02. mars 2018 · Commentaires fermés sur Le vocabulaire de l’argumentation : repérer une stratégie argumentative · Catégories: Fiches méthode · Tags: ,
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Un orateur en action 

Etudier des textes argumentatifs suppose de savoir nommer avec précision les procédés employés par les écrivains pour nous convaincre et / nous persuader de la justesse de leurs thèses. Leurs stratégies argumentatives désignent l’ensemble des moyens qu’ils vont mettre en oeuvre pour défendre leurs opinions ; Ils peuvent se servir des formes de textes (discours, dialogue, récit ) , des différents registres (les mélanger, les opposer ) , du lexique plus ou moins imagé, plus ou moins péjoratif ou critique ou au contraire élogieux. Le plus important consiste à repérer la thèse qu’ils soutiennent ou qu’ils combattent et la manière dont ils s’y prennent pour fabriquer leur raisonnement et réussir à vous influencer ; N’oubliez pas d’observer les connecteurs logiques : ils vous seront d’un grand secours pour déterminer à quel type d’arguments vous êtes confrontés. L‘éloquence désigne l’art de savoir convaincre en paroles et donc de bien utiliser les stratégies argumentaires adaptées à un public précis ou à une situation de communication. 

Voilà qui devrait vous aider à y voir plus clair ….

Fiche de vocabulaire sur l’argumentation :

I/ Pour commencer :
– Argumenter : signifie soutenir une thèse (idée) dans le but d’obtenir l’adhésion de son destinataire à l’aide d’arguments 
Deux démarches pour argumenter :

Convaincre : chercher l’adhésion du destinataire sa thèse en faisant appel à des arguments logiques, qui sollicitent la raison. (chiffres, exemples , raisonnements déductifs, inductifs )

Persuader : chercher l’adhésion du destinataire sa thèse en faisant appel à des arguments affectifs, qui sollicitent ses sentiments. (pitié, colère, compassion, haine..) 

II/ Vocabulaire argumentatif :
– Thème  : sujet abordé par un texte. Pour le repérer, il faut s’intéresser au titre de l’œuvre, aux champs lexicaux présents.

Argument : c’est un élément de raisonnement (un fait, une remarque, une réflexion, une analyse) sur lequel on s’appuie pour justifier une thèse. Il est le plus souvent abstrait ou général .

– Exemple : c’est un élément concret, précis, qui sert à  illustrer un argument. Il est également appelé illustration 

– Le syllogisme : raisonnement déductif (de la règle générale  on tire l’exemple ou le cas particulier ), formé de deux propositions conduisant  à une conclusion.
Ex : « Tous les hommes sont mortels ; or je suis un homme ; donc je suis mortel ».

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– Le sophisme : souvent fondé sur le même principe que le syllogisme, il s’agit d’un raisonnement qui paraît rigoureux mais il est illogique : « Tous les hommes sont mortels ; or Socrate est mortel ; donc Socrate est un homme » (mais en fait Socrate est le nom de mon chat par exemple).

– Le paradoxe : du grec « para » (contre) et « doxa » (opinion) ; pensée contraire à l’opinion communément partagée. Il surprend le lecteur par son côté étonnant.

III/ Les différentes pratiques de l’argumentation :

– La délibération :
Délibérer : du latin « deliberare » qui signifie « réfléchir mûrement, trancher, décider »,consiste à considérer différents points de vue. Il s’agit de confronter des idées contradictoires avant de prendre une décision, de trouver une solution.

– La conviction :
Convaincre nécessite de faire appel  à des arguments sollicitant la raison, l’intelligence, les facultés d’analyse du destinataire pour obtenir son adhésion. Les arguments doivent donc être illustrés au moyen d’ exemples ; la progression argumentative est marquée par l’utilisation de connecteurs logiques (tout d’abord, ensuite, puis, en revanche, cependant, alors, aussi, en outre…). page1image23264 page1image23424 page1image23584

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La persuasion :
Persuader, c’est agir sur la sensibilité du destinataire pour obtenir son adhésion. On a donc recours à  des procédés tels que : l’apostrophe, les questions rhétoriques (questions qui n’attendent pas de réponses), l’exclamation, la variation des différents registres .

IV/ Exemples de genres argumentatifs :

L’essai : L’essai désigne un genre littéraire caractérisé par un texte en prose, argumentatif où la présence de l’auteur est nettement marquée par l’utilisation de la première personne. L’auteur livre une réflexion et ses impressions à travers une écriture personnelle. L’essai est donc un genre où l’auteur développe une pensée en mouvement en train de se saisir. Les sujets traités sont essentiellement d’ordre philosophique, moral, politique, artistique et parfois religieux.

On considère que c’est Montaigne (1533-1592) qui crée le genre en intitulant son œuvre Essais. Dans cette œuvre répartie en trois livres, il analyse notamment les faiblesses de la nature humaine et ses imperfections ; il confronte les civilisations et réfléchit sur la notion de barbarie…

La lettre :En général, elle est adressée un destinataire réel que l’on veut convaincre. Elle est souvent propice au débat dans la mesure où elle implique une réponse. Elle peut aussi prendre la forme d’une lettre ouverte, publiée, s’adressant ainsi au plus grand nombre. Par exemple, « J’accuse » de Zola est une lettre adressée au président Félix Faure, publiée le 13 janvier 1898 dans le journal L’Aurore, pour dénoncer l’injustice concernant l’ « affaire Dreyfus ».

L’apologue :Il s’agit d’un récit allégorique, plus ou moins court, en vers ou en prose, visée morale (implicite ou explicite). La fonction première de l’apologue est de divertir au moyen d’un récit plaisant chargé de livrer un enseignement moral.

V/ Exemples de registres pour le texte argumentatif :

– Le registre polémique :Du grec « polemos », signifiant « combat », le registre polémique est synonyme de violence verbale entre deux interlocuteurs. C’est un registre qui suscite le débat. Le texte polémique comporte une ponctuation expressive avec des exclamations, des interjections et des interrogations.
L’auteur ou le narrateur d’un texte polémique attaque ouvertement un personnage, une institution, une idée.

– Le registre comique peut être présent sous la forme de :L’absurde : il permet de confronter deux éléments qui n’ont rien en commun. L’ironie : elle consiste dire le contraire de ce que l’on pense.

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Un combat d’éloquence 

– Le registre satirique :Il permet de dénoncer des situations en les ridiculisant et de faire réagir le lecteur grâce à l’ironie et à l’exagération de certains traits.

