01. mars 2018 · Commentaires fermés sur Le quatrième Mur : idées de plans pour les extraits présentés · Catégories: Première · Tags: ,
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Les 5 passages du roman évoquent tous une étape dans le parcours du personnage de Georges :  la naissance de sa fille  qui lui rappelle son enfance plutôt malheureuse , la mort de sa mère et  l’enterrement de son père; son premier contact avec la guerre ensuite après l’explosion qui interrompt la  seconde répétition des acteurs à Beyrouth ; Sa décision de quitter sa femme et sa fille pour repartir après la lettre de Marwan qui lui annonce la mort de Nakad: état qu’on peut considérer comme une sorte de victoire de la guerre ; sa transformation tragique  en assassin après le meurtre de Joseph Boutros, le frère de Charbel et enfin, l’épilogue du roman: la mort de Georges qui est présentée comme le franchissement du quatrième mur, celui qui sépare les morts des vivants . Pour chacun de ces extraits, il faudra adonner des éléments précis d’introduction, les situer à l’intérieur du récit et ensuite répondre à la question posée à l’aide d’un plan . Voilà quelque exemples , à la fois de questions et de plans sommaires . A l question, quelle est l’importance de ce passage, il faut bien sur répondre à quelle étape il correspond dans la construction du personnage : le lecteur découvre une enfance malheureuse qui explique la violence , Georges découvre la guerre ; Georges rompt avec son passé et abandonne sa famille; Georges tue et devient cette fois un acteur à part entière de la guerre et plus seulement  une victime ; Enfin le romancier offre ici un final théâtral et tragique à son personnage dont le sort est scellé dè les première lignes du roman. Entrons dans le détail des textes …

T 1 : déclencheur – Georges devient père …remontée des souvenirs qui , aux yeux du lecteur, participent à la construction du personnage de Georges , doté d’un passé.

  • père et  fils : des rapports marqués par une incompréhension ( les différences , l’absence de souvenirs , les images antithétiques d’ouverture et de refus de communication 
  •   la Figure de la mère : idéalisée, s’oppose à la froideur du père (tendresse contre silence ) : images à commenter, clichés de la tendresse maternelle et du vide laissé par la mort de la mère 
  • le récit de l’enterrement  du père est une anecdote qui illustre la froideur de la relation père/fils : possibilité d’entrer en contact 
  • la violence présentée comme la conséquence de ce manque de corps à corps , peau à peau = Georges devient un combattant et cherchera à défendre sa peau (isotopie de la peau à développer ) 

T 2: l’explosion = déclencheur   PB: comment le personnage relate-t-il cet épisode tragique ? 

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  • un tableau étrange et horrible : les conséquences de l’explosion ; personnages figés , terreur, pleurs , bruits et prières ; détails saisissants .
  • la réaction de Georges : ce qui se passe autour de lui et en lui 
  • personnification de la guerre : une déesse cruelle , un monstre dévorateur 

T 3 : la cérémémonie des adieux 

Déclencheur : Suite à une série d’incidents (anniversaire Mii Linotte , boule de glace, oublis de Georges ) et après la lecture de la lettre de M qui révèle la mort de Nakad, G fait ses valises et part sans dire au revoir ..comment l’écrivain met-il en scène ce départ ? 

  • une absence de sentiments qui cache un mal-être: rupture avec le passé (photo ) 
  • les préparatifs symboliques: rangement, coup de balai, remise en ordre 
  • les affaires qu’on emporte : le sac, la clé et la terre ; dimension tragique 
  • le triomphe de la guerre  

T 4 : Georges devient un assassin 

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Déclencheur : retour de Georges à Beyrouth après la mort de Nakad 

  • avant le coup de feu : préparatifs et étirement du temps , regards croisés : Georges en statue contemple un martyr : une plaie envie, un animal blessé..
  • le coup porté : détail des actions et sentiments du personnage ; la surprise fait place à la stupéfaction : les paradoxes 
  • les conséquences du geste : la mauvaise conscience de Georges qui se cherche des excuses et présente son geste comme une libération pour la victime ; il devient le Mal, un ogre, le Diable ..il est transformé 

Ccl: victoire de la guerre qui a rattrapé et transformé le personnage 

T 5 

Epilogue du roman : retour au premier chapitre et mort de Georges le héros 

  • une mort symbolique : les dernières paroles et les dernier gestes 
  • une mort mise en scène : forme théâtrale et liens avec Antigone 
  • une mort tragique : différée mais inexorable, attendue mais redoutée 
01. mars 2018 · Commentaires fermés sur Abécédaire des Faux-Monnayeurs · Catégories: Divers · Tags:
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Le roman de Gide ainsi que le Journal des Faux-Monnayauers abordent de nombreux thèmes en relation avec la création littéraire.  L’auteur y aborde notamment  son désir d’écrire un roman où il pourrait tout regrouper , tout ce que lui présente la vie ; empêtré dans cette vision idéaliste, il se demande techniquement comment faire et débute une sorte de carnet (son Journal de création, dans lequel on note à la fois l’avancée de son roman et les problèmes qu’il rencontre ) ; Gide inscrit au jour le jour ses sources d’inspiration : un roman où il serait question de deux soeurs,  (Laura et Rachel ou Laura et Sarah ) d’un séducteur (Vincent ), du conflit des générations (Bernard et son père, la famille Molinier ) ; L’écrivain se méfie des roman d’idées et compte sur ses personnages pour incarner des opinions variées ; Il cherche les meilleurs décors et les techniques de narration les plus adaptées à son projet de roman “total” ou roman “pur” . Il s’inspire également de plusieurs faits divers parus dans les journaux de l’époque comme celui du gang des faussaires et celui des suicides d’écoliers : deux anecdotes qu’il va fondre dans le roman. Il hésite longuement sur l’usage des points de vue conscient qu’il a besoin de différents narrateurs et s’interroge “peut être est-ce folie de vouloir éviter à tout prix le simple récit impersonnel ?  (Journal ) En effet, ce dernier est l’instrument favori de la majorité des  écrivains . Gide recherche des truchements : il pense à des notes de Lafcadio, ensuite à un carnet de notes d’Edouard  (qui deviendra  dans la version finale le journal d’Edouard ) mais aussi à un dossier d’avocat (qui es transformera en discussion entre Profitendieu et Molinier , un juge et un avocat. 

Ce que retient Gide , c’est la volonté que Lafcadio incarne dans le roman, le personnage de l’écrivain en recherche : “il essaierait en vain de nouer des fils; il y aurait des personnages inutiles,des gestes inefficaces , des propos inopérants et l’action ne s’engagerait pas ” .Gêné par l’emploi du Je , Gide s’efforce de ne pas faire raconter directement les événements par l’auteur mais plutôt de les faire apparaître légèrement déformés soit par des participants soit exposés par un journal, par exemple. En parlant de son Journal , il écrit “il faut que ce carnet devienne en quelque sorte le cahier d’Edouard; il contiendrait des remarques d’ordre général sur l’établissement, la composition et la raison d’être du roman”. De même lorsqu’il réfléchir à la base artistique de son roman, Gide reprend cette idée de la méditation d’Edouard. Dans son second carnet, il écrit “ce cahier où j’écris l’histoire même du livre,je le vois versé tout entier dans le livre,en formant l’intérêt principal, pour la majeure irritation du lecteur . 

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Edouard lui pose véritablement des problèmes insurmontables : il tente de produire un roman pur dont il défend la théorie et auquel il rêve mais, en même temps, “c’est un amateur, un raté.Et ce roman, il ne parviendra jamais à l’écrire ; Pourtant au fur et à mesure que Gide pense à certains aspects de son roman, il précise de plus en plus souvent qu'il faudra le faire dire par Edouard ; Par exemple, il souhaiterait donner l'impression que comme dans la vie, quantité d'amorces de drames se présentent mais il est rare que ceux-ci se poursuivent et se dessinent comme a coutume de les filer un romancier . Il refuse ici que la narration n’imite pas le mouvement naturel et comme inachevé de la vie . L’écrivain confie à ses amis  et note dans son Journal être davantage intéressé par la manière de présenter des figures que par l’invention de nouvelles figures . 

Amour/Amitié

Je crois que c’est le propre de l’amour de ne pouvoir demeurer le même ; d’être forcé de croître, sous peine de diminuer </b>; et que c’est là ce qui le distingue de l’amitié.

Dans le domaine des sentiments, le réel ne se distingue pas de l’imaginaire </b>; Et s’il suffit d’imaginer qu’on aime pour aimer, ainsi suffit-il de se dire qu’on imagine aimer un peu moins , pour aussitôt aimer un peu moins , et même pour se détacher un peu de ce qu’on aime ou en détacher quelques cristaux.

. « Il est l’ami de beaucoup de monde » (parle de Passavant)

. « Je retiens la définition que Méral me donnait de l’amitié : « un ami, disait-il, c’est quelqu’un avec qui on serait heureux de faire un mauvais coup » Le journal des faux-monnayeurs

Désir

Du rassasiement des désirs peut naître , accompagnant la joie, et comme s’abritant derrière elle, une sorte de désespoir.

Education /Instinct

La meilleure éducation du monde ne prévalait pas contre les mauvais instincts.

Famille

Ne pas savoir qui est son père, c’est ça qui guérit de la peur de lui ressembler.

L’égoÏsme familial, à peine moins hideux que l’égoïsme individuel.

Famille je vous hais.

