25. septembre 2017 · Commentaires fermés sur Un résumé très résumé d’Antigone d’Anouilh · Catégories: Première · Tags:

Tragédie en prose , en un acte. 

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l’auteur 

Le personnage baptisé le Prologue présente les différents protagonistes et résume la légende de Thèbes ( Anouilh reprend cette tradition grecque qui consiste à confier à un personnage particulier un monologue permettant aux spectateurs de se rafraîchir la mémoire. Le Prologue replace la pièce dans son contexte mythique). Toute la troupe des comédiens est en scène. Si certains personnages semblent ignorer le drame qui se noue, d’autres songent déjà au désastre annoncé. Antigone est présentée de manière plutôt péjorative comme une petit fille noiraude maigre est frêle; En face d’elle, le roi Créon est décrit comme robuste et travailleur. Il n’hésite pas à se retrousser les manches  

 

Antigone rentre chez elle , à l’aube, après une sortie nocturne. Elle est surprise par sa nourrice qui lui adresse des reproches. L’héroïne doit affronter les questions de sa nounou. Le dialogue donne lieu à un quiproquo . La nourrice prodigue des conseils domestiques ( ” il va falloir te laver les pieds avant de te remettre au lit”) tandis qu’Antigone évoque son escapade avec beaucoup de mystère ( ” oui j’avais un rendez-vous”) . Mais elle n’en dira pas plus.

La nourrice sort et Ismène, la sœur d’Antigone, dissuade cette dernière d’enfreindre l’ordre de Créon et d’ensevelir le corps de Polynice. Ismène exhorte sa sœur à la prudence (“Il est plus fort que nous, Antigone, il est le roi”) . Antigone refuse ces conseils de sagesse . Elle n’entend pas devenir raisonnable.

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La découverte du corps “honoré”

Antigone se retrouve à nouveau seule avec sa nourrice. Elle cherche à surmonter ses doutes et demande à sa nourrice de la rassurer. Elle tient aussi des propos ambigus pour ceux ( et c’est le cas de la nourrice) qui ne connaissent pas son dessein . Elle semble décidée à mourir et évoque sa disparition à mots couverts ” Si, moi , pour une raison ou pour une autre, je ne pouvais plus lui parler…”.

Antigone souhaite également s’expliquer avec son fiancé Hémon. Elle lui demande de le pardonner pour leur dispute de la veille. Les deux amoureux rêvent alors d’un bonheur improbable. Sûre d’être aimée , Antigone est rassurée. Elle demande cependant à Hémon de garder le silence et lui annonce qu’elle ne pourra jamais l’épouser. Là encore , la scène prête au quiproquo : le spectateur comprend qu’Antigone pense à sa mort prochaine, tandis qu’Hémon , qui lui n’a pas percé le dessein d’Antigone, est attristé de ce qu’il prend pour un refus. 

Ismène revient en scène et conjure sa sœur de renoncer à son projet. Elle affirme même que Polynice, le “frère banni”, n’aimait pas cette sœur qui aujourd’hui, est prête à se sacrifier pour lui et à lui donner sa vie alors même qu’il est mort.

Antigone avoue alors avec un sentiment de triomphe, qu’il est trop tard, car elle a déjà , dans la nuit, bravé l’ordre de Créon et accompli son geste ” C’est trop tard. Ce matin , quand tu m’as rencontrée , j’en venais.”

Jonas, un des gardes chargés de surveiller le corps de Polynice, vient révéler à Créon, qu’on a transgressé ses ordres et recouvert le corps de terre. Le roi veut d’abord croire à un complot dirigé contre lui et fait prendre des mesures pour renforcer la surveillance du corps de Polynice. Il semble également vouloir garder le secret sur cet incident : ” Va vite. Si personne ne sait, tu vivras.”

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Le chœur s’adresse directement au public et vient clore la première partie de la pièce. Il commente les événements en exposant sa conception de la tragédie qu’il oppose au genre littéraire du drame. Le chœur affiche également une certaine ironie et dévoile les secrets du dramaturge : “c’est cela qui est commode dans la tragédie. On donne un petit coup de pouce pour que cela démarre… C’est tout. Après on n’a plus qu’à laisser faire. On est tranquille. Cela roule tout seul.”

Antigone est traînée sur scène par les gardes qui l’ont trouvée près du cadavre de son frère. Ils ne veulent pas croire qu’elle est la nièce du roi , et  ils la traitent avec brutalité. Ils se réjouissent de cette capture et des récompenses et distinctions qu’elle leur vaudra.

Créon les rejoint. Les gardes font leur rapport . Le roi ne veut pas les croire. Il interroge sa nièce qui avoue aussitôt. Il fait alors mettre les gardes au secret, avant que le scandale ne s’ébruite.

Créon et Antigone restent seuls sur scène. C’est la grande confrontation entre le roi et Antigone. Le roi souhaite étouffer le scandale et ramener la jeune fille à la raison. Dans un premier temps , Antigone affronte Créon qui tente de la dominer de son autorité.

Les deux protagonistes dévoilent leur personnalité et leurs motivations inconciliables. Créon justifie les obligations liées à son rôle d’homme d’état . Antigone semble sourde à ses arguments : (Créon : Est ce que tu le comprends cela ? Antigone : ” Je ne veux pas le comprendre.”) . A court d’arguments Créon révèle les véritables visages de Polynice et d’Etéocle et les raisons de leur ignoble conflit. Cet éclairage révolte Antigone qui semble prête à renoncer et à se soumettre. Mais c’est en lui promettant un bonheur ordinaire avec Hémon, que Créon ravive  son amour-propre  et provoque chez elle un ultime sursaut. Elle rejette ce futur fade et se rebelle à nouveau. Elle choisit une nouvelle fois la révolte et la mort.

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Ismène , la sœur d’Antigone entre en scène alors que cette dernière s’apprêtait à sortir et à se dénoncer publiquement , ce qui aurait obligé le roi à l’emprisonner. Ismène se range aux côtés d’Antigone et est prête à mettre elle aussi sa vie en jeu. Mais Antigone refuse , prétextant qu’il est trop facile de jouer les héroïnes maintenant que les dés ont été jetés. Créon appelle la garde , Antigone clôt la scène en appelant la mort de ses cris et en avouant son soulagement ( Enfin Créon !)

Le chœur entre en scène. Les personnages semblent avoir perdu la raison, ils se bousculent. Le chœur essaye d’intercéder en faveur d’Antigone et tente de convaincre Créon d’empêcher la condamnation à mort d’Antigone. Mais le roi refuse , prétextant qu’Antigone a choisi elle-même son destin, et qu’il ne peut la forcer à vivre malgré elle.

Hémon vient lui aussi, ivre de douleur, supplier son père d’épargner Antigone, puis il s’enfuit. 

Antigone reste seule avec un garde. Elle rencontre là le “dernier visage d’homme”. Il se révèle bien mesquin, et ne sait parler que de grade et de promotion. Il est incapable d’offrir le moindre réconfort à Antigone. Cette scène contraste, par son calme, avec le violent tumulte des scènes précédentes. Apprenant qu’elle va être enterrée vivante, éprouvant de profonds doutes ( ” Et Créon avait raison, c’est terrible maintenant, à côté de cet homme, je ne sais plus pourquoi je meurs.” , Antigone souhaite dicter au garde une lettre pour Hémon dans laquelle elle exprime ses dernières pensées. Puis elle se reprend et corrige ce dernier message ( “Il vaut mieux que jamais personne ne sache”). C’est la dernière apparition d’Antigone.

Le messager entre en scène et annonce à Créon et au public la mort d’Antigone et la mort de son fils Hémon. Tous les efforts de Créon pour le sauver ont été vains. C’est alors le chœur qui annonce le suicide d’Eurydice, la femme de Créon : elle n’a pas supporté la mort de ce fils qu’elle aimait tant. Créon garde un calme étonnant . Il indique son désir de poursuivre ” la sale besogne ” et sort en compagnie de son page.

 Le chœur entre en scène et s’adresse au public : Il constate avec une certaine ironie la mort de nombreux personnages de cette tragédie : “Morts pareils, tous, bien raides, bien inutiles, bien pourris.”  . Il ne reste plus que Créon dans son palais vide . Les gardes , eux continuent de jouer aux cartes , comme ils l’avaient fait lors du Prologue. Ils semblent les seuls épargnés par la tragédie. 

18. septembre 2017 · Commentaires fermés sur Prévert dénonce la misère dans son poème · Catégories: Seconde
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Prévert devant sa caricature 

Jacques Prévert est un poète et scénariste parisien  né en 1900 à Neuilly-sur-Seine, et mort en 1977 . Auteur d’un premier succès, le recueil de poèmes, Paroles, il devint un poète populaire grâce à son langage familier et à ses jeux sur les mots. Ses poèmes sont depuis lors célèbres dans le monde francophone et appris dans les écoles françaises. Il a également écrit des scénarios pour le cinéma et il est l’auteur de répliques cultissimes pour les cinéphiles . Dans La grasse matinée, poème au titre ironique, il dénonce les débuts de la société de consommation qui met sous les yeux des plus pauvres des biens qu’ils n’ont pas les moyens de s’acheter; Ce qui pour Prévert les mène au crime. Il souligne ainsi le danger des inégalités de richesse.