– Le registre didactique :Il permet d’enseigner un savoir. La fonction du texte est de transmettre un savoir ou une morale. 

20. avril 2017 · Commentaires fermés sur Clémenceau : Un discours contre la colonisation · Catégories: Première · Tags: ,

Parlons d’abord de l’auteur de ce discours … Qui est Clémenceau ?

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Georges Clémenceau

Médecin , il commence sa carrière politique par une fonction de maire  d’un arrondissement de Paris  , ensuite élu  député en 1871 ;il rejoint le parti républicain. Il défend l’idée d’une séparation entre l’Eglise et l’Etat et surtout  s’oppose à la politique de colonisation faisant tomber le gouvernement sur cette question. Il rejoindra également les rangs des dreyfusards et se battra pour que les Communards de 1871 soient amnistiés.Élu en 1902 sénateur  il est nommé ministre de l’Intérieur  en 1906. Se désignant lui-même comme le « premier flic de France »,  ,il est surnommé « le Tigre » et va réformer durablement la police ,  À la fin de l’année 1906, il devient président du conseil, l’équivalent du poste de premier ministre .

 

 

  Quel est ensuite le contexte  ?

 Georges Clémenceau s’exprime devant la Chambre des députés le 30 juillet 1885. Il répond au discours prononcé par l’ancien président du Conseil Jules Ferry, deux jours auparavant, au cours d’un débat sur la politique d’expansion coloniale de la France. Chef du gouvernement à deux reprises (1880-1881, 1883-1885), mais renversé par la Chambre le 30 mars précédent, Jules Ferry défend sa politique. Clemenceau entend la dénoncer. Nous sommes donc face à un débat idéologique .

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Le discours à l’assemblée

Le discours de Clémenceau : lecture analytique n° 4 

 

Points de méthode : tout discours suppose qu’on accore une attention particulière à l’éloquence de l’orateur c’est à  dire aux marques son élocution ; les plus fréquentes sont : les adresses aux auditeurs qui peuvent être soit des apostrophes soit des verbes à l’impératif ; les questions rhétoriques ; la présence des indices de subjectivité  du locuteur (je, moi, pour ma part ) . On cherchera également les figures de construction comme les antithèses, les répétitions et les parallélismes de construction. 

 

A noter que ce discours constitue une réponse à des arguments évoqués par Jules Ferry : il faudra donc repérer les arguments de la partie adverse dénoncés par l’orateur ainsi que les concessions faites aux thèses adverses. L’ironie peut également être une arme utilisée par le locuteur et on sera attentif à la rhétorique de l’éloge (les compliments ) et du blâme (les critiques ) 

 

Quelle est la thèse de Clémenceau ? les colons  français dissimulent la violence qu’il infligent aux populations colonisées sous le nom de devoir rendu aux races inférieures par la race supérieure; ils sont hypocrites et cruels. Il va également démontrer qu’il n’y  pas de race inférieure.  `

Quelle est la thèse combattue ? Ferry défend l’idée que la colonisation est un devoir des races supérieures envers les races inférieures . Il va donc s’efforcer de démontrer que ces arguments ne sont pas justifiés  en combattant l’idée d’inégalité des races notamment et en donnantt des illustrations concrètes (les chinois, les Hindous et l’exemple allemand qui fait référence à la désastreuse défaite française de 1871 face à l’Allemagne. ) 

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Quel est son sentiment dominant ?  l’indignation 

Quels sont ses arguments ? il emploie des arguments variés et s’efforce de réfuter les arguments adverses ;

argument 1 de Ferry : la colonisation rapporte des profits même si elle entraîne des dépenses. (de luxe ) 

réponse  : dépenser cet argent pour les Français serait utile et fructueux ; Clémenceau oppose le luxe à l’utilité (convaincre ) et il reprend cet argument dans la péroraison de son discours : “mon patriotisme est en France “ : ce qui signifie qu’il faut faire porter les efforts du gouvernement sur les citoyens français de métropole avant de penser aux colonies.

argument 2 de Ferry : les races supérieures auraient un droit sur les races inférieures  qu’elles exercent et pour justifier la colonisation, Jules ferry emploie le terme de devoir qui est son contraire; il souligne ainsi par cette formulation adroite la contradiction de la thèse de son opposant ; l’expression transformation particulière est particulièrement ironique . 

il détaille ensuite l’expression exercer son droit en utilisant une expression imagée : allant guerroyer et le convertissant de force ; on voit bien ici qu’il oppose encore une fois la notion de droit à la notion de force ; un droit qu’on exerce par la violence est-il encore un droit ? 

il remet en cause ensuite l’existence même d’inégalité des races en arguant du fait que cette différence n’a pas été scientifiquement prouvée mais résulte d’un jugement hâtif : c’est bientôt dit signifie c’est vite dit ( l 8 ) et donc pas forcément vrai. Cette formulation remet en cause la validité même de l’affirmation de Ferry. Il discrédite ainsi la thèse adverse.

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première illustration : pour étayer son argument sur les erreurs de jugement , Clémenceau reprend l’exemple récent (1871 ) de la défaite française face à l’ Allemagne que d’aucuns prétendent liée à l’infériorité de la race française ; il provoque ainsi la fibre patriotique de son public

en même temps l’orateur adopte une attitude de modestie : pour ma part, j’en rabats singulièrement ( l 8) et j’y regarde à deux fois ( l 11) . Il montre ainsi de manière fort adroite qu’il faut se méfier des jugements hâtifs et de cet argument de race inférieure . Il permet ainsi au public de reconnaître ses erreurs .

Il prend ensuite l’exemple des Hindous dont il vante en termes élogieux la “grande civilisation raffinée “  l 13 et la civilisation Chinoise avec “cette grande efflorescence d’art “ et ses “magnifiques vestiges “ Il fait donc ici clairement l’éloge de ces deux civilisations anciennes sur le plan artistique et intellectuel en citant notamment le vénérable Confucius, modèle de sagesse universellement reconnu. 

De plus, cet argument est aussitôt relayé par un second argument politique qui fait clairement allusion à des négociations diplomatiques gagnées par les asiatiques; de plus, Clémenceau reprend l’idée de jugement hâtif évoqué dès le début de son discours avec la phrase : “ceux qui se hâtent trop de proclamer leur suprématie “  

Ce paragraphe mêle donc habilement illustrations historiques, allusions à des événements politiques et critiques des partisans de la théorie des races supérieures. 