« Les sentiments pour les progéniteurs, ça fait partie des choses qu’il vaut mieux ne pas chercher trop à tirer au clair »

Faux -Sentiments

“Chacun de ces jeunes gens, sitôt qu’il était devant les autres, jouait un personnage et perdait presque tout naturel”

– “Tant que Lucien ne cherche qu’a persuader les autres, il n’y a que demi-mal. C‘est le premier degré de l’hypocrisie”

– “Le véritable hypocrite est celui qui ne s’aperçoit plus du mensonge, celui qui ment avec sincérité”

Femmes :

« Au fond, je me demande quel pourrait être l’état d’une femme qui ne serait pas résignée ? J’entends : d’une « honnête femme »… Comme si ce que l’on appelle « honnêteté » chez les femmes, n’impliquait pas toujours de la résignation ! »

« L’exemple de ses deux sœurs l’avait instruite ; elle considérait la pieuse résignation de Rachel comme une duperie ; ne consentait à voir dans le mariage de Laura qu’un lugubre marché, aboutissant à l’esclavage. […] Elle ne voyait point en quoi celui qu’elle pourrait épouser lui serait supérieur. […] il lui semblait que, de la politique même au besoin, la femme fait souvent preuve de plus de bon sens que bien des hommes… »

« Rachel s’est effacée toute sa vie, et rien n’est plus discret, plus modeste que sa vertu. L’abnégation lui est si naturelle qu’aucun des siens ne lui sait gré de son perpétuel sacrifice. C’est la plus belle âme de femme que je connaisse. » Partie III chap 2 p.230

Journal/Roman

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Ce nouveau carnet, sur quoi j’écris ceci, ne quittera pas de sitôt ma poche. C’est le miroir qu’avec moi je promène. Rien de ce qui m’advient ne prend pour moi d’existence réelle, tant que je ne l’y vois pas reflété. »

«Je voudrais tout y faire entrer, dans ce roman. Pas de coup de ciseaux pour arrêter, ici plutôt que là, sa substance. Depuis plus d’un an que j’y travaille, il ne m’arrive rien que je n’y verse, et que je n’y veuille faire entrer : ce que je vois, ce que je sais, tout ce que m’apprend la vie des autres et la mienne »
 « Sur un carnet, je note au jour le jour l’état de ce roman dans mon esprit<font color="#000000"> ; oui, c’est une sorte de journal que je tiens, comme on ferait celui d’un enfant… C’est à dire qu’au lieu de me contenter de résoudre, à mesure qu’elle se propose, chaque difficulté (et toute œuvre d’art n’est que la somme ou le produit des solutions d’une quantité de menues difficultés successives), chacune de ces difficultés, je l’expose, je l’étudie. Si vous voulez, ce carnet contient la critique de mon roman ; ou mieux : du roman en général. »

Littérature

« Lettre à François Mauriac » de Gide :« C’est avec les beaux sentiments qu’on fait de la mauvaise littérature »

Notes prises par Gide dans son journal intime à propos de l’écriture et de la réception des faux monnayeurs :1921 : « Je crois que le majeur défaut des littérateurs et des artistes d’aujourd’hui est l’impatience. »

Mensonge

« Il ne pouvait pourtant pas raconter la vérité, livrer aux enfants le secret de l’égarement passager de leur mère »

 je reste ahuri devant l’épaisseur du mensonge où peut se complaire un dévot »

Morale

« Les bourgeois honnêtes ne comprennent pas qu’on puisse être honnête autrement qu’eux »

« Mais les préjugés sont les pilotis de la civilisation »

« Il suffit bien souvent, de l’addition d’une quantité de petits faits très simple et naturels chacun pris à part, pour obtenir un total monstrueux. »

« Il est bon de suivre sa pente, pourvu que ce soit en montant”

« On ne découvre pas de terres nouvelles sans consentir à perdre de vue, d’abord et longtemps, tout rivage. »

« Que sert d’interdire ce qu’on ne peut pas empêcher »

« Il y a beaucoup de choses très belles que nous verrions si nous étions moins méchants 

Passion

Les passions mènent l’homme non les idées.

Personnages

Edouard (dans le Journal des FM )

Je dois respecter soigneusement en Edouard tout ce qu’il fait qu’il ne peut écrire son livre. Il comprend bien des choses mais se poursuit lui même sans cesse; à travers tous, à travers tout. Le véritable dévouement lui est à peu près impossible. C’est un amateur, un raté.»

« Personnage d’autant plus difficile a établir que je lui prête beaucoup de moi.»

« Il y a eu maldonne : C’est Olivier qu’Edouard aurait du adopter ; et c’est Olivier qu’il aimait. »

Un vieillard, ça n’intéresse plus personne ” (à propos de La Pérouse)

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Vie /Existence

« La manière dont le monde des apparences s’impose à nous et dont nous tentons d’imposer au monde extérieur notre interprétation particulière, fait le drame de notre vie. La résistance des faits nous invite à transporter notre construction idéale dans le rêve, l’espérance, la vie future, en laquelle notre croyance s’alimente de tous nos déboires dans celle-ci »

« Dans la vie, rien ne se résout ; tout continue. On demeure dans l’incertitude ; et on restera jusqu’à la fin sans savoir à quoi s’en tenir ; en attendant, la vie continue, tout comme si de rien n’était »

 

26. février 2018 · Commentaires fermés sur Cris de Laurent Gaudé · Catégories: Le livre du mois · Tags:

Des romans sur la guerre 14/18 , on ne les compte plus ; Alors pourquoi écrire encore en 2001 un récit sur cette guerre qui a tant  marqué les esprits ? Cris est avant tout un récit contemporain: par sa forme éclatée, polyphonique, qui fait entendre toutes les voix des personnages et par les thèmes abordés également, universels mais tellement actuels ; Cris nous fait réfléchir , au delà des descriptions de la guerre et de ses horreurs, à la manière dont le langage humain peut survivre à la guerre et transformer ces expériences humaines en récits, les mettre en voix. En effet, les Cris des soldats se mêlent aux cris de la guerre personnifiée en une sorte de  monstre infra-humain. Comment décrire avec des mots, les expériences de la terreur, les bruits assourdissants du feu lorsqu’on se trouve en première ligne, le fait de voir mourir ses compagnons dans d’atroces souffrances et d’entendre les hurlements des mourants, des fous et de ceux qui seront à jamais transformés et marqués dans leur chair par ce qu’ils ont vu et entendu ? 

En effet , l’auteur a cherché avant tout à faire entendre les voix des hommes dans la guerre, au milieu des combats. Bien sûr le lecteur averti peut aisément reconnaître des  indices des affrontements de 14/18: guerre de tranchées, guerre dans la boue et  le froid, avec des lignes de front et la relève des soldats, les permissions à l’arrière; mais il ne s’agit pas d’un roman autour de la guerre ou d’un récit qui chercherait à montrer toute  la guerre, c’est plutôt une tentative de mettre en mots ce qui ne peut être dit ou entendu; chacun des soldats, chaque personnage imaginé par l’écrivain, représente symboliquement une attitude possible de l’homme sous la mitraille; il y avait ceux qui se taisaient et ceux qui hurlaient, ceux qui couraient et ceux qui tremblaient, ceux qui priaient et trouvaient refuge dans la foi et ceux qui mouraient en maudissant Dieu et les hommes.

Gaudé a ainsi inventé autant de personnages que de possibilités de faire entendre la voix de la guerre à travers l’homme et à travers l’art en général et l’écriture en particulier; En lisant ce roman, vous ne pourrez pas vous empêcher de penser à celui auquel vous auriez pu ressembler. Quels cris auriez -vous poussés durant l’assaut ? Comment inscrire ces voix dans notre espace actuel sans penser qu’elles furent sans doute réelles ? La fiction donne ici à voir autant qu’à entendre ce qui fut et ce que l’homme vécut.

 Quelques voix : Jules ouvre la marche et c’est sa voix qui débute le récit mais Jules marche tête basse et sans “rien dire à personne”; D’où il vient , il ne veut rien en dire et lorsqu’il se remémore ce qu’il  a vu et ce qu’il  a fait , il ne sait pas comment le dire aux autres ; d’ailleurs les hommes de la vieille garde n’ont même plus la force de parler et se contentent d’ ” un grognement parfois. Pour dire qu’ils m’ont reconnu. ” Marius lui , a fait comme tout le monde durant l’attaque : il a gueulé et couru. Boris lui a failli mourir et Jules lui a sauvé la vie. Le médecin entend trop de cris autour de lui et ne sait pas nommer “les cris que poussent  les hommes qui se débattent ” Les souffrances qu’endurent les hommes n’ont pour lui, pas de nom . L’homme qui meurt est au- delà des cris : c’est ce que pense Marius quand il contemple le corps de Boris , tué par l’homme cochon : ” j’ai voulu pleurer. Mes lèvres tremblaient mais aucun liquide, aucun son ne sortait de mon corps.” (101)

L’homme- cochon est un des personnages les plus mystérieux du récit : on prétend qu’il s’agit d’un soldat devenu fou et qui ne sait plus parler; “certains affirment qu’il s’agit du fantôme écorché du champ de bataille” et que ses hurlements rappellent aux hommes leurs meurtres quotidiens. Une chose est sûre , c’est que personne ne supporte les cris horribles qu’il pousse : lamentations ou fou rire d’une bête sauvage, certains disent même que c’est le cri de la guerre elle-même, le chant démembré des morts. Pourtant quand il pousse ses cris fauves, on  l’impression qu’il prête sa voix aux hommes pour pleurer leurs morts . ” (102) “Je crois que c’est la terre qui hurle par cet homme ” dira le médecin .

