06. octobre 2025 · Commentaires fermés sur La parole libératrice : authenticité, sincérité et quête de vérité · Catégories: Spécialité : HLP Première · Tags: ,

Peut-on se libérer par la parole :   pourquoi , comment  et dans quelles circonstances ?  

Dans la vie quotidienne, on distingue plusieurs usages de la parole qui permettent de libérer le sujet ; dans le cadre juridique, le policier, l’avocat vont demander à l’accusé de passer aux aveux; cette parole doit le libérer d’une partie de sa culpabilité; en avouant son crime, il devient coupable et soulage, en partie , sa conscience;  cette notion d’aveu est en grande partie héritée des pratiques religieuses ; Il est en effet couramment admis que les pêcheurs doivent, pour être absous de leurs pêchés, les confesser; L’Eglise instaure d’abord une pratique collective de la confession  au Moyen-Age avant de mettre en place des entretiens entre le prêtre et ses fidèles , entretiens durant lesquels la parole est abritée par les parois du confessionnal et protégée par le secret de la confession.  Saint- Augustin écrit un ouvrage intitulé Confessions qui est considéré comme l’ancêtre de l’autobiographie. Les groupes de paroles peuvent constituer une aide non négligeable pour certaines personnes en proie à des addictions ou qui souhaitent évoquer un problème . Les Alcooliques anonymes par exemple, fonctionnent sur le principe du récit public. La modélisation religieuse demeure cependant très présente dans certains groupes de paroles  . Il existe aussi  des hotline  ou des numéros verts qui permettent de parler avec un interlocuteur souvent anonyme et bienveillant comme le 3919 SOS enfants en danger  accessible 24h/24  ou le 119 SOS femmes en détresse ,  ou encore le 3117 pour signaler une attitude suspecte ou une agression  dans un transport en commun . Plus »

20. septembre 2025 · Commentaires fermés sur Humanisme et transformations de la vision de l’homme · Catégories: Spécialité : HLP Première · Tags:
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Pour mieux comprendre cette période importante dans l’évolution des idées, il faut tenter de se souvenir de l’état de nos connaissances sur le monde afin de mesurer les bouleversements liés aux grandes découvertes et aux nouvelles inventions . Si l’homme a pu commencer à repenser sa place dans le monde , c’est parce qu’il a pris conscience que les limites du monde qu’il imaginait n’étaient pas celles qu’on lui avait enseignées ( découverte de nouvelles terres, de nouveaux pays et de nouvelles religions ) ; ainsi dans des domaines aussi différents que la zoologie, les sciences et techniques, la philosophie, les mathématiques, les langues anciennes, la botanique , chaque découverte a eu un impact considérable . Prenons quelques exemples concrets en images…

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Les peintres de la Renaissance continuent de s’inspirer de sujets antiques ou mythologiques comme ici la naissance de Vénus mais en même temps, ils représentent leur monde en insérant des détails vestimentaires d’époque ou en appliquant les lois de la perspective . Les sujets d’inspiration religieuse sont concurrencés par des sujets d’inspiration profane ; la mythologie est également la trace d’une réapropriation de la matière antique avec en France, la redécouverte des textes grecs par les poètes et traducteurs de la Pléiade comme Guillaume Budé (une collection de livres de grec porte d’ailleurs toujours son nom )

Dans le domaine des sciences, on commence à répertorier la diversité  des espèces animales et végétales et peu

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à peu, certaines croyances disparaissent; on découvre par exemple que la description de certains  animaux monstrueux aux limites de l’univers correspond aux animaux comme

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l’Autruche,les perroquets  le zèbre ou les éléphants . Les savants ne sont pas encore spécialisés mais on voit apparaître à travers l’Europe, des échanges et des correspondances au sujet de la faune et de la flore des pays découverts; peu à peu , on va prendre l’habitude d’embarquer des savants à bord des bateaux afin qu’ils procèdent à un inventaire des espèces nouvelles . Un esprit scientifique voit ainsi progressivement le jour .

