24. mars 2017 · Commentaires fermés sur Le diable à l’oeuvre : rôles et fonctions du démon dans les FM · Catégories: Divers · Tags:
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Dans son Journal des FM  , Gide évoque à plusieurs reprises son désir de faire du démon un personnage à part entière .  D’ailleurs , ”   Il  n’y a pas d’oeuvre d’art sans collaboration du démon ” écrit -il en 1923 dans un essai sur un romancier russe.  Ce projet a partie liée avec son désir de fabriquer un roman métaphysique dans lequel,  à l’image des romans de Dostoievsky, les drames que vit chacun de personnages peuvent avoir des significations philosophiques . En 1921, Gide écrit dans son Journal que “le traité de non existence du diable ” devait devenir le sujet central de tout le livre; mais de peur sans doute que cela paraisse trop abstrait ou trop choquant , il a simplement inséré une vague figure de démon à l’intérieur même de son roman et de son intention première de faire du diable le sujet  principal du roman, il est resté au final , assez peu de choses. Certes le diable est bien présent dans le roman mais il apparait le plus souvent subrepticement et il demeure attaché à de nombreux protagonistes sans avoir de continuité . Quels rôles joue-t-il  vraiment  dans la composition du roman ?

Le 2 janvier 1921, Gide écrit dans son Jornal des FM : “Le traité de la non -existence du diable. Plus on le nie, plus on lui donne de rélaité. Le diable s’affirme dans notre négation. Ecrit hier soir quelque pages de dialogue à ce sujet – qui pourrait bien devenir le sujet central tout le livre – c’est à dire le point invisible autour de quoi tout  graviterait.. et il précise ce à quoi il pense : “réussite dans le pire et détérioration des qualités les plus exquises ” Quelques jours plus tard, il ajoute à propos de la construction des personnages : “j’en voudrais un (le diable ) qui circule incognito à travers tout le livre et dont la réalité s’affirmerait d’autant plus qu’on croirait moins en lui. c’est là le propre du diable dont le motif d’introduction est : pourquoi me craindrais-tu ?tu sais bien que je n’existe pas . ” ( p 37)

On peut donc se demander pourquoi le romancier a introduit un tel personnage à l’intérieur de son roman et quelles fonctions il occupe au juste ? 

Péché, monstre, éducation puritaine et préférences homosexuelles apparues très tôt , autant de raisons pour que le diable surgisse dans l’oeuvre de Gide ; cet esprit diabolique incarnerait le versant de la chair et de la sexualité que Gide n’assume que partiellement et qui semble le dédoubler; En effet, à propos de son amour pour sa cousine Madeleine qui deviendra son épouse mais avec laquelle il n’aura pas de relations sexuelles, il constate qu’elle représente pour lui le Ciel “que mon insatiable enfer épousait ” ; Le romancier aurait donc pu fabriquer un personnage sans corps, une sorte de démon qui pousse les personnages du roman vers leur instincts les plus vils, qui les incite à faire le mal, à mentir, voler, tricher et tromper. 

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Dans les dernières pages de son Journal, Gide semble même obsédé par le thème du démon et il a notamment écrit quelque pages très étranges qui forment une sorte de chapitre intitulé “identification du démon ” ( p123 du Journal des FM ) Il s’y interroge sur son attirance pour le péché et après avoir évoqué son éducation puritaine et religieuse comme principale cause de sa croyance au diable, il mentionne ensuite son attirance pour la dramatisation à la manière des romantiques notamment de lord Byron, fasciné par la figure diabolique; En effet, à l’époque romantique, le diable est vu souvent comme un rebelle un ange déchu et un héros maudit qui cherche à se dresser contre Dieu et qui meurt en révolté. Les romantiques vont alors plus ou moins s’identifier à cet archétype de l’ange maudit .

Cependant Gide s’efforce de se démarquer de cette sorte de fascination pour tout ce qui a trait aux diableries et à leur folklore car il affecte de mépriser  ces croyances un peu naïves; Il prétend que le diable l’attire parce “qu’on ne le  sert  jamais si bien qu’en l’ignorant” . trait d’esprit sans doute mais on note une volonté de ne pas donner un visage au diable, le considérer comme quelque chose d’impalpable  mais cependant un principe actif qui justifierait a posteriori certaines des actions humaines.   Est-ce une manière pour Gide de suggérer que nous agissons en suivant des pulsions inconscientes et inexplicables qu’après coup, nous qualifions de diaboliques afin de les justifier ?