 Pas de récit de guerre sans évoquer les combats et les combattants ; Certains ne feront qu’une courte apparition dans le roman. Le lieutenant Rénier va mourir lors de la première charge et sa mort va le priver définitivement de sa voix : bouche ouverte et yeux écarquillés ” il semble encore crier à l’attaque alors qu’il gît dans la boue, que son corps est froid et que plus jamais personne n’entendra sa voix. ”  Le narrateur ajoute qu’il méritait mieux que cela; (67) et évoque la fin tragique de tous ces jeunes gens qui pensaient mener une autre guerre , une guerre du siècle passé.  “ils tombent une belle phrase sur les lèvres qu’ils n’ont pas le temps de prononcer” (69)   Durant ce premier assaut de la relève, certains soldats comme Messard, se mettent à hurler : “il gueule à plein poumons; Je l’entends hurler et je le bénis pour ces exhortations lancées au ciel . Car dans la mêlée de l’attaque, ces cris si violents, si bestiaux, je les écoute et je les suis . ” (64) 

Durant la mêlée, certains hommes craquent et se retournent contre Dieu ou sombrent dans la folie; c’est le cas de Barboni qui prononce le De profundis avant d’exécuter un jeune messager allemand d’une balle à bout portant en plein visage. Pendant ce temps, Jules roule vers la vie après avoir déserté et trahi les siens et la prière qu’il prononce est en quelque sorte l’inverse de celle de Barboni, c’est un hymne à la vie , c’est un Je vous salue Marie ou plutôt je vous salue Margot, d’un genre très spécial ;

Les morts contre les vivants : qui va l’emporter ? quels cris vous hanteront le plus longtemps ? et si au final, tout le monde sortait perdant de cette guerre en ayant certes gagné des combats mais perdu une part de son humanité . Ils furent pourtant de braves petits soldats parfois…

26. février 2018 · Commentaires fermés sur Antigone d’Anouilh : extrait 3 de Et vous l’avez fait …à un roi des bêtes .. Qu’est-ce qu’être roi ? · Catégories: Première · Tags:
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 Durant une grande partie de la tragédie, Antigone se dresse face à son oncle Créon et interroge notre conception du pouvoir et de la notion de gouvernement juste; Anouilh, en effet, souhaitait insister en créant cette pièce à la fin de la seconde guerre mondiale, au beau milieu de l’occupation allemande de la Capitale, sur la notion de résistance ; Fortement choqué par les affiches de propagande allemande qui présentent les résistants du commando Manoukian comme des terroristes et de dangereux bandits, le dramaturge a choisi,en réadaptant le mythe antique de cette jeune fille qui s'oppose à la Loi au péril de sa vie , de questionner le public français sur ses représentations de la collaboration. En effet, dans cette scène, on trouve de nombreuses allusions à l ‘actualité historique de la France occupée; Créon y figure la collaboration, , ceux qui ont dit oui à l’occupation, qui ont cessé de se battre et ont refusé  de résister, tandis qu’Antigone symbolise la refus de tout compromis, l’intransigeance et l’absence de compromission. Cet extrait montre le caractère inconciliable des deux personnages qui représentent deux attitudes de l’homme . Nous pouvons dans ce passage analyser le caractère dramatique du face à face et   les arguments de Créon qui illustrent les paradoxes de la conception du pouvoir  . 

  Quelle est l’attitude d’Antigone dans ce face à face ? Créon est immédiatement accusé par la jeune femme dès sa première réplique : cette dernière met l’accent sur la les contradictions du personnage de Créon auquel elle reproche de ne pas être maître de ses actes soi disant  “vous allez me faire tuer sans le vouloir. Et c’est cela être roi . ” Cette répartie cinglante illustre l’ironie de la nièce du roi ; Comment un chef d’Etat peut- il agir contre sa volonté ? est-il , parce qu’il gouverne, privé de son libre arbitre et doit il prendre des décisions qui vont à l’encontre de se convictions ou bien, est-ce une excuse pour un gouvernant ? Elle se présente comme une reine et sous- entend que son oncle a été lui, privé de sa liberté; Le contraste apparaît ici par les didascalies internes : “ongles cassés, bleus que tes gardes m’ont fait aux bras, peur qui me tord le ventre “;  L’héroïne pourrait tout aussi bien représenter les résistants arrêtés que la gestapo et la milice française torturent pour les faire parler . En rappelant son rang de reine alors qu’elle n’est que princesse et que son oncle est le roi en exercice , Antigone se hausse ici à son niveau et devient son égale. 

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Dans sa seconde réplique, elle se montre inflexible et rappelle à son oncle qu’il va devoir “payer maintenant” : Anouilh envisage ici clairement les conséquences de la collaboration et la mauvaise conscience, sans doute qui s’est abattu sur une partie du peuple français ,hostile au départ à l’idée morale d’une collaboration mais qui ont accepté la décision de leurs gouvernants pour maintenir la paix et épargner une guerre longue et qui aurait coûté la vie à des millier d’hommes ; En voyant l(évolution du conflit, certains français devaient songer qu’ils avaient fait le mauvais choix; ce qui explique aussi que les engagements dans la Résistance se ont multipliés au fur et à mesure de l’avancée du conflit et des défaites de l’armée allemande ; Le spectateur peut se demander en qui va consister le prix à payer ici ; Pour le roi, ce sera la perte de ceux qu’il aime: son fils , sa femme et ensuite la condamnation, dans un palais vide , à la solitude éternelle. La formule employée par Antigone: “vous ne vous arrêterez jamais de payer maintenant ” a un caractère tragique et rappelle le fonctionnement même de la tragédie : une catastrophe que rien ne peut arrêter une fois qu’elle est enclenchée. Le Oui de Créon marque ainsi pour lui l’entrée dans l’univers tragique .

La troisième intervention de la jeune fille qui répond brièvement à la tirade de son oncle nous ramène à cette inflexibilité qui est sa marque : la didascalie “secoue la tête ” illustre ici le refus et la négation. La jeune fille n’essaie pas de raisonner ni d’argumenter ; Elle se présente comme un bloc farouche de certitudes et de volonté : “je ne veux pas comprendre “; Elle montre ici la tpute- puissance de sa volonté ; Alors que Créon prétend lui, ne pas pouvoir agir selon sa volonté, Antigone elle semble gouvernée par cette volonté même ; Ce faisant, elle perd toute compassion devient presque inhumaine ; Il est difficile ici pour le spectateur de savoir s’il admire le personnage ou s’il la trouve trop orgueilleuse et trop hautaine ici. Elle rappelle ensuite la raison de son existence même en tant que mythe : “je suis là pour autre chose que pour comprendre. Je suis là pour vous dire non et pour mourir. Anouilh rappelle à son tour la raison d’être de ce personnage qui depuis l’Antiquité incarne le Non ; Le dramaturge nous ramène également au fonctionnement de la tragédie où chaque personnage joue un rôle défini à l’avance.

Antigone termine le face à face avec deux réparties très courtes : elle remet en cause l’argument de son oncle qui évoque la facilité de dire non en répondant laconiquement  “pas toujours ” ; En fait, elle risque sa vie et le rappelle ici au spectateur ; Elle accepte de perdre la vie , considéré par beaucoup comme notre bien le plus précieux, simplement pour continuer à dire Non et faire de ce refus sa ligne de conduite . Elle peut évoquer ici la mort terrible de tous les résistants détenus qui ont refusé de parler ; au spectateur ensuite de mesurer la valeur de l’argument que lui opposera alors son oncle : “c’est facile de dire non, même si on doit mourir ” . Est-ce vraiment aussi facile de donner sa vie pour  continuer à demeurer fidèle à ses convictions et à ses principes ?  

La dernière intervention d’Antigone prend , une fois de plus , une dimension ironique . Alors que son oncle se défend en mettant en avant les difficultés inhérentes à l’exercice même du pouvoir et en prenant l’exemple des animaux qui avancent sans se poser de questions toujours prêts  à perpétuer leur espèce; sa nièce se moque de lui ” Quel rêve ,hein, pour un roi, des bêtes “ Cette réplique critique violemment la manière dont le roi envisage la manière de gouverner ; Il faut comprendre ici : quel rêve ce serait pour un roi d’avoir à diriger des animaux à la place des hommes car les animaux ne se posent pas et questions et obéissent aveuglément . Antigone dans cet extrait critique e, une fois déplus, les choix de Créon qui engagent l’avenir de tout un peuple. 

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Comment ce dernier réagit-il aux accusations de la jeune fille ? Sa première réplique tente de toucher Antigone et fait appel à sa compassion ” Alors aie pitié de moi; Vis. ” Il rappelle à cette occasion que lui-même a déjà perdu deux neveux dans cette guerre , que son fils est le fiancé d’Antigone donc qu’il va éprouver une peine immense à la voir condamnée par son propre père. Le roi est  impliqué à titre personnel dans cette affaire te n’agit pas en simple spectateur ou simplement au titre de représentants de la loi. Il rappelle  qu’agir selon la loi lui coûte;  Le verbe payer ici répété ” c’est assez payé ” et ensuite “j’ai assez payé ” Le passage de la formule impersonnelle au pronom Je montre bien l’implication du personnage de Créon .  Le roi évoque le règne de l’ordre et reprend l’argument selon lequel le peuple a besoin de cet exemple pour respecter la royauté et ne pas se rebeller . Il invoque donc la raison d’Etat qui fait passer les intérêts collectifs d’une nation avant les intérêts personnels d’un groupe d’individus ou d’un particulier . De plus Créon rappelle l’amour de son fils : ce qui pourrait être un argument décisif face à Antigone et pourrait la faire réfléchir et renoncer , par amour, à son sacrifice . 

La tirade qui suit montre, grâce à la didascalie initiale, la fureur du roi : il traite d’ailleurs sa nièce de “petite idiote “ ; ce changement de ton révèle son exaspération et il démarre son intervention par un juron “bon Dieu ” qui lui aussi, trahit qu’il est hors de lui. Il utilise en,suite des formules impersonnelles qui rappellent qu’il a agi, selon lui, par nécessité impérieuse . “il faut qu’il y en ait qui dosent oui te qui mènent la barque ” ; Le roi justifie ici sa décision en invoquant l’urgence de al situation du pays grâce à la métaphore de la barque ; La France , ou plutôt , Thèbes , est comparée à un vaisseau qui prend l'eau et pour éviter le naufrage et la mort de ses passagers, faut imprimer un changement de direction; Créon es fabrique ici une image de sauveur providentiel qui évite au pays le pire . Ce sont les arguments qu'utilisèrent les partisans de la collaboration te notamment le chef du gouvernement, le maréchal Pétain , pour faire accepter l'occupation allemande aux français : elle était justifiée par cet argument d‘éviter le pire , à savoir la défaite et la ruine du pays. La métaphore est filée avec les mots gouvernail, balotter, prendre l’eau, radeau, cale ... et un second argument est développé par Créon: celui de la sauvegarde de l’intérêt des plus faibles; En effet, face à l aggravait ode la situation, certains s’en sortent mieux que d’autres et n’hésitent pas à mettre les vies de leurs camarades en danger en “pillant la cale” , prenant les provisions d’eau douce et se construisant “un petit radeau confortable ” . Le chef d’Etat doit alors protéger le plus grand nombre et pas seulement une poignée de privilégiés; On peut lire , à travers l‘image du bateau qui prend l’eau, celui de la France déchirée et envahie par les armées allemandes qui ont enfoncé la ligne Maginot et qui menacent de piller et de brûler Paris; En ordonnât la collaboration, le gouvernement de Vichy pense , sans doute ainsi, protéger une partie du patrimoine français. L’image de la tempête qui met à mal le bateau symbolise la guerre  et ses conséquences ; Le roi utilise le terme brute pour évoquer les passagers du bateau et fustige leur égoïsme : “des brutes vont crever toutes ensemble parce qu’elles ne pensent qu’à leur peau à leurs précieuses peaux et à leurs petites affaires ‘ Cette expression “petites affaires ” signale le mépris du roi pour une telle attitude égocentrique qui représente également; comme on l’ a vu, un danger pour l’ensemble du pays; Créon doit donc se situer au-dessus de la mêlée et penser au plus grand nombre, aux plus faibles et aux plus démunis: ceux qui comptent sur l’Etat pour subvenir à leurs besoins et pour les protéger. face à l’urgence il a fallu prendre une décision sans trop réfléchir aux conséquences sinon “la montagne d’eau aurait submergé le navire ” . Par analogie,  et un peu par glissement , nous passons de la tempête et de la vague meurtrière , au vocabulaire militaire avec l’arrivée de la guerre “on gueule un ordre et on tire dans le tas “ Le roi justifie ainsi les crimes commis durant les batailles : pour sauver sa peau ; Les hommes devenus combattants perdent ainsi leur humanité et du coup ‘leur nom” : ils ne sont plus que des obstacles sur le chemin du bateau ; Sa tirade se termine par une adresse à Antigone : Créon sollicite sa compréhension mais cette dernière refuse de chercher à le  comprendre . 