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Une imprimerie

Dans le domaine de la diffusion des connaissances, la découverte de l’imprimerie va révolutionner les pratiques de l’époque.Alors que les moines recopiaient à la main au fond de leurs monastères les livres anciens pour de riches clients, les ouvriers vont effectuer en quelques heures le travail de plusieurs mois . la lecture va se développer avec le développement de la diffusion des livres imprimés et permettre ainsi à une grande partie de population (essentiellement l’aristocratie )  d’avoir accès aux connaissances .

Les progrès des  sciences et des techniques vont avoir des conséquences sur la mesure du temps avec notamment l’invention de l’horlogerie mécanique : la mesure du temps devient mathématique et ne dépend plu sise éléments naturels comme le soleil (variable ) ou la lune . Les rythmes naturels vont donc être concurrencés par une mesure

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immuable : ce qui va avoir des conséquences importantes sur le plan de la perception  de notre existence et de notre condition mortelle. Le développement des Vanités et autres Mémento Mori reflète cette inquiétude de l’homme face à l’écoulement inexorable du temps , marqué par des instruments comme l’horloge ou la montre .

A cette époque, la notion de fantastique n’est pas la même qu’aujourd’hui mais l’esprit humain a toujours cherché à recomposer le monde et à l’imaginer autrement. Certains artistes vont développer une vision du monde très personnelle qui vont servir de modèles et de références pour les générations suivantes ; C’est le cas de ces portraits très particuliers d’Arcimboldo qui sont demeurés célèbres . Peintre italien,  appartenant au duché de Milan, il rend hommage à des membres de la cour; la variété des fruits et légumes qu’il associe pour former ses têtes reflète la puissance de l’empire des Habsourgs auxquels ils sont dédiés.

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02. septembre 2025 · Commentaires fermés sur Les critères de réussite du commentaire littéraire · Catégories: Fiches méthode · Tags: ,
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Comment savoir si son commentaire littéraire est réussi ? Je vous conseille d’examiner les points suivants afin de déterminer si vous avez suivi ou pas les critères  de réussite de cet exercice . Un commentaire doit comporter une introduction et une conclusion visiblement séparées du développement ; ce dernier est formé de paragraphes argumentés qui contiennent trois types d’éléments : des citations extraites du texte en nombre suffisant et intégrées dans des phrases construites , des observations stylistiques basées le plus souvent sur  des procédés d’écriture mis en relation avec des interprétations ,c’est à dire des propositions d’explications et d’analyses du sens du texte . 

Voici quelques exemples de grilles qui proposent des barèmes d’évaluation de cet exercice.  Les différentes  lettres qui apparaissent sur vos copies sont O comme organisation sur 4 pts , C comme citations, S comme style pour évaluer le repérage des procédés d’écriture , analyses stylistiques et I comme interprétations  dans la partie à 8 points   et enfin E comme expression globale sur 4 points. 

Le commentaire littéraire : 16 points

Les attentes du commentaire littéraire:  voilà une reprise du barème utilisé au baccalauréat.

La notation évalue 3  principalement compétences : 

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  •     la composition et l’organisation (4 points),
  •     la pertinence du contenu (8 points)
  •     l’expression (4 points).

Composition et organisation : 4 points 

4 points : la copie comporte un paragraphe d’introduction, un paragraphe de conclusion et au moins deux parties, elles-mêmes structurées, correspondant aux idées directrices.

2 points : la copie comporte une introduction, une conclusion et deux parties sans structure interne.

1 point : la copie ne présente qu’une organisation apparente, sans cohérence réelle.

0 point : la copie est incomplète ou vraiment très brève.

Contenu : 8 points en fonction du texte à commenter.

6 à 8 : présence de citations bien choisies , de procédés d’écriture nommés avec exactitude et d’interprétations correctes

4 à 6 : l’un des points est manquant ou défaillant 

2 à 4 : les citations en sont pas intégrées ou absentes, les procédés d’écriture non relevés ou en nombre très insuffisant et interprétations non étayées par le texte (hypothèse de lecture fantaisistes ) 

0 à 2 : absence de citations, de relevés stylistiques et/ou d’interprétations . 

Expression: 4 points 

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4 points : expression globalement correcte (nombre de fautes limité)

3 points : expression syntaxique globalement correcte, mais orthographe comportant quelques négligences.