12. septembre 2017 · Commentaires fermés sur Le poète selon Victor Hugo · Catégories: Première
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Hugo à 40 ans ..

Hugo ne fut pas seulement poète : romancier avec des romans réalistes  comme Les Misérables , dramaturge avec Ruy Blas ou Lucrèce Borgia  : on lui doit l’invention du drame romantique en 1827;  Il a été  également considéré comme le chef de file de ce mouvement romantique qui apparaît en France vers 1820. Poète lyrique qui célèbre la Nature et les saisons , poète engagé contre Napoléon III avec son recueil qui lui coûtera l’exil : Les Châtiments: il écrira également des poèmes épiques . En 1840, dans Les Rayons et les Ombres, il s’efforce de préciser quelles sont, selon lui, les fonctions d’un poète . Doit-il être un artiste détaché des contingent,ces matérielles  ou au contraire un homme de combat? Doit -il chanter les beautés du monde ou faire naître la révolte ? Tout dépend , en fait du contexte dans lequel s’inscrit l ‘oeuvre;: Voyons d’un peu plus près comment Hugo définit le poète idéal …

La première strophe donne le modèle des 5 autres ; ce sont des dizains d’octosyllabes aux rimes soit croisées, soit plates soit embrassées. Une versification classique mais un rythme bouleversé par l’usage des enjambements pour apporter une touche d’originalité à la prosodie; D’emblée , la première strophe dépeint une situation catastrophique:le champ lexical du malheur est fortement présent avec “temps contraires ” v 1 “malheur” deux fois en anaphore vers 3 et 5 , haine , scandale et le verbe tourmentent qui garde à cette époque un sens très fort de “faire  énormément souffrir,” presque torturer. Le poète doit donc affronter une situation marquée par le malheur et du coup, son rôle va changer ; Hugo pense, une effet, que lorsque le pays souffre, le poète ne peut se contenter d’être un simple chanteur , spectateur des malheurs de sa patrie: il doit donner toute sa mesure et devenir un penseur à part entière. On voit donc ici que l’engagement du poète est , selon Hugo, nécessaire, particulièrement en temps de crise.

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La deuxième strophe précise la nature de la mission du poète grâce à des séries d‘antithèses : en des jours impies, il apporte des jours meilleurs ; le poète semble résolument porteur d'espoirs; le mot utopie désigne habituellement quelque chose qui ne se réalise pas, qui est plutôt de l’ordre du rêve; Or ici, le poète est associé au vers 13 à cet espoir naissant comme l’indique le complément de nom qui le définit: il est l’homme des utopies “; Nous retrouvons l’idée d’un apport de lumière avec l’image de la torche enflammée au vers 19 qui va servir à faire flamboyer l’avenir; La connotation  ici du verbe flamboyer est clairement méliorative : on pense notamment au flamboiement de l’automne ou d’une chevelure; Il ne s’agit pas d’un feu dévastateur mais d’une flamme éclairante et réconfortante. Au vers 13, nous retrouvons l’idée que le poète appartient à la fois au monde terrestre et au monde céleste; en effet, il  a bien les pieds sur terre et se doit d’être un homme d’actions, pas un simple contemplatif; mais il lève les yeux au ciel et voit ainsi plus loin que la plupart des hommes ; on retrouve encore dans l’imagerie romantique l’idée d’un lien entre le céleste et l’artiste; Son pouvoir est marqué par l’image de la main  comme celle de Dieu dans laquelle tout tient; Hugo utilise les références au corps humain pour définir la nature du poète: il domine les autres hommes car sa tête est au-dessus des autres : ce qui lui permet d’avoir une meilleure vue notamment sur l’avenir . Rimbaud développera encore davantage cette idée de regard qui porte plus loin avec l’image du poète Voyant. Le mot prophète au vers 15 fait référence à la dimension sacrée du poète considéré par certains hommes comme un envoyé des dieux et celui qui apporte la bonne nouvelle, un message d’espoir et de délivrance pour les peuples opprimés. Le vers 18 fait mention de la position du poète au sein de la société : objet d’admiration il peut parfois être complimenté pour son talent et ce qu’il dit ; mais ses idées peuvent également ne pas être acceptées et il est alors marginalisé, critiqué par les autres hommes d’où la construction binaire de la phrase qui présente une alternative : qu’on l’insulte ou qu’on le loue .

La troisième strophe met en évidence ses différents pouvoirs et s’ouvre sur le verbe voir qui définit ses capacités visionnaires ; le poète selon Hugo est capable d’entrevoir l’avenir et ainsi de conseiller les peuples ; Le verbe végéter qui s’emploie au sens propre pour des plantes dont la croissance est ralentie ou rendue difficile par la mauvaise terre ou l’absence de lumière, nous ramène aux malheurs des temps présents qu’évoquait Hugo dans la première strophe; le poète est ainsi celui qui ramène l’espoir grâce à ses rêves ; il entrevoit , à la manière d’un voyant , des bribes d’avenir grâce aux contacts qu’il peut créer avec les esprits ; ce sont ,en effet, les ombres des choses qui seront un jour qui peuplent ses rêves ; cette idée de communication possible entre les esprits de différentes époques était familière à Hugo qui pratiquait avec ses amis le spiritisme : réunis autour d’une table sur laquelle ils apposaient leurs mains , ils convoquaient les âmes des défunts qui leur transmettaient parfois des messages “codés “.  Les insultes qui pleuvaient sur le poète au vers 18 prennent au vers 25 la forme de railleries c’est à dire de moqueries méchantes ;  La connotation est ainsi nettement péjorative. Cependant  le poète n’en tient pas compte; La construction du vers 25 en trois temps montre sa détermination: On le raille; Qu’importe; Il pense . Penser apparaît alors comme un acte fort, un acte de résistance face à l’opinion publique; Le poète est souvent seul contre tous lorsqu’il évoque l’avenir. Son âme s’oppose aux opinions de la foule présentée ici comme un ensemble de faux sages; Le poète pour Hugo se range toujours du côté de la Vérité et doit ainsi combattre les mensonges et les faux -semblants. Il garde néanmoins de l'amour et de la compassion pour ceux qui ne l'écoutent pas : il les plaint et leur garde son amour  .

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La strophe 4 début sur une apostrophe : le poète s’adresse directement aux peuples et leur lance un appel sous forme d‘impératif qui prend ici plutôt la valeur d’une prière ; cet appel insistant est repris au vers suivant en position forte : à l'attaque du vers.  La périphrase “rêveur sacré” associée au contraste entre l’ombre et la lumière redéfinit les liens entre le poète et la divinité; choisi par Dieu pour être son interprète et son envoyé terrestre, le poète se pare ainsi de différents attributs plus ou moins divins; son front, à la manière des saints, devient éclairé par la lumière qui émane de dieu et le contact se crée également par la voix: en effet, au vers 39 Hugo mentionne les contacts entre le poète et l’esprit divin sous la forme de chuchotements : “Dieu parle à voix basse à son âme ” ; ce lien spirituel donne de la force au poète et des pouvoirs; Il lui permet notamment d’éclairer les zones d’ombre ; Ce contraste entre l‘ombre et la lumière symbolise à toutes les époques  la lutte entre le Bien et le Mal, l’ignorance et la connaissance, ce qui est mauvais et ce qui est bon. Le poète se range toujours du côté de la lumière et son pouvoir le rend unique : lui seul est repris à l’anaphore des vers 34 et 36 et au vers 33, Hugo précise que sans lui , le peuple serait dans une nuit complète; Il réaffirme ici que la société a besoin des poètes : ils lui sont vraiment utiles grâce à leurs capacités visionnaires et leur faculté de dire la Vérité. Le poète est un homme différent des autres et il possède notamment une douceur qui le rapproche du monde féminin : cette idée est présentée sous la forme d’un paradoxe au vers 38 : “Homme ,il est doux comme une femme. ” 

La strophe 5 fait du poète une sort d’image du Christ: comme lui, il est fils de Dieu et comme lui il souffre pour sauver les hommes ; le poète se peint comme une victime de la société et décrit ses souffrances sous la forme d’une énumération : épines, envie et dérision . On retrouve ainsi l’idée qu’il est la cible des moqueries de la foule qui ne le comprend pas ; Les épines font référence à la couronne d’épines dont on avait recouvert le front du Christ pour se moquer de lui et on l’avait affublé du titre de roi des juifs ; L’image du poète en Christ est un topos (cliché )  du romantisme : en effet, les poètes de cette époque ont recours à de nombreuses références religieuses pour dépeindre leur rejet  . Aux vers 43 à 45 apparaît l’image du poète en moissonneur : tel le paysan qui  se penche pour récolter le blé ou ensemencer la terre , il apparait courbé; là encore il s'agit d'un cliché du romantisme qui se fonde sur la métaphore de la culture. Le poète fait naître l'avenir grâce au passé: cette idée est reprise sous différentes formes à l'intérieur du poème; d'abord sous la forme de la fécondation au vers 44 et 45 ; en se servant de la tradition ; c’est à dire de ce qui nous vient du passé, le poète est capable de devenir un trait d’union entre les époques et il n’est pas en rupture avec le passé, il ne lui tourne pas le dos dans un désir de modernité; au contraire, il utilise le passé pour qu’il serve de support à l’avenir; le verbe féconder qui s’emploie également pour tous les êtres vivants ainsi que pour les végétaux  signifie faire naitre la vie : il est associé à des connotations laudatives ( = positives = mélioratives ) ; La même idée d’un lien entre les époques est développée à travers la métaphore de l’arbre : le passé constitue nos racines et le feuillage l’avenir; Hugo refuse ainsi d’apparaître comme un révolutionnaire qui tournerait le dos au passé ; il se pose davantage en continuateur d’une certaine tradition qu’il entend juste moderniser .Poésie de continuité et non pas poésie de rupture : Hugo tente ici de rassurer ceux qui ne verraient en lui qu’un “révolutionnaire ” . Sur le plan de l’ oeuvre poétique, il se montre moins attaché au renouvellement formel que sur scène par exemple avec sa pratique du drame romantique et du mélange des genres . 