Le paragraphe suivant critique directement les défauts des colons : le mot vices ainsi que les références  à l’alcool et à l’opium sont des accusations directes de l’attitude des colons français; On peut d’ailleurs comparer cette stratégie argumentative à celle qu’emploie Diderot dans son Supplément au voyage de Bougainville. 

L’orateur met le public de son côté avec les allusions historiques et politiques dans un premier temps et passe

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Elu président du conseil 

ensuite au blâme avec des critiques des pratiques coloniales ; il peut alors réfuter la notion de droit et la remplacer par la notion de violence ; Il fustige ainsi l’hypocrisie des colons et il remplace , au final (l 30) l’opposition entre race inférieure et race supérieure par une différence entre civilisation scientifique et civilisation rudimentaire ; les mots abus et tortures désignent les actes des colonisateurs dont la mission civilisatrice est carrément remise en cause : prétendu civilisateur peut on lire à la ligne 31, ce qui est une critique directe des alibis des colons.

Clémenceau dénonce ainsi de manière polémique les pratiques coloniales qui dissimulent une violence sous  couvert d’une mission humaniste. Point par point, il réfute les thèses de son adversaire politique et parvient à la conclusion que ces façons d’agir nient les droits des populations indigènes :” ce n’est pas le droit (l 32) : c’en est la négation.” Une formule finale très efficace et frappante .

 

Exemple d’introduction (vous ajouterez des éléments biographiques donnés au début de cet article )

En 1885, l’Empire colonial français se dessine et  certaines voix au gouvernement militent pour son expansion et la multiplication des guerres de conquête; cependant le pays, sorti défait de sa confrontation avec l’Allemagne en 1871, a besoin de clarifier se priorités budgétaires; d’aucuns pensent que la colonisation pourra rapporter de gros profits et y voie t une possibilité pour al France de es reconstruire; Clémenceau n’est pas d’accord avec cette ligne de conduite et il le fait savoir ; (développement biographique sur l’auteur à placer ici ) .… son discours prononcé à la chambre des députés constitue une réponse à celui d’un  membre du gouvernement : Monsieur Jules Ferry ;  les deux hommes ont une vision différente de l’avenir même s’ils militent tous deux  au sein du parti républicain ; il s’agit donc de montrer en quoi ce discours éloquent constitue  une attaque contre la politique de colonisation menée par le gouvernement français  et reflète donc une confrontation politique et idéologique .

Exemple de plan détaillé pour un commentaire 

1 un discours éloquent ou polémique 

a) la contestation des thèses adverses : reprise et réfutation 

b) les indices de subjectivité :

et la création de  liens avec le public : l’absurdité de la thèse de l’infériorité des races avec l’exemple franco-allemand

  c)   l’utilisation du registre ironique très présent : transition une dénonciation virulente qui reflète l’indignation de Clémenceau

2. Une critique de la politique coloniale 

a) des conquêtes onéreuses : le poids économique 

b) les vices des colons : leurs abus

c) la violence des conflits : ils n’ont pas de droits sur ces populations 

3. La défense des civilisations  “rudimentaires “

a) l’éloge des grandes civilisations

b) la création d’une nouvelle distinction qui remplace l’idée d’infériorité

c) du droit à l’abus : contestation des pratiques coloniales désignées comme la négation des droits 

en conclusion ( à étoffer ) Une contestation idéologique et une remise en question de la politique coloniale française à cette époque : visée politique et idéologique  

17. mars 2017 · Commentaires fermés sur Montaigne et l’humanisme : des cannibales. · Catégories: Première · Tags:
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Montaigne

Michel Eyquem de Montaigne est un auteur du seizième siècle qui entreprit de rédiger des Essais pour exprimer ses pensées ; il  représente le courant humaniste qui s’efforce de repenser la juste place de l’homme dans le monde.  Les Essais forment un ensemble de réflexions sur des thèmes , un peu comme des discussions ou des conversations entre lettrés. Montaigne y mêle des propos sur sa vie (ce qu’il a mangé, son état de santé ) et des propos plus généraux sur la Vie en général: de l’amitié, des ennuis, de la mélancolie, de la guerre.. Les Essais appartiennent au genre argumentait: l’auteur tente d’y saisir sa pensée en mouvement . 

  

 En 1492, on découvre, grâce aux voyages maritimes que tous les hommes ne se ressemblent pas forcément et ne vivent pas de la même manière. Ce choc des civilisations et des cultures est raconté par l’auteur dans un chapitre de ses Essais intitulé Des cannibales.

 Il s’y met en scène sous la forme d’un témoin et raconte l’arrivée à la cour des Sauvages, source d’étonnement pour les courtisans occidentaux. L’écrivain nous amène à  réfléchir sur le sens du mot sauvage et raisonne à partir  de différents arguments : il va , par exemple; dans certains chapitres qui évoquent les Cannibales, raisonner du caractère fondé ou pas de leur appellation de Sauvage. Montaigne explique que , dans la nature, des fruits sauvages que l’on trouve  ne sont pas inférieurs aux créations de l’homme : la plante qui pousse à l’état sauvage dans la Nature serait même supérieure à une création artificielle car plus robuste, plus naturelle. Cette argumentation se fonde sur un raisonnement analogique et conduit Montaigne à affirmer paradoxalement la supériorité des Sauvages , plus proches de la Nature , adeptes de lois naturelles, sur les Civilisés, corrompus par les vices. Montaigne entend ainsi nous convaincre que la nature humaine est foncièrement bonne et digne de confiance : à l’état de Nature, les rapports humains se passent de lois et de règlements; cette thèse est à l’origine, deux siècles plus tard  du mythe du Bon Sauvage.qui sera repris par les philosophes des Lumières comme Rousseau ou Diderot dans Son Supplément au Voyage de Bougainville notamment. Vous trouverez, à propos de ce mythe, des explications supplémentaires dans le fichier joint ….

20. février 2016 · Commentaires fermés sur Des procès romanesques célèbres · Catégories: Seconde · Tags:

Stendhal et  Albert Camus ont chacun choisi  dans leurs romans, Le Rouge et le Noir et l’Etranger , de dresser le portrait de deux héros qui devient des meurtriers. Julien tu épar amour et par dépit , la première femme qu’il a aimée et Meursault assassine un inconnu sur une plage car il s’est senti menacé. Les romanciers terminent leur récit par le procès de leurs héros . 