2 points : syntaxe et ponctuation maladroites, orthographe négligée, mais n’altérant pas gravement la compréhension.

1 point : langue très incorrecte, rendant  difficile la compréhension.

0 point : copie totalement incompréhensible.

02. septembre 2025 · Commentaires fermés sur Présenter une oeuvre intégrale à l’oral du bac · Catégories: Fiches méthode · Tags: ,

Depuis la session de juin 2020, l’oral du bac français comporte , après la lecture linéaire d’un texte et la question de grammaire , une seconde partie notée sur  8 points. Ce  second temps s’articule en deux  étapes : le candidat présente un court exposé de moins de 3 minutes sur  l’œuvre qu’il a choisie  librement: Il s’agit d’une œuvre traitée durant l’année parmi les œuvres au programme ( 4 œuvres chaque année ) ou parmi les lectures proposées par le professeur ( 4 au minimum: ) ou il peut s’agir d’un livre que vous avez particulièrement apprécié ou dont vous avez envie de parler   ; cette présentation  initiale  devra faire apparaître d’emblée les raisons pour lesquelles le candidat a choisi de présenter ce livre . Il est donc exclu d’en proposer uniquement un résumé ; Il est largement préférable de présenter un argumentaire personnel  qui récapitule les points suivants ..il s’agit avant tout de restituer une expérience personnelle de lecture Plus »

02. septembre 2025 · Commentaires fermés sur Le programme de première en français · Catégories: Fiches méthode · Tags: ,

L’ année  de première en français reste marquée par les épreuves  dites anticipées du baccalauréat ; vous les connaîtrez bien tôt sous le nom d’EAF qui est l’acronyme de Épreuves Anticipées de Français. C’est la dernière année du cycle secondaire où l’enseignement du français est obligatoire. Mais si la matière en elle-même disparaît en terminale au lycée  , beaucoup d’écoles dans l’enseignement supérieur intègrent des  cours de français ou de communication, que ce soit en BTS, en BUT , dans les écoles d’ingénieurs et même à l’université.

 La nature de l’examen final ne change pas ; vous devrez passer d’abord  une épreuve écrite ( durée 4 heures et coefficient 5 ) . Vous traiterez au choix un commentaire sur un texte inconnu  ou une dissertation qui porte sur une question d’ensemble à partir d’une des œuvres au programme et des parcours associés. Enfin vous présenterez   une épreuve orale qui est composée de 5 exercices différents (préparation 30 minutes ; durée 12 minutes pour la première partie avec lecture  à voix haute, explication linéaire d’un texte étudié en classe,  et répondre oralement à une  question de grammaire sur ce texte . La seconde partie de l’oral dure environ 8 minutes et comporte un expos de moins de 3 minutes qui rend compte de votre expérience de lecture d’un livre  et  vous terminerez par un  entretien avec l’examinateur ) . Cet  oral sera lui aussi affecté d’un coefficient 5. 

Quel est le programme obligatoire ?

Au niveau national, les 4 objets d’étude: poésie, théâtre, roman et littérature d’idées sont abordés à l’aide de 4 œuvres  (une par objet d’étude ) . L’année sera donc découpée en 4 temps : le premier , de septembre à novembre , sera consacré à la découverte de Rimbaud , un jeune poète révolté  siècle et à l’étude en classe de ses poèmes  .  Le parcours s’intitule Emancipations créatrices . Ensuite, à partir du retour des congés de Toussaint, nous envisagerons les 3 autres objets d’étude qui sont : Le roman et le récit du Moyen-Age à nos jours , le théâtre et la poésie du XIX à nos jours et la littérature d’idées. Les œuvres choisies pour être étudiées en classe et servir de base pour le bac  par le professeur cette année sont dans l’ordre chronologique, Le Discours sur la servitude volontaire de La Boétie pour la littérature d’idées  ; au théâtre , nous lirons On ne badine pas avec l’amour de Musset  avec une réflexion autour des Jeux du cœur te de la parole   et pour la poésie  Les  Cahiers de Douai de Rimbaud . Nous terminerons avec un roman :   Les vrilles de la Vignes et Sido de Colette . Le parcours associé évoque la célébration du monde , les liens entre l’Homme et la Nature .