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La dernière strophe figure l’apothéose du poète rayonnant de lumière. Le verbe rayonner indique l’intensité de la lumière qui émane de lui et qui irradie son entourage ; Hugo associe la lumière de la flamme, qui est aussi classiquement la métaphore du sentiment amoureux , à la notion de Vérité;  Le poète est comparé à une sorte de vainqueur dans son habit de lumière ; Les hyperboles des vers 54 et 55 : “merveilleuse clarté”inonde de sa lumière ” traduisent bien les pouvoirs du poète; Ces derniers s’étendent partout comme le montre le double parallélisme : “ville et désert, Louvre et chaumière “ ; Ces deux derniers mots désignent la demeure des rois et celle des paysans; Le poète n'est pas seulement un homme de cour qui vit et agit parmi les grands, et uniquement au service des Puissants, c'est également un artiste qui se préoccupe des petites gens, de ceux que Hugo nomme le Peuple . L’idée d’un poète qui prête sa voix et fait entendre la parole des plus démunis fera son chemin au siècle suivant et on la retrouvera avec certains surréalistes comme René Daumal. Elle  se traduira par la notion d’engagement mais ici un engagement pour la cause des plus démunis dans cette société inégalitaire du dix-neuvième siècle.  Ainsi le poète est partout et son pouvoir paraît illimité ; le pluriel du vers 57 les plaines et les hauteurs  a pour effet d’accroître la dimension “extraordinaire ” du poète qui se transforme en une sorte de Dieu qui règne sur le monde; D’ailleurs il est placé en haut (vers 57) d’où il peut surplomber l’humanité , comme une divinité; La dernière image du quatrain assimile la poésie à l’étoile du berger; On retrouve ici l’idée de quelque chose qui brûle, un astre lumineux, placé dans le ciel à la manière d’un être divin et qui sert de guide aux bergers; Grâce à cette image, le poète parvient à unir les trois dimensions du pouvoir poétique : une force divine associée à un guide pour le peuple et quelque chose d’utile . Il rappelle enfin que la poésie  est faite pour tous , pour les rois comme pour les pasteurs; Les connotations du mot pasteurs rappellent  le contexte sacré car dans la Bible l’étoile guide les rois mages vers le Christ et Dieu a choisi de simples bergers pour entourer Jésus; On retrouve ainsi en filigrane l’image du poète associé au chemin qui mène vers le Christ. Pour les romantiques,le poète incompris figure très souvent en Christ pour traduire les souffrances qu’il peut endurer et son désir de sauver les hommes. 

Voilà une lecture expliquée de ce poème mais elle ne constitue pas un commentaire littéraire; Pour l’oral du bac, vous devrez y ajouter

  • une introduction qui rappellera la problématique (il est d’ailleurs d’usage de  la lire  sous cette forme …Pour répondre à la question que vous m’avez posée, nous allons tout d’abord voir comment Hugo montre que le poète est un être atemporel ; nous verrons ensuite que l’auteur assimile le poète à un être divin et ensuite nous montrerons la nécessité pour le poète de servir les hommes et qu’il risque d’en souffrir. 
  • vous rangerez vos remarques et interprétations à l’intérieur d’un plan détaillé
  • une conclusion qui ouvrir sur le thème et qui mentionnera d’autres textes du corpus ou d’autres oeuvres 

Rappel du plan vu en cours qu’il est important de bien mémoriser …

I  Poète à 3 dimensions : relie passé présent et futur 

1/ passé qui sert à construire l’avenir

2/ présent temps de malheurs 

​​​​​​​3/ poète prépare des jours meilleurs 

II Poète être sacré 

1/ sa lumière 

​​​​​​​2/ un rêveur sacré: l’homme des utopies 

3/ un prophète, un guide 

III Poète au service de la Cité toute entière 

​​​​​​​1/ Un homme qui sert 

2/ un penseur utile porteur de la vérité

3/ un homme incompris et qui peut souffrir 

 

Un lien à consulter pour compléter vos notes ou comparer d’autres interprétations ….

Fonction du poète, Victor Hugo : commentaire

02. septembre 2017 · Commentaires fermés sur Fabriquer un texte polémique · Catégories: Fiches méthode
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Le registre polémique s’emploie lorsqu’on, cherche avec violence ou véhémence  à persuader un adversaire de la justesse de nos idées ou de la fausseté des siennes  : il faut à la fois le convaincre en utilisant des arguments logiques basés sur le raisonnement et des arguments basés sur des valeurs morales (éthiques )  ou sur des sentiments (pathétique)  ; les sujets de polémique sont nombreux et ils divisent la société ; ils se fondent sur des valeurs différentes et il est parfois très difficile de convaincre quelqu’un qu’il a tort ou que nous ne partageons pas son point de vue ; des sujets  dit sensibles tels que l’avortement (qui est un droit ) ,le mariage pour tous, le port du voile ou de la burka ou du burkini, le travail les jours fériés, le travail des femmes, la politique, l’euthanasie, l’adoption par des couples homosexuels, les mères-porteuses, les dons d’organes, la peine de mort, la liberté de culte, le vote des étrangers ..divisent les communautés 

Vous avez devoir fabriquer un texte polémique qui va comporter des arguments en faveur d’une thèse ; cette thèse ne devra pas faire l’unanimité mais déclencher une polémique au sein de la communauté; Le choix du sujet sera évalué sur 2 points : plus il sera polémique, plus vous gagnerez de points ; un sujet trop consensuel vous donnera moins de bonus. Vous choisirez un titre percutant et en- dessous : un slogan qui résumera votre point de vue . ( 2 pts) Votre texte perdra la forme d’un article de journal, d’un billet d’humeur, d’une chronique, d’une lettre ouverte ou d’une tribune. Votre point de vue sera collectif et vous signerez votre article du nom de votre association ou de votre mouvement . ( 2 pts) (6 pts en tout ) 

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Une FEMEN

Les outils de l’argumentation : votre texte comportera obligatoirement des arguments (idées abstraites) et des illustrations (exemples concrets, situations titrées de l’actualité ou faits historiques); vous devrez vous adresser, à plusieurs reprises, et sous différentes formes, au lecteur (1 pt) ; vous emploierez un registre polémique en cherchant notamment à discréditer les arguments de la partie adverse ou en les réfutant (2 pts) ; l’utilisation de l’humour ou de l’ironie sera un bonus comptabilisé en supplément. Vous emploierez des questions  rhétoriques et vous pourrez également avoir recours à des procédés d’écriture comme la périphrase, la gradation, la métaphore, la comparaison afin de donner de la force à vos mots à vos idées.  ( 2 pts) (5pts en tout ) 

  Pour aller plus loin, vous pouvez employer …

  • Marques de la première personne.
  • Procédé de dévalorisation (métaphores dépréciatives, antiphrases ironiques).
  • Procédés d’insistance (anaphores, accumulations).
  • Lexique de l’émotion (indignation, surprise).
Défendre ses idées. Opposer ce que l’énonciateur juge bon à ce qu’il juge mauvais, dénoncer un adversaire en cherchant à le discréditer.

Bien évidemment la qualité de votre expression, la précision de votre vocabulaire et de votre orthographe seront des atouts non négligeables ( 4 pts ) ; plus vous utiliserez d’arguments et d’illustrations variés, plus vous serez efficace..( 5 pts ) 

En résumé, 4 pts pour la qualité de l’expression, 5 pts pour l’utilisation des outils, 6 pts pour la forme et 5 pts pour la qualité des arguments . 

Voici 3 exemples de textes polémiques …analysez les et voyez quels procédés ils utilisent ..

Premier exemple 

Victor Hugo, alors député, proteste dans ce discours contre un projet de loi réduisant le nombre d’électeurs.

