Le dix-neuvième siècle estmarqué par la succession de différents mouvements littéraires : le romantisme est contesté par les fondateurs du Parnasse et après eux, les Symbolistes définiront un nouvel art poétique. Charles Baudelaire se trouve précisément au carrefour de ces trois courants . Son recueil Les Fleurs du Mal qui paraît 1857 fit scandale et lui vaudra un procès retentissant ; Le poète sera contraint de censurer des pièces jugées scandaleuses et de livrer ainsi , au public, une version expurgée de son recueil . Dans la continuité du mouvement romantique, on retrouve des thématiques communes et notamment l‘expression du mal de vivre, qui chez Baudelaire, s’amplifie et devient le Spleen . Nous verrons comment Baudelaire, dans « l’Albatros », propose une image du poète en oiseau; Il oppose l’Idéal au Spleen, et met en scène une vision pessimiste de la société, dans laquelle le poète ne trouve pas sa place.
Questions possibles qui pourraient servir d’axes de commentaire : Comment analysez-vous la comparaison du poète à un albatros dans ce poème ? Comment Baudelaire met-il en valeur le génie du poète ? Quels sentiments se dégagent ici à l’égard de l’albatros et pourquoi ? Quelle est la place et la fonction du poète dans la société ? Comment s’expriment dans cette poésie le Spleen et l’Idéal ?
Première lecture de « l’Albatros » : se lit comme une petite histoire au décor maritime. Un navire et ses hommes d’équipage traversent les océans : pour passer le temps, ils s’amusent avec des albatros. Les quatre quatrains semblent raconter une histoire et sont construits comme un récit avec notamment un narrateur au point de vue externe (ne s’implique pas) dans les 2 premiers quatrains : pas d’implication de l’émetteur, pas de lyrisme.- Dans le 3ème quatrain on repère les marques du discours avec la présence d’un style direct (présence de « ce » : démonstratif déictique, propre à une situation de communication orale (on nous montre quelque chose à voir) + exclamation x3 => caractère insistant. Type exclamatif propre au discours oral, au registre oratoire
énonciation propre au récit : situation spatiale établie (dans le ciel, sur le navire) et -établissement du cadre temporel .Le. début du poème par un adverbe de temps qui marque la répétition, l’habitude, la lassitude.Le poème se présente donc à la 1ère lecture comme la narration d’une scène de la vie en mer. (rappel : Baudelaire a voyagé dans les îles).
–Au v.13,une analogie (comparaison explicite avec l’outil de comparaison « semblable à ») invite à réinterpréter la scène évoquée dans les 3 premiers quatrains: “Le Poète est semblable au prince des nuées“.Cette analogie opère le passage de l’anecdote à l’allégorie et invite à voir une nouvelle signification morale et philosophique.
– « prince des nuées » et « rois de l’azur » : l’albatros est personnifié par une figure de style, la périphrase noble, poétique pour idéaliser l’image du poète ; De plus l’oiseau est-caractérisé par des sentiments humains :indolent, maladroit,honteux : ces adjectifs participent à la personnification de l’animal comme symbole du poète
La -lecture de la poésie peut se faire sous un nouvel angle, à travers tout un réseau de symboles. Baudelaire devance ainsi l’esprit de la poésie symboliste :
Si l’ Albatros est le symbole du poète, l’ Equipage représente la société qui ne comprend pas le poète et se moque de lui; Le Navire est le symbole de la matérialité et le Ciel celui de la spiritualité. Quant au gouffre, il symbolise la mort .
L’oiseau et le poète ont en commun la plume, l’outil de liberté. La plume de l’albatros l’aide à voler, celle du poète lui permet d’écrire : pour tous les deux, c’est le seul moyen d’être libre, de vivre un idéal.
– vastes: adjectif qui caractérise l’animal et le poète par une connotation d’ampleur = capacité d’expansion (pour le poète, expansion = figure de l’hyperbole, adjectifs qualificatifs), qui prend la place qu’il lui faut, dans son univers idéal : le ciel, c’est l’espace de liberté, comme la feuille.
– oiseaux des mers : périphrase. Pluriel « des mers» : universalité par le pluriel => Pouvoir sur le monde.
Dans la symbolique traditionnelle, l’oiseau représente les états spirituels et supérieurs de l’être : il est celui qui détient la connaissance spirituelle.