La dernière tirade du roi adopte une autre stratégie d’argumentation ; Créon revient sur la morale du l’action et sur la nécessité d’agir dans l’urgence, sous la pression des événements et face à l’imminence de la catastrophe. Cette fois ce sont les métaphores du travail physique qui vont se substituer à l’action de gouverner et de dire oui ; “suer, retrousser ses manches et empoigner la vie à pleines mains ” sont , selon Créon, du côté du oui ; Le roi se présente alors comme un travailleur manuel, un travailleur qui accomplit une besogne difficile; Par ces images, il suscite la compassion des spectateurs . Par contraste avec cette difficulté , il présente les partisans du non comme des “lâches ” qui refusent justement la difficulté et choisissent la solution de facilité “attendre pour vivre attendre même pour qu’on vous tue” ; Pour lui, dire non condamne les hommes à l’immobilisme qu’il traduit par la notion d’attente ; dire non selon Créon prive l’homme de l’action et il oppose le dynamisme te l’engagement de partisans du oui avec une sorte de passivité des partisans du non. Pour conclure sa tirade, il prend l’exemple de la Nature où selon, lui , il est impossible de dire Non . Ce qui revient à nous faire penser que dire non est antinaturel; “Tu imagines un monde aussi où les arbres auraient dit non contre la sève..”  Cependant on peut  rétorquer ici au personnage de Créon qu’il compare deux éléments qui ne sont pas identiques; dans la Nature, la croissance n’est pas choisie pais relève d’un déterminisme biologique alors que l’homme est une créature qui possède un libre-arbitre et qui peut donc effectuer des choix; Nous ne sommes pas uniquement mus par nos instincts à la différence des plantes et des animaux qui , sont certes des êtres vivants dotés d’une forme de sensibilité mais chez lesquels l’instinct est largement dominant.   

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En conclusion, Créon tente ici de stigmatiser les partisans du Non et de convaincre le spectateur qu’Antigone adopte une attitude regrettable et égoiste en s’opposant à lui et à sa volonté. Il essaie de la faire passer pour une irresponsable, une entêtée qui choisit la facilité et qui se montre lâche car selon lui, dire oui est une décision plus courageuse  que maintenir un refus obstiné; il tente de discréditer pour le spectateur le Non d’Antigone et de justifier sa propre décision ; Lequel l’emportera ; l’avantage ici semble revenir à Créon mais Antigone n’a pas encore dit son dernier mot. 

23. février 2018 · Commentaires fermés sur Qui est Robespierre ? · Catégories: Première · Tags: ,
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Robespierre en BD

Certes ce n’est pas à proprement parler un écrivain mais il demeure un homme de lettres ou plutôt un homme qui sait manier le Verbe. Artisan majeur de la Révolution française, il en incarne à la fois le pire et le meilleur ; Le pire car son intransigeance  a fait de lui le chef d’orchestre de la Terreur et le meilleur car il avait à coeur de transformer en profondeur la société française et de donner des droits au Peuple dans son ensemble sans distinction de classe sociale, de couleur , de parti politique . Considéré par certains comme un tyran, un véritable despote et exécuté le 9 thermidor , son génie politique et sa vision d’avenir , sont reconnus par beaucoup comme des bases de notre démocratie actuelle. Sa biographie ne suffit pas à le faire connaître; C’est pourquoi vous trouverez dans ce billet , un résumé de sa carrière et des citations commentée qui tentent de cerner son idéologie . Commençons par quelques dates …

Sa biographie (abrégée à partir du site hérodote.net ) 

 C’est tout d’abord un avocat : ce qui explique sa connaissance de l’éloquence qu’on apprenait alors aux futurs magistrats dans le cadre de leurs études. Fils d’un avocat d’Arras, qui appartient à la petite noblesse de robe, il a perdu très tôt ses parents et a été élevé par son grand-père .Après ses études, il demeure dans le Nord de la France . Séduit par les écrits sentimentaux de Rousseau, introverti, studieux, il ne fréquente pas de femme et n’a guère d’amis. On le décrit comme un jeune homme solitaire et taciturne. C’est alors que surviennent les élections aux Etats généraux  en 1789. Il signe alors son entrée en politique.

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 Il est rapidement élu député du tiers état d’Arras  et se montre  d’abord discret à l’assemblée mais assidu à un café de Versailles fréquenté par des députés bretons et auquel on donnera le nom de club breton. À l’automne 1789, le roi et l’Assemblée se transportent à Paris. Le club breton s’installe de son côté dans le couvent désaffecté des Jacobins. Il portera alors le nom célèbre de club des Jacobins en référence à ce lieu de leurs premières réunions.

Lorsqu’il prend la parole à  la tribune de l’Assemblée, Robespierre suscite des ricanements avec sa voix éraillée et son emphase amis il va donner toute sa mesure au club des Jacobins. Ce haut lieu de l’agitation révolutionnaire est fréquenté par les députés comme par les artisans de la ville, ceux que l’histoire va nommer les sans-culottes .Son détachement des plaisirs terrestres  lui vaut le surnom d’« incorruptible défenseur du peuple ».Après la chute de la monarchie, Robespierre est à nouveau élu député et entre à la Convention le 20 septembre 1792. Il se hisse d’emblée parmi les chefs de file de la Montagne et des Montagnards (on donna ce surnom aux députés qui s’asseyaient en hauteur dans les gradins ) et organise l’élimination de la Gironde, un parti modéré qu’il jugeait coupable de s’opposer à la Terreur. Ses chefs sont proscrits le 31 mai 1793.

L’« Incorruptible » va personnifier la Révolution à partir de son entrée le 27 juillet 1793 au Comité de Salut Public (le gouvernement révolutionnaire), dont il va devenir le président sans en avoir le titre.

Dans son discours du 5 février 1794, il en appelle à la terreur pour sauver la Révolution menacée de l’intérieur (par les partisans d’un retour à la royauté )  comme de l’extérieur (par les guerres des gouvernements étrangers) et lui donne une justification inattendue : « La terreur n’est autre chose que la justice prompte, sévère, inflexible ; elle est donc une émanation de la vertu ; elle est moins un principe particulier qu’une conséquence du principe général de la démocratie, appliqué aux plus pressants besoins de la patrie ». Dictateur de fait après l’exécution de son principal rival Danton, le 5 avril 1794, il relance donc la terreur et même la Grande Terreur. Il tente même d’imposer l’éphémère culte de -l’Etre Suprême en remplacement du christianisme.

Gagnés par la lassitude et la peur, rassurés par les victoires des armées françaises sur le front, les députés de la Convention finissent par s’insurger et décrètent l’arrestation de Robespierre et de ses proches le 9 thermidor An II (27 juillet 1794). L’« Incorruptible »est guillotiné le lendemain.

Ce qu’il a dit : 

Celui qui dit qu’un homme a le droit de s’opposer à la Loi, dit que la volonté d’un seul est au-dessus de la volonté de tous. Il dit que la nation n’est rien, et qu’un seul homme est tout. S’il ajoute que ce droit appartient à celui qui et revêtu du pouvoir exécutif, il dit que l’homme établi par la Nation, pour faire exécuter les volontés de la nation, a le droit de contrarier et d’enchaîner les volontés de la nation ; il a créé un monstre inconcevable en morale et en politique, et ce monstre n’est autre chose que le veto royal.”
Maximilien de Robespierre – 1758-1794 –   Discours contre le veto royal, absolu ou suspensif, 21 septembre 1789

“La loi est-elle l’expression de la volonté générale lorsque le plus grand nombre de ceux pour qui elle est faite ne peuvent concourir, en aucune manière, à sa formation ? Non.”
Maximilien de Robespierre – 1758-1794 – Discours à l’Assemblée constituante, 25 janvier 1790

“La source de tous nos maux, c’est l’indépendance absolue où les représentants se sont mis eux-mêmes à l’égard de la nation sans l’avoir consultée. Ils ont reconnu la souveraineté de la nation, et ils l’ont anéantie. Ils n’étaient, de leur aveu même, que les mandataires du peuple, et ils se sont faits souverains, c’est-à-dire despotes, car le despotisme n’est autre chose que l’usurpation du pouvoir souverain.”
Maximilien de Robespierre – 1758-1794 – 29 juillet 1792

Toute spéculation mercantile que je fais aux dépens de la vie de mon semblable n’est point un trafic, c’est un brigandage et un fratricide.
Maximilien de Robespierre – 1758-1794 – Sur les subsistances, séance de la Convention du 2 décembre 1792

“La première loi sociale est donc celle qui garantit à tous les membres de la société les moyens d’exister ; toutes les autres sont subordonnées à celle-là ; la propriété n’a été instituée ou garantie que pour la cimenter ; c’est pour vivre d’abord que l’on a des propriétés. Il n’est pas vrai que la propriété puisse jamais être en opposition avec la subsistance des hommes.”
Maximilien de Robespierre – 1758-1794 – Discours à la Convention nationale sur les subsistances, 2 décembre 1792
 

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Lorsque le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.”
Maximilien de Robespierre – 1758-1794 – Discours sur la nouvelle déclaration des droits de l’homme et du citoyen, 24 avril 1793

“La force publique est en contradiction avec la volonté générale dans deux cas ou lorsque la loi n’est pas la volonté générale; ou lorsque le magistrat l’emploie pour violer la loi.”
Maximilien de Robespierre – 1758-1794 – Sur le gouvernement représentatif, 10 mai 1793

Ses discours 
Vous trouverez en pièce jointe dans cet article les 4 textes de votre liste du bac qui font l’objet de 4 articles .