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« Allez, faites ! retranchez trois millions d’électeurs, retranchez-en quatre, retranchez-en huit millions sur neuf. Fort bien. Le résultat sera le même pour vous, sinon pire. Ce que vous ne retrancherez pas, ce sont vos fautes ; ce sont tous les contresens de votre politique de compression ; c’est votre incapacité fatale ; c’est votre ignorance du pays actuel ; c’est l’antipathie qu’il vous inspire et l’antipathie que vous lui inspirez. »
Victor Hugo, Discours sur le suffrage universel, prononcé à l’Assemblée nationale le 20 mai 1850. 

 

Second exemple : 

Le discours de Victor Hugo appuie la proposition d’Armand de Melun visant à constituer un comité destiné à « préparer les lois relatives à la prévoyance et à l’assistance publique »

  

Je ne suis pas, messieurs, de ceux qui croient qu’on peut supprimer la souffrance en ce monde ; la souffrance est une loi divine ; mais je suis de ceux qui pensent et qui affirment qu’on peut détruire la misère.

Remarquez-le bien, messieurs, je ne dis pas diminuer, amoindrir, limiter, circonscrire, je dis détruire. Les législateurs et les gouvernants doivent y songer sans cesse ; car, en pareille matière, tant que le possible n’est pas fait, le devoir n’est pas rempli.

La misère, messieurs, j’aborde ici le vif de la question, voulez-vous savoir jusqu’où elle est, la misère ? Voulez-vous savoir jusqu’où elle peut aller, jusqu’où elle va, je ne dis pas en Irlande, je ne dis pas au Moyen Âge, je dis en France, je dis à Paris, et au temps où nous vivons ? Voulez-vous des faits ?

Il y a dans Paris, dans ces faubourgs de Paris que le vent de l’émeute soulevait naguère si aisément, il y a des rues, des maisons, des cloaques, où des familles, des familles entières, vivent pêle-mêle, hommes, femmes, jeunes filles, enfants, n’ayant pour lits, n’ayant pour couvertures, j’ai presque dit pour vêtement, que des monceaux infects de chiffons en fermentation, ramassés dans la fange du coin des bornes, espèce de fumier des villes, où des créatures s’enfouissent toutes vivantes pour échapper au froid de l’hiver.

Voilà un fait. En voulez-vous d’autres ? Ces jours-ci, un homme, mon Dieu, un malheureux homme de lettres, car la misère n’épargne pas plus les professions libérales que les professions manuelles, un malheureux homme est mort de faim, mort de faim à la lettre, et l’on a constaté, après sa mort, qu’il n’avait pas mangé depuis six jours.

Voulez-vous quelque chose de plus douloureux encore ? Le mois passé, pendant la recrudescence du choléra, on a trouvé une mère et ses quatre enfants qui cherchaient leur nourriture dans les débris immondes et pestilentiels des charniers de Montfaucon !

Eh bien, messieurs, je dis que ce sont là des choses qui ne doivent pas être ; je dis que la société doit dépenser toute sa force, toute sa sollicitude, toute son intelligence, toute sa volonté, pour que de telles choses ne soient pas ! Je dis que de tels faits, dans un pays civilisé, engagent la conscience de la société tout entière ; que je m’en sens, moi qui parle, complice et solidaire, et que de tels faits ne sont pas seulement des torts envers l’homme, que ce sont des crimes envers Dieu !

Vous n’avez rien fait, j’insiste sur ce point, tant que l’ordre matériel raffermi n’a point pour base l’ordre moral consolidé !

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Exemple 3

Pour finir, voilà la chronique d’une journaliste, sans doute opposée à la chasse 

Allez-y, les gars, tirez sur les tourterelles, c’est le moment. Elles n’ont pas la tête à vous éviter, vous, votre quincaillerie et votre 4X4, elles nidifient, on ne peut pas penser à tout. Elles sont sûrement très bêtes, les tourterelles. Vous ? Non. Vous avez des lettres et vous avez de la tradition.
Vous ne les bouffez pas, les tourterelles, vous les zigouillez parce que ça se fait depuis la plus haute antiquité. Mais pourquoi vous contenter de cette seule tradition ?
Relisez vos classiques. Si votre voisine vous contrarie, dénoncez-la au service « sorcières » de votre mairie, on la brûlera. Pendez le voleur qui vous a piqué votre autoradio. Exigez que les séropositifs de votre région ne se déplacent qu’en secouant une crécelle. Lapidez votre femme adultère, je suis sûre que le juge d’instruction comprendra votre penchant pour la tradition. Pour soulager vos envies de tirer sur tout ce qui bouge, vous pourriez jouer au pigeon d’argile, seulement, ça ne saigne pas un pigeon d’argile, comme c’est frustrant.
La civilisation consiste à faire la peau aux idées toutes faites, aux désirs de meurtre qu’on passe sur les petits oiseaux et à prendre les canards sauvages pour les enfants du Bon Dieu. Mais être civilisé, ce n’est pas traditionnel.

Odile Grand, L’Événement du Jeudi, 21 et 21 mai 1992.

Qu’est-ce qui rend leurs textes polémiques ? quelle thèse soutiennent-ils ? quels procédés de style ont-ils utilisés ? 

 

10. mai 2017 · Commentaires fermés sur Le personnage de Marianne dans Réparer les vivants : mater dolorosa · Catégories: Première · Tags:
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Marianne et Sean 

Marianne Limbres est interprétée dans le film par l’actrice française Emmanuelle Seigner qui avoue qu’elle a d’abord refusé le rôle car personne n’a envie d’intrepréter ça, cette douleur de perdre un enfant te de devoir faire le choix de donner ses organes  alors même qu’il paraît encore vivant . Marianne c’est avant tout la mère, figure maternelle qui doit affronter un drame qui vient bouleverser l’ordre des choses : un parent qui enterre son enfant . Comment l’auteure a -t-elle construit ce personnage de mère ? 

La présence maternelle est rappelée dès les premières lignes du roman par la mention de la naissance de Simon, ce moment où son coeur a subitement accéléré sous la pression de l’expulsion du corps maternel . Les trois adolescents subissent également les “sommations maternelles ” pour les tirer du lit ; on retrouve ici l’idée d’une mère qui veille. Marianne fait son apparition dans le récit à l page 47 lors de son arrivée à l’hôpital . L’appel de la gendarmerie a eu lieu vers 11h et le chapitre va alors s’organiser sous la forme d’un retour en arrière . On assiste d’abord à l’arrivée de Marianne paniquée : elle doit se rendre aux urgences et une infirmière lui indique la route à suivre.  La page 48 détaille la réaction de Marianne lorsque le téléphone a sonné ; sa première réaction fut la peur. Notre premier extrait montre le regard de la petite Lou sur sa mère qui “enfile ses vêtements à la hâte” et peu à peu se défigure sous l’effet de la terreur . L’écrivain utilise alors la métaphore filée de l’éboulement pour rendre plus concret cet effondrement intérieur et le passage se termine par la pétrification de Marianne. Après avoir déposé Lou, elle prend sa voiture et au volant, concentre sur le trajet à parcourir, elle ressent peu à peu un changement d’atmosphère; Tout autour d’elle devient menaçant comme si une force de destruction inouïe ( p 52) se préparait. Marianne s’emploie à “conjurer l’intuition qui sédimentaire en elle depuis l’appel téléphonique”  comme si elle ressentait intuitivement la mort de Simon ou du moins, son départ . arrivée sur le parking de l;hoîtal qui est comparé à une forêt immobile, close, Marianne tente de joindre à nouveau le père de Simon. Son parcours jusqu’au service de réanimation lui parait interminable et dès qu’il croies son regard, Pierre Révolu sait qu’elle est la mère de Simon : “regard vrillé, joue mordues de l’intérieur” Marianne  attend la phrase par la quelle le malheur va s’engouffrer et elle voudrait s’enfuir, disparaitre ; Le médecin sait qu’elle sait ( 62) ; L’auteure nous présente cette intuition maternelle comme si les mots n’allaient que confirmer ce qu’elle a déjà compris et ressenti dans sa chair; Marianne est désormais  une statue de pierre .

