture lyophilisée , distance avec la Terre , sensation d’éloignement ) | astronaute et jardinier | l’Espace et la terre vue du ciel | une mission spatiale qui tourne mal mais l’espoir d’être secouru/transformation du personnage et prise de conscience | Toute ces lumières sur terre : combien sont vraiment utiles ? combien de bouches pourrait -on nourrir avec les économies réalisées ? |
Groeland | la découverte des Inuits ? | incapacité à supporter la solitude | comment prendre un nouveau départ dans sa vie personnelle ? | ||
Québec | rencontre avec un ourson | dehors tout paraît si pur, si inoffensif / présence d’un lac mystérieux | le sentiment de s’apaiser et de devenir une “nouvelle moi” | le mot seul a un sens particulier : il me fait peur mais je l’apprécie également
l’amitié peut elle exister entre l’homme et l’animal ? |
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Nouvelle -Zélande | se sentir au bout du monde ? | contraction d’une boîte aux lettres pour ancrer sa présence
solidarité avec un pêcheur rencontre avec le sage Nigel |
les cris robotiques des Tuis (oiseaux )
filmer un kiwi de nuit |
vouloir m’éloigner d’un monde que je ne comprenais plus | Comment se manifeste l’Ennui et quels sont ses effets sur l’Esprit ?
quel problème suis- je en train d’essayer de régler au moyen de l’isolement ? la solitude est-elle une solution à mes problèmes ? |
Destination : le Chili | avoir un but dans la vie | rencontre avec Matias, un sauveur et une sorte de prise de conscience , apercevoir un lama | des paysages angéliques ? | partir pour se retrouver, pour se trouver? rompre avec une vie fade et monotone, sans but . | a-t-on besoin d’avoir des objectifs dans la vie ? peut on vivre sas savoir pourquoi ? |
Thaïlande : ile de Koh Kood | exister en laissant la nature s’imposer et sans m’opposer à elle | la traversée en kayak, le village de pêcheurs | goyaves, coco, chaleur et pluies tropicales , petits singes dans les arbres | une journée passée à joyeusement ne rien faire , la perception des choses et des sentiments s’intensifie | quelle est ma place sur terre ?
population très pauvre mais refuse de vivre de la charité d’autrui: nécessite de travailler pour obtenir de la nourriture échange, entraide, assistanat |
Japon : Miyaka-Jina | l’importance de la foi et des liens avec le Monde | une averse troue le toit de la cabane | sauvée par un dauphin de la noyade | la présence de Dieu dans l’Univers qui nous entoure | j’ai appris à apprécier ma propre compagnie
qu’est-ce qui fait qu’ion se sent à sa place ? connectée au Monde ? en phase ? que signifie “se retrouver ?” |
Japon : la forêt des suicidés | un nouveau départ ? | construction du camp
exploration des environs |
quelques animaux : martre/ taupe/ sanglier / tourterelles orientales | pourquoi veut on retrouver la Civilisation ? qu’est-ce qui risque de nous manquer le plus ? | pourquoi finit-on par se sentir oppressé par la Solitude ?
comment définir la notion de Civilisation par opposition à la Nature ? |
Hawai : Big Island | recueillir un héritage
vivre sans aucune pression |
rénover une maison vieillotte, et située en bord de mer
tuer un animal pour se nourrir |
paysage apaisant , trouver sa place , rester définitivement , abandonner sa vie sociale , | ici je peux rêver de mille et une choses | que veut dire “se sentir enfin soi-même ” ?
comprendre ce qu’est la Vie ? |
un paysage inconnu mais familier Madère | penser à moi sans distraction possible | vivre dans un site protégé, une forêt splendide , de longues marches | richesse de la nature, variété de la flore
rencontre avec un enfant |
je me situe entre ciel et terre
je me rend compte de la chaque que j’ai et que la vie peut s’arrêter en un claquement de doigt |
Suis- je une personne normale ? |
lac Two Jack , Canada | fuir les humains , regarder le monde vivre paisiblement
trouver l’équilibre |
observer les nuages et se jouer du Temps
composer une ode au charme de la Nature |
ce monde est immodéré, démesuré, détraqué : rencontre avec une famille de touristes peu respectueux
l’incendie de forêt |
Il y a autant de mondes qu’il y a d’êtres vivants sur terre.
tu es soit une araignée soit une coccinnelle |
Ai- je une âme maritime ? Sommes nous vraiment- obligés de faire des erreurs pour nous améliorer ? |
Quelques pensées à discuter
“être soi-même dans un monde qui cherche en permanence à vous transformer , est le plus grand accomplissement ” Ralph Waldo Emerson
L’importance des petits plaisirs dans la vie : réaliser un objet de ses mains, se préparer un plat qu’on aime de temps en temps , contempler de belles choses , éprouver des sentiments .
Le sentiment de la valeur de son existence : “je ne suis rien ” ” je suis tout petit face à la grandeur de l’univers ” ma vie ne compte pas “
La nature est un exemple parfait de ce qui ne peut être contrôlé : Ardit Beqiri
Quelques références au parcours de Sylvain Tesson
Le projet du journal d’ermitage : devenir le laboratoire des transformations du personnage
“la liberté existe toujours : il suffit d’en payer le prix ” Henry de Montherlant
la vie : cette affaire d’épicerie …
j’ai atteint le débarcadère de ma vie
j’avais trouvé dans la marche à pied matière de ralentir le temps : l’alchimie du voyage épaississait les secondes .
habiter joyeusement des clairières sauvages vaut mieux que dépérir en ville
la vie dans les bois : une fuite ? une quête ? un élan vital ? se déshabituer de ses anciens besoins
les relevés sismographiques de son âme : peut on se supporter soi-même ?
l’amour mont une moi pour ces bois peuplés de cerfs, ce lac gorgé de poissons, ce ciel traversé d’oiseaux , le grand amour beatnik m’envahit …
le solitaire : il est l’ambassadeur du genre humain, a un devoir de bienveillance et cherche à ne pas nuire
pourquoi la foi en un Dieu ?
en rétrécissant la panoplie des actions, on augmente la profondeur de chaque expérience ;
rien ne me manque de ma vie d’avant : ni mes biens ni mes miens ;
ma vie s’est dépliée ici pendant des mois; Je la replie .