Comparons ces deux extraits : notons tout d’abord que les deux accusés avouent leur crime et ne cherchent pas à minimiser la portée de leur geste; En effet, julien s”accuse d’avoir commis un crime atroce: “attenter aux jours  de la femme la plus digne de tous les respects, de tous les hommages (ligne 5) ; Il va même jusqu’à affirmer qu’il a “donc mérité la mort “ à la ligne 9 . De la même manière, Meursault ne se révolte pas et semble même s’ennuyer durant la plaidoirie de son avocat mais , à la différence de Julien, il ne s’exprime pas et semble très détaché de ce qui se déroule dans la salle : ” tout ce que je faisais d’inutile dans ce lieu m’est alors remonté à la gorge et je n’ai eu qu’une hâte , c’est qu’on en finisse ..” ligne 32.  Les deux accusé sont conscients d’avoir déjà été jugés et condamnés  : Julien parce qu’il est un paysan jugé par des gens riches qui appartiennent à une classe supérieure à la sienne  et Meursault parce que son avocat lui semble ridicule et sans talent. ” il m’a paru qu’il avait beaucoup moins de talent que le procureur” . Les deux accusés semblent donc résignés à subir leur sort mais leur attitude face au public est différente;

En effet, Julien prend la parole  et exprime “tout ce qu’il avait sur le coeur “ligne 20 , sans rien dissimuler de la gravité des faits qui lui sont reprochés ; il avoue la préméditation , le repentir et le respect qu’il avait pour sa victime ; il réussit à émouvoir la salle : “toutes les femmes fondaient en larmes ” ligne 23 ; Alors que Meursault semble , au contraire devenir de plus en plus indifférent à son propre jugement : “j’ai eu l’impression que tout devenait comme une eau incolore où je trouvais le vertige.” ligne 25. Le romancier nous donne le point de vue de l’accusé et nous fait vivre le procès à travers ses sensations pour le moins étranges: “c‘est à peine si j’ai entendu mon avocat s’écrier , pour finir , que les jurés ne voudraient pas envoyer à la mort un travailleur honnête perdu par une minute d’égarement. ” l 35. L’avocat de l’accusé cherche lui clairement à défendre son client en évoquant un geste de folie.

Alors que Stendhal rend pathétique l’intervention de son héros qui semble se trouver des circonstances aggravantes et affronte la sentence avec bravoure : “je ne vous demande aucune grâce “, dit -il ligne 5: “la mort m’attend: elle sera juste” l 6; Meursault lui semble un peu étranger à son propre jugement et très peu concerné par ce qu’on lui reproche; Ce qui rend le texte étrange car on a parfois l’impression qu’on parle de quelqu’un d’autre que lui. Ces procédés d’écriture permettent de traduire l’indifférence globale du héros pour le monde et  pour la vie. 

Ecoutez la plaidoirie de Julien dans le film tiré du roman …

07. février 2016 · Commentaires fermés sur Analyser un affrontement sur scène · Catégories: Première · Tags:

La question de synthèse proposée se basait sur un corpus emprunté au théâtre contemporain: comment les affrontements étaient-ils représentés ?  Les personnages de Beckett, deux clochards, Vladimir et Estragon, se disputaient de manière loufoque à propos notamment d’une chaussure ; la pièce de Beckett fait partie du théâtre de l’Absurde et le lien était ici important à montrer dans la mise en scène de cette querelle amicale. 

Les deux personnages choisis par Kundera pour illustrer la relation souvent  conflictuelle  entre maitre et valet parodiaient de manière savoureuse une scène classique, un topos de la comédie de moeurs : le valet insolent craint son maître et lui répond. On pouvait par exemple, penser à Sganarelle face à Don Juan, à Scapin face à Géronte ou aux valets de l’Avare. Quant au troisième affrontement, il émanait d’un drame politique de Nasser Djemaï qui aborde le thème sociétal  des conditions de vie des travailleurs immigrés. (voir le fichier en pièce jointe sur la pièce Invisibles , la tragédie des Chibanis)
Procédez avec méthode au brouillon  ; isolez d’abord les origines des conflits , leur ton, les éléments verbaux et les procédés de style qui alimentent l’échange (stichomythie, répétitions, antithèses, familiarités, insultes) et n’oubliez pas les éléments non verbaux (présence ou absence de didascalie, ponctuation). Proposez une conclusion de deux ou trois lignes en hiérarchisant les textes  : la dispute la plus sérieuse ou la plus fréquente ou la plus inattendue ) 