En plus de ces 4 livres obligatoires qu’il vous faudra lire et bien connaître , le professeur vous  fera des suggestions de lectures tout au long de l’année et il vous conseille d’effectuer  des lectures personnelles pour accompagner les parcours choisis . Ces lectures appelées cursives   vous seront d’une grande  aide au moment de l’examen car elles vous permettront de parler avec l’examinateur et de répondre à ces questions . 

Bon courage pour cette année qui sera marquée par le bac de français. Sachez que vos notes de français sont toujours particulièrement regardées au moment des choix dans les filières sélectives type écoles d’ingénieurs, BTS ou BUT; À notes égales en mathématiques et dans les matières scientifiques , ce sont vos résultats obtenus aux EAF qui feront la différence . Vous aurez , cette année , du travail dans toutes les matières mais gardez bien présent à l’esprit que vous vous préparez à un examen exigeant dans quelques mois : le bac de français. Alors n’attendez pas la fin de l’année pour vous préparer ; un travail régulier est votre meilleure arme pour réussir . 

08. février 2025 · Commentaires fermés sur Les aveux d’une passion tragique : le face à face Phèdre -Hippolyte II, 5 · Catégories: Lectures linéaires, Première · Tags: , ,

( Voir l’introduction proposée sur le digipad Badine ) 

La tragédie racinienne libère la parole amoureuse qui marque souvent une  forme de transgression :  La longue  tirade de Phèdre commence par une déclaration d’amour à Thésée qui , par glissements successifs, finit par révéler , sa passion pour le “charmant” Hippolyte. Le jeune homme , honteux , pense tout d’abord qu’il s’est mépris et qu’il a accusé , à tort sa belle-mère d’être amoureuse de lui .  Alors qu’il souhaite se retirer , Phèdre entreprend  de le détromper et avoue, cette fois sans détour, son amour . Elle ne joue pas avec les mots et dévoile les plus sombres secrets de son coeur .

 Texte : De ” Ah cruel, tu m’as trop entendue..à délivre l’univers d’un monstre qui t’irrite.” Comment Phèdre exprime-t-elle ici, à la fois , les souffrances de sa passion  et son caractère monstrueux ?  Comment sa parole se libère-t-elle et met-elle son coeur à nu ?
Le premier  mouvement présente , une fois de plus , Phèdre comme la  victime d’une fatalité incontrôlable, le jouet de Dieux cruels.