Le diable qui a ” intérêt à ne pas se laisser connaître ”  ( p 125 ) prendrait ainsi la forme de l’inconscient . Gide affirme même , de manière réitérée qu’il ne croit pas au démon mais qu’il demeure intrigué par le fait qu’il “sait bien comment faire pour s’insinuer dans nos coeurs et qu’il n’y peut entrer d’abord qu’inaperçu ” ( p 125) “Satan ou l’hypothèse gratuite ” ajoute-t-il dans son Journal et si on transpose cette notation sur le plan de la composition de l’ouvre romanesque, alors on peut peut être penser que Gide a utilisé le diable comme pour marquer la dimension totalement gratuite en apparence des actions de  certains personnages dont le lecteur chercherait à comprendre la logique ; ce serait ainsi une manière pour le romancier d’aller à l’encontre des principes d’écriture réalistes qui s’efforcent de motiver la moindre action de chaque personnage au sein de la construction de l’édifice romanesque . 

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Gide se défie des explications simplistes comme il l’écrit dans son journal mais il doit reconnaître que dès qu’il admet l’existence du diable alors des zone d’ombre entières s’éclairent et il a l’impression que “tout à coup jedécouvre l’explication de ma vie ” . La référence au diable pourrait , vue sous cet angle, constituer une sorte de principe explicatif quand rien d’autre ne semble justifier une action mais les souvenirs littéraires déforment quelque peu cette idée car Gide cite Goethe qui en écrivant Faust a incarné le Diable comme esprit tentateur et puissance de séduction.  En suivant ce raisonnement et cet aspect du diable , Gide conclut que ce que nous portons en nous de démoniaque serait à l’origine d’une sorte de puissance intérieure; Tout comme Dieu, le Diable ou son essence pourrait être en nous et nous sentirions alors parfois les poussée de ce que Gide nomme “l’envahissement du mal ” qu’il faudrait distinguer de notre  enfer intérieur .

Dans son travail de traducteur, Gide a côtoyé les démons des autres romanciers  notamment celui inventé par le poète anglais William Blake : ce dernier procède à une forme de renversement des valeurs communément admises en disant que cet ange devenu démon est désormais son ami . Gide noir pas jusque là mais il établit un une bien particulier , d’intimité presque, avec le démon qui va hanter les pages des FM et venir en “perturber” le bon déroulement . 

Gide ne sait donc pas très bien comment se situer par rapport cet esprit diabolique qui s’incarnerait dans beaucoup d’entre nous mais il compte utiliser dans son roman  le démon comme  principe actif d’explication de l’inexplicable. Alors que le romancier montre que la plupart de ses personnages ne savent pas vraiment qui il sont, ce qu’ils font et pourquoi ils agissent de la sorte, ils ont lechoix de se tourner vers le Ciel, Dieu la religion ou justement un principe alternatif : le démon. Plus Dieu paraît inhumain et cruel, trompeur parfois dans le roman , plus le diable paraît un refuge. 

Etudions maintenant les apparitions du démon dans le roman. Elles sont situées essentiellement dans la première partie.

Le diable rôde dès les premières lignes du roman autour de Bernard : ce dernier révise trois semaines avant son bac et sa famille respect sa solitude . “le démon pas “, précise le narrateur ; le ton est donné : le diable va épier les personnages et leur tendre des pièges à leur insu , les tenter et les voir tomber. Bernard ainsi va lire la correspondance secrète de sa mère te découvrir qu’il est le fils qu’elle a eu avec son amant. Juste ensuite , il prend la forme des mauvais instincts des jeunes à travers la conversation des deux pères ; celui d’Olivier et celui de Bernard; Les deux hommes se vantent d’avoir bien élevés leurs fils mais déplorent que la meilleure éducation du monde ne puisse le protéger contre les mauvais instincts, les mauvaises lectures, les mauvaises fréquentations. ( 45) Le diable est ainsi un peu partout dans ces références aux tentations de sortir du droit chemin. 