20. février 2018 · Commentaires fermés sur La révolution française : un cadre, des acteurs, une tragédie … · Catégories: Première · Tags:
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La prise de la Bastille 

Célébrer le 14 juillet, la prise de la Bastille, c’est ne se souvenir que d’une des journées qui changèrent l’Histoire de notre pays ; En effet, la révolution française avec son cortège de héros et d’horreurs, de passions et de drames, de victoires et d’écrasantes défaites, c’est l’avénement de tout un siècle : celui des Lumières; Parfois les dates de l’Histoire ne correspondent pas toujours aux siècles : le siècle des Lumières commence en 1715 avec la mort de Louis XIV et s’achève dans le sang et les larmes, en 1789; En quelques mois, quelques années tout au plus, de nombreux combats vont trouver une réponse politique et législative avec les discours des orateurs de la Révolution et la déclaration des droit de l’homme et des citoyens. Education, libertés individuelles, démocratie, régime républicain, droit des femmes et des enfants , reconnaissances de l’égalité des droits des citoyens sans tenir compte de leur naissance et de leur rang social , suppression des privilèges de l’aristocratie et droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, fin de la monarchie absolue : voilà quelques avancées que nous devons en partie aux révolutionnaires ; Examinons plus en détails le déroulement des événements qui rythmèrent cette période agitée et découvrons quelques acteurs de premier plan .  

En mai 1789 s’ouvrent les Etats Généraux qui prennent le nom de Communnes et s’instituent Assemblée Nationale le 17 juin ; Le Serment du jeu de Paume est prononcé le 20 et la Bastille prise le 14 juillet; Commence alors la Grande Peur; Le 4 aout on déclare l’abandon des privilèges du clergé et de la noblesse et le 05 octobre les  femmes marchent sur Paris suivies par la garde nationale emmenée par Lafayette qui se rend à Versailles et ramène le roi le 06 octobre . 

Les Etats Génarux comptent 1150 députés : près de 300 pour le clergé et la noblesse et le double pour le Tiers Etat avec notamment Mirabeau , Robespierre, Sieyès l’un des 20 députés de Paris et Volney. Le serment prononcé par l’Assemblée de ne jamais se séparer place cette nouvelle pratique sous le signe des actes héroïques de l’Antiquité mais on y retrouve également l’idée d’un contrat social entre l’individu et la société à la manière des textes de Rousseau . Peu à peu chacun propose des changements pour réduire les injustices : que les peines soient les mêmes pour tous par exemple et  que la justice soit gratuite ; que les emplois ne soient pas réservés à certaines classes sociales mais ouverts à tous ; il fallait que ces intentions fussent converties en lois et c’est ce que va permettre l’adoption de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, Toutefois à y regarder d’un peu plus près, on s’aperçoit que les paysans sont quelque peu oubliés car si les droit des personnes évoluent, étrangement les droits sur les terres sont encore maintenus ; Bien entendu, le roi refuse de signer les décret consécutifs à la nuit du 4 août.

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Le serment du Jeu de Paume par David

Dans Paris la famine gagne du terrain et  des centaines de femmes partent des Halles pour se rendre à Versailles ; le lendemain le roi revient à Paris et promet du pain; jusqu’en novembre 1789, on assiste à un double mouvement de résistance d’une part et d’union du peuple d’autre part; la révolution est désormais en marche et rien ne pourra plus en arrêter le mouvement ; En novembre 1789, on assiste aux premières fédérations de communes rurales qui dépassent ainsi les clivages des Provinces ;leurs mot d’ordre: “Plus de province! la Patrie !” Et ils jurent de s’aider , de se nourrir les uns les autres par delà les divisions des territoires et les frontières naturelles qui les séparent . 

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Le serment de l’ Assemblée

Le 14 juillet 1790 a lieu la fédération générale au Champ de Mars; des milliers de français ont fait le déplacement pour assister au grand défilé sous la pluie ; C’est La Fayette sur son cheval blanc qui prononce le serment fédératif : ” nous jurons de rester à jamais fidèles à la Nation, à la loi et au roi, de maintenir de tout notre pouvoir la constitution décrétée par l’Assemblée Nationale …”  Le roi qui sent la colère gronder décide de s’enfuir mais il est rattrapé à Varennes en juin 1791 et ramené sous bonne escorte ; La question de la guerre va alors diviser la France :les girondins s’y déclarent favorables alors que Robespierre s’y oppose farouchement car il veut d’abord éteindre les contre-révolutions à l’intérieur du pays ; le 20 avril 1792 la France vote la guerre contre l’Autriche; les défaites militaires se succèdent et le roi refuse de ratifier certaines mesures du gouvernement pour ainsi le forcer à démissionner ; en juillet 1792, on proclame la Patrie en danger et on enferme le roi au Temple .

La Grande Peur va déferler sur le pays : durant les premiers jours de septembre, on massacre de nombreux prêtres réfractaires et la foule se gonfle peu à peu  de brigands et de voleurs qui de prisons en prisons, violent, égorgent et pillent . Les exécutions durèrent 4 jours et 4 nuits et la princesse de Lamballe, dame de compagne de la reine, fut parmi les victimes ; On dénombra environ 1000 morts : essentiellement des détenus et quelques  prêtres ainsi que quelques nobles. Après les batailles de Valmy et de Gemmapes ,  le roi est déchu en août  et son procès commence .

La découverte des tractations secrètes entre le roi et les Autrichiens conduit à sa mise en accusation; La Montagne et Saint Just,dès novembre 1792 estiment le jugement nécessaire alors que la parti girondin hésite. Déclaré coupable par 700 vois, on décide pourtant que le jugement ne sera pas ratifié par le Peuple ; la mort est votée par 387 voix contre 334 pour ceux qui s’y opposaient et le sursis est refusé par une courte majorité en janvier . Le roi sera donc exécuté le 21 janvier 1793 : certains feront de lui le martyr de la royauté et de cette révolution qui aura bien du mal, après ce régicide,  à retrouver une unité et l’aval de l’opinion publique . 

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Marat poignardé

Le 1 février 1793, la France  repart en guerre, cette fois  contre l’Angleterre et la Hollande : la Convention a besoin de lever 300 000 hommes et cette mesure contestée par les départements de l’ouest , demeurés majoritairement royalistes, provoque  début mars un soulèvement de la Vendée : les Chouans vont marquer l’Histoire ;les paysans s’en prennent aux villes qui elles sont républicaines ; A Paris, la tension monte également; les Jacobins avec à leur tête Marat veulent destituer les membres de la Convention qui  avaient voté l’appel au peuple lors du procès du roi.  Les girondins de leur côté,tentent de faire accuser Marat par le tribunal révolutionnaire en avril 1793  mais ce dernier le soutient , le surnomme l’Ami du Peuple et demande  un jugement pour 22 députés girondins. L’opposition entre les girondins qui s’appuient sur la province et les Montagnards qui siègent sur les bancs les plus haut de l’Assemblée et s’appuient sur Paris et les grandes villes ne cesse de croître .Les Montagnards accusent 22 députés girondins  d’être redevenus royalistes et obtient leur arrestation . Pendant ce temps, l’armée des Chouans gagne du terrain et encercle Nantes mais leur avancée est stoppée ; Le 13 juillet 1793, Charlotte Corday tue Marat dans son bain après s’être rendue à son domicile; elle est guillotinée le 19 juillet 

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Madame Roland

Les députés girondins sont exécutés le 30 octobre 1793 et Madame Roland  le 8 novembre : “O liberté que de crimes commis en ton nom” furent ses dernières paroles . Danton , Camille Demoulins , Fabre d’Eglantine, débutent une campagne pour mettre fin aux exécutions mais Robespierre , fait voter leur mort  en avril 1794 . Il organise ensuite la fête de l ‘Etre Suprême et marche en tête de la Convention dont il est alors le Président. Le complot prend forme contre celui que beaucoup considèrent alors comme un tyran. Le 9 thermidor d’abord victime d’une tentative d’assassinat , la mâchoire brisée, Robespierre est mené à l’échafaud avec 21 autres membres de la Commune ; 70 le lendemain seront exécutés  et 20 encore le troisème jour .

Quelques noms à connaître : 

Bailly , député du Tiiers-Etat, organisa le Jeu de Paume, maire de Paris, exécuté en mars 1793 parce qu’on l’a tenu responsable de la fusillade du Champ de Mars (a donné l’ordre de   tuer ceux qui voulaient destituer le roi après sa fuite )

Brissot chef du parti girondin, guillotiné le 31 octobre 1793

Charette, prit la tête des paysans vendéens insurgés et fut fusillé à Nantes en 1796

Condorcet ,député à la Convention, il vota la déportation du roi, se cacha après l’exécution de se ami girondins, fut arrêté et es suicida en prison en 1794; -Réformateur et spécialiste  de l’Education

Corday : a décidé de tuer Marat qu’elle jugeait responsable des poursuites contre les députés girondins ; Guillotinée en juillet 1793.

Danton : avocat, fonda les Cordeliers, intégra la Commune et combattit les girondins; il demanda toutefois la fin de la Terreur et Robespierre le fit exécuter après un procréé escamoté ( avril 1794 ) 

Marat : fonde un journal intitulé l’Ami du peuple , député montagnard à la Convention, il voulait exécuter tous les ennemi edu Peupl est fonda le  tribunal révolutionnaire et le comité de Sureté; Poignardé par Charlotte Corday en 1793

Mirabeau : élu député du Tiers-Etat,  défend l’idée d’une monarchie constitutionnelle ; inhumé au Panthéon, on eut après sa mort en 1791, la preuve de sa duplicité : il était complice de la Cour.