Deux des trois textes mettent en scène une dispute qui peut sembler liée aux personnages et à leur caractère: Vladimir et Estragon se chicanent pour tout et n’importe quoi et se réconcilient quelque minutes plus tard. Leur ton est un mélange d’agressivité : “Il n’y jamais que toi qui souffre; Moi je ne compte pas” et de sollicitude comme lorsqu’Estragon demande de l’aide à son ami et que ce dernier évoque une image d’eux “main dans la main ” . On retrouve ces contradictions dans l’affrontement entre Jacques et son maître , dominé, lui aussi ,  par les effets comiques ; Jacques semble éprouver un malin plaisir à contredire son maître  et à lui tenir tête: ”   Vous vous trompez Monsieur “, répété à deux reprises , sert de réplique d’ouverture au valet provocateur;il refuse même d’obéir aux ordres de son maître : “je n’irai pas” réitéré en dépit des hurlements du maître  ; cependant le serviteur se montre conciliant à la fin de leur querelle : ” mais pour éviter de nouvelles disputes, nous devrions nous mettre d’accord un fois pour toute sur quelques principes” ; Jacques aurait-il remporté cette joute verbale? Rien n’est moins sûr mais l’ oxymore maître obéissant ” atteste de ce renversement des rôles. Aucun effet comique dans Invisibles : la question qui divise les personnages prend une importance cruciale et dépasse le cadre individuel : l’unique didascalie “long silence ” reflète bien la gravité du moment et le rythme de l’échange est beaucoup plus lent que dans les deux autres disputes : la  tirade d’Hamid lui permet de poser ses arguments et de les faire entendre au spectateur ; Martin semble seul contre les trois autres qui forment une ensemble choral. Contrairement aux deux scènes de comédies, Invisibles montre un affrontement idéologique : le jeune Martin s’indigne comme le montrent ses questions et les nombreuse exclamatives qui ponctuent ses répliques mais il se heurte à l résignation des chibanis, ses ancêtres,  et la fatalité semble l’emporter : ” y a pas à comprendre mon fils; Faut tu respectes l’histoire; On change pas les chose comme ça; Le destin, c’est comme ça.” 
On sent également un pointe de résignation dans le théâtre de Beckett mais elle prend plutôt la forme d’une incommunicabilité entre les personnages et d’un double discours : en effet, au- delà de la simple querelle à propos de la chaussure qui blesse Vladimir, on devine des allusions à la mort et au tragique de la condition humaine : “Tu ne serais plus qu’un petit tas d’ossements à l’heure qu’il est..pas d’erreur” assène Vlaimir à Estragon qui est “piqué au vif “comme le précise la didascalie. La violence des gestes est manifestée par de nombreuses notations (avec vivacité, avec emphase, avec emportement ) qui assurent les effets comiques de cette altercation alors que la scène se termine de manière tragique avec la dernière réplique de Vladimir : “ça devient inquiétant” suivie d’un silence. Pas d’inquiétude dans le jeu entre jacques et son maître mais le comique n’empêche pas le sérieux des propos et la vivacité des échanges ne, doit pas nous faire oublier la réflexion  philosophique sous- jacente : à travers les personnages et leurs saillies parfois triviales (la mention du cul  magnifique de l’aubergiste par exemple, Kundera reprend la philosophie de Hegel dans la dialectique du maître et de l’esclave ” il est écrit là-haut que vous ne pouvez pas vous passer l’un de l’autre” Le conflit entre elle maître qui ne parvient pas à se faire obéir et le valet qui refuse d’obéir aux ordres donnés nous amène à nous interroger sur la relation dominant/dominé qui est ici, rééquilibrée ” 
Ces trois affrontements présentent donc de nombreux points communs ; ils nous font réfléchir à notre condition, à celle de ceux qui nous entourent ; le mélange des registres peut parfois nous faire oublier que sous le comique apparent peut se tapir un enjeu existentiel, philosophique et même  tragique. Les paroles des Chibanis devraient leur permettre de ne plus demeurer invisibles à nos yeux.

21. décembre 2015 · Commentaires fermés sur Voltaire répond à ses juges : un plaidoyer éloquent. · Catégories: Première · Tags:

Il fallait imaginer que Voltaire justifiait ses prises de position et ses choix narratifs et idéologiques . Le discours de l’auteur de l’Ingenu devait prendre en compte les accusations proférées à son encontre. Il s’agit de convaincre des juges soit en prononçant un réquisitoire,véritable acte d’accusation, soit en fabriquant un plaidoyer qui est un discours qui vise à défendre un accusé. 

Commençons par reprendre les principaux arguments de ses adversaires; 

Une erreur de cadrage fréquente vous a fait considérer le Dictionnaire Philosophique comme oeuvre de référence pour les accusations alors qu’il s’agissait de défendre la matière de l’Ingénu

N’oublions pas la formule d’introduction qu’on peut faire suivre d’une accroche de type captatio benevolentiae
Messieurs les Juges, de très nombreux lecteurs, vos compatriotes, m’ont fait l’honneur d’acheter mon dernier cont philosophique et son succès prouve que les thèmes que j’y aborde , sous le voile de la fiction, intéressent mes contemporains; Je me présente aujourd’hui devant vous afin de prouver ma bonne foi et pour répondre des accusations qui ont été lancées contre mon livre dans un journal que vous connaissez sans doute et dont j’apprécie particulièrement le style . …; 
Attention, l’ironie est laissée à votre appréciation.
L’accusation d’impiété peut facilement être réfutée en se fondant sur l’omniprésence de la religion dans le conte en particulier et dans les ouvrages de Voltaire en général ; “ Pour quelles raisons , Messieurs, un homme sans religion, évoquerait-il constamment un sujet dont il n’à que faire ?  Si la religion m’inspire autant c’est parce que je cherche à montrer aux hommes leurs erreurs et que je  les mets  en garde contre les dissensions qui surviennent lorsqu’on considère qu’en matière de religion, on détient la vérité; Je crois en Dieu et je me rends à l’église le dimanche pour prier, le prier d’accorder la sagesse aux hommes et la clairvoyance; “ 
C’était le moment de placer une profession de foi déiste de Voltaire.
Les accusations d’obscénité peuvent être contrecarrées à condition de choisir des exemples précis dans le conte; On peut alors jouer sur le sens du mot et proposer d’y voir plutôt des allusions grivoises pour divertir le lectorat  féminin notamment ou , mieux encore, pour sensibiliser les jeunes femmes aux dangers de la fréquentation des Grands ; “Messieurs, au vu de mon grand âge, pensez-vous vraiment qu’il est raisonnable de voir de l’obscénité là où je décris la beauté naturelle d’un corps de jeune homme ?; En effet, mon personnage de Huron doit susciter l’envie parce qu’il représente un mode de vie sain et que sa vigueur est un élément qui me permet , justement de faire l’éloge d’un mode de vie naturel; Si vous y voyez de la concupiscence, c’est peut être que pour vous , la nudité est quelque chose de répréhensible mais sachez bien que tous nous naissons nus au sortir du ventre de notre mère et que les hommes ne se promenaient pas autrement dans l’Eden. ” Quant au commerce charnel auquel se soumet ma pauvre héroïne, j’ai  simplement voulu montrer que lorsqu’on est une jeune femme , les dangers sont encore plus grands lorsqu’on se place dans une position où les faveurs d’un homme puissant paraissent nécessaires ” Je souligne ainsi les dangers de la Cour et de la fréquentation de certains ministres que leurs fonctions peuvent dépraver; En effet, je crois que le pouvoir corrompt et j’ai pu en faire l‘expérience , à mes dépens, lorsque je me trouvais à la cour de Frédéric de Prusse, qui autrefois fut mon ami avant de devenir un tyran.