L’émotion est ici poussée à son paroxysme, comme le montrent les points d’exclamation et l’interjection « Ah », ainsi que le terme d’adresse « Cruel » qui paraît ici  désigner ici le jeune homme  .  On entend davantage la cruauté d’un amour non réciproque et la cruauté de la souffrance qu’il inflige, malgré lui , à sa belle-mère, par sa simple vue.  La ponctuation expressive marque ici  la violence verbale et annonce la violence  physique.- La présence de verbes injonctifs semble  traduire l’ emportement de l’héroïne contre la fatalité de cette passion. .  Phèdre a désormais le pouvoir, celui de la parole libératrice : « Connais », « ne pense pas » : le temps n’est plus à la réflexion. Et la parole de Phèdre s’apparente à une révélation qui montre ce qu’on ne devait pas voir, qui met à jour ce qui était dans l’ombre . –  D’ailleurs le terme ” fureur” qui peut être considéré comme  manifestation de l’Hybris, cet orgueil humain  démesuré, propre à la tragédie, est également une manière de rendre visible ce qu’on ne voyait pas  : Phèdre est à présent hors de contrôle. La fureur désigne donc l’emportement du personnage : elle semble poussée par une force incontrôlable, propre à la passion . Le contraste est particulièrement frappant avec son aveu , qui tient en 2 mots : « J’aime ». et qui, pour le coup, est d’une grande sobriété alors que le mouvement précédent annonçait une montée en puissance . Cette sorte de chute , d’adoucissement , montre que  c’est bien là l’essentiel de ce qu’elle voulait dire . Et pourtant, ce « J’aime »  ressemble à une bombe à retardement. La  précision en fin de vers « je t’aime » paraît touchante et fait résonner aux deux extrémités de l’alexandrin l’amour de Phèdre . Pourtant , très vite il apparaît que cet amour doit être combattu car il a un  caractère infamant (dégradant )  : « fol amour », « trouble ma raison », « lâche complaisance », « poison », « feu fatal ». On retrouve ici le champ lexical de l’aliénation provoquée par la passion qui, pour les anciens, est assimilée à une malédiction divine .
Phèdre se présente  ici comme une victime de la malédiction de Vénus, lancée contre toute sa lignée. Le terme « dieux » revient par trois fois, renforcé par la métaphore « vengeances célestes » et la métonymie «contre tout mon sang ». – Pour insister sur le caractère odieux de la machination dont elle est victime, elle se qualifie de « faible mortelle », sorte d’antithèse qui vient en contrepoint de « dieux » et qui démontre son impuissance ; Le registre pathétique est déployé pour faciliter la compassion du spectateur,  qui , avec la terreur , est  le ressort essentiel du spectacle tragique comme le démontre Aristote . Le spectateur, pour pouvoir s’émouvoir du sort de Phèdre doit   considérer l’héroïne tragique comme une victime d’une fatalité qui la dépasse.  Le personnage explique donc l’origine de cette passion incontrôlable , pour mieux tenter de se justifier aux yeux du spectateur et présente  cet amour qui lui fait horreur comme le montre l’acmé de ce premier mouvement : « Je m’abhorre encore plus que tu ne me détestes » :  formule frappante où on note , à la  fois une gradation descendante et  des effets d’ hyperbole. le verbe abhorrer signifiant un rejet très fort d’elle-même : elle se juge elle même coupable et se dégoûte.
–  On retrouve également dans cette tirade l’idée que Phèdre a tenté de se prémunir contre cette passion  mais que ces précautions ont été inutiles “ inutiles soins  ”  ce qui renforce l’ironie tragique : elle est justement confrontée avec cette arrivée à Trézène à ce qu’elle voulait “fuir ” : la tragédie devient  un piège qui se referme sur un personnage et plus il cherche à éloigner le péril, plus le filet se resserre autour de lui  . On voit donc ici qu’elle mène une lutte inutile contre elle-même. –  Alors que le présent dominait le premier mouvement, c’est le  passé qui est dès lors employé (passé composé + imparfait). : Phèdre se remémore la façon dont elle a cherché à lutter et fuir cet amour qui s’imposait à elle.- Elle cherche ainsi à prouver qu’elle n’est pas à l’origine de ses sentiments monstrueux, qu’elle n’a pas subi passivement le feu de la passion qui s’est mis à la consumer : elle a tenté d’agir en chassant le jeune homme ; Le champ lexical de la haine montre qu’elle l’a persécuté : «fuir », «chassé », «odieuse », «inhumaine », «j’ai recherché ta haine », « tes malheurs ». Cette idée est corroborée par le verbe « résister »  mais la femme de Thésée a échoué avec cette stratégie ” Tu me haïssais plus, je ne t’aimais pas moins ”  Le dramaturge a  combiné  ici trois procédés d’écriture pour obtenir un effet maximal ; l’effet de chiasme avec ce croisement Je  et Tu , l’ antithèse avec l’opposition haïr et aimer et enfin , la litote car ” je ne t’aimais pas moins ” signifie qu’elle ne parvient pas à chasser cet amour  ;  ce vers illustre  ainsi les limites de cette lutte interne. Racine montre ensuite , de manière assez traditionnelle, les manifestations physiques de cette passion destructrice : ” J’ai langui, j’ai séché, dans les feux , dans les larmes ”  Un nouveau chiasme ( languir est associé à larmes et signifie être triste et le verbe sécher est associé à l’action du feu ) matérialise  les douleurs de Phèdre .- Malheureuse, elle inspire la pitié et elle implore Hippolyte ; La proposition subordonnée circonstancielle  de condition « Si tes yeux un moment pouvaient me regarder » a des allures de prière.   Cette didascalie interne laisse imaginer l’attitude du jeune prince : en effet, on peut imaginer qu’il a détourné les yeux, sous le coup de cette révélation ; La honte qu’il ressent est d’avoir pu, à son corps défendant, inspirer cette passion à celle qu’il respecte comme étant l’épouse de son père .