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Le démon accompagne également, à plusieurs reprises, Vincent, le grand frère d’Olivier  ; Quand il rend l’argent à Lady Griffith chez Passavant et qu’il s’apprête à succomber aux charmes de cette dernière alors qu’il avait l’intention de s’occuper de Laura , voilà ce qui est noté dans le roman : ” C‘était l’heure douteuse où s’achève la nuit et où le diable fait ses comptes” et peu après , à la fin du chapitreV, le narrateur souligne l’égarement de Vincent : “laissons-le tandis que le diable amusé le regarde glisser sans bruit la petite clé dans la serrure. ( 60)  Il va donc devenir l’amant de Lilian .  La présence du diable est bien manifeste mais son action se laisse deviner implicitement; il peut être défini comme une sorte de principe tentateur ou de geste inattendu et inexplicable.

Le personnage de Robert de Passavant pourrait d’ailleurs être considéré comme une sorte de tentateur pour Vincent d’abord et d’une autre manière, pour Olivier qu’il va initier à l’homosexualité. Son double féminin Lilian Griffith corrompt Vincent et lui fait oublier ses devoirs envers Laura. Ses deux personnages sont des incarnations de certains principes diaboliques comme la séduction.

Le diable dans le roman peut se trouver un peu partout et symboliser la voix de la mauvaise conscience des personnages ; artifice d’écrivain, il permet au narrateur de prendre également une distance par rapport au personnage et de demeurer cette voix énigmatique; Toujours à l’affût , le démon suit particulièrement Vincent : “la culture positive de Vincent le retenait de croire au surnaturel; ce qui donnait au démon de grands avantages. Le démon n’attaquait pas vincent de front; il s’en prenait à lui d’une manière retorse et furtive. une de ses habiletés consiste à nous bailler pour triomphantes nos défaites.” Gide applique ici ce qu’il écrit dans son Journal: la force du diable est inversement proportionnelle à la croyance qu’on a en lui; ce sont ceux qui ne croient pas qui en sont les principales victimes.<font face="Times New Roman">; En notant l’évolution du caractère de Vincent, le narrateur note que le démon a partie gagnée au stade 5 qu’il nomme la griserie du gagnant . “ le démon n’aura donc de cesse que Vincent ait livré son frère à ce suppôt damné qu’est Passavant” ( 143 ) . Cette fois le caractère diabolique du Comte de Passavant est nettement précisé. Le narrateur  ajoute ensuite que le diable, avant de s’attaquer à une vertu prive l’âme de points d’appui en la dépaysant et pour illustrer son propos, il explique que Lilian est un dépaysement pour Vincent. “Parfois telle vertu résisterait que le diable avant d’attaquer, dépayse.”

C’est ce que nous constatons  également avec le personnage de Bernard qui est dupe du diable qui le fait agir par dépit alors qu’il n’identifie pas lui-même ce sentiment : “cela peut mener loin ce dépit là et faire faire bien des sottises” Cela rappelle la remarque où le narrateur précisait que Bernard suivait un mauvais chemin: “sur quel chemin t’engages-tu ? ”  quelle pensée t’effleure ? ( 86 ) ;  et c’est encore une intervention du démon qui lui fait retrouver une pièce perdue dans sa poche pour payer la consigne de la valise d’Edouard. On peut mettre cette analyse en rapport avec ces mauvais instincts évoqués par les pères au cours de leur conversation au chapitre 2. 

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Lilian et Robert de Passavant

Le diable peut même parfois dans le roman  s’apparenter à Dieu : par exemple, lorsque Edouard rend visite à La Pérouse , son ancien professeur, ce dernier évoque Dieu en des termes qui pourraient être employés pour désigner le diable : “ Dieu m’a roulé “ dit -il “je crois qu’il joue avec nous comme un chat avec une souris” “Il nous envoie des tentations auxquelles il sait que nous ne pourrons pas résister “ ( p 121)

Dans la seconde partie du roman, on retrouve quelques allusions au diable mais beaucoup plus discrètes : Vincent se croit réellement possédé, Boris a peur de l’enfer et La Pérores confond Dieu et Diable . Comment expliquer cette diminution du rôle du diable ? sans doute parce désormais les personnages sont campés et que le romancier cherche moins à motiver leurs actions qu’à observer leurs interactions. 