Robespierre : député, devient républicain , vote la mort du roi et combat les girondins ;défend la nécessité d’un gouvernement révolutionnaire et de la Terreur ; finit par être exécuté par les partisans de ceux qu’il a tués.

Madame Roland: épouse de l’ancien ministre de l’Intérieur en 1792, elle soutient les girondins et les suivra sur l’échafaud. (novembre 1793) 

Saint-Just : député à la Convention, proche de Robespierre , prit des mesures favorables au plus pauvres et contribua au renforcement du pouvoir révolutionnaire. ( exécuté avec Robespierre ) 

 

 

28. janvier 2018 · Commentaires fermés sur Une mort tragique : la mort de Georges dans Le Quatrième Mur · Catégories: Première · Tags:
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L‘épilogue du roman nous présente le récit complet de la mort du personnage principal qui avait déjà été annoncée dès le premier chapitre du roman; le dénouement du roman referme la boucle et nous ramène, en quelque sorte au point de départ: Tripoli , Liban , 27 octobre 1983 un an après le massacre de Sabra et Chatila. Le premier chapitre nous le montre en pleine action : Marwan son guide vient d’être tué dans une explosion et il a trouvé refuge dans un trou où il rencontre un vieux combattant palestinien; Il sait alors qu’il va mourir. Les premiers mots du chapitre 24 intitulé Georges reprennent les derniers mots du chapitre 1 : le palestinien se trompe quand il affirme que Georges a croisé la mort sans jamais tuer.

Comment le romancier nous présente-il la mort du héros ? Tout d’abord il s’agit d’une mort tragique qui prend une dimension symbolique et qui est mise en scène par le romancier en faisant directement référence à la tragédie d’Anouilh Antigone, qui joue un rôle très important dans le roman. Axe possibles ; une mort annoncée, Une mort mise en scène, une mort tragique, une mort théâtralisée, une mort qui entre en résonance avec d'autres morts …

La dimension symbolique : Georges meurt accompagné d’un  nouveau personnage qui représente la durée de cette guerre enter Israël et la Palestine; Ce combattant est issu de Bethléeem (17) : une ville de Cisjordanie peuplée essentiellement de palestiniens musulmans; située au sud de Jérusalem, elle est également la ville où le Christ est né et  donc occupée à l’origine par une population juive. Un autre symbole important c’est la terre de Jaffa : en effet, Georges offre un peu de la terre de Jaffa qu’il a reprise dans la maison d’Imane tuée sauvagement  lors de l’attaque du camp; cette terre représente pour le palestinien un peu de sa patrie perdue et cette terre vient de Samuel qui la destinait aux palestiniens : “j’ai versé la poussière au creux de ses rides noires ” (20) ;

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Ce don a beaucoup de valeur : il représente une identité perdue ; Avant de se lever et de mourir, Georges met sur sa tête la kippa  (44 ) de son ami Samuel, celle qu’il devait porter lors de la représentation d’Antigone car il jouait le rôle du choeur . Il aurait ainsi représenté sur scène” le juif” et le personnage collectif antique témoin du déroulement de la tragédie. D’ailleurs le personnage  du choeur apparait à la fin du roman comme pour prendre le relais du personnage de Georges au moment où ce dernier s’apprête à franchir le quatrième mur (69) ;cette image désigne à la fois le passage du monde des vivants au monde des morts mais aussi le passage de la réalité à la fiction de la scène. Un autre symbole important c’est la clé de Jaffa que Georges garde sur lui. Cette clef représente à la fois l’origine de la guerre car ce conflit a débuté en 1948 juste après la création de l’ Etat d’ Israel qui a entraine l’exode massif des populations de Jaffa; ces palestiniens se sont donc retrouvés privés de terre, sans patrie; beaucoup sont restés attachés à leurs origines et cette clef rappelle l’importance de nos origines; mais cet objet symbolique peut également être considéré comme ce qui va permettre d’ouvrir le passage entre les vivants et les morts ; d’ailleurs dans l’Antiquité, les Anciens possédaient de nombreux rites de passage dont s’inspire ici le romancier. Saint Pierre détient par exemple les clés du paradis et on l’appelle parfois le portier 

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La mise en scène de la mort : le romancier met soigneusement en scène la mort de son personnage principal; Elle intervient au terme de son parcours de personnage et avait été longuement préparée, dès le premier chapitre comme nous l’avons constaté en lisant le roman. Cette mort attendue, redoutée également par le lecteur a des allures de tragédie au sens où on savait déjà ce qui allait se produire; elle est dramatisée par la mort de Marwan et par cette dernière rencontre avec Mahdi: rencontre qui se transforme en un dialogue de théâtre comme nous pouvons le voir avec la mention des prénoms des personnages (MAHDI/ GEORGES/ ) et surtout l’apparition du choeur qui rappelle à la fois celui de la tragédie mais également celui de la pièce d’Anouilh , qui intervient dans l’épilogue. La mort de Georges correspond à une sortie de scène : il a traversé le quatrième mur ( 69) mais le romancier refuse de la décrire “la mort l’a pris comme ça” (70): il ne nous donnera aucun autre détail à l’exception des objet qu’il portait : ” une kippa sur la tête et une clef dans la main ” On se souvient de l’importance des objet symboliques dans le roman: le chandelier qui représente l’amour entre Aurore et Georges, la nippa de Samuel, le foulard d’ Imane; Chaque objet est un peu de l’identité du personnage . 

 Une mort avant tout tragique : Cet épilogue comporte de nombreuses références directes à la pièce d’Anouilh : en plus des noms des acteurs et du choeur, il est fait mention de passages empruntés au texte d’Anouilh ; la tragédie est décrite comme “commode, reposante” (60) et comparée au drame qui lui est “utilitaire et ignoble parce qu’on espérait s’en sortir ” (63) Georges devient donc un personnage à part entière de tragédie et cela lui confère une sorte de majestéc’était pour les rois la tragédie ” (66), une forme de noblesse dans l’acceptation de ce destin ; Les lignes finales sont particulièrement émouvantes avec une sorte du chemin de croix accompli par le héros qui est sorti de sa cachette : “Deux fois Georges est tombé. Il s’est relevé “ (67) Ce parcours fait penser  au calvaire du Christ qui a du porter sa croix et qui est tombé à plusieurs reprises en chemin vers la mort. L’image finale semble adoucir la réalité de cette mort et le romancier fait disparaitre son personnage un peu comme un fantôme. Pour clore son récit, Chalandon a repris intégralement l’épilogue d’Anouilh qui donne une résonance particulière  à sa propre fiction : “toux ceux qui avaient à mourir sont mots; ceux qui croyaient une chose et ceux qui croyaient le contraire -même ceux qui ne croyaient en rien et qui se sont  trouvés rapidement pris par l’Histoire ” cette citation s’applique bien sur au contexte de la seconde guerre mondiale et rappelle certains poèmes de résistance notamment celui d’Aragon intitulé la Rose et le Réséda qui met en scène des combattants réunis dans le même camp au delà de leurs différences initiales. On notera ici la parenté des expressions : ceux qui croyaient au Ciel et ceux qui n’y croyaient pas ” avec ceux qui croyaient une chose et ceux qui croyaient le contraire ” (voir le poème d’Aragon en pj )

Cette citation  peut tout aussi bien désigner le conflit au Moyen -Orient ; en effet, Marwan est mort, le frère de Charmel est mort, Imane a été sauvagement tuée; aucun d’entre eux n’appartenait au même camp; leur mort atteste de l’impossibilité de réunir les hommes des factions ennemies sur scène pour jouer une même pièce qui justement représente des conflits insurmontables ; C’est la guerre qui a triomphé et non la bonne volonté des hommes ; Antigone demeurera éternellement tragique mais la guerre l’ est encore plus.

Avant de mourir Georges dit qu’il n’est plus rien,  ( 48)  qu’il n’est plus de nulle part qu’il n’appartient plus à aucune terre, aucune patrie; la guerre lui a pris ses racines, lui a volé son identité mais lui a fait rencontrer des frères d’armes et de sang; pourtant il rentre chez lui comme si la mort était désormais son unique refuge; ses dernier mots sonnent comme un adieu et résument une sorte de fatalité tragique   : “personne ne quitte ce monde vivant ”  (52) 

23. janvier 2018 · Commentaires fermés sur Autour de la guerre : quelques points de vue ..Voltaire, Céline, Giraudoux et Lemaître · Catégories: Première, Terminale spécialité HLP · Tags: ,
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Pour cette étude qui porte sur  l’homme au centre de la guerre ou face à la guerre , ont été réunis différents témoignages qui attestent de la pluralité des visions de la guerre; Nous allons donc comparer les définitions données par Voltaire dans Candide, Céline dans Voyage au bout de la nuit, Giraudoux dans La guerre de Troie n’aura pas lieu et Pierre Lemaître dans Au Revoir là hautLe conte philosophique adopte plutôt une dimension critique ; le roman de Céline prend appui sur des élements autobiographiques et se veut le témoignage d’un combattant ; la pièce de Giraudoux se présente comme une réflexion sur les causes de la guerre et tente de répondre à la question: pourquoi les hommes font- ils la guerre été pourquoi aiment-il cela ? Quant au roman de Pierre Lemaître, la guerre n’y occupe pas un rôle central ; elle est le déclencheur d’un drame humain, celui d’un jeune artiste qui ne parviendra pas à surmonter le handicap crée par sa blessure au visage. Le romancier y montre surtout les traumatismes engendrés par les mutilations des corps .