Mouvement 2 : une nouvelle étape dans cet aveu  : Phèdre revient sur la force qu’elle subit comme une fatalité . Les questions rhétoriques montrent qu’elle n’agit pas cette fois, de son plein gré  mais poussée par des circonstances exceptionnelles . ” cet aveu si honteux, le crois-tu volontaire ? ” le ton ici n’est plus celui de la supplique . La reine  fait retour sur sa situation qui  vient d’évoluer et met en avant son rôle de mère protectrice; En effet, en apprenant la  “fausse “mort de Thésée son mari , elle craint  les luttes pour le pouvoir; elle a peur que son beau-fils cherche à éliminer d’autres héritiers potentiels les  jeunes enfants qu’elle a eux avec Thésée. Elle venait donc le prier “de ne le point haïr ” . On retrouve ainsi, un parallélisme de situation: elle le supplie , en quelque sorte, deux fois: une première fois en tant que mère et une seconde fois, en tant que femme amoureuse . Cette situation rappelle que les tragédies de Racine sont toujours sous-tendues par des drames politiques : l’amour n’y joue pas un rôle de premier plan.La ponctuation exclamative  marque à nouveau l’effervescence qui anime la jeune femme. L’interjection « Hélas » souligne la perte de toute forme d’illusion et ne laisse à Phèdre que l’espoir d’une mort libératrice. 

Mouvement 3 : Un nécessaire sacrifice sur l’autel de la passion  . Elle conjure Hippolyte d’abréger ses souffrances grâce à de nouveaux verbes à l’impératif qui forment un parallélisme et une antithèse : « Venge-toi » / « Punis-moi » : de victime, elle devient coupable et présente sa mort comme une solution avantageuse alors que quelques instants plus tôt, elle venait plaider pour la protection de ses enfants; On remarque la contradiction du personnage en proie à un accès de folie passionnelle ; Souvent , sous l’effet de la passion, les sentiments se mêlent et et le discours peut paraître incohérent.   Sa prière fait appel aux qualités héroïques du jeune homme qui en la tuant, accède au même rang que son père et répète les exploits de ce dernier; On se souvient, en effet que Thésée est un chasseur de monstres célèbre et qu’il a accompli de nombreux exploits comme le fait de tuer le Minotaure . Hippolyte peut ainsi , symboliquement, se hisser au même rang que son père dont il devient le digne fils  . Le vers suivant  contient cette idée  « Délivre l’univers » est une hyperbole qui accentue la monstruosité de Phèdre et permet au jeune homme de “devenir un digne fils de héros ” c’est à dire d’agir, à son tour , en héros. En se jetant sur son épée, Phèdre fait appel, à la fois à son orgueil et à son sens du devoir . Le  champ lexical de l’amour  trouve encore sa place dans une sorte de gradation tragique  « un cœur trop plein de ce qu’il aime », « un odieux amour»: on assiste à une métamorphose de cet amour, qui correspond à la métamorphose monstrueuse de Phèdre elle-même : elle fait corps avec ses sentiments.  Le  vers résonne comme une sentence irrévocable.  Notons enfin qu’elle emploie une périphrase pour se désigner «  la veuve de Thésée » mettant en lumière  ainsi son statut de belle-mère. Elle se présente non seulement comme un “monstre  affreux “mais  ses paroles sont autant d’appels à la haine. Comme si, par ses mots, elle tentait de convaincre Hippolyte de passer à l’acte . Le tour présentatif “Voilà mon coeur” est à prendre à la fois au sens propre comme une didascalie interne : elle désigne sa poitrine comme cible. Mais on peut également y lire la thématique de l’aveu dans le sens où elle a mis son coeur à nu .Elle adopte une attitude héroïque en es déclarant “impatiente” de mourit pour pouvoir expier sa faute ; On retrouve ici la valeur chrétienne de l’expiation et du châtiment des offenses. Elle s’avance ici au devant de son trépas en demandant au jeune homme d’être l’instrument de sa mort ; Ce qu’il va refuser et son refus obliger aPhèdre à recourir au suicide . le rejet “Frappe ” donne uen allur etragique à cet impératif . Cependant l’héroïne anticipe un possible refus et se déclare , dès lors, prête à utiliser elle-même l’épée . Les trois raisons invoquées se complétent et sont quelque peu redondantes  : indigne de tes coups, ta haine , un sang trop vil ” ; On retrouve l’idée que la souffrance doit être supérieure à la mort et qu’un héros ne se salit pas les mains en tuant un ” monstre ” ; elle ne mérite pas de mourir de la main de son beau-fils et devra donc se tuer elle-même.  Cette scène se termine par la sortie précipitée de Phèdre qui , à la demande d’Hippolyte, entre dans le palais pour se cacher: ce qui met un terme à leur face à face. Ils ne se reparleront plus jamais jusqu’à la fin de la pièce. Après la mort du jeune homme, Phèder avouera alors à son époux toute la vérité avant de mourir , sosu l’effet du poison qu’elle a avalé.