Idées de plans pour traiter un sujet sur le diable dans  le roman : 

1un principe actif de composition :

  • un rôle déterminé dans la genèse de l’oeuvre : citer le journal
  • un artifice pour construire le narrateur
  • un élément qui éloigne le roman du réalisme 

2. un élément  pour expliquer inexplicable

  • le diable guide les personnages : 
  • exemple de Vincent
  • exemple de Bernard

3. un principe de réflexion 

  • faire réfléchir à la religion
  • faire réfléchir à l’inconscient
  • un roman métaphysique
12. mars 2017 · Commentaires fermés sur Gide : Les faux-Monnayeurs et les personnages · Catégories: Divers · Tags:
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Georges observé par Edouard

Dans son Journal, Gide indique vouloir pour ses personnages que chacun à leur tour, ils puissent occuper le devant de la scène du roman; Il mentionne également,à plusieurs reprises, éprouver des difficultés pour fabriquer autour du personnage isolé, un système avec des liens de parenté, des rencontres et des détails réalistes. Il prétend entendre ses personnages mais ne pas pouvoir se les représenter; Du coup, les détails physiques sont étonnamment absents de leurs portraits et ils ne livrent de leur passé que des bribes d’informations . Voyons d’un peu plus près quels sont les principes de fabrication des personnages dans le roman. 

1. Des êtres vivants ? 

Lorsqu’il évoque la vie de ses personnages, Gide semble parler d’êtres vivants : il indique ainsi que ses personnages se sont imposés à lui et qu’ils vivent à se dépens; Cette image peut traduire l’idée que la vie du romancier nourrit l’imagination qui elle-même produit les personnages du roman. Gide deviendrai en quelque sorte un peu de chacun de se personnages et oublierait sa propre personnalité pour s’incarner  tour à tour en chacun d’eux; Laura, Bernard, Edouard, Lilian seraient ainsi des parties de lui et grandiraient en lui comme pour l’envahir progressivement. Les personnages sont souvent présentés par les écrivains comme des êtres autonomes et dotés de réactions mais depuis Stendhal, la tendance la plus répandue consiste à considérer les personnages comme des projections de l’écrivain; ce derniers seraient les possibles qu’un seul homme ne peut jamais réaliser en une seule vie; chaque personnage, à sa manière te par certains de ses traits, représente une partie de ce à quoi leur créateur a renoncé ou un rêve qu’il ne réalisera jamais. Ils sont ses espoirs déçus, ses illusions perdues parfois ou se projet avortes; A la fois doubles de lui-même et rebuts de lui, ils représentent des compagnons d’existence  et beaucoup d’écrivains avouent entendre leurs personnages leur parler ou sentir leur présence à leurs côtés quand ils écrivent. 

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2. Des voix ?

Etres de papier , les personnages se caractérisent essentiellement par leurs voix: narration ou dialogues, conversations rapportées de plusieurs points de vue, chaque personnage va s’efforcer d’avoir une voix bien à lui, un style qui le distingue des autres . Gide prétend savoir à la fois ” comment il pensent; comment ils parlent. Je distingue la plus subtile intonation de leur voix ” écrit-il dans son Journal. (8/1921, p 58). En revanche, il ne voit pas leurs visages, leurs traits; Il tente de saisir l’inflexion de leur voix, leur ton et c’est selon sa conception du roman, leur discours qui va donner accès à leur état d’âme . Roman du flux de paroles, les personnages gidiens sont d’incorrigibles bavards et passent leur temps à discuter les uns avec les autres ou à lire les lettres qu’ils reçoivent (ce qui est une variante du même procédé ); Le lecteur peut parfois être étourdi de tant de conversations rapportées de différentes manières.  ” Pour moi, explique Gide, c’est plutôt le langage que le geste qui renseigne.” Et il ajoute “le mauvais romancier construit ses personnages ; il les dirige et les fait parler. Le vrai romancier les écoute et les regarde agir; il les entend parler dès avant que de les connaître et c’est d’après ce qu’il les entend dire qu’il comprend peu à peu qui il sont.” Ainsi si l’on en croit son ami Roger Martin Du Gard , Gide bâtit un personnage à partir d’une forme verbale préexistante. 