Le siècle des Lumières voit apparaître un renversement de l’opinion publique: siècle belliqueux, il amorce une réflexion sur la nécessité de certaines guerres ; Les philosophes, en effet, combattent la guerre en s’appuyant sur son caractère non nécessaire Ils accusent ,la plupart du temps, les Princes et les Puissants de se laisser emporter par leurs passions, leur orgueil et leur soif de pouvoir qui les conduisent à amorcer des conflits dans leurs seuls intérêts. Voltaire est l’un des premiers à développer une critique systématique de la guerre afin d’en démontrer , à la fois le caractère néfaste mais aussi l’absurdité véritable. Dans Candide, son héros s’est engagé dans l’armée uniquement pour gagner de l’argent car il n’a nulle part où aller et il se retrouve,enrôlé , face à la réalité d’une guerre atroce: un conflit destructeur entres abares et Bulgares; Voltaire dresse un tableau apocalyptique du massacre en accumulant les détails sordides : “les vieillards criblés de coups regardaient mourir leurs femmes égorgées, qui tenaient leurs enfants à leurs mamelles sanglantes . ” Le point de vue du personnage est d’abord utilisé pour décrire, sur un ton élogieux , la préparation des troupes et le cérémonial : “rien n’était si beau si leste si brillant et si bien ordonné que les deux armées” La dimension spectaculaire est ici mise en valeur mais très vite , le spectacle se transforme en massacre : ” les canons renversèrent à peu près  six mille hommes de chaque côté ” et Voltaire emploie l’oxymore “boucherie héroïque “ pour rendre compte de cette contradiction . De plus, il montre bien la réciprocité des destructions en précisant que les pertes subies dans chaque camp sont identiques ; Le héros décide alors de déserter et Voltaire le montre s’enfuyant “en marchant sur des membres palpitants ou à travers des ruines ” “hors du théâtre de la guerre ” . La critique des horreurs de la guerre se manifeste de différentes manières et on note que  la désertion de Candide est montrée comme un choix raisonnable : “ il prit le parti d’aller raisonner ailleurs des effets et des causes “ ; vue de l’extérieur, avant le déclenchement des hostilités, la guerre peut paraître admirable mais lorsqu’on se retrouve au front, à l’intérieur des combats, elle devient horrible.

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Louis Auguste Ferdinand  Destouches a choisi lui aussi de consacrer une partie de son roman à la description d’une guerre qu’il a lui même effectuée: la première Guerre Mondiale. Son héros Bardamu se retrouve aux premières lignes ,  dans le conflit tout comme son auteur qui choisit de s’engager dans l’armée à 18 ans devançant ainsi l’âge légal du service militaire obligatoire . Il montre l’horreur des assauts ,la lassitude des soldats et l’acharnement des officiers; Blessé , le héros est évacué et  effectue sa convalescence à Paris ; Il devient alors un adversaire acharné de la guerre et se fait traiter de lâche par sa fiancée. ” vous êtes répugnant comme un rat “lui lance cette dernière et elle se range derrière l’argument de la  nécessaire défense de la Patrie( l 9) . Bardamu persiste  dans son refus en prenant comme illustration l’oubli des morts  tombés sur le champ de bataille  “ils sont morts pour rien ces crétins” et “il n’y a que la vie qui compte “ajoute-t-il ‘ (ligne 16 ) .  Cette confrontation des points de vue se retrouve , sous une autre forme, dans la pièce de Giraudoux où deux camps s’affrontent avec des arguments puissants :.

Jean Giraudoux est un diplomate français qui, parmi les premiers, a pressenti les risques d’un nouveau conflit. En 1935, juste avant le déclenchement de la Guerre d’Espagne, prélude à la seconde guerre mondiale, Giraudoux mesure la montée des nationalismes et se sert d’un conflit légendaire, la guerre de Troie, pour mettre en scène une réflexion sur la  possibilité d’éviter la guerre. Il fait dialoguer bellicistes et pacifistes jusqu’à l’issue tragique : l’ouverture des portes de la guerre en dépit des efforts conjugués d’Hector, qui a rallié l’avis de son épouse Andromaque et d’Ulysse ,le négociateur envoyé par les Grecs. L’extrait que nous étudions se situe au début de la tragédie : Hector vient de rentrer victorieux d’une guerre éprouvante et découvre que son épouse attend leur premier enfant.  Cette dernière set farouchement opposée à une nouvelle guerre qui risquerait de coûter des vies mais son mari se moque de sa sollicitude maternelle en affirmant que le désir de faire la guerre l’emportera toujours “si toutes les mères coupent l’index droit de leur fils, les armées de l’univers se feront la guerre sans index.”( l 1) Andromaque se déclare prête à tuer son propre fils plutôt que de lui faire courir le risque de se faire tuer à la guerre ; ce qui peut paraître quelque peu excessif ..elle demande ensuite à son mari s’il aime la guerre et la réponse d’Hector est étrange :il définit d’abord la guerre par ses aspects négatifs “ce qui nous délivre du bonheur, de l’espoir, des êtres les plus chers. ” avant d’ajouter qu’il se sent invincible juste avant de combattre grâce à cette délégation que les Dieux  lui donnent . Leur discussion se clôt sur un nouveau paradoxe ; L’homme se sent à la fois un Dieu et moins qu’un homme et respecte la vie au moment où il s’apprête à l’ôter à d’autres hommes.

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Pierre Lemaître revisite à sa manière  les affrontements de 14/18 en inventant un point de départ tragique à sa fiction. Albert , l’un des deux héros du roman , constate , au cours d’un assaut  que deux des hommes du bataillon ont été abattus de deux balles dans le dos et il soupçonne alors son officier :le lieutenant Pradelle , de les avoir exécutés pour faire croire à des tirs allemands. Avec un certain cynisme, le romancier critique les officiers qui se croient des Dieux au moment du combat ; le lieutenant est qualifié de “Messie “; Le décor de la guerre ressemble à un décor “de fin du monde “. Les soldats sont présentés comme terrifiés ” des types hurlent comme des fous pour s’enivrer, pour se donner du courage.” Il sont armés d’une colère définitive et d’un désir de vengeance : ” même Albert terrorisé par l’idée de mourir, étriperait le premier venu ” . Les hommes ont le ventre noué, la gorge sèche et courent baissés, par réflexe d’offrir le moins de prise possible comme si l’on faisait tout le temps la guerre dans la crainte du ciel ” . Pierre Lemaître reprend la plupart des clichés sur la guerre des tranchées : la terre épaisse , la boue, la peur et la colère ; Il utilise un narrateur omniscient à la différence de Laurent Gaudé qui dans Cris, ne nous offre que les pensées de ses personnages sans jamais aucun commentaire .

22. janvier 2018 · Commentaires fermés sur Un nouveau personnage de Germinal : le gendarme face aux mineurs · Catégories: Seconde · Tags: ,
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Le sujet d’invention vous proposait de créer un nouveau personnage de Germinal en vous inspirant des techniques utilisées par Zola pour donner une épaisseur réaliste à ses personnages. Il s’agit d’un gendarme un peu particulier car originaire d’une famille de mineurs dont le père est  parti étudier à  la ville . Ce personnage se trouve donc fort logiquement pris dans un conflit d’intérêt. Les principales difficultés du sujet consistent à fabriquer une description organisée et cohérente; Pour cela, il vous faut d'abord répondre à un certain nombre de questions avant même de commencer à rédiger votre portrait. Voici quelques exemples de problèmes à résoudre …

 

Par quoi commencer ? Comme on on vous demande d’imiter Zola et d’employer les mêmes techniques que le romancier réaliste, la première question à se poser était la suivante : comment Zola introduit-il les nouveaux personnages dans Germinal ? Souvenez- vous de l’arrivée d’ Etienne : le romancier montre ses habits usés et trop fins pour la saison  pour traduire sa pauvreté et le rendre pathétique : Il souffre du froid ; Il détaille son allure  mais n’en fait pas encore le héros du roman; il ne donne pas tous les éléments de son hérédité dès sa première apparition; En effet, pour ne pas alourdir les descriptions,le romancier complètera le portrait du personnage au fur et à mesure qu’il le montrera en train d’agir. On apprendra bientôt ses origines dans une scène de travail à la mine avec Catherine qui lui pose des question sur son passé. Le romancier réaliste motive ainsi se descriptions :aucun détail n’est purement décoratif; Tous les éléments vont servir lors des actions ultérieures du récit. 

Au brouillon, il peut être utile de répartir les événements dont le personnage sera le témoin ; C’est à dire de le mettre en situation ; Beaucoup ont  trop tardé à le mettre en place sur les bords de la fosse. Vous pouviez, par exemple, dresser une liste des actions qu'il allait tenter et de ce qu'il allait voir; Va-t-il affronter la colère de la foule ? Va t-il devoir prendre une décision comme celle de tirer ou de faire tirer sur la foule ? Est-il à distance en train de  contempler la montée de la violence des ouvriers ou est-il au premier rang, à couvert, protégé ou à découvert, exposé ? Bref, il fallait lui trouver un angle de vue et construire la description à partir de ce qu’il voit te de ce qu’il ressent. 

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De sa situation, vous pouviez en déduire une série de sentiments  : A -t-il peur?, Ressent-il de la pitié pour les familles de mineurs ? Quels détails le frappent particulièrement dans le spectacle de la colère des ouvriers ? Il pouvait être intéressant de ne pas commencer par un portrait du personnage mais de faire entrer le lecteur , in medias res, dans le feu de l’action. Zola ,lorsqu’il introduit un nouveau personnage, le donne à voir brièvement et ensuite seulement, par une sorte de retour en arrière, lui invente un passé , une enfance et finit par le ramener au moment précis dans le roman où le lecteur l’a découvert; Ces  digressions permettent de ne pas trop longtemps interrompre le fil du récit ; Les portraits des personnages sont enrichis au fur et à mesure de leurs apparitions dans le roman; En procédant ainsi, par petites touches, le romancier évite également la lassitude du lecteur. 

La description réaliste se fonde sur un certain nombre de théories et l’une des plus importantes consiste à imaginer des correspondances entre les éléments physiques (moustache, forme du visage, tête, corps, silhouette )  Tout d’abord quelles correspondances alliez-vous imaginer entre son portrait physique et son caractère . Quelles notations physiques vont pouvoir être choisies pour caractériser au mieux le personnage ? Va -t-il être fort, imposant, l’air sévère ou au contraire frêle, l’air doux , peureux . Allez-vous employer des connotations plutôt  positives ou négatives

Une des erreurs férquentes de vos travaux consiste à nommer des éléments que le personnage ne peut connaître comme le nom des mineurs par exemple  : si vous décidez de nommer Etienne et Maheu, il faut que vous trouviez un moyen de justifier la connaissance du personnage ; il pouvait par exemple reconnaître des cousins éloignés mais cette hypothèse demeurait moins réaliste qu excelle qui consistait à imaginer qu’il ignorait l’identité du meneur, un nouveau venu dans le village. 