-Supériorité physique (oiseau = au-dessus). Le poète est donc témoin de la société, il dénonce les travers humains
– se rit, hante: supériorité du poète dans son domaine. Idée d’invincibilité du poète lorsqu’il se trouve dans son élément : le Ciel . Alors qu’il est démuni et infirme lorsqu’il se trouve au milieu des hommes , sur le navire qui représente la vie en société.
-4 quatrains + vers en alexandrins => ampleur et noblesse du rythme : pureté dans la forme
-Poète avec majuscule : idéalisation du monde des poètes, noblesse du monde de l’esprit
– périphrases nobles : appartenance à un autre univers, celui de la noblesse d’âme (roi, prince), celui d’un univers de couleur et d’abstrait (nuées, azur).
–prince des nuées : allusion à l’expression prince des poètes, distinction attribuée au poètes courtisans au XVIème siècle (ex : Ronsard). Baudelaire s’inscrit donc dans la lignée des grands poètes
-ses ailes de géant : anacoluthe (figure de style créant une rupture grammaticale avec le vers précédent).
=> effet de surprise // liberté du poète de pouvoir exprimer les mots sans se plier aux exigences syntaxiques, donc aux exigences sociales
cpdt, malgré cet idéal poétique, le poète ne peut s’épanouir complètement : la société lui pèse, elle cherche à l’empêcher de s’exprimer, par sa dureté et sa trivialité. Le poème finit sur une touche pessimiste (on l’empêche de marcher) : Baudelaire n’échappe pas au spleen qu’il cherchait pourtant à fuir avec la poésie.
L’albatros est victime de la trivialité du monde et de la société. Le registre réaliste présent dans la poésie nous invite à lire ici l’expression du spleen du poète, mal dans la vie.
adjectifs et adverbes volontairement péjoratifs à partir du moment où le poète met un pied dans la société et tout ce qu’elle a de plus vulgaire et trivial, cad la vie quotidienne
-rime alternéeplanche / blanche : exprime bien l’opposition entre les deux mondes, celui de la poésie, et celui de la réalité. les planches : Terme trivial, signifie q. chose de construit, qui s’oppose au ciel : symbole de la civilisation.
–comique et laid: ce qui n’appartient pas au domaine de la poésie noble et pure. Allitération en /k/ => tonalité coupante, blessante (caractère trivial et hostile de la société). L’albatros n’est plus dans son environnement, il perd ses qualités, sa grâce et devient maladroit ; il est la risée et la victime des hommes d’équipage ; Idée d’un poète victime et souffre-douleurs .
-rejet => prennent en début de vers : connotation de capture, d’emprisonnement
-structure grammaticale : hommes sujets, donc qui détiennent le pouvoir, bourreaux / albatros compléments d’objet, donc victimes
-pour s’amuser : CC de but, antéposé + encadré par les virgules (apposition) : plusieurs procédés grammaticaux qui cherchent à mettre en évidence la cruauté des hommes, gratuite.
-les hommes : aspect généralisant de l’être humain (tous les hommes) : pas un seul ne sort du lot => universalité dans la cruauté humaine
-présent de vérité générale dans le poème : caractère atemporel : universalité de la chose
-Naguère + imparfait qui volait : rupture avec un temps prospère et insouciant, celui de l’écriture
-opposition : ciel (lieu d’écriture et d’inspiration, idéal) VS terre (lieu de réalité, spleen)
-laissent placé en début de vers (enjambement) => abandon du poète, victoire impossible contre la société (fatalisme ?)
-de voyage : voyage vers quoi ? vers la mort. Fatalisme de la condition humaine
-le navire = symbole de la société, de la terre, de la vie quotidienne.
-glissant = allitération en /s/ + participe présent => sensation de lenteur, symbole de la vie terrestre où l’on s’ennuie (+ souvent : aspect itératif : monde de répétition, et d’ennui)
-sur des gouffres amers : allitération en /R/ : connote une dureté, la chute : termes péjoratifs propres au spleen. Marche lente vers la mort, rappelle le fleuve qui mène à l’enfer (le Styx)
-Indolent : terme polysémique, issu de dolor = souffrance. Qui ne souffre pas/ qui ne fait pas souffrir/ qui n’est touché de rien (insensible)/ nonchalant, paresseux => Lecture réaliste => « touché de rien », nonchalant. Lecture symbolique : poète qui ne travaille pas avec la sueur de son front => insupportable pour la société humaine qui du coup se déchaîne contre le poète ?
– Société où le rêve est interdit, considéré comme une perte de temps => poète = figure de la marginalité; Donnera naissance à l’image du poète maudit pour la génération suivante .
