05. février 2024 · Commentaires fermés sur L’entrée en scène d’Oreste dans Andromaque de Racine : le commentaire littéraire · Catégories: Première · Tags: , ,

 Pour un dramaturge, l’entrée en scène d’un personnage est toujours un moment important dans une représentation.  Particulièrement au cours de la scène d’exposition car il faut donner au public de nombreuses informations à la fois sur les personnages ; le cadre et surtout l’action à venir.  Que nous apprend cette exposition ? 

 Exemples de problématiques :  Cette scène remplit-elle les fonctions d’une scène d’exposition ?
Quels éléments traditionnels retrouve-t-on dans cette exposition ? 
Comment cette scène d’exposition introduit-elle l’univers tragique ?
En introduction : que peut -on évoquer ? 

  • Introduire le classicisme,

  • Dire quelques mots à propos de Racine 

  • Présenter le récit mythologique qui sert de trame à la pièce : la défaite de Troie et la captivité d’Andromaque, princesse troyenne aimée par un jeune roi grec. 

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21. février 2020 · Commentaires fermés sur Phèdre : enquête sur une passion · Catégories: Sorties · Tags: ,

Ce matin, trois classes du lycée ont eu la chance d’assister, à une représentation du spectacle de la compagnie Ilôt Théâtre . Les comédiens, Laure Huselstein et Serge Irlinger  jouent d’abord le rôle de deux journalistes d’investigation qui enquêtent sur un fait divers tragique : un accident de voiture sur la D 936 qui a coûté la vie à un jeune homme d’une vingtaine d’années , Hippolyte Rivière ; Fait troublant : cette sortie de route a  eu lieu à proximité de La Ferté Milon , la ville natale d’un certain Jean Racine et surtout, l’asphalte était étrangement soulevée et les arbres brûlés à la racine . Seul un public averti peut comprendre cette référence à l’épisode du récit de Théramène dans la pièce ; Plus »

15. février 2020 · Commentaires fermés sur Phèdre ou les dangers de la passion… · Catégories: Première · Tags: ,

Qui est Phèdre ? Il s’agit d’une héroïne de la mythologie grecque: “fille de Minos et de Pasiphaé ” ; héritière d’une lignée marquée par une malédiction divine . Soeur d’Ariane, qui grâce à son fil, aide Thésée à tuer le Minotaure enfermé dans son dédale , Phèdre a donc oeuvré pour éliminer son propre frère monstrueux : ce taureau mi- homme mi- animal , né des amours  imposés de sa mère avec une bête  sauvage. Pourtant Racine , en retraçant la lignée monstrueuse de Phèdre, pose quelque part le problème de sa responsabilité personnelle.  Euripide en – 480  est le premier tragique grec qui aborde le thème de la marâtre amoureuse du fils de son mari et Hippolyte , le fils , est, tout d’abord, le héros éponyme de la pièce . Racine choisit  docn , en réécrivant le mythe, de mettre l’héroïne féminine sur le devant de la scène .  Phèdre sait qu’elle doit combattre le sentiment amoureux qu’elle éprouve pour son   beau-fils sous peine d’être incestueuse et pourtant elle fait l’aveu, à sa confidente, de sa passion coupable ; Est-elle vraiment  désarmée face à la puissance de la Passion ? 

Phèdre est un personnage tragique qu’on associe le plus souvent à la douleur de l’amour . Certes , la langue poétique et ancienne de Racine peut parfois faire obstacle à votre identification mais si vous dépassez vos préjugés, vous entendrez un langage amoureux résolument actuel .  Aimer et ne pas être aimée en retour, douter des sentiments de l’autre, faire souffrir celui qui vous aime , craindre d’avouer son amour : autant de thèmes qui sont loin d’être dépassés aujourd’hui. La tragédie de Racine tient uniquement au pouvoir des mots et des images et quels mots ! Phèdre porte à la fois le poids de la culpabilité maternelle  et des remords d’éprouver un amour incestueux. Elle souffre également de la jalousie envers une rivale plus jeune qu’elle , la belle Aricie dont Hippolyte est amoureux. Elle ne peut s’empêcher  d’éprouver du désir tout en sachant cet amour  condamné par la morale et la société. Mais comment s’exprime la passion dans la tragédie ?