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Maylis de Kerangal 

Elle n’a pas l’autorisation de voir Simon et les souvenirs de son enfance se mettent à lui revenir en mémoire par bribes : d’abord les maladies infantiles et ensuite un souvenir de séjour en classe de neige; elle quitte l’hôpital toujours sans nouvelles de Sean et se dirige vers un café: elle cherche un lieu pour attendre, un lieu pour épuiser le temps . Dans la rue, l’univers semble transformé sous l’effet de sa douleur : “la catastrophe s’est propagée sur les éléments , les lieux, les choses, un fléau  comme si tout se conformait à ce qui avait eu lieu ce matin .” (87) . Rien ne vient injurier la détresse de Marianne qui avance tel un automate, la démarche mécanique et l’allure floue. Elle se met à prier à voix haute et entre dans un café où elle commande un gin. elle ne se reconnaît pas dans le miroir et tente de faire barrage aux images de Simon qui  se fomcent à tout allure et foncent sur elle par vagues successives .( 89) . Sa douleur fait écho à une chanson d’Alain Bashung qu’on entend ; “Les bouffées mémorielles survenues alors qu’elle évoquait Simon dans le cagibi de révolu ont logé dans sa poitrine une douleur qu’elle est impuissante à contrôler, à réduire. ” L’auteure décrit la chimie de la douleur et ses pleurs au téléphone quand elle entend la voix de Sean : “elle pleure traversée par l’émotion que l’on ressent parfois devant, ce qui, dans  le temps, a survécu d’indemne et déclenche la douleur des impossibles retours en arrière.” (91) 

Les parents unis dans la douleur sont présentés comme des naufragés; Au chevet de leur fils, Marianne a bien du mal à ne pas s’évanouir : “elle chancelle, jambe molles, s’agrippe au lit à roulettes.” (99) A l’annonce par le médecin de l’état de mort cérébrale deSimon, les parents accusent le coup. Marianne pense qu’il peut se réveiller du coma mais révolu affirme que c’est impossible. accablés les parents ne réalisent pas “comme si ces deux-là lentement se dissociaient du reste de l’humanité, migraient vers les confins de la croûte terrestre, quittaient un temps et un territoire pour amorcer une dérive sidérale. ” (108) A la fois coupés d’eux-mêmes et coupés du monde qui les entoure . Marlis de Kerangal observe ici les effet sue la douleur et le fait qu’elle nous retranche du monde réel . 

Sean et Marianne apparaissent comme frappés par un météore noir qui venait de les percuter de plein fouet et ils suivent Thomas Rémige l’infirmier , dans le dédale des couloirs de l’hôpital. Pris dans une onde de choc, ils concentrent dans leur tête à cet instant, la pleine tragédie du monde . (125) A l’annonce de la possibilité du don d’organes, Marianne et Sean sont assomés: “Bouches bées, regard flottant au ras de la table basse, mains qui se tordent, et ce silence qui s’écoule, épais, noir, vertigineux, mélange l’affolement à la confusion. ” ( 127)  Thomas Rémige fait son travail pour tenter d’arracher le consentement des parents mais il est conscient des vagues de douleur que cela provoque sur “leurs visages torchonnés de souffrance”. Marianne pleure mais désormais parle de Simon à l’imparfait ce qui est le signe qu’elle parvient à réaliser sa mort . Thomas pense qu’elle pourrait accepter les prélèvements mais pas le père. 

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Sean et Marianne vont faire un tour en voiture et Sean a alors un accès de violence contre lui-même ; Marianne tente de l’arrêter et sent la folie les menacer ; Ils se sentent responsables d’avoir donné à leur fils ce goût du surf et de ne pas avoir su le protéger . ” Marianne songe, c’est trop, on va crever.” ( 157) Leurs visages finissent par se caresser au bord du fleuve et les mots de Marianne forment une empreinte dans l’air statique. ” ils ne lui feront pas mal, ils ne lui feront aucun mal”  Elle réussit avec ces mots à obtenir le consentement du père pour les dons d’organes. Ils se retrouvent alors une dernière fois autour de Simon , corps contre corps. Au moment de sortir de la chambre, Marianne se retourne une dernière fois vers le lit et ce qui la fige sur place est la solitude qui émane  de Simon, désormais aussi seul qu’un objet , comme s’il était délesté de sa part humaine . ( 175) 

L’auteure montre dans ce roman un lien très fort entre la mère et le fils et une conscience près que physique de la mort de Simon éprouvée dans sa chair avant même que l’idée fasse son chemin dans son esprit.Ce personnage est rendu patéhtqioue car sa conscience est saisie à la fois au moyen d’une narration anonyme et de plongées dans ses pensées souvent sous la forme de bribes de monologues ou même de dialogues;  De retour chez eux , Marianne et Sean récupèrent Lou et doivent ensuite prévenir leurs proches . La mère pense ensuite à Juliette : “que deviendra l’amour de Juliette une fois que le coeur de Simon recommencera de battre dans un corps inconnu, que deviendra tout ce qui emplissait ce coeur ? “

Au moment où les équipes prélèvent les organes sur le corps de Simon, Marianne imagine le voyage fantastique de ce coeur dans l’espace : il est 23 h 50 et “la douleur la défonce ” : après avoir visualisé l’envol du coeur de son fils dans la nuit polaire, à l manière d’un objet merveilleux, elle trouve enfin le sommeil : “elle ressent un calme profond ” . Le roman se ferme sur le corps de Claire qui reçoit son nouveau coeur et le corps de Simon sera rendu ad integrum à sa famille le lendemain matin . 

02. mai 2017 · Commentaires fermés sur Portraits de mères · Catégories: Première · Tags:
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Folcoche

La question de corpus se proposait d’étudier quatre portraits de mère dans des romans du XX et XXI siècle . Daniel Picouly, Hervé Bazin et Philip Roth ont créé des récits autobiographiques qui relatent des souvenirs d’enfance marquants  centrés autour de la figure maternelle alors que Maylis de Kerangal a construit une fiction qui interroge l’évolution de la figure maternelle à l’annonce de la mort du fils. Il s’agira d’abord de montrer que le point de vue est celui d’un enfant avant de nous interroger sur les pouvoirs de cette figure maternelle.

 

Bazin est celui qui dresse le portrait le plus critique de sa mère surnommée Folcoche, contraction de folle et cochonne. Ce portrait se démarque des autres dans la mesure où il est nettement critique. On ressent de la haine et de souffrance également à travers ce  bilan de la relation entre le fils et sa mère : la comparaison avec la

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vipère d’abord et son venin, mais également le “jus de pieuvre” et les paroles blessantes et dévalorisantes pour ce fils auquel elle prédit un avenir sinistre attestent d’une relation marquée par l’incompréhension et la colère.  Cependant, à l’approche sans doute de la mort de cette dernière, on note une certaine ambivalence du narrateur , devenu adulte avec la mention l 30    “ toi qui as déjà tant souffert pour nous faire souffrir .” Sans accorder le pardon à cette mauvaise mère, il montre quel horrible héritage il a reçu. C’est également une question d’héritage dans l’admiration que voue le narrateur de 5 ans  à sa mère qu’il redoute autant qu’il l’adore mais qui en revanche semble beaucoup moins aimer sa fille qu’elle dévalorise  “cette petite n’est pas un génie” alors qu’elle considère son fils comme un “ Albert Einstein II ” Le petit garçon voue une admiration sans borne à cette figure maternelle qui se caractérise par la toute puissance et l’a conduit , par peur, sur le chemin de l’honnêteté.

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Picouly et de Kerangal ont choisi de montrer deux moments importants où la figure maternelle se transforme sous les yeux de l’enfant : dans le premier cas, le petit garçon découvre une cicatrice sur le dos de son père et la mère surprend ce regard et das le second cas, la petite fille est témoin de la transformation de sa mère sous l’effet du coup de fil qui annonce l’accident mortel de son grand frère. Dans les deux cas,  on vit l’événement à travers les yeux de l’enfant qui remarque, par exemple, que sa mère “enfile ses vêtements à la hâte” ( l 15 )  : la petite a “le regard fixé sur sa mère qui ne la voit pas ” (10 ) et elle est attentive aux changements de son comportement “elle halète comme un chien, gestes précipités et visage tordu ” ( ‘l 11) sous l’effet de la peur . Ensuite, le lecteur , grâce au changement de point de vue, pénétrera dans l’intimité du personnage qui sera alors décrit de l’intérieur.  La m’am de Picouly, elle, a surpris le regard de l’enfant  et elle se “fige comme si elle avait déjà compris ce qui allait se passer ” ; Le narrateur raconte des souvenirs de l’époque où il mesurait un mètre vingt et il avoue son impossibilité de “retrouver le même angle ” pour décrire notamment ce que fut la relation mère / fils.

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Dans les quatre portraits, les mères sont présentées, en partie ,  à travers les yeux des enfants et elles sont dotées de nombreux pouvoirs ; Roth et Bazin sont ceux qui accordent le plus d’importance à la domination de la figure maternelle qu’on pourrait presque qualifier de toute -puissante . Pour le petit garçon de cinq ans, il a l’impression de vivre sous la surveillance constante de sa mère qui peut changer de forme à volonté ou devenir invisible; elle l’accompagne partout et c’est avec humour qu’il raconte qu’elle lui apparaissait déguisée sous les traits de chacun de ses professeurs. Il ne parvient pas à se détacher de la figure maternelle et lui accorde le don d’ubiquité . Bazin reconnait également que Folcoche possède de nombreux pouvoirs ; elle aussi a un don de seconde vue ( l 24 ) par moments et surtout elle a le pouvoir de moduler son avenir car il ne peut se détacher des valeurs qu’elle lui a transmises et de cette haine tenace : “haïr c’est s’affirmer ” écrit -il et on mesure à quel point il est demeuré prisonnier de son éducation. La mère est dotée de pouvoirs quasi divins où on retrouve encore l’ambivalence : “ange ou démon “. En effet, dans la pensée des enfants, leurs mères sont toujours omnipotentes et Picouly choisit l’image de la déesse Shiva dans la religion hindoue , qui possède des dizaines de paires de bras afin d’illustrer ainsi l’efficacité de cette mère de famille très nombreuse. Seule la mère de Simon paraît au contraire  totalement en perdition: pétrifiée par la douleur et on mesure à quel point elle est terrorisée à la pensée de perdre son fils ;  Le    lecteur  a ainsi conscience de la force de l’amour maternel mais du point de vue cette fois de la mère.