Les accusations politiques pouvaient être l’occasion d’évoquer subtilement les convictions politiques de Voltaire, son anglophilie , sa croyance en une monarchie parlementaire, un meilleur  équilibre des pouvoirs et une limitation du pouvoir personnel du roi, un modèle idéal de despote éclairé; 
“Messieurs , loin de moi l’idée de critiquer pour le simple plaisir de me montrer irrévérencieux  ; “j’ai toujours eu à coeur , dans mes  nombreux ouvrages, de mêler le plaisir justement à la réflexion et c’est ce qui m’a conduit à faire le choix du conte philosophique; Comme tout ouvrage de fiction, j’ai pu parfois forcer le trait et paraître outrancier  mais le lecteur doit être saisi sous peine de passer à côté de la dimension didactique de mon travail ; Nul n’a songé à critiquer mes tragédies qui pourtant comportent indiscutablement une part de réflexion mais, emporté par le drame, le spectateur oublie parfois l’objet même du conflit tragique; alors que dans le conte, les lecteurs ne s’identifient pas au malheur des personnages et demeurent à distance ; c’est cette mise à distance qui permet justement à la réflexion de s’exercer.
Dernier conseil: n’attaquez pas directement vos adversaires sinon vous vous discréditez;  Jamais d’insultes ni de critiques ad hominem du type : ” Monsieur François Berthier, de toute façon, ne sait ni lire ni écrire …” Vous devez toujours privilégier les faits et vos connaissances pour construire votre argumentation . 
16. novembre 2015 · Commentaires fermés sur L’ingénu toujours en prison fait des progrès … · Catégories: Première · Tags:

Le chapitre XIV du conte nous révèle les progrès accomplis par notre héros , au contact du vieux et sage Gordon; Voyons plutôt comment son esprit s’est fortifié et ce qu’il a appris en quelques semaines. Quelles questions pourrait-on vous poser sur cet extrait ?

 Vous lirez dans les chapitres précédents ….

Embastillé depuis plus d’un an, notre héros emploie l’essentiel de son temps à lire et à discuter avec Gordon.Après la géométrie, il découvre la philosophie de Malebranche et ne partage pas l’idée selon laquelle toute idée émane de Dieu; Gordon lui résume les grands mythes des origines de l’homme et du mal sur terre mais ils ne parviennent pas à se mettre d’accord.  L’esprit du jeune homme se fortifie de plus en plus mais la pensée de Mademoiselle de Saint Yves le distrait et l’empêche de progresser en mathématiques. L’histoire l’attriste car “elle n’est que le tableau des crimes et des malheurs” (chap X) ” Le monde lui parut trop méchant et trop misérable” . Seule l’histoire romaine trouve grâce à ses yeux et notre héros ne comprend pas pourquoi les nations se dotent d’origines fabuleuses. Il rappelle la phrase que le romancier Marmontel attribue à son héros Bélisaire général de l’empereur Justinien : ” La vérité luit de sa propre lumière et on n’éclaire pas les esprits avec les flammes des bûchers.” Gordon admire le “bon sens naturel de cet enfant presque sauvage” Tous deux sont d’accord pour condamner vivement les critiques , qualifiés d’ “excréments de la littérature”. Le narrateur compare son personnage à des “arbres vigoureux qui , nés dans un sol ingrat, étendent en peu de temps leurs racines et leurs branches quand ils sont transplantés dans un terrain favorable.” L’Ingénu découvre Molière qui l’enchante avec une préférence pour Tartuffe qui dénonce l’hypocrisie des faux dévots; Il aime par dessus-tout les vers des tragédies de Racine alors qu’il garde les yeux secs quand il lit les pièces de Corneille.  Le chapitre que nous allons analyser est présenté sous l’aspect d’un dialogue philosophique entre Gordon et l’Ingénu: Les thèmes abordés sont la morale, les vérités en matière de religion et l’injustice de leur captivité.                    
 Commentaire composé : vous rédigerez l’introduction et imaginerez la problématique qui peut être traitée à l’aide de ce plan
De l’ Ingénu faisait des progrès … libre cours à sa juste colère…(voir texte photocopié)
  1.  Quelque pistes : Un dialogue argumentatif : des techniques de philosophie /questions/réponses, la dispute socratique et la maïeutique
  2. Le renversement des rôles : l’Ingénu devient un maître à penser et influence le sage Gordon, un éloge de l’homme naturel qui rejoint  certaines réflexions autour du mythe du bon sauvage . Un ton polémique et critique : dénonciation du fanatisme religieux et de l’arbitraire de la justice

Voici quelques analyse pour vous  aider à rédiger l’une des parties ..à partir de ces 12 points, à vous de les répartir au sein d ‘un plan détaillé  et d’en trouver d’autres..