Le premier personnage à avouer qu’il aime , c’est Hippolyte en personne qui se confie à Théramène ; Il justifie son départ de  Trézène par deux raisons ; il part à la recherche de son père et il fuit sa belle-mère qualifiée de “dangereuse marâtre”; Cependant la haine qu’elle lui vouait a disparu, selon Théramène et elle souffre d’une étrange maladie “ une femme mourante et qui cherche à mourir / atteinte d’un mal qu’elle s’obstine à taire ” ; la tragédie justement va consister dans cette libération de la parole que s’interdit , pour le moment , Phèdre;

Mais revenons à Hippolyte: il avoue fuir une autre “ennemie” cette jeune Aricie, reste d’un sang fatal conjuré contre nous ; d’emblée, la périphrase qui désigne la jeune femme l’associe à un passé sanglant ; Ses  50 frères, dans le mythe, ont tous été abattus par Thésée car ils étaient les héritiers du trône qu’il convoitait et il a interdit, sous peine de mort, à la jeune fille, de se marier afin que sa lignée s’éteigne . Contrairement à son père, Hippolyte est décrit comme un “ennemi des amoureuses lois” , c’est à dire un homme qui méprise l’amour et qui ne subit pas le “joug de Venus “; On voit bien, avec le vocabulaire employé que le sentiment amoureux s’impose à l’homme qui se contente de le subir . C’est pourquoi la passion  amoureuse est définie , notamment comme une force qui nous rend passif et contre laquelle on se bat en vain. Avant d’avouer son amour pour Aricie, Hippolyte rappelle les  nombreuses aventures de son père ; Il évoque ses exploits guerriers et ensuite ses conquêtes comme des “faits moins glorieux ” Thésée séduisit et enleva la belle Hélène, sauva Péribée du Minotaure, l’épousa et  l’abandonna,avant de récidiver avec Ariane, la propre soeur de Phèdre abandonnée, elle aussi,  sur l’île de Naxos; Tant de femmes, lui reproche d’ailleurs son fils , dont il ne se souvient même pas des noms, ajoute-t-il . Et Hippolyte craint de ressembler à son père en tombant lui aussi, amoureux. Il redoute , comme il le dit au vers 113, d’embarquer sa jeunesse “dans un fol amour ” . Son ami Théramène tente de lui présenter les joies d’un “chaste amour “, sa douceur et lui rappelle que sa mère Antiope, reine des amazones, était elle aussi ,ennemie de l’amour avant de rencontrer Thésée et de donner naissance à Hippolyte ; le jeune homme tiendrait son côté farouche de son ascendance maternelle; Des changements dans l’attitude du jeune guerrier ont été remarqués : il chasse moins souvent et son amour est visible à certains symptômes physiques  : ” Chargés d’un feu secret vos yeux s’appesantissent. Il n’en faut point douter, vous aimez, vous brûlez. Vous périssez d’un mal que vous dissimulez. ” (vers 135 à 138 ) . Le dramaturge utilisera les mêmes termes pour décrire le feu qui ronge Phèdre au même moment: ce qui crée un rapprochement centre ces deux personnages, unis dans une même souffrance amoureuse. La scène suivante , en effet, nous dépeint , en détails, le mal mystérieux dont souffre Phèdre .

La reine touche presque à son terme fatal..elle meurt dans mes bras d’un mal qu’elle me cache ..” La servante Oenone, confidente de Phèdre, semble très inquiète pour sa maitresse et s’alarme de la voir souffrante .  Au début de la scène 3, elle la presse d’avouer l’origine de ce qui la fait tant souffrir . Phèdre évoque sa mort prochaine , son désir de renoncer à la vie à cause de “ses honteuses douleurs” ; Oenone tente de lui rappeler ses devoirs : elle doit rester en vie pour assurer la protection de ses enfants en l'absence de leur père. Lorsqu'elle prononce le nom d'Hippolyte, Phèdre tressaille et la servante pense qu'elle éprouve encore de la colère pour ce fils qui n'est pas de son sang et qui représente une menace pour les enfants issus de son mariage avec Thésée. La nourrice interprète mal ce qu'elle voit et elle l'incite vivement à se confier : si elle ne parle pas, elle ne mourra et Oenone la suivra dans  la mort; C'est donc pour épargner la vie de sa nourrice que Phèdre se décide enfin à avouer ce qui la ronge "quand tu sauras mon crime , et le sort qui m ‘accable/ Je n’en mourrai pas moins, j’en mourrai plus coupable” prévient-elle..  elle mentionne en premier lieu “la haine de Venus” ; rappelle “les égarements” de sa mère … elle avoue avoir “toutes les fureurs de l’amour ” (260 ) mais se souvient des infortunes qu’il  a fait subir aux femmes de sa famille. Le nom tant redouté est enfin prononcé par Oenone qui est glacée d’effroi à l’annonce de cet amour défendu par la morale et se lamente ” O désespoir! ô crime! ô déplorable race !”  On remarque , à cette occasion que la nourrice relie cet amour coupable à la malédiction qui s’est abattue sur cette famille  et qui semble ici, poursuivre , les descendants. Phèdre s’épanche alors dans une longue tirade  pathétique qui achève la scène 3.