-Grandes ailes blanches : instrument de l’oiseau pour se mouvoir, pour aller vers autre chose. Par analogie, les ailes représentent aussi l’inspiration ou les mots du poète qui lui permettent de s’exprimer (donc d’aller vers autre chose). Ici bas, les ailes n’ont plus de fonction; L’oiseau est cloué au sol ce qui pourrait signifier que le poète dans la société n’a pas de rôle à jouer ou se sent mal à l’aise.
-comme des avirons : comparaison. Instrument qui permet d’avancer. Sans cet instrument, stagnation dans l’eau.
-traîner: implique une salissure du blanc, de la pureté. Confrontation de la poésie au monde social. Salissure de la poésie par la corruption humaine.
-Poésie qui ne peut plus s’exprimer. Problématique essentielle du poète romantique : comment trouver l’inspiration dans un monde trivial et prosaïque, dans la réalité quotidienne ?
–gauche et veule: poète qui se débat dans la société. Inadaptation au monde, intégration impossible
–Bec = pour s’exprimer. Outil de la parole et de l’expression. Société qui cloue le bec au poète, qui l’empêche de s’exprimer.
-La société tue l’inspiration : brûle-gueule, terme trivial (= petite pipe, soit q. chose qui fume, qui chauffe, qui brûle, qui empêche de respirer, et qui pue). Nombreuses connotations péjoratives
Conclusion : Poésie qui se lit plusieurs fois, avec de nouveaux sens qui apparaissent au fil du décryptage des symboles : première lecture racontant une petite scène de vie en mer, seconde lecture symbolique qui nous amène à percevoir l’amour de Baudelaire pour son art, car c’est la poésie qui lui permet de se libérer de la pesanteur terrestre (comme l’oiseau), de l’ennui de la vie quotidienne, de la corruption du monde social. Cependant, la poésie ne suffit pas à fuir le spleen, comme le dernier vers du poème nous le fait entendre (pessimisme final).
Ouverture : Poème qui suit « l’Albatros » = « Elévation » : on retrouve cette thématique aérienne, cette recherche désespérée de Baudelaire pour échapper au mal de vivre :
Le poète en oiseau : l’Albatros de Baudelaire
Le dix-neuvième siècle est marqué par la succession de différents mouvements littéraires : le romantisme est contesté par les fondateurs du Parnasse et après eux, les Symbolistes définiront un nouvel art poétique. Charles Baudelaire se trouve précisément au carrefour de ces trois courants . Son recueil Les Fleurs du Mal qui paraît 1857 fit scandale et lui vaudra un procès retentissant ; Le poète sera contraint de censurer des pièces jugées scandaleuses et de livrer ainsi , au public, une version expurgée de son recueil . Dans la continuité du mouvement romantique, on retrouve des thématiques communes et notamment l‘expression du mal de vivre, qui chez Baudelaire, s’amplifie et devient le Spleen . Nous verrons comment Baudelaire, dans « l’Albatros », propose une image du poète en oiseau; Il oppose l’Idéal au Spleen, et met en scène une vision pessimiste de la société, dans laquelle le poète ne trouve pas sa place.
Questions possibles qui pourraient servir d’axes de commentaire : Comment analysez-vous la comparaison du poète à un albatros dans ce poème ? Comment Baudelaire met-il en valeur le génie du poète ? Quels sentiments se dégagent ici à l’égard de l’albatros et pourquoi ? Quelle est la place et la fonction du poète dans la société ? Comment s’expriment dans cette poésie le Spleen et l’Idéal ?
Première lecture de « l’Albatros » : se lit comme une petite histoire au décor maritime. Un navire et ses hommes d’équipage traversent les océans : pour passer le temps, ils s’amusent avec des albatros. Les quatre quatrains semblent raconter une histoire et sont construits comme un récit avec notamment un narrateur au point de vue externe (ne s’implique pas) dans les 2 premiers quatrains : pas d’implication de l’émetteur, pas de lyrisme.- Dans le 3ème quatrain on repère les marques du discours avec la présence d’un style direct (présence de « ce » : démonstratif déictique, propre à une situation de communication orale (on nous montre quelque chose à voir) + exclamation x3 => caractère insistant. Type exclamatif propre au discours oral, au registre oratoire
énonciation propre au récit : situation spatiale établie (dans le ciel, sur le navire) et -établissement du cadre temporel .Le. début du poème par un adverbe de temps qui marque la répétition, l’habitude, la lassitude.Le poème se présente donc à la 1ère lecture comme la narration d’une scène de la vie en mer. (rappel : Baudelaire a voyagé dans les îles).