  • la trempe de son âme : connotation laudative, esprit fort : Voltaire met en parallèle l’inné et l’acquis; l’éducation ne suffit pas à forger une belle âme; âme au sens d’esprit, personne.
  • l’absence de préjugés est un atout comme l’exprime la métaphore de la rectitude : son entendement n”ayant point été courbé; les préjugés nous déforment et modifient nos pensées, les infléchissent dans le mauvais sens: usage de termes scientifiques issus de la géométrie 
  • importance de l’éducation : “les idées qu’on nous donne dans l’enfance” : un préjugé se forme avant l’apparition de l’esprit critique vers l’adolescence. les philosophes des Lumières accordaient donc beaucoup d’importance à la qualité de l’éducation.
  • chimères : le mot à connotations négatives désigne des idées mensongères, des illusions : Gordon réalise qu’il s’est peut être trompé en accordant trop de crédit à l’idéologie janséniste; pries de conscience de Gordon provoquée par le raisonnement te la démonstration de l’Ingénu 
  • Voltaire fait l’éloge de l’homme naturel et emploi des expressions laudatives : progrès rapides,voyait les choses comme elles sont ; ce vocabulaire s’oppose aux connotations négatives liées à l’erreur 
  • les paradoxes sont nombreux et c’est un moyen d’attirer l’attention du lecteur: ce jeune ignorant instruit par la nature, vérité obscures et faussetés obscures..comment peut on à la fois être ignorant et instruit? comment une vérité peut elle paraître obscure ? 
  • la métaphore de la Lumière, assimilée au Savoir : si cette vérité était nécessaire comme le soleil l’est à la terre, elle serait brillante comme lui; pour Voltaire, dans le domaine religieux, il n’existe pas de vérité et rien ne peut être démontré; les religions qui prétendent imposer leur point de vue et leurs vérité sont ainsi assimilées à des sectes. “tout secte me paraît le ralliement de l’erreur ” Les arguments de l’ingénu ont pour but de démontrer que le mot vérité ne peut pas être employé dès qu’il s’agit de croyance et que les religions divisent les hommes qui ne parviennent pas à se mettre d’accord : ” ils sont trop partagés sur les vérités obscures” ; Voltaire montre ici que  les querelles religieuses lui semblent vaines, nocives et totalement inutiles. 
  • les parallélismes de construction sont une arme efficace dans l’argumentation : “je vous plains d’être opprimé mais je vous plains d’être janséniste.” Les bourreaux catholiques jésuites sont dénoncés ainsi que leurs méthodes (jeter leurs opposants en prison) mais Voltaire condamne également les prises de position jansénistes en montrant qu’ils s’accrochent à de fausses idées.
  • L’Ingénu se transforme en professeur de déisme et c’est lui qui tente de convaincre Gordon avec des questions philosophiques qui reposent sur des hypothèses : “S’il y avait eu une seule vérité cachée dans vos amas d’arguments qu’on ressasse depuis tant de siècles, on l’aurait découverte sans doute.” cet argument logique prouve qu’il ne peut y avoir de vérité en matière de religion ; notez au passage qu’amas et ressasse ont des connotations péjoratives qui renforcent la critique des partis religieux. Notez également l’ironie véhiculée ici par l’expression “sans doute” qui signifie assurément 
  • Voltaire établit néanmoins une différence entre les jansénistes et les jésuites : les premiers sont qualifiés de peu sages et les seconds de monstres car ils commettent le mal , tuent et persécutent d’autres hommes pour des dogmes sur lesquels ils ne sont pas d’accord; les jansénistes sont comparés à des fous et c’est finalement le doute qui s’empare de Gordon
  • j’ai perdu mes jours à raisonner sur la liberté de Dieu et du genre humain; mais j’ai perdu la mienne.” Voltaire traduit ici le scepticisme de Gordon et montre l’injustice de la captivité comme dans la suite du passage.
  • On condamne les hommes sans les entendre ! critique de la manière dont l’Ingénu a été arrêté sans jamais pouvoir se justifier donc de l’arbitraire de la justice quand elle est soumise aux lettres de cachet (qui ont été supprimées en Angleterre ) En 1769, l’Habeas Corpus Act protège tout citoyen anglais des arrestatiosn arbitraires et Voltaire considère qu’il s’agit d’un progrès considérable. On retrouve d’autres références à cette justice arbitraire comme “Nous voici tous les deux dans les fers sans en savoir la raison et sans pouvoir la demander.” 
Rédigez intégralement la conclusion de ce passage…
14. novembre 2015 · Commentaires fermés sur Mon dictionnaire philosophique portatif · Catégories: Seconde · Tags: ,

L’idée de Voltaire lorsqu’il fabriqua son dictionnaire philosophique portatif en 1764, consistait à prolonger le travail fourni par les Encyclopédistes mais sous une forme condensée.A la différence d’un banal dictionnaire qui se contente de donner les principales définitions de tous les mots, le dictionnaire philosophique ne retient que quelques mots qui semblent importants et tente d’en éclaircir le sens, de mieux faire comprendre  leurs enjeux.

Ainsi Voltaire a choisi d’éclairer le mot préjugés et de soumettre à la sagacité des lecteurs les sens communément admis pour ce terme philosophique. Le
projet de rédaction d’un dictionnaire qui rassemblerait les
principales idées du parti philosophique est
né vers 1750
mais
ne s’est concrétisé que des années plus tard à cause de la
dispute entre Voltaire et le roi de Prusse. Voltaire a d’abord
collaboré , à la demande de Diderot à l’Encyclopédie mais il
pense que l’ouvrage est beaucoup trop volumineux pour être un
instrument de lutte efficace contre l’infâme.

En
1762 Voltaire écrit le Traité de la Tolérance pour défendre le
protestant Jean Calas exécuté alors qu’il était innocent du crime
dont on l’accusait.
La
première
édition du Dictionnaire
philosophique portatif
,
paraît
anonymement
à Genève
et Voltaire se défend publiquement d’en être l’auteur.

L’ouvrage
crée le scandale et
il
est condamné à être « lacéré et brûlé » un
peu partout comme
« téméraire, scandaleux, impie, destructif de la
Révélation ». En
1766, l’exemplaire du livre de Voltaire que possédait le chevalier
de la Barre sera
cloué sur le torse de son propriétaire, et brûlé sur le même
bûcher.

Le
livre
se présentant sous la forme d’un dictionnaire, son organisation
obéit évidemment à la logique de l’ordre alphabétique, mais
l’auteur a choisi quels mots il allait analyser et a su créer entre
les différents articles des liens.

Ame,
Anthropophage,
Amitié, Amour, Beau,
Christianisme Destinée,,
Dieu, Fanatisme, Guerre, Hommes, Jésuites, Juif, Ignorance, Inquisition, Liberté, Martyrs, Miracles, Philosophie, Providence, Religion, Style, Superstition, Supplice, Tolérance, Tragédie, Vertu :
autant de définitions qui tentent de chasser l’obscurantisme. Mes mots à moi ; terrorisme, capitalisme , économie de marché, libéralisme économique, crise, chômage, individualisme, jeunisme, nouvelles technologies, réseaux sociaux, Facebook, snapchat, skyper, dowmloader, uploader.

Les
éditions successives feront apparaître plus de 100 articles. Au fur
et à mesure des rééditions, la critique religieuse se renforce
avec des nouveaux articles comme baptême ou Torture et
l’ironie
devient
plus sarcastique et plus violente.

A ton tour, compose un article d’une quarantaine d lignes à partir d’un mot de ton choix que tu t’efforceras de définir avec soin en donnant des illustrations concrètes de l’emploi de ce mot à partir de différente situations .

Les critères d’évaluation sont les suivants ; 4 points pour le choix du mot et la qualité de l’écriture, 4 points pour l’invention et la diversité des illustrations, 4 points pour les définitions successives et les arguments et 4 points pour l’usage de l’ironie. Avant de composer, relisez l’article Préjugés, l”article Torture et les explications données en pièces jointes.

Ecrasons l’infâme d’autant plus fort qu’il devient résistant..

21. octobre 2015 · Commentaires fermés sur Voltaire et la religion · Catégories: Première · Tags:

Eduqué par des jésuites, partisan de la cause protestante, adversaire des thèses jansénistes, du dogmatisme et du providentialisme, Voltaire est un  déiste théiste..lisez plutôt ces questions/réponses ..

Quelle est l’attitude de Voltaire vis-à-vis des religions
officielles ?