 En conclusion : Phèdre, en se déclarant à Hippolyte, vient de franchir un point de non-retour. Déclenchant , à plusieurs reprises , la pitié du spectateur  elle s’inscrit dans cet aveu monstrueux comme une véritable héroïne tragique, victime de la fatalité et de l’hybris.  A la fois victime et  coupable, elle fait corps avec ses sentiments et envisage la mort comme remède à ses tourments.  Les paroles de Phèdre seront lourdes de conséquences et la tragédi eest en marche .   Cette épée  qui devait servir à tuer Phèdre va ensuite jouer un rôle crucial dans la tragédie car elle va servir de preuve à la tentative de viol dont Oenone, la confidente de Phèdre, va accuser Hippolyte .   Le quatrième acte s’ouvre, en effet , avec l’entrevue entre  Thésée et  Oenone qui accuse Hippolyte  : le roi reconnait l’épée de son fils entre les mains de la nourrice ” j’ai reconnu le fer, instrument de sa rage/ ce fer dont je l’armai pour un plus noble usage .” Thésée   convoque son fils et convaincu de sa culpabilité , il lui lance  ” il fallait en fuyant ne pas abandonner le fer , qui dans ses mains aide à te condamner . Un monstre marin sortdes flots à la demande de Neptune et tue le jeune homme innocent .La tragédie est en marche, et rien ne pourra plus l’arrêter. Cette épée est devenue l’agent du destin d’Hippolyte . Les paroles de Phèdre ont déclenché l’engrenage tragique.  

07. février 2025 · Commentaires fermés sur Défaite des maîtres et possesseurs : apprendre à repenser le monde avec la Science-Fiction ? · Catégories: Le livre du mois, Spécialité : HLP Première, Terminale spécialité HLP

La Science -fiction est un genre littéraire qu’on qualifie abusivement  de mineur et qui nous raconte des histoires de futur, de demain et nous permet de voyager dans des mondes et des civilisations différentes des nôtres; Au programme de terminale HLP , la notion de dystopie est l’une des formes que peut prendre la Science- Fiction . Les récits de  SF, nous préparent-ils au pire ? Ne s’agit -il pas de nous tendre un miroir déformant certes mais un miroir qui nous permet de nous observer en regardant l’Autre et d’entrevoir les dangers qui nous menacent : destruction de la planète et de nos ressources, robotisation de la société et déshumanisation du monde du travail, guerres incessantes et menace de destruction massive de l’espèce ne sont que quelques exemples de ce qui risque de nosu arriver . Le programme de Première aborde lui la question des relations de l’homme et de l’animal, la question fortement teintée d’actualité, du spécisme et de la protection des espèces vivantes ; Nous allons donc aborder ces deux points à l’aide du roman de Vincent Message. Une bonne manière de vous familiariser avec cette fable philosophique, c’est peut être de découvrir l’entretien qu’a accordé le romancier au magasine littéraire Diacritik , à la sortie de son livre en 2016.