–Au v.13, une analogie (comparaison explicite avec l’outil de comparaison « semblable à ») invite à réinterpréter la scène évoquée dans les 3 premiers quatrains: “Le Poète est semblable au prince des nuées“.Cette analogie opère le passage de l’anecdote à l’allégorie et invite à voir une nouvelle signification morale et philosophique.
– « prince des nuées » et « rois de l’azur » : l’albatros est personnifié par une figure de style, la périphrase noble, poétique pour idéaliser l’image du poète ; De plus l’oiseau est-caractérisé par des sentiments humains : indolent, maladroit, honteux : ces adjectifs participent à la personnification de l’animal comme symbole du poète
La -lecture de la poésie peut se faire sous un nouvel angle, à travers tout un réseau de symboles. Baudelaire devance ainsi l’esprit de la poésie symboliste :
Si l’ Albatros est le symbole du poète, l’ Equipage représente la société qui ne comprend pas le poète et se moque de lui; Le Navire est le symbole de la matérialité et le Ciel celui de la spiritualité. Quant au gouffre, il symbolise la mort .
L’oiseau et le poète ont en commun la plume, l’outil de liberté. La plume de l’albatros l’aide à voler, celle du poète lui permet d’écrire : pour tous les deux, c’est le seul moyen d’être libre, de vivre un idéal.
– vastes : adjectif qui caractérise l’animal et le poète par une connotation d’ampleur = capacité d’expansion (pour le poète, expansion = figure de l’hyperbole, adjectifs qualificatifs), qui prend la place qu’il lui faut, dans son univers idéal : le ciel, c’est l’espace de liberté, comme la feuille.
– oiseaux des mers : périphrase. Pluriel « des mers » : universalité par le pluriel => Pouvoir sur le monde.
Dans la symbolique traditionnelle, l’oiseau représente les états spirituels et supérieurs de l’être : il est celui qui détient la connaissance spirituelle.
-Supériorité physique (oiseau = au-dessus). Le poète est donc témoin de la société, il dénonce les travers humains
– se rit, hante : supériorité du poète dans son domaine. Idée d’invincibilité du poète lorsqu’il se trouve dans son élément : le Ciel . Alors qu’il est démuni et infirme lorsqu’il se trouve au milieu des hommes , sur le navire qui représente la vie en société.
-4 quatrains + vers en alexandrins => ampleur et noblesse du rythme : pureté dans la forme
-Poète avec majuscule : idéalisation du monde des poètes, noblesse du monde de l’esprit
– périphrases nobles : appartenance à un autre univers, celui de la noblesse d’âme (roi, prince), celui d’un univers de couleur et d’abstrait (nuées, azur).
–prince des nuées : allusion à l’expression prince des poètes, distinction attribuée au poètes courtisans au XVIème siècle (ex : Ronsard). Baudelaire s’inscrit donc dans la lignée des grands poètes
-ses ailes de géant : anacoluthe (figure de style créant une rupture grammaticale avec le vers précédent).
=> effet de surprise // liberté du poète de pouvoir exprimer les mots sans se plier aux exigences syntaxiques, donc aux exigences sociales
cpdt, malgré cet idéal poétique, le poète ne peut s’épanouir complètement : la société lui pèse, elle cherche à l’empêcher de s’exprimer, par sa dureté et sa trivialité. Le poème finit sur une touche pessimiste (on l’empêche de marcher) : Baudelaire n’échappe pas au spleen qu’il cherchait pourtant à fuir avec la poésie.
L’albatros est victime de la trivialité du monde et de la société. Le registre réaliste présent dans la poésie nous invite à lire ici l’expression du spleen du poète, mal dans la vie.
adjectifs et adverbes volontairement péjoratifs à partir du moment où le poète met un pied dans la société et tout ce qu’elle a de plus vulgaire et trivial, cad la vie quotidienne
-rime alternée planche / blanche : exprime bien l’opposition entre les deux mondes, celui de la poésie, et celui de la réalité. les planches : Terme trivial, signifie q. chose de construit, qui s’oppose au ciel : symbole de la civilisation.
– comique et laid : ce qui n’appartient pas au domaine de la poésie noble et pure. Allitération en /k/ => tonalité coupante, blessante (caractère trivial et hostile de la société). L’albatros n’est plus dans son environnement, il perd ses qualités, sa grâce et devient maladroit ; il est la risée et la victime des hommes d’équipage ; Idée d’un poète victime et souffre-douleurs .