→ Voltaire est critique à l’égard de toutes les religions
officielles qu’il considère comme des SECTES cf. L’Ingénu,
chapitre 14 ; Dictionnaire philosophique, article
« Secte » : « Toute secte, en quelque genre
que se puisse être, est le ralliement du doute et de l’erreur »,
« Il n’y a point de secte en géométrie », « Quand
la vérité est évidente, il est impossible que s’élèvent des
partis et des factions ».

≠ sens actuel (Groupement organisé dont les membres ont adopté
une doctrine et des pratiques différentes de celles de la religion
majoritaire ou officielle).

Voltaire est-il athée pour autant ? NON : il est
déiste ou théiste, religion qu’il définit dans l’article
« Théiste » du Dictionnaire philosophique.

► Qu’est-ce que le théisme ?

) : le théiste croit en
l’existence d’une force supérieure qui fait le bien sur terre.

  • Définition de l’ « Être suprême » se fait en
    termes d’ACTION : on est dans le visible, le factuel,
    l’objectif et non dans une définition métaphysique.

→ être créateur de tout ce qui existe sur terre.

→ être qui agit (punit et récompense) mais son action est
raisonnable (≠ fanatisme).

un Dieu en quelque sorte  « qui punit sans
cruauté les crimes // et récompense avec bonté les actions
vertueuses » : é

→ le Dieu du théiste est un Dieu qui agit raisonnablement, avec
mesure // attitude philosophique.

le théisme est une attitude de croyance envers une force
supérieure qui agit raisonnablement.

Le théiste n’a pas la prétention d’expliquer les motivations
de Dieu .

  • Le théiste ne cherche pas à comprendre le fonctionnement de la
    Providence car cela dépasse ses capacités.

Le théisme est aussi une attitude d’humilité face à Dieu.

le point commun entre les religions étant la croyance en
Dieu, Voltaire propose d’en faire le principe d’une religion
universelle.

  • Théisme présenté comme la religion « la plus ancienne et la
    plus étendue » :
    avant les « systèmes », il y a une croyance et celle-ci
    est la même pour tous..

le théisme a pour principe de réunir les hommes autour du
même sentiment d’adoration de Dieu → utilité sociale.

  • Profession de foi du théiste :
    la religion doit faire le bien dans la société.

  • « Faire le bien, voilà son culte ; être soumis à Dieu,
    voilà sa doctrine »

le théiste préfère l’action à la discussion 

CONCLUSION : Qu’est-ce que le théisme ? 

Le théisme est une religion épurée, sans dogme ni rite. C’est
une religion qui assume son rôle de lien social.

Ses grands principes sont :

  • l’affirmation simple de l’existence d’un Dieu créateur.

  • l’utilité sociale de la religion.

  • l’absence de cérémonie mais l’adoration et la justice.

    Dans L’Ingénu, Voltaire dénonce le dogmatisme des catholiques qui font passer le respect des rites avant le bonheur de leurs proches (exemple ; ne pas pouvoir épouser sa marraine ); Il dénonce aussi l’aveuglement de la politique de Louis XIV, fortement influencé par le parti dévot (ultracatholique composé de jésuites influents); le roi a restreint la liberté religieuse en révoquant l’édit de Nantes en 1685 et a ainsi provoqué l’exode massif de sujet protestants qui refusaient de es convertir; Les soldats tentaient parfois de convertir les hérétiques par la force et de nombreuses familles prirent alors la fuite . C’est cette situation qui est évoquée dans le chapitre 8 : le dîner à Saumur.  Voltaire se moque également des différences entre le texte littéral de la Bible et l’évolution du culte ; Alors que Jésus prône la pauvreté et le partage, certains dignitaires catholiques se montrent cupides et avides de pouvoir comme le Père de La Chaise et le père Tout-à-Tous.  En pièce jointe, un tableau qui résume les différences entre catholiques et protestants (le point sur la religion)

    Lisez la avant de débuter le QCM…



20. septembre 2015 · Commentaires fermés sur Eloge et blâme · Catégories: Fiches méthode · Tags:

Comment faire l’éloge de quelqu’un ? quels procédés de style utiliser ? comment exprimer une opinion critique ? 

L’éloge et le blâme sont des registres; ils font partie de l'argumentation épidictique et sont très souvent utilisés dans les discours ; ils constituent une stratégie argumentative; faire l’éloge de quelqu’un consiste à en vanter les qualités, à mettre en valeur les points positifs; il est donc logique de recourir aux adjectifs mélioratifs , aux comparatifs de supériorité et aux formules emphatiques qui renforcent l’expressivité de l’énoncé ; de nombreuses figures de style peuvent également être associées à l’éloge comme l’hyperbole, la gradation, l’énumération, l’antithèse. Ces mêmes procédés pourront tout aussi bien être employés , dans un autre texte, dans  un sens critique.

Comparons par exemple les portraits suivants: le renard qui cherche à s’emparer du fromage que le corbeau tient dans son bec, utilise un discours flatteur :

“Et bonjour Monsieur du Corbeau “: formule de politesse et particule nobiliaire affectée au corbeau : ce qui lui confère un statut de Seigneur

“Que vous êtes joli, que vous me semblez beau “:2 adjectifs mélioratifs redondants ; le locuteur s’implique  avec la première personne du singulier :en disant me.

“Sans mentir si votre ramage se rapporte à votre plumage” : comparaison précédé d’un formule emphatique destinée à rassurer le corbeau

“Vous êtes le phénix des hôtes  de ces bois” : métaphore qui assimile le corbeau à un Dieu, extrêmement valorisant

Lorsqu’on cherche à blâmer un personnage, on utilise des connotations négatives et des comparaisons dévalorisantes qui inspirent le dégoût ou le mépris.

Le portrait s’apparente alors à une caricature : Victor Hugo admirait Napoleon Premier et lorsque Napoléon III l’exile dans les îles anglo-normandes, il écrit ce portrait charge du nouvel Empereur; Chaque strophe le compare à son illustre parent et le rabaisse.

” Toi son singe marche derrière, petit petit” : la comparaison avec un singe est dévalorisante

“Toi tu te noieras dans la fange, petit petit:”  l’image de l’empereur qui tombe dans une flaque de boue est là aussi particulièrement négative.

La répétition de l’adjectif petit contribue à renforcer la dimension critique de cette dénonciation.

A retenir : les mêmes  procédés de style peuvent s’employer dans l’éloge comme dans le blâme.