Pour conclure, la mère est souvent décrite par son enfant comme un être fascinant et auquel il demeure profondément rattaché, bien au delà de l’enfance, parfois même en dépit des mauvais traitements subis.Ce lien mère/enfant fait l’objet de nombreux romans .

20. avril 2017 · Commentaires fermés sur Clémenceau : Un discours contre la colonisation · Catégories: Première · Tags: ,

Parlons d’abord de l’auteur de ce discours … Qui est Clémenceau ?

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Georges Clémenceau

Médecin , il commence sa carrière politique par une fonction de maire  d’un arrondissement de Paris  , ensuite élu  député en 1871 ;il rejoint le parti républicain. Il défend l’idée d’une séparation entre l’Eglise et l’Etat et surtout  s’oppose à la politique de colonisation faisant tomber le gouvernement sur cette question. Il rejoindra également les rangs des dreyfusards et se battra pour que les Communards de 1871 soient amnistiés.Élu en 1902 sénateur  il est nommé ministre de l’Intérieur  en 1906. Se désignant lui-même comme le « premier flic de France »,  ,il est surnommé « le Tigre » et va réformer durablement la police ,  À la fin de l’année 1906, il devient président du conseil, l’équivalent du poste de premier ministre .

 

 

  Quel est ensuite le contexte  ?

 Georges Clémenceau s’exprime devant la Chambre des députés le 30 juillet 1885. Il répond au discours prononcé par l’ancien président du Conseil Jules Ferry, deux jours auparavant, au cours d’un débat sur la politique d’expansion coloniale de la France. Chef du gouvernement à deux reprises (1880-1881, 1883-1885), mais renversé par la Chambre le 30 mars précédent, Jules Ferry défend sa politique. Clemenceau entend la dénoncer. Nous sommes donc face à un débat idéologique .

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Le discours à l’assemblée

Le discours de Clémenceau : lecture analytique n° 4 

 

Points de méthode : tout discours suppose qu’on accore une attention particulière à l’éloquence de l’orateur c’est à  dire aux marques son élocution ; les plus fréquentes sont : les adresses aux auditeurs qui peuvent être soit des apostrophes soit des verbes à l’impératif ; les questions rhétoriques ; la présence des indices de subjectivité  du locuteur (je, moi, pour ma part ) . On cherchera également les figures de construction comme les antithèses, les répétitions et les parallélismes de construction. 

 

A noter que ce discours constitue une réponse à des arguments évoqués par Jules Ferry : il faudra donc repérer les arguments de la partie adverse dénoncés par l’orateur ainsi que les concessions faites aux thèses adverses. L’ironie peut également être une arme utilisée par le locuteur et on sera attentif à la rhétorique de l’éloge (les compliments ) et du blâme (les critiques ) 

 

Quelle est la thèse de Clémenceau ? les colons  français dissimulent la violence qu’il infligent aux populations colonisées sous le nom de devoir rendu aux races inférieures par la race supérieure; ils sont hypocrites et cruels. Il va également démontrer qu’il n’y  pas de race inférieure.  `

Quelle est la thèse combattue ? Ferry défend l’idée que la colonisation est un devoir des races supérieures envers les races inférieures . Il va donc s’efforcer de démontrer que ces arguments ne sont pas justifiés  en combattant l’idée d’inégalité des races notamment et en donnantt des illustrations concrètes (les chinois, les Hindous et l’exemple allemand qui fait référence à la désastreuse défaite française de 1871 face à l’Allemagne. ) 

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Quel est son sentiment dominant ?  l’indignation 

Quels sont ses arguments ? il emploie des arguments variés et s’efforce de réfuter les arguments adverses ;

argument 1 de Ferry : la colonisation rapporte des profits même si elle entraîne des dépenses. (de luxe ) 

réponse  : dépenser cet argent pour les Français serait utile et fructueux ; Clémenceau oppose le luxe à l’utilité (convaincre ) et il reprend cet argument dans la péroraison de son discours : “mon patriotisme est en France “ : ce qui signifie qu’il faut faire porter les efforts du gouvernement sur les citoyens français de métropole avant de penser aux colonies.

argument 2 de Ferry : les races supérieures auraient un droit sur les races inférieures  qu’elles exercent et pour justifier la colonisation, Jules ferry emploie le terme de devoir qui est son contraire; il souligne ainsi par cette formulation adroite la contradiction de la thèse de son opposant ; l’expression transformation particulière est particulièrement ironique . 

il détaille ensuite l’expression exercer son droit en utilisant une expression imagée : allant guerroyer et le convertissant de force ; on voit bien ici qu’il oppose encore une fois la notion de droit à la notion de force ; un droit qu’on exerce par la violence est-il encore un droit ? 

il remet en cause ensuite l’existence même d’inégalité des races en arguant du fait que cette différence n’a pas été scientifiquement prouvée mais résulte d’un jugement hâtif : c’est bientôt dit signifie c’est vite dit ( l 8 ) et donc pas forcément vrai. Cette formulation remet en cause la validité même de l’affirmation de Ferry. Il discrédite ainsi la thèse adverse.

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première illustration : pour étayer son argument sur les erreurs de jugement , Clémenceau reprend l’exemple récent (1871 ) de la défaite française face à l’ Allemagne que d’aucuns prétendent liée à l’infériorité de la race française ; il provoque ainsi la fibre patriotique de son public

en même temps l’orateur adopte une attitude de modestie : pour ma part, j’en rabats singulièrement ( l 8) et j’y regarde à deux fois ( l 11) . Il montre ainsi de manière fort adroite qu’il faut se méfier des jugements hâtifs et de cet argument de race inférieure . Il permet ainsi au public de reconnaître ses erreurs .

Il prend ensuite l’exemple des Hindous dont il vante en termes élogieux la “grande civilisation raffinée “  l 13 et la civilisation Chinoise avec “cette grande efflorescence d’art “ et ses “magnifiques vestiges “ Il fait donc ici clairement l’éloge de ces deux civilisations anciennes sur le plan artistique et intellectuel en citant notamment le vénérable Confucius, modèle de sagesse universellement reconnu. 

De plus, cet argument est aussitôt relayé par un second argument politique qui fait clairement allusion à des négociations diplomatiques gagnées par les asiatiques; de plus, Clémenceau reprend l’idée de jugement hâtif évoqué dès le début de son discours avec la phrase : “ceux qui se hâtent trop de proclamer leur suprématie “  

Ce paragraphe mêle donc habilement illustrations historiques, allusions à des événements politiques et critiques des partisans de la théorie des races supérieures. 

Le paragraphe suivant critique directement les défauts des colons : le mot vices ainsi que les références  à l’alcool et à l’opium sont des accusations directes de l’attitude des colons français; On peut d’ailleurs comparer cette stratégie argumentative à celle qu’emploie Diderot dans son Supplément au voyage de Bougainville. 

L’orateur met le public de son côté avec les allusions historiques et politiques dans un premier temps et passe

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Elu président du conseil 

ensuite au blâme avec des critiques des pratiques coloniales ; il peut alors réfuter la notion de droit et la remplacer par la notion de violence ; Il fustige ainsi l’hypocrisie des colons et il remplace , au final (l 30) l’opposition entre race inférieure et race supérieure par une différence entre civilisation scientifique et civilisation rudimentaire ; les mots abus et tortures désignent les actes des colonisateurs dont la mission civilisatrice est carrément remise en cause : prétendu civilisateur peut on lire à la ligne 31, ce qui est une critique directe des alibis des colons.

Clémenceau dénonce ainsi de manière polémique les pratiques coloniales qui dissimulent une violence sous  couvert d’une mission humaniste. Point par point, il réfute les thèses de son adversaire politique et parvient à la conclusion que ces façons d’agir nient les droits des populations indigènes :” ce n’est pas le droit (l 32) : c’en est la négation.” Une formule finale très efficace et frappante .

 

Exemple d’introduction (vous ajouterez des éléments biographiques donnés au début de cet article )

En 1885, l’Empire colonial français se dessine et  certaines voix au gouvernement militent pour son expansion et la multiplication des guerres de conquête; cependant le pays, sorti défait de sa confrontation avec l’Allemagne en 1871, a besoin de clarifier se priorités budgétaires; d’aucuns pensent que la colonisation pourra rapporter de gros profits et y voie t une possibilité pour al France de es reconstruire; Clémenceau n’est pas d’accord avec cette ligne de conduite et il le fait savoir ; (développement biographique sur l’auteur à placer ici ) .… son discours prononcé à la chambre des députés constitue une réponse à celui d’un  membre du gouvernement : Monsieur Jules Ferry ;  les deux hommes ont une vision différente de l’avenir même s’ils militent tous deux  au sein du parti républicain ; il s’agit donc de montrer en quoi ce discours éloquent constitue  une attaque contre la politique de colonisation menée par le gouvernement français  et reflète donc une confrontation politique et idéologique .