Phèdre peint essentiellement les ravages de la passion et Racine envisage surtout le sens du mot comme un état extrême de soumission qui fait souffrir l’individu  et qui peut avoir comme origine l’amour, et ses dérivés : colère, haine , jalousie, chagrin. Cet état d’excitation plonge les personnages dans de grandes agitations , qui se traduisent, sur scène, soit par des aveux à un confident , soit par de longs monologues introspectifs sous forme de tirades enflammées , soit par des dialogues mouvementés qui sont de véritables confrontations entre les personnages . La tragédie s’efforce, et c’est un paradoxe, de rendre compte du trouble dans lequel les passions jettent les personnages , dans un langage qu’ils s’efforcent justement de maîtriser .. les sources de la passion sont multiples : amour interdit sur le plan politique ( Aricie et Hippolyte), moralement interdit ( Phèdre et son beau-fils ) , moralement répréhensible ( Thésée époux volage et infidèle ) ; On lit aussi dans cette tragédie les ravages de la colère et ses conséquences funestes : Oenone en colère contre Phèdre qui veut mourir, Thésée en colère contre son fils qu’il croit coupable , Phèdre en colère contre elle-même qui choisit de s’infliger la mort et qui entraîne sa nourrice dans la mort en la haïssant. Les personnages sur scène semblent captifs de leurs émotions et excessifs en tout; Thésée aime trop et trop souvent alors que son fils souhaiterait être délivré du sentiment amoureux et le considère comme un ‘joug ” c’est à dire un fardeau, un poids très lourd qui l’entraîne ; Les deux personnages représentent deux faces opposées d’un même excès.

Racine avait déjà montré dans Andromaque, quelques années plus tôt,  le combat interne entre Passion et Raison : il reprend dans Phèdre cette idée de lutte de l’individu contre une force annihilante ; L’homme y apparait comme soumis à une forme de fatalité qui le dépasse ( le fatum ou transcendance ou les Dieux  ) . La passion amoureuse s’y révèle à la fois coupable et impossible et le personnage qui tente de s’affranchir de cette passion, sombre dans une mélancolie qui le conduit à envisager sa disparition comme la seule échappatoire pour mettre un terme à sa souffrance et à sa honte . La tumeur amoureuse ne peut être extraite que par la destruction complète de soi . Vision très pessimiste de la passion car aucune victoire de l’individu n’est possible .  Le destin amoureux est imposé par une puissance supérieure et extérieure , qui  finit par vaincre et provoque la destruction de l’individu .

De plus, influencé par la tradition janséniste, Racine, particulièrement chez ses héroïnes féminines,  montre le combat amoureux comme un combat violent contre une forme de monstruosité : d’emblée, la personne aimée est présentée comme un ennemi implacable et le registre épique est dominant ; la lutte est âpre et provoque des désordres du corps et de l’humeur, un ensemble de symptômes liés au désordre amoureux.

Pour conclure ce tableau de la peinture des passions dans la tragédie racinienne, retenons que la passion est un agent destructeur puissant .  La passion ne s’attaque pas seulement à l’individu isolé, elle détruit également l’ordre social avec les risques de disparition des rois et des renversements d’alliances. Le dramaturge peint toutes les nuances de l’amour pour au final, montrer que même l’amour le plus pur au départ, peut se transformer en fureur quand il devient excessif . Phèdre est donc  une tragédie qui nous permet de réfléchir aux dangers des passions . Ci-dessous un résumé de la pièce pour vous aider à construire vos introductions …