3. Un milieu limité ? 

Cette méthode restreint le milieu dans lequel Gide va fabriquer ses personnages car ils doivent tous aimer parler, écrire, converser, échanger . Ils vont appartenir soit à la bourgeoise cultivée soit à l’aristocratie et le roman va ainsi se composer comme une suite d’échanges , de conversations, de réunions entre différents protagonistes. Gide se sert en fait de ces personnages comme des réservoirs d’idées mais il se fait un point d’honneur de “ne jamais exposer d’idées qu’en fonction des tempéraments et des caractères” (Journal 1919 15/11 ) ; chaque personnage va s’exprimer en fonction de son milieu d’origine : le lycée pour Bernard et Olivier , le monde de la littérature pour Edouard et Passavant , le monde des avocats pour Molinier et Profitendieu, la biologie pour Vincent, le libertinage pour Lilian. 

4. Des réservoirs d’idées ? 

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Boris arrive à la pension

Gide se sert en fait de ces truchements pour exposer une grande partie de ses idées personnelles mais il n’endosse pas les revirements de ses personnages et ne prend ainsi pas à son compte leurs évolutions successives ; Cette faculté de dépersonnalisation qu’il évoque à plusieurs reprises dans son Journal pourrait être assimilée à l’inaptitude à s’exprimer en son nom propre.”il m’est certainement plus aisé de faire parler un personnage, que de m’exprimer en mon nom propre; et ceci d’autant que le personnage crée diffère de moi davantage…” Pour le romancier, aucun de ses personnages n’est réellement un double de lui-même ; Il avoue juste que des personnages comme Edouard sont plus proches de lui que passavant par exemple. 

5. Premier et second plan

L’une des particularités du roman gidien réside dans le changement de statut des personnages qui tantôt jouent un rôle de premier plan et tantôt devient des figurants; Le romancier se vante de faire attendre ses personnages avant de les amener au centre des regards et en multipliant les scènes du roman, il augmente d’autant le passage de ces principaux protagonistes à l’arrière plan. De plus, il s’attache à décrire avec précision les personnages qui ne vont jouer aucun rôle et à mettre en lumière certains détails de leur portait physique notamment comme Dhurmer dont on apprend , dès le premier chapitre que c’est “un petit barbu à pince- nez, sensiblement plus âgé que les lycéens. On ne saura rien des détails physiques qui nous permettraient d’imaginer Bernard, Olivier ou Laura.

6. Couples et doublons

Même si dans l’absolu, Gide aimerait que chacun de ses personnages soit “orphelin, fils unique , célibataire et sans enfant” il s’efforce de créer des regroupements entre les différents acteurs de son récit. Le premier principe de regroupement , ce sont les lien familiaux qui permettent de regrouper les personnages par groupes  issus des mêmes familles ; On distingue ainsi les Molinier et l’oncle Edouard, les Profitendieu, et les Vedel-Azaïs ; Le second principe de liaison des personnages, ce sont les liens d’amitié amoureuse comme à la base les couples Edouard/ Laura et Olivier/Bernard ou Passavant/Lilian . Chaque élément de ces couples va ensuite former un nouveau couple avec un personnage associé : Laura avec Vincent , le frère d’Olivier et ensuite avec Bernard; Edouard avec Olivier et ensuite avec Bernard. Passavant va échanger Lilian contre Olivier avec l’appui du frère de ce dernier alors que Lilian va avoir une aventure avec ce même frère Vincent. Au niveau générationnel, les parents s’opposent assez singulièrement à leurs enfants car le dessein du romancier est notamment de montrer comment , après avoir critiqué le mode de vie de leurs parents, les enfants ont tendance à refaire la même chose 🙁 Journal , 20 non 1924 ). Certains comparses n’interviennent qu pour séduire ou détourner un personnage d’un avenir plus ou moins tracé; Ce personnages comme Lilian, Miss Aberdeen , Strouvilhou et Ghéridanisol .

7, Les reflets 

 
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Olivier et Passavant en Corse

Gide a organisé des son système des personnages en se défiant de la conception romantique qui consistait selon lui à ” opposer un personnage à un autre ou de faire des pendants.”   (Journal 17/06/1919 ) Néanmoins, on peut remarquer des personnages , issus de la même tranche d’âge le plus souvent qui représentent différentes possibilités de réactions face à l’ordre établi. On trouve ainsi deux romanciers qui ont des conceptions différentes de la littérature; parmi les enfants d’une même famille, certains s’opposent radicalement et d’autres se ressemblent ; Comme il le souhaitait , il adopte l’art  musical de la fugue comme principe de construction du roman et chaque personnage est construit avec des variations de son modèle : deux grand-pères , deux anglaises , deux serviteurs , et plusieurs démons.