Du côté de sa biographie : Francis Etienne Sicard est un poète contemporain né en 1952; il se passionne, dès l’adolescence, pour la littérature, et en particulier pour Marivaux et Marcel Proust. Des études de lettres classiques le conduisent à Lyon, où il complète sa formation d’enseignant avant de rejoindre, en 1977, Berlin, où il choisit de résider pendant plusieurs années, pour écrire son premier texte en prose Le Voyage Bleu, qu’il ne publiera cependant qu’en 1986 .Il voyage ensuite en Europe, en Asie et aux Etats Unis et commence une importante correspondance.En 1983, il s’installe à Londres, d’où il publie trois recueils de poèmes, Contrepoint, Ecritoire Vécue, et Ariane, En 1998, il se retire dans le Languedoc, et publie quelques textes dans la presse.
Fata Temporum (la fée du temps ) est un sonnet qui nous confronte à différentes représentations du Temps; certaines peuvent nous sembler courantes mais la modernité du poème est à rechercher essentiellement dans l’utilisation du langage poétique et la création, à la manière surréaliste, de certaines associations d’idées qui renouvellent le matériau poétique classique. Commençons par tirer quelques fils d’interprétation à partir de repérages simples dans le texte poétique .
La figure du Monstre : le Temps apparait d’abord comme une sorte de rôdeur inquiétant qui “coule lentement le long des cimetières” : on repère bien le champ lexical de la mort qu’on retrouve avec la métaphore ” éteint la flamme” et la cloche des morts : le glas dans le premier tercet. Ce monstre est doté de griffes qui au lieu d’être aiguisées , aiguisent le silence; la transformation ici du qualificatif en verbe d’action est surprenante. Cette figure démoniaque ronge la peau de la bouche des rois et celle des lèvres des meufnières; on peut sans doute ici retrouver une variante de la figure vampirique de la goule qui entre dans la bouche et dans l’âme de se victimes pour les aspirer, les vider de leur substance vitale. Ce Temps a des allures de roi car son règne dure depuis l ‘éternité , image de son pouvoir sans limite; un roi puissant et tyrannique donc qui impose sa loi aux hommes et qui les dévore; On retrouve , en effet, dans ce poème, la trace d’une dévoration avec le verbe “nourrit sa chair ” qui désigne le Temps comme une créature qui absorbe les hommes ; C’est le dernier vers qui révèle un des paradoxes les plus intéressants de ce poème ; l’ogre a un visage de fée donc il trompe l’homme doublement: d’une part, en lui cachant sa véritable nature et d’autre part, en en lui montrant des atours séducteurs et magiques .
Cette première piste peut être complétée par le retour du symbolisme de l’alternance jour/nuit qui est une des unités de mesure du temps; en effet, le Temps est une sorte de couturière qui “attache ” la nuit au jour et qui “ourle” le matin avec un “galon”; ce champ lexical de la couture complété par le mot écheveau présente la continuité du temps comme inattaquable : aucune faille ne peut avoir lieu dans ce déroulement qui mène inexorablement à la mort:cette figure énigmatique de la porte , l’huis médiéval , représente peut être l’idée chrétienne d’une vie après la mort , d’un passage vers l’au-delà. A la rime avec huis, on note la présence du symbole du puits qui représente le gouffre avec toute son étrangeté ; l’idée est celle d’un temps qui renforce le silence ; d’une part à cause de l’oubli et du non dit mais également l’idée que seul temps qui passe permet d’oublier ce qui a blessé ou ce qui a pu causer de la douleur; la référence aux étrivières qui sont les parements en cuir qui relient la selle aux étriers , évoque une forme du cinglage, un peu comme si on fouettait un cheval.
Dans le premier tercet, le Temps est représenté à l’échelle de l’univers et on pense à la formation du monde avec des mots aux connotations philosophiques comme néant, gouffres d’univers et étoiles à naître; Ce feu des origines peut faire penser au magma de la naissance du monde et ce Temps se mesurerait à l'échelle géologique. Il s'agirait d'y lire le Temps de la Création, celui du début des Temps.
Les dernières images du second tercet demeurent énigmatiques : ce temps nourrit sa chair (alors qu’on attendrait se nourrit de chair ) de la soif de nos yeux; Si , dans un premier temps, on pense aux larmes à cause de l’association automatique entre le liquide (la soif) et les yeux , on peut toutefois se demander s’il n s’agit pas plutôt d’ une désignation de l’envie de vivre, de notre instinct de vie. Le poète penserait ici à ceux qui profitent de leur temps , qui ne le laissent pas passer sans essayer d’en tirer parti. D’un certain point revue, plus on lui accorde de l’importance et du crédit et plus il nous fait mesurer notre condition mortelle.
Des associations sont parfois difficiles à comprendre comme l’or des temps qui peut évoquer le soleil selon le symbolisme des saisons ; l’éclat de la lumière présent dans les connotations du mot or se double de référence à quelque chose de précieux .
Alors à vos idées pour la suite et l’organisation ….
Le plan proposé :
On rappelle la problématique : comment le poète représente-t-il le Temps ?
Consigne 1 : les titres des parties répondent à la question posée
I Le double visage du Temps
1. Un temps vu comme un monstre
ogre,chair, griffes, aiguisées
2. Le temps magique comme la Fée
ourle, galon, attache,visage de fée, or , étoiles
3. L’ambivalence du temps
l’alternance du Jour et de la Nuit : cache une cruauté sous un aspect fééerique , finit par nous dévorer donc indice d’une victoire du temps .(paradoxe)
II L’homme face au Temps ou la victoire finale ou le combat de l’homme
1. La puissance du temps
son règne dure éternité, gouffres d’univers, Néant,
2. La présence de la mort
cimetière, coule, huis (image énigmatique) , éteins la flamme
3. Une victoire finale
les silences , enfouir, les étrivières l’au delà demeure une croyance