-rejet => prennent en début de vers : connotation de capture, d’emprisonnement
-structure grammaticale : hommes sujets, donc qui détiennent le pouvoir, bourreaux / albatros compléments d’objet, donc victimes
-pour s’amuser : CC de but, antéposé + encadré par les virgules (apposition) : plusieurs procédés grammaticaux qui cherchent à mettre en évidence la cruauté des hommes, gratuite.
-les hommes : aspect généralisant de l’être humain (tous les hommes) : pas un seul ne sort du lot => universalité dans la cruauté humaine
-présent de vérité générale dans le poème : caractère atemporel : universalité de la chose
-Naguère + imparfait qui volait : rupture avec un temps prospère et insouciant, celui de l’écriture
-opposition : ciel (lieu d’écriture et d’inspiration, idéal) VS terre (lieu de réalité, spleen)
-laissent placé en début de vers (enjambement) => abandon du poète, victoire impossible contre la société (fatalisme ?)
-de voyage : voyage vers quoi ? vers la mort. Fatalisme de la condition humaine
-le navire = symbole de la société, de la terre, de la vie quotidienne.
-glissant = allitération en /s/ + participe présent => sensation de lenteur, symbole de la vie terrestre où l’on s’ennuie (+ souvent : aspect itératif : monde de répétition, et d’ennui)
-sur des gouffres amers : allitération en /R/ : connote une dureté, la chute : termes péjoratifs propres au spleen. Marche lente vers la mort, rappelle le fleuve qui mène à l’enfer (le Styx)
-Indolent : terme polysémique, issu de dolor = souffrance. Qui ne souffre pas/ qui ne fait pas souffrir/ qui n’est touché de rien (insensible)/ nonchalant, paresseux => Lecture réaliste => « touché de rien », nonchalant. Lecture symbolique : poète qui ne travaille pas avec la sueur de son front => insupportable pour la société humaine qui du coup se déchaîne contre le poète ?
– Société où le rêve est interdit, considéré comme une perte de temps => poète = figure de la marginalité; Donnera naissance à l’image du poète maudit pour la génération suivante .
-Grandes ailes blanches : instrument de l’oiseau pour se mouvoir, pour aller vers autre chose. Par analogie, les ailes représentent aussi l’inspiration ou les mots du poète qui lui permettent de s’exprimer (donc d’aller vers autre chose). Ici bas, les ailes n’ont plus de fonction; L’oiseau est cloué au sol ce qui pourrait signifier que le poète dans la société n’a pas de rôle à jouer ou se sent mal à l’aise.
-comme des avirons : comparaison. Instrument qui permet d’avancer. Sans cet instrument, stagnation dans l’eau.
-traîner : implique une salissure du blanc, de la pureté. Confrontation de la poésie au monde social. Salissure de la poésie par la corruption humaine.
-Poésie qui ne peut plus s’exprimer. Problématique essentielle du poète romantique : comment trouver l’inspiration dans un monde trivial et prosaïque, dans la réalité quotidienne ?
–gauche et veule : poète qui se débat dans la société. Inadaptation au monde, intégration impossible
–Bec = pour s’exprimer. Outil de la parole et de l’expression. Société qui cloue le bec au poète, qui l’empêche de s’exprimer.
-La société tue l’inspiration : brûle-gueule, terme trivial (= petite pipe, soit q. chose qui fume, qui chauffe, qui brûle, qui empêche de respirer, et qui pue). Nombreuses connotations péjoratives
Conclusion : Poésie qui se lit plusieurs fois, avec de nouveaux sens qui apparaissent au fil du décryptage des symboles : première lecture racontant une petite scène de vie en mer, seconde lecture symbolique qui nous amène à percevoir l’amour de Baudelaire pour son art, car c’est la poésie qui lui permet de se libérer de la pesanteur terrestre (comme l’oiseau), de l’ennui de la vie quotidienne, de la corruption du monde social. Cependant, la poésie ne suffit pas à fuir le spleen, comme le dernier vers du poème nous le fait entendre (pessimisme final).
Ouverture : Poème qui suit « l’Albatros » = « Elévation » : on retrouve cette thématique aérienne, cette recherche désespérée de Baudelaire pour échapper au mal de vivre :
Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides.
Derrière les ennuis et les vastes chagrins
Qui changent de leur poids l’existence brumeuse.