Exemple de plan détaillé pour un commentaire 

1 un discours éloquent ou polémique 

a) la contestation des thèses adverses : reprise et réfutation 

b) les indices de subjectivité :

et la création de  liens avec le public : l’absurdité de la thèse de l’infériorité des races avec l’exemple franco-allemand

  c)   l’utilisation du registre ironique très présent : transition une dénonciation virulente qui reflète l’indignation de Clémenceau

2. Une critique de la politique coloniale 

a) des conquêtes onéreuses : le poids économique 

b) les vices des colons : leurs abus

c) la violence des conflits : ils n’ont pas de droits sur ces populations 

3. La défense des civilisations  “rudimentaires “

a) l’éloge des grandes civilisations

b) la création d’une nouvelle distinction qui remplace l’idée d’infériorité

c) du droit à l’abus : contestation des pratiques coloniales désignées comme la négation des droits 

en conclusion ( à étoffer ) Une contestation idéologique et une remise en question de la politique coloniale française à cette époque : visée politique et idéologique  

14. avril 2017 · Commentaires fermés sur La question de l’homme : apprendre à voir le monde autrement .. · Catégories: Spécialité : HLP Première · Tags:
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Le sujet de ce second bac blanc  vous proposait de débattre de la question de l’homme à travers quatre textes : Montaigne, auteur humaniste décrit dans un chapitre de ses Essais  au seizième siècle, la rencontre entre trois amérindiens et le roi de France , un véritable choc culturel qui oppose deux manières de vivre en société et de gouverner  ; 50 ans plus tard, Cyrano de Bergerac nous propose d’assister à l’arrivée d’un homme sur une planète peuplée d’oiseaux : ces derniers vivent très différemment des sociétés humaines ; quant à Paul Eluard, sous la forme d’un poème surréaliste, il nous enseigne une forme de liberté intérieure ; Michel Tournioer lui, a décidé de réemployer le mythe de Robinson pour mettre en évidence les préjugés qui nous gouvernent et nous enferment dan des prisons intérieures . 

 

 

Voilà quelques éléments de corrigé pour améliorer voter question de corpus .

  • Présentation des textes : un essai du XVIème siècle de Montaigne, un roman du XVIIème siècle de Cyrano de Bergerac, un poème du XXème d’Eluard et un roman du XXème de Tournier. 
  • Reformulation de la question : Quelles sont les stratégies des auteurs pour permettre au lecteur de se remettre en question et de s’interroger sur son monde ?  
  • Proposition de réponses à la question (chaque réponse peut être une partie du plan) : 
  • Les auteurs font le choix de passer par l’imaginaire (fiction) ou d’évoquer directement la réalité :    

Cyrano de Bergerac et Michel Tournier inventent, dans leurs romans, des histoires (ils passent par un détour afin de faire réfléchir le lecteur, ils s’écartent de la réalité). => argumentation indirecte

Michel de Montaigne et Paul Eluard s’adressent directement au lecteur. Montaigne n’invente pas l’histoire mais relate ses pensées et ses expériences réelles (authenticité). l texte apparait comme la transcription d’un aventure vécue  => argumentation  à la frontière entre directe et indirecte 

Eluard invite directement le lecteur à partir à l’aventure et à découvrir le monde dans son poème, toutefois il fait appel au rêve et à l’imaginaire en jouant sur les mots. Eluard n’exprime pas explicitement le fait que son aventure est un pas vers l’inconnu, la découverte du monde qui permet d’éclairer les esprits. => entre argumentation directe et indirecte 

  • Les auteurs font parler des personnes ou personnages éloignés de leurs sociétés afin que le lecteur puisse voir à travers un regard autre, plus critique et plus objectif, les vices de la société française et européenne (au XVIIème siècle pour Cyrano et XVIIIème pour le mythe de Robinson) : mythe de Robinson Crusoé (Daniel Defoe au XVIIIème siècle)
  • Les auteurs présentent des systèmes politiques qui s’opposent à ceux de la société dans laquelle les auteurs et leurs lecteurs vivent : ces systèmes peuvent être imaginaires ou réels (essai de Montaigne) : antithèses : les oiseaux élisent le roi « le plus faible, le plus doux, et le plus pacifique » tandis que les Hommes ont pour roi les « plus grands, [les] plus forts et [les] plus cruels » + roman Tournier : création d’un nouveau rituel : nouveau style de vie et découverte de nouveaux usages des matériaux et des objets. 

Vous trouverez également en pièce jointe des éléments de corrigé du commentaire composé sur le texte de Montaigne.

 

 

27. mars 2017 · Commentaires fermés sur Autour de la peine de mort : analyse de Dead man walking.. · Catégories: Seconde · Tags: ,
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En 1995, Tim Robbins décide d’écrire un scénario à partir d’un  synopsis qui provient d’un livre rédigé par une religieuse Soeur Héléne Préjean  qui retrace son expérience d’accompagnement d’un prisonnier condamné pour le viol et le meurtre de deux adolescents et  condamné à mort par l’état de  Louisiane. Le titre fait référence aux paroles du gardien lorsque Matthew  Poncelet se dirige vers la chambre d’exécution:  il annonce officiellement “c’est la marche du mort” ; Auparavant soeur Hélène, qui était devenue sa conseillère spirituelle et qui demeura avec lui le dernier jour de sa vie, lui avait interprété un cantique (chant religieux ) où il est également question de marcher vers la mort sans avoir peur . Ce film n’est pas un simple plaidoyer contre la peine de mort: il enseigne aussi la valeur de l’amour et du pardon.

Le film débute par un portrait en actions du personnage de soeur Hélène Préjean: on la voit souriante et occupée à aider les enfants et les femmes de la communauté noire de son quartier alors qu’elle-même est issue, comme on le verra au cours d’un repas de famille, d’un milieu social beaucoup plus favorisé. Cette femme se caractérise par une bonté et un dévouement hors du commun et un désir très marqué d’aider son prochain et particulièrement les plus démunis; C’est sous cet angle que le spectateur comprend son engagement aux côtés du condamné Matthew Poncelet, accusé d’avoir sauvagement violé et tué un couple d’adolescents sans histoire, deux enfants qui faisaient la joie et la fierté de leurs parents et qui étaient promis à un bel avenir. Leur mort atroce paraît d’autant plus injuste et les images que le réalisateur choisit de montrer en montage alterné au moment où Porcelet va être exécuté , tendent à superposer les destins des victimes et celui du tueur; Il a certes ôté la vie et s’est montré inhumain mais sa mort décidée par la société le met dans la même position que les victimes ; la caméra filme ici en plongée les corps des adolescents qui forment une croix et celui du condamné sanglé sur la table . 

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Le condamné “crucifié”

.Le spectateur s’attache rapidement au personnage d’Hélène incarné par l’actrice Susan Sarandon et il la découvre , au début du film,malmenée par l’aumônier principal de la maison d’arrêt qui lui reproche de ne pas porter l’habit religieux; A travers ce personnage sévère , le réalisateur montre deux conceptions de la religion chrétienne qui s’affrontent : l’une, rigoriste et intransigeante , est basée sur la loi de l’Ancien Testament qui préconise la vengeance et la châtiment pour les fautes alors que soeur Hélène défend plutôt les principes du Nouveau Testament fondés sur le pardon des fautes . L’exemple de Jésus est souvent cité : on rappelle qu”il est mort pour nous sauver et on retrouve des images dans le film qui évoquent la crucifixion du Christ notamment quand le condamné est basculé sur la table d’exécution. On notera aussi que les religieux ne sont pas tous d’accord sur ce que leur foi leur enseigne : les parents de Hope ont perdu leur foi et ne pensent qu’à se venger alors que le père de Percy, Monsieur Delacroix, finit par retrouver le chemin de l’église et de la prière en rejoignant soeur Hélène à la fin du film.A travers cette confrontation des personnages, le cinéaste nous fait prendre conscience que la religion propose plusieurs idéologies qui se retrouvent   en concurrence.

Une autre opposition qui traverse le film , c’est la réflexion sur l’existence et la pratique de la peine de mort et son application légale ; Certains américains comme l’avocat de Matthew Poncelet ou soeur Hélène, se battent pour son abolition alors que les parents des victimes dans le scénario ainsi que beaucoup d’autres (on peut penser à la femme médecin en prison qui pratique l’injection et qui a un rôle ambigu), s’y montrent favorables comme dans les Etats qui la pratiquent sous différentes formes (chaise électrique, pendaison, injection léthale) . L’habileté du film consiste à établir une évolution dans la relation du spectateur avec les deux principaux protagonistes;  Le condamné se montre parfois totalement antipathique et parfois très émouvant .Depuis des dizaines d’années les arguments des abolitionistes reposent sur l’idée qu’en tuant un homme quand bien même il se serait rendu coupable des pires atrocités, on devient soi même, collectivement, des assassins. C’est la thèse à laquelle le réalisateur semble se rallier .