En règle générale, vous avez perdu le contrôle de la description quand

  • vous avez introduit la première personne du singulier : pas de Je en point de vue interne 
  • vous avez perdu de vue la position du personnage et décrit la foule sans vous préoccuper de l’angle de vision 
  • vous avez inventé une suite non immédiate (le personnage rentre chez lui, quitte la ville, se suicide
  • vous avez inventé des détails gratuits et exagérés comme les yeux bleu saphir ou noisette très clairs ..la plupart des personnages ne sont ni des colosses ni des beautés .. Zola s’efforce de demeurer dans la norme avec des petits  détails positifs et négatifs qui souvent s’équilibrent 
  • vous avez modifié des éléments du roman 

Pour exprimer les pensées et le conflit intérieur du gendarme, vous deviez  tenter de reproduire le style indirect libre, technique mise au point par les romanciers réalistes qui consiste à mixer le langage du personnage avec l’emploi de la troisième personne du singulier et de supprimer la ponctuation du dialogue comme si le personnage se parlait à lui-même ; Tout éprise de décision du personnage devait être précédée d’arguments liés à son passé et à sa connaissance de la situation ; C’est ce qui faisait le principal intérêt de ce personnage ; Il permettait d’avoir un point de vue sur ce conflit qui ne soit pas celui d’un mineur ni d’un bourgeois mais d’un soldat, lié à la fois aux mineurs et qui veille au respect de la loi. 

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Quelques réussites : reprendre les éléments de l’émeute en les faisant commenter par votre personnage qui assiste quelque peu tendu  aux provocations des mineurs ( Bonnement qui réussit à franchir le barrage pour nourrir les chevaux, geste impudique de la Mouquette  les jets de pierre , les insultes, la tension qui monte, la mort de Maheu , les pleurs de la Maheude ) 

Quelques extraits …

 Deux lignes de gendarmes s’étendaient comme des sentinelles et leurs silhouettes  spectrales se confondaient dans le brouillard matinal  (Laura D  ) Un vent frais faisait lever le manteau de laine bleue du jeune militaire : le soleil venait à peine de se lever sur Monsoult (Ambre ) Chétif pour ses 22 ans, sa peau gardait la carnation maladive de son hérédité de mineurs privés de viande (Marie ) Il se sentait lui-même écrasé par le poids de al misère qui suintait des ouvriers (Bilal) 

Ses yeux bleus/  les mêmes que ceux de son père et de son grand-père; c’était une lignée qui portait la même marque et qu’il avait transmis à son fils âgé de quatre ans.  Ses pieds enfoncés dans des bottes de cuir pataugeaient dans un mélange de boue et de neige fondue qui rendait la terre noire encore plus collante ( Marie ) 

Il contempla la foule qui s’avançait en vociférant : une armée noire vengeresse animé par la haine telle une masse informe dont on entendait les cris avant même de pouvoir les distinguer dans le brouillard . (Sonia) Le Voreux pour lui n’était qu’un Dieu de souffrances où petits et grands descendaient en sacrifice quotidien (Caïna )  ; Quand cela cesserait -il ? 

Pour lui cette grève n’était qu’une perte de temps qui rendrait ces pauvres gens encore plus pauvres : ils ne mesuraient pas la force à laquelle ils devaient faire face ; en quoi une simple révolte pouvait-elle bien changer les choses ; Cele ne fera qu’empirer (Charline ) Oui les mineurs devaient assumer leurs revendications et aller jusqu’au bout  mais cette société égoïste et soumise au profit  était-elle prête à les entendre ? (Maxime ) Alors il vit brusquement l’un des mineurs, un homme petit et trapu, s’avancer et présenter, en déchirant sa chemise, son torse dénudé à ses collègues en criant qu’on l’abatte . La balle le visa en plein coeur et ce fut le silence . ( Ambre ) 

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Lui aussi se mit à tirer sur cette foule déchaînée, sans viser quelqu’un en particulier, juste pour se décharger de la peur animale qu’il avait emmagasinée depuis quelques heures  (Clémence ) 

Au fond de lui, cette flambée de violence ne lui faisait que prendre un peu plus conscience qu’il ne menait pas la bataille contre les bons ennemis. (Alice ) Une véritable catastrophe ! (Clémentine ) 

Il avait voulu devenir gendarme parce qu’il croyait en la justice et qu’il pensait ainsi pouvoir apaiser les conflits  : désormais il savait de toute évidence que ce métier l’exposait plus qu’il ne l’aurait souhaité. Il avait l’impression que ses certitudes s’écroulaient autour de lui ..( Léa ) Depuis son plu jeune âge, l’injustice le révoltait mais ce matin là ,il aurait tellement aimé être ailleurs, loin . (Brice ) Quelle sorte d’avenir cette société miteuse et qui craque de toutes parts réservait-elle à son fils ? (Bilal ) 

22. janvier 2018 · Commentaires fermés sur Le quatrième mur : la découverte du massacre …des visions d’horreur · Catégories: Première · Tags: ,
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Photos de presse 

Le passage de la découverte du massacre perpétré dans les camps palestiniens de Sabra et Chatila est sans doute l’un des plus difficiles à lire à l’intérieur de ce roman ; le romancier nous dépeint  une réalité sans fard  et nous entraîne à la suite de son héros dans une  véritable plongée au sien de l’horreur; Il déploie un registre réaliste et pathétique et nous nous sentons véritablement touchés par cette description sans concession de la guerre et de la souffrance;

Rappelons tout d’abord les faits historiques tels qu’ils se sont déroulés en 1982…

Le 6 juin 1982, l’armée israélienne a envahi le Liban dans ce qu’elle a décrit comme étant des “représailles” pour la tentative d’assassinat sur l’Ambassadeur israélien à Londres.Le 18 juin 1982, Israel avait cerné les forces armées de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) dans la partie occidentale de la capitale libanaise. Un cessez-le-feu a eu comme conséquence l’évacuation de l’OLP de Beyrouth le 1er septembre 1982.Le 11 septembre 1982, le ministre de la défense israélien, Ariel Sharon, a annoncé que “2.000 terroristes” étaient restés à l’intérieur des camps de réfugiés palestiniens .Le mercredi 15 septembre, le lendemain de l’assassinat du chef de la milice phalangiste alliée des Israéliens et président élu libanais, Bashir Gemayel, l’armée israélienne a occupé Beyrouth-Ouest, “encerclant et bouclant” les camps de Sabra et Chatila.

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L’armée israélienne a alors désarmé, dans la mesure où elle le pouvait, les milices anti-israéliennes à Beyrouth-Ouest, alors qu’elle a laissé ses armes aux milices phalangistes chrétiennes de Beyrouth.Le jeudi 16 septembre 1982 vers midi, une unité d’environ 150 Phalangistes armés (c’est ce que prétend Israël) est entrée dans le premier camp.Pendant les 40 heures suivantes, les membres de la milice phalangiste ont violé, tué et blessé un grand nombre de civils non-armés, dont la plupart étaient des enfants, des femmes et des personnes âgées à l’intérieur des camps encerclés et bouclés. L’estimation des victimes varie entre 700 (chiffre officiel des Israéliens) et 3.500.

Les journalistes qui ont couvert les reportages dans cette région du monde ont pu alors découvrir lorsqu’ils sont entrés dans les camps, des visions d’horreur et ce sont ces visions que s’efforce de reconstruire le romancier dans ce passage. Comment le romancier décrit-il cette scène d’horreur ? comment cette description est-elle organisée ? 

Le romancier utilise différents procédés pour dépeindre  cette vison : tout d’abord , il nous entraine dans le sillage d’un personnage et nous voyons à travers ses yeux; Ce procédé appelé focalisation interne facilite grandement l’identification par le lecteur au personnage et grandit l’illusion réaliste. 

Georges se déplace : c’est ce qu’on appelle une description en mouvement ou ambulatoire et nous le suivons pas à pas . Le texte est construit selon une organisation spatiale facilement repérable ; Nous avançons ainsi “plus loin” : nous pénétrons “à l’intérieur”  ( 5) de cet univers cauchemardesque ; J’ai vu , j’ai marché (1)  ; Les verbes de vision sont nombreux ainsi que les connecteurs spatio-temporels : dans un angle ( 15), là-bas (11) , partout des morts (19) . 

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Les camps palestiniens 

Le registre pathétique est particulièrement marqué dans cet extrait avec tout d’abord la mention des victimes : ce sont des vieux, des jeunes et même des enfants ; Nous avons ici une sorte de gradation de l’horreur . Le lecteur ne peut s’empêcher de prendre parti contre les miliciens et les exactions commises; Le romancier dénonce ici les massacres perpétrés par les combattants contre des civils sans défense.

La multitude des  petits détails réalistes contribue à renforcer cette dénonciation: la position des corps, les souffrances subies augmentent notre émotion; les cadavres sont présentés dans des positions humiliantes : sur le dos, bras ouverts, ” un bébé torse nu, en couches déchiquetées ( 29)  “un corps coupé en deux ” (10) ; les victimes sont montrées comme cueillies par la mort et aucun détail trivial ne nous est épargné : “la merde séchée , (18 )  les plaies béantes, les trainées de cervelle (21) 

De plus, la description est dramatisée par les réactions du personnage -témoin : Georges qui a bien du mal à ne pas se laisser déborder par l’émotion : “ je le redoutais, je le craignais ” ; ces deux verbes montrent son appréhension ; Profondément troublé par la scène, il semble marquer, malgré lui, un temps d’arrêt : “je me suis arrêté; j’étais sec” ; ( 32)  Aucune larme ne parvient à sortir de son corps : " le visage sans rien ” Tout es passe comme si Georges ne ressentait plus rien, comme si son coeur s’était vidé ; Il ose à peine respirer car selon lui “inspirer, c’était bouffer de la mort “ . Le lexique est ici imagé et le romancier recourt à la crudité de certaines expressions pour mieux peindre fidèlement ce qu’il voit : ” chairs et vêtements arrachés” (l 50) ; le narrateur peu à peu perd pied et semble se perdre au fond de la guerre ; il est guidé par des anges et échappe de peu à la mort mais cette dernière est déjà annoncée. 

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Un texte poignant qui révèle une description organisée visuellement autour du personnage de Georges et de la découverte de ces massacres qui , à l’époque, ont ému considérablement l’opinion publique; C’est cette émotion que tente de restituer le romancier en utilisant diner moyens lexicaux et stylistiques.