Entrons dans le vif du sujet. Plus »

02. février 2025 · Commentaires fermés sur L’angoisse , atroce despotique, sur mon crâne incliné, plante son drapeau noir…: une version du Spleen baudelairien · Catégories: Terminale spécialité HLP · Tags: , ,

Ce vers  de Baudelaire tiré d’un poème de son recueil Les  Fleurs du Mal, paru en 1857 et  intitulé Spleen , décrit, avec les mots du poète, sa sensibilité et notamment sa vision de l’Angoisse et de son cortège de sensations . Pour travailler sur cette partie du programme de HLP qui touche à la fois, à l’expression de notre sensibilité, aux manifestations de notre vie intérieure, à la constitution et aux variations de notre Moi et également à l’influence des lieux et des paysages sur notre sensibilité , nous verrons tout d’abord quelques notions théoriques  autour des définitions de l’Angoisse avant d’aborder un corpus de textes poétiques . Plus »

02. janvier 2025 · Commentaires fermés sur Dystopies ou mondes à l’envers : quels modèles pour penser l’homme et représenter le monde ? · Catégories: Terminale spécialité HLP · Tags: ,

 Introduction : le fonctionnement de la dystopie

Depuis la fin du dix-neuvième siècle, la dystopie ou fiction qui prend comme base la création d’un nouveau monde, le plus souvent dans le futur , s’est imposée comme un moyen de mettre l’homme d’aujourd’hui face à certaines réalités .Elle se révèle un instrument pour la pensée  car elle nous délocalise; elle  figure un ailleurs imaginaire , différent dans l’espace et dans le temps et où la situation sociale et politique de l’humanité est présentée comme précaire , fragile, dégradée par rapport à celle que nous connaissons.La dystopie devient alors une arme pour notre esprit critique car elle nous tend un miroir déformant dans lequel nous pouvons saisir les dangers qui menacent l’humanité . Comme l’écrit Jorge Semprun dans la préface de la réédition de “Nous autres “ d’Eugène Zamiatine, “elle nie le présent, le dissout même , en projetant sur lui la lumière d’un avenir lointain et redoutable ‘ ; Souvent opposée à l’utopie, en tant que lieu idéal, la dystopie n’offre pas une voie d’imitation mais une voie de réflexion.

I Utopie/ dystopie

Alors que l’utopiedévoile des mondes imaginaires parfaits  qui fonctionnet selon  une égalité totale descitoyens  et une abolition de la propriété privée pour assurer le bonheur de chacun au service de tous, la dystopie présente des mondes où la privation de liberté est l’un des ingrédients essentiels ; Elle s’inspire de nombreuses idéologies politiques et philosophiques  et les pousse à leurs extrêmes . Ainsi le communisme va produire des dystopies dans lesquelles l’Etat sera présenté comme omnipotent, écrasant les individus, en leur imposant une pensée unique. Toute divergence est alors sévèrement réprimée . Ces mondes sont souvent contrôlés par une conscience centrale,  dictateur humain ou machine qui lit les pensées .La dystopie fonctionne alors comme un signal d’alarme, une sorte d’alerte en anticipant des dérives possibles des maux de notre monde contemporain .
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18. décembre 2024 · Commentaires fermés sur Cendrillon , mise en scène par Joël Pommerat · Catégories: Seconde · Tags: ,

Tout le monde a l’impression de connaître l’histoire de Cendrillon car les contes de fée alimentent notre imaginaire depuis fort longtemps . Mais quelle version connaissez-vous de ce conte et comment avez-vous compris l’adaptation proposée par le dramaturge Joël Pommerat ? Nous sommes bien loin de l’univers aseptisé de Disney .. Commençons par un petit tour d’horizon de la pièce : une petite fille perd sa maman et doit apprendre à vivre, avec son père ,  dans un nouvel environnement où elle ne paraît pas acceptée. L’ image de la  méchante belle-mère plane sur la tragédie familiale et Cendrillon souffre chaque jour un peu plus : reléguée dans une chambre sordide, sorte de caveau, elle paraît prisonnière de sa douleur . Peu à peu , Sandra devient Cendrillon et la matière du conte se mêle à la tragédie familiale qui est aussi une tragédie de la solitude et de la difficulté à accepter l’Autre. C’est également un apprentissage de la résilience et une sorte d’ essai  théâtral qui transforme la douleur de la perte en désir de vivre . Le deuil est le point de départ de la création théâtrale . Plus »