Le personnage du condamné est construit sur plusieurs ambivalences : incarné par l’acteur Sean Penn , il représente à la fois le mauvais garçon (bad boy ) et la victime de la société; Le spectateur le voit tour à tour comme un sale raciste , un fils qui cherche à protéger sa mère, un homme manipulateur, un “pauvre” victime de son incapacité à se défendre avec un bon avocat, un tueur cynique et sauvage. Soeur Hélène entretient avec lui, au cours de ses visites au parloir, une relation faite à la fois de fascination et de compassion. D’ailleurs cette question est posée à plusieurs reprises dans le film, qu’est-ce qui l’attire  chez cet homme : est-ce son désir de sauver les plus faibles, ceux que tout le monde rejette ou sa fascination morbide pour le Mal ? C’est en effet une idée qui traverse également le film : comment devient-on un tueur ? Est-on prédestiné à fair tel Mal ?

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Les derniers instants 

 Lors de ses échanges avec soeur Hélène, Matthew raconte l’alcoolisme partagé avec son père, la pauvreté mais le film montre aussi la haine cultivée dè l’enfance, le poids des préjugés et les difficultés de cette famille ; On sera sensible à la dernière visite en prison des trois jeunes frères du condamné qui ont l’air très mal à l’aise et pourtant, on sent que des sentiments existent entre eux , qu’ils ne parvient pas à exprimer; la peine de la mère du tueur est également un moyen que Tim Robbins utilise pour nous faire prendre le condamné en pitié parce que cette femme éprouve réellement du chagrin de perdre son fils .

Le film ne se contente pas de montrer les conséquences d’un meurtre : il révèle les bouleversements de ce geste meurtrier dans les familles des victimes et du tueur ; on retrouve ainsi des idées que Hugo a envisagées dans son roman Le dernier jour d’un condamné en montrant, la visite de Marie , la fillette du prisonnier qui comme Matthew, s’inquiète de la survie des siens : comment vont-ils s’en sortir sans l’argent qu’il ramenait de son travail ? Les spectateurs envisagent alors le condamné sous un autre angle ne dépit de ce qu’il a commis.

Autre idée clé du scénario : dresser un parallèle entre les souffrances subies par les noirs autrefois esclaves dans les plantations et les souffrances de ces deux jeunes gens victimes d’un duo de malfaiteurs ivres et drogués. On pense notamment à la scène où soeur Hélène, en voiture, regarde les ouvriers noirs travailler dans les champs et imagine , en même temps, la scène du meurtre où elle veut croire à l’innocence de Matthew.  L’action de soeur Hélène apparait ainsi sous cet angle comme un moyen d’apaiser les souffrances humaines , passées et présentes. Ce personnage est totalement convaincant dans son interprétation . L’actrice  a d’ailleurs reçu un oscar pour sa prestation.

 

20. mars 2017 · Commentaires fermés sur Humanisme et Renaissance : les points essentiels · Catégories: Première · Tags:
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François Premier 

Il est difficile de caractériser les conséquences de ce mouvement de pensée qui fit son apparition en Europe au seizième siècle tant ses ramifications sont importantes mais nous pouvons tenter de saisir les différents domaines dans lesquels se sont illustrés les Humanistes, ces hommes nouveaux. Il faut aussi comprendre qu’à la fin de la seconde guerre mondiale, le mot humanisme était alors à la mode et on l’utilisait pour caractériser des mouvements de pensée qui semblent refaire confiance aux capacités de l’homme de construire un avenir meilleur . On doit donc distinguer les deux sens du mot : le sens historique  et littéraire et le sens courant . 

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La chapelle sixtine par Michel Ange: 

 Qui sont les Humanistes à la Renaissance  et d’où viennent-ils ? Le domaine artistique a été l’un des premiers à refléter l’évolution de la pensée humaniste et la plupart des historiens s’accordent à penser que ce courant trouve son origine en Italie.Les dates symboliques en revanche les divisent : certains voient la prise de Constantinople comme la marque de la désunion entre deux chrétientés : l’occidentale et l’orientale (1517) ; d’autres pensent que c’est Luther et la réforme protestante qui donne en Europe le coup d’envoi des bouleversements majeurs , à l’intérieur cette fois du christianime occidental ; Il faut sans doute penser à la conjonction de ces deux phénomènes et y ajouter les grandes découvertes des voyages maritimes. 

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L’humanisme de la Renaissance est donc à la fois un mouvement historiquement daté qui donne naissance à une idéologie qui elle va perdurer . Un des aspects essentiels de cette idéologie de la Renaissance est contenue dans le discours de Pic de la Mirandole en 1486 : ” J’ai lu, dans les livres des  Arabes , qu’on ne peut rien voir de plus admirable dans le monde que l’homme.”  Les auteurs vont alors désigner par le terme humanitas ou studia humanitatis, l’ensemble des domaines de la pensée dans lesquels l’homme va trouver l’accomplissement de lui-même et tendre vers un modèle de perfection . 

 

La pédagogie ou science de l’enseignement va peu à peu être au centre des débats car de la qualité de l’éducation des enfants va dépendre leur capacité à es conformer aux modèles hérités de la culture gréco-latine qu’on redécouvre ; Montaigne, ainsi dans ses Essais, va consacrer un chapitre à l’éducation et Rabelais dans ses romans va lui aussi , ériger en modèle, l’éducation reçue par son géant Gargantua.  Erasme développe la théorie selon laquelle l’enfant doit être formé par un maître qualifié et ainsi quitter l’état sauvage pour rejoindre le monde de la culture. Les pédagogues valorisent les activités du corps et de l’esprit ainsi que les aptitudes au dialogue .

Il est possible que les humaniste aient entrevu des différences ou mêmes des incompatibilités entre les sources antiques auxquelles il s’ abreuvent et les enseignements de la religion catholique mais  ils ont privilégié l’esprit de synthèse entre la tradition judéo-chrétienne et le paganisme , à l’image de Saint Augustin et de Saint Jérôme . Peu soucieux de révolutions, ils croient avant tout à la réforme de l’esprit . les conséquences de ce courant e pensée sont nombreuse et touchent des domaines variés.

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Sur le plan artistique, la représentation de l’homme change : il n’est plus seulement une créature de Dieu comme au Moyen-Age ou un citoyen de l’Empire comme dans l’Antiquité, il est désormais une créature vivante et pensante , qui s’efforce d’obéir à la raison et qui va oser s’affirmer en tant que volonté indépendante et oser  dire “Je” comme dans les Essais de Montaigne . Alors que jusque là seul Dieu méritait qu’on lui construise des demeures somptueuses ou qu’on représente des peintures liées aux Ecritures Saintes, désormais, on va ériger des palais en l’honneur des Grands de ce monde et on va es mettre à représenter les familles royales. Le roi François Premier en France accompagne et encourage les artistes qui révolutionnent les techniques artistiques en adoptant notamment des modèles vivants ou en respectant les lois de la perspective.

Les débats traversent les frontières et le dialogue se poursuit entre Budé le français, Erasme le hollandais et Thomas More l’anglais (qui sera décapité par le tribunal religieux pour pensées subversives ) ; En même temps qu’elle découvre sa diversité , l’Europe fait également l’expérience de l’altérité avec la découverte de l’Amérique . Montaigne dira d’ailleurs que chaque homme appelle barbarie ce qui ne correspond pas à son usage ; on découvre également que la terre tourne autour du soleil alors qu’on pensait qu’elle était el centre de l’univers: les liste sud monde connu ne cessent de s’élargir donnantt  lieu à de nombreuses fantasmagories dont témoignent certains écrits qui évoquent des univers mystérieux peuplés de créatures fantastiques.

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Les explorateurs : de Colomb à Vasco de Gama en oassant par Jacques Cartier et Marco Polo , chaque navigateur contribue à éloigner l’inconnu et à faire naître de nouveaux horizons; Mais les explorations se succèdent également dans le domaine des sciences avec Galilée ou Copernic les astronomes ou même Ambroise Paré le chirurgien qui va percer les énigmes du corps et donner accès aux sciences du vivant . 

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Sur le plan politique , les humanistes voient les guerres de religion ravager leurs pays et la royauté devenir de plus en plus centralisée : le pouvoir féodal semble céder du terrain et l’unification de la France par exemple, passe notamment par l’adoption du français comme langue officielle ainsi que le constate le poète Joachim Du Bellay en écrivant en 1549 son manifeste: Défense et illustration de la langue française; Quant au poète Pierre de Rossard, son condisciple de la Pléiade, il voue un culte à la famille royale dont il devient le poète officiel. La poésie va célébrer François Premier et les rimants comme celui de Madame de Lafayette vont refléter le faste de la cour du roi Henri II. 

Quelques pensées célèbres : 

Rabelais : science sans conscience n’est que ruine de l’âme 

Montaigne : il se tire une merveilleuse clarté pour le jugement humain, de la fréquentation du monde. 

Thomas More décrit un pays imaginaire: Utopie où règne la liberté : “Utopus laissa à chacun liberté entière de conscience et de foi (pour éviter le guerres et le querelles )