06. janvier 2019 · Commentaires fermés sur Le parcours d’Etienne dans Germinal: naissance de ses idées politiques et naissance d’un leader · Catégories: Seconde · Tags: , ,
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Le personnage d’Etienne est le héros de Germinal, ce nouveau volet de la série des Rougon-Macquart , qui décrit la misère des ouvriers mineurs dans le Nord de la France à la fin du dix-neuvième siècle: En France ; la révolution de 1848 marque la montée des mouvements de revendications des ouvriers qui s’appuient sur les thèmes de Karl Marx et Friedrich Engels ; ces deux hommes fondent la ligue communiste et se battent pour changer les relations entre les bourgeois qui possèdent les moyens de production (les usines ) et  leurs salariés, les ouvriers qui sont contraints de vendre, leur force de travail, leur labeur, en échange d’argent . Dans ce roman social , Zola prend parti pour les travailleurs et entend dénoncer l’exploitation dont ils sont victimes de la part de patrons qui ne pensent qu’à augmenter leur profit. 

 Les origines du personnage : Etienne est fils d’une blanchisseuse Gervaise Macquart,  qui , en raison de son alcoolisme, va sombrer dans la misère et la déchéance (L’Assommoir ) Il est d’abord présenté comme un ouvrier sans travail qui ne possède que quelques effets dans un pauvre baluchon : Il possède la qualification de machineur et comprend que pour pouvoir travailler dans la fosse, il va devoir changer de métier , apprendre à devenir soit un charretier comme Bonnemort, soit un herscheur ; un culbuteur, un haveur , un galibot ou un raccommodeur  ; La situation économique est  alors décrite comme catastrophique : partout les usines ferment ; Autour de Montsou, on voit des sucreries ( qui extraient le jus des betteraves), des forges, mais également une minoterie, une verrerie et des fabriques ; Le décor sinistre  semble relayer la peine des ouvriers : “le vent passait avec sa plainte comme un cri de faim dans la nuit ” ; la fosse est décrite comme un monstre affamé de chair humaine qui dévore les ouvriers : “une bête méchante qui respirait d’une haleine plus grosse et plus longue, l’air gêné par sa digestion pénible de chair humaine ” Grâce à sa conversation avec Bonnement, le grand père de la famille Maheu qui compte à son actif un demi-siècle passé à travailler à la mine, Etienne apprend quelles sont les conditions de vie des ouvriers ainsi que le nom du directeur de la mine , M Hennebeau.

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Le second chapitre nous fait découvrir dans le coron ouvrier , la vie des Maheu, une famille typique de mineurs  : c’est la misère la plus noire ; 7 enfants à nourrir , plus d’argent et la nourriture qui devient une obsession : ils trompent la faim avec des feuilles de chou bouillies, ont des dettes à l’épicerie et Catherine, la fille aînée, a bien du mal à leur trouver de quoi se faire des “briquets ” pour la mine (pain, beurre et fromage blanc ) Zola décrit parfois les ouvriers comme des animaux pour dénoncer l’ampleur de leur misère : il évoque par exemple, à la fin du chapitre 2, leur piétinement de troupeau ou la mamelle pendante de la Maheude qui allaite épuisée sa petite Estelle âgée de 3 mois . 

La pensée politique d’Etienne : le personnage est placé comme un observateur du milieu des ouvriers et Zola s’inspire des notes qu’il a prises durant son séjour dans le pays minier pour faire évoluer son personnage . Tout d’abord il apprend les gestes qui font de lui un mineurs  : “il apprenait de Catherine à manœuvrer sa pelle , montre des bois dans la taille ” . Certains le surnomment l’aristo pour se moquer de sa maladresse liée à l’ignorance du métier . Les premiers temps, il étouffe au fond des veines ; C’est en fait un timide qui craint sa violence intérieure ; Le personnage songe d’abord à reprendre sa route affamée afin de ne plus redescendre dans cet enfer : “car avec son instruction plus large, il ne sentait point la résignation de ce troupeau et finirait par étrangler quelque chef ” (I, VI ) Finalement, au dernier chapitre, il décide de rester à cause d’un vent de révolte . Peu à peu le personnage devient un camarade et se lie d’amitié avec Maheu qui admire son instruction  “il le voyait lire, écrire, dessiner des bouts de plan, il l’entendait causer de choses dont lui, ignorait jusqu’à  l’existence ” (P1, 3) 

L’influence de Souvarine : c’est un ouvrier pauvre, Russe et secret qui a commandité un attentat contre le tsar . Il s’est réfugié en France  et tente de dissuader Etienne de rejoindre l’Association internationale des travailleurs qui venait de se créer à Londres sous l’impulsion de Karl Marx ; Souvarine lui veut tout détruire mais Etienne pense qu’il n’est pas vraiment sérieux : “cette théorie de la destruction lui semblait une pose ” ; Pluchart lui fait partie de cette association : il est même secrétaire de la  fédération du Nord.  Les hommes pensent qu’une révolution des ouvriers est indispensable  ” un chambardement qui nettoierait la société du haut en bas, et qui la rebâtirait avec plus de propreté et de justice ”  Souveraine semble ne savoir long sur les mécanismes économiques qui régissent la loi du marché et il évoque notamment la loi d’airain : le salaire est fixé selon lui à la  plus petite somme indispensable, juste le nécessaire pour que les ouvriers mangent du pain sec et fabriquent des enfants.  “C’est l’équilibre des ventres vides, la condamnation perpétuelle au bagne de la faim ”  Alors Etienne se met à lire des livres dans lesquels il ne comprend pas tout et des idées lui viennent . (P 3, 3) Jusque là , il n’avait eu de la révolte que l’instinct, au milieu de la sourde fermentation des camarades. Toutes sortes de questions confuses se posaient à lui: pourquoi la bière des uns? pourquoi la richesse des autres ? pourquoi ceux- ci sous l étalon de ceux-là, sans l’espoir de jamais prendre leur place ? 

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Sa découverte des livres : il lit tout ce qui lui tombe sous la main; des traités de médecine, des brochures anarchistes, des traités d’économie politique , des livres sur les coopératives mais il reste un grand utopique et  il se contente de  rêver aux améliorations possibles de la société : “ il assistait à la régénération radicale des peuples sans que cela dût couter une vitre cassée ni une goutte de sang. ” Cependant Etienne qui loge désormais chez les Maheu parvient à les convaincre que les choses peuvent changer et il partage ses rêves d’un monde meilleur avec eux : ” Une société nouvelle poussait en un jour, ainsi que dans les songes,une ville immense d’une splendeur de mirage, où chaque citoyen vivait de sa tâche et prenait sa part des joies communes; La devise de ce nouveau peuple: “à chacun suivant son mérite, et à chaque mérite suivant ses oeuvres. ”  

Etienne devient un leader  : son influence peu à peu s’élargissait ; Il crée sa caisse de prévoyance et devient secrétaire de l’association.  Il es transforme intérieurement et extérieurement: “son visage changea et devint grave,il s’écouta parler; tandis que son ambition naissante enfiévrait ses théories et le poussait au idées de bataille. ” Le nouveau mode de paiement des berlines décrété par la compagnie va mettre le feu aux poudres et par conséquent la mine à feu et à sang. La grève va être décidée et l’accident de Jeanlin, le départ de Catherine et de Zacharie contribuent à rendre encore plus précaire l’existence quotidienne des Maheu. La quatrième patrie du roman débute par la visite d’une délégation de mineurs chez les Hennebeau; Etienne en fait partie.