28. septembre 2021 · Commentaires fermés sur Le roi se meurt : un rôle sur mesure pour un grand acteur ! · Catégories: Divers, Première · Tags:

L’acteur Michel Bouquet, âgé de 88 ans , reprend pour la cinquième fois de sa carrière de comédien, le rôle du roi Bérenger dans la pièce de Ionesco . Qu’est-ce qui le pousse à remonter sur les planches pour incarner , justement, un roi qui va mourir .  L’acteur considère Eugène Ionesco comme un dramaturge majeur et un artiste qui nous donne “de salutaires leçons” te nous apprend à mieux vivre. Il tente même de nous divertir avec la mort et de nous préparer à l’accepter même si comme le dit le roi dans la pièce, il aimerait redoubler plutôt que de passer au stade supérieur  . Il avoue même préférer  égoïstement “que tous meurent pourvu que je vive éternellement ” . Le spectacle imaginé par Ionesco, qui se savait lui même gravement malade débute par la vision peu réjouissant d’un royaume en ruines; Un vieux roi que la médecine a condamné, a bien du mal à régner ;

Les murs du palais se lézardent, des tremblements de terre et des fissures engloutissent le peu d’habitants encore présents; De 9 milliards, la population ne compte plus que ” 45 jeunes gens ” qui , en quelques jours , passent de 20 ans à 80 ans. Le roi ne parvient plus à commander aux éléments et le soleil, par exemple, a de plus ne plus de mal à se lever. La dimension spectaculaire du délabrement du monde sera rendu généralement par une salle du trône sombre, poussiéreuse et encombrée de détritus comme si le désordre ambiant dans l’espace scénique traduisait le désordre à l’extérieur, dans le monde décrit par les personnages.  Le roi est entouré par ses deux épouses; la jeune Marie représente les tentations de la vie , l’espoir du bonheur; Avec elle, il a connu les joies des voyages de noces, des fêtes et des bals. La seconde épouse Marguerite est pourtant celle qui va le guider et lui permettre d’accepter la mort, de ne plus en avoir peur. Dans le dénouement de la pièce, elle le guide de sa voix, le rassure en permanence et lui donne le courage d’avancer à travers les obstacles , pour parvenir à s’asseoir enfin sur le trône pour y mourir sans plus jamais dire un mot. Ce silence final du roi et sa disparition du plateau sont également des aspects spectaculaires de la pièce 

Lorsque Molière écrivit Le Malade imaginaire, il se savait lui aussi atteint par un mal incurable; La médecine de l’époque était impuissante à le soigner et de nos jours, il arrive que la médecine ne trouve pas de remède à certaines maladies . On ne guérit pas de la vieillesse et la mort apparaît bien comme notre lot à tous, le signe de notre condition humaine. Se préparer à mourir est cependant un exercice pratiqué par certaines philosophies notamment dans les philosophies orientales comme le bouddhisme C’est sa propre angoisse, c’est toute l’angoisse humaine face à la mort, que Ionesco tente d’exorciser ici, prêtant à  son personnage Bérenger cet attachement  à la vie qui est celui de la plupart des hommes .Dans Notes et Contre-notes , le dramaturge écrit tenir beaucoup à la vie  : « que j’aurais du mal à m’en arracher ! Je m’y suis habitué ; habitué à vivre. De moins en moins préparé à mourir. Qu’il me sera pénible de me défaire de tous ces liens accumulés pendant toute ma vie. Et je n’en ai plus pour trop longtemps, sans doute. La plus grande partie du trajet est parcourue. Je dois commencer dès maintenant à défaire, un à un, tous les noeuds. » C’est ce que montre justement cet extrait de la pièce : comment aider celui qui va mourir à accepter son sort , comment l’accompagner et lui donner la force de faire ses derniers pas . Le tragique de la condition humaine se mêle au désir d’apprivoiser nos derniers instants . 

 <