12. janvier 2020 · Commentaires fermés sur Plaire et instruire : quel équilibre dans les Fables ? · Catégories: Dissertations sur oeuvre, Première · Tags: ,

Les fables représentent  une alliance entre le désir de plaire aux lecteurs et la volonté de leur inculquer un  véritable enseignement moral . A travers des situations qui posent problème ,  des dialogues animés et argumentés  ,des  récits pittoresques et parfois merveilleux , des personnages humains ou animaux   et  bien sûr des morales, comment  l’auteur parvient-il à articuler ces deux exigences qui peuvent parfois sembler complémentaires ou antagonistes ; En effet, peut-on réellement apprendre  quelque chose de la vie par le biais  de fictions qui présentent des animaux qui parlent ou des lutins chargés d’ exaucer les souhaits de leurs maîtres ? Comment concilier plaisirs de la fiction et goût pour la vérité ?

 

Voici un plan détaillé à partir duquel vous pourrez fabriquer une fiche sur ce sujet de dissertation : complétez ces plans avec des exemples tirés des fables et apprenez ces citations par coeur

I : Comment plaire aux lecteurs ?

1 En fabriquant des histoires drôles , des anecdotes amusantes , des récits variés

2. En utilisant souvent des animaux et leurs ressemblances avec les humains pour dresser un portrait satirique de la société

3 En adoptant un ton humoristique, un regard amusé et en jouant avec les mots; la satire apparaît ainsi comme un moyen utile pour combiner les deux dimensions car la satire permet de développer une critique ( donc une réflexion morale ) en divertissant le lecteur grâce aux exemples ou au ton employé .

II Comment instruire des lecteurs ?

1. En fabriquant des morales

La plupart des fables comportent des morales explicites: séparées du récit, souvent placées à la fin de l’histoire, elles apportent un éclairage moral à l’anecdote narrée ; elles contiennent des conseils, des recommandations, et parfois des mises en garde facilement identifiables . elles sont porteuses de bon sens et s’apparentent à des vérités générales; elles ressemblent à des dictons, émanations de la sagesse populaire transmise de générations en générations

2. En condamnant certains comportements : satire nette et répétée des courtisas, des colères du Roi, de l’égoïsme de certains religieux , des incessantes querelles entre les Grands: c’est à ce titre qu’on peut dire que Les Fables sont un miroir de la Société dans la mesure où la variété des situations reflète la diversité de la Vie ( ou III )

3. En montrant les valeurs morales à défendre et à transmettre comme le Respect de l’Autre et de la parole donnée , l’humilité et la condamnation de l’Orgueil des Puissants , l’amitié, parfois sous forme de question posée aux lecteurs

III L’importance de la satire

1 satire des défauts des hommes ( plan individuel ) : dénoncer les vices = but des moralistes

2. satire des défauts de la société : montrer les dysfonctionnements et les abus  : la cour un milieu cruel, la loi du plus fort , satire des nobles et de l’orgueil dse Grands

La Fontaine s’efforce, en fait, de respecter un équilibre entre la dimension plaisante de ces récits et leur valeur didactique : il importera, pour chaque fable, de poser la question de cet équilibre . “le conte fait passer le précepte avec lui

Qu’apprend-t-on  au juste dans Les deux amis ? La fable passe en examen un cas moral et philosophique de manière légère, à travers une anecdote amusante

Comment plaire tout en instruisant ? en combinant , pour chaque fable , un récit amusant et un enseignement sérieux.

 Attention : L’absence de morale claire ne signifie pas l’absence de leçon mais la difficulté de l’identifier clairement

  • soit parce que c’est l’Histoire elle-même qui sert de morale et donc d’enseignement
  • soit parce que la leçon retenue est problématique , à double sens, ou contraire, en apparence aux valeurs morales communément admises

En conclusion, dans le Pouvoir des Fables, La Fontaine rappelle qu’il est, de son point de vue, non seulement possible d’enseigner en utilisant des contes mais que seules ces histoires “pour enfants ” parviennent à retenir l’attention du public;  l’apologue réussit  à susciter l’attention de l’assemblée là où le sermon , le discours sérieux avait échoué: le public  devient ainsi prêt à entendre ce que veut dire l’orateur mais ce dernier reprend sa mise en garde initiale et ne continue pas son conte : ce qui pourrait signifier que la fable n’est que l’enrobage, le moyen de délivrer une mise en garde très sérieuse; Cette idée d’habillement de la vérité comme fonction principale de la fable sera développée par Florian au siècle suivant, notamment dans sa Fable : La fable et la vérité.

12. janvier 2020 · Commentaires fermés sur Diversité des morales : réfléchir sur les relations entre la morale et l’oeuvre littéraire · Catégories: Dissertations sur oeuvre, Première · Tags: ,

 Un livre n’a pas pour principal objectif d’être lu comme un traité de morale mais la tentation est grande d’y chercher des valeurs morales; C’est pourquoi il importe de bien définir le mot morale dans son usage appliqué à l’oeuvre littéraire .  On peut d’abord distinguer  , un premier plan, l’observation des moeurs : comment un récit montre-t-il  des manières de penser ou d’agir  , par l’intermédiaire de ses personnages ou parrfois  directement  par des jugements ou des des pensées de l’auteur dans les Essais , par exemple. . Ensuite, on parle de morale prescriptive quand l’oeuvre littéraire contient une forme de jugement , de critique de ce qui est décrit ; cette critique peut être implicite ou explicite  ; C’est le cas par exemple lorsqu’un narrateur commente les actions d’un personnage ou ses manières de faire . Enfin, on peut également penser  qu’une oeuvre se fait l’écho de valeurs morales dans le choix des thèmes abordés et la construction des personnages ainsi que  par son appartenance à un genre littéraire . ( roman, apologue, fable, tragédie, poésie ) Très souvent il s’agit de déterminer quelles valeurs morales sont diffusées par une oeuvre ?  Il faut alors différencier les idées de l’auteur , ce qu’on sait de lui te de se prise de positions publiques et son projet littéraire ; essayons de clarifier ces notions en prenant quelques exemples ..

Par exemple,  lorsque Molière, au dix-septième siècle,  met en scène le destin d’un séducteur ,cela ne signifie pas que l’auteur défend le libertinage mais qu’il en montre plutôt les dangers : Don Juan, son héros, “grand seigneur mais méchant homme ” rend les femmes malheureuses et meurt foudroyé par une punition du Ciel ! C’est à travers le dénouement tragique de la pièce, qu’on peut comprendre la position  morale que défend le dramaturge ; dans cette oeuvre jugée scandaleuse parce qu’elle donne le premier rôle à un séducteur impie , Molière n’approuve pas les agissements de son personnage car il le condamne en le faisant mourir . Montrer le mal ne signifie pas s’en rendre complice mais la pièce a été interdite à cause des positions anti-religieuses du personnage de Don Juan.

 

Quand on pense aux Fables de La Fontaine, on évoque souvent la morale finale  des récits qu’on juge, parfois,  immorale . Mais comment lire au juste les morales des fables? Le récit pourrait-il transmettre une réflexion sans  morale ou serait-il moins aisé d’en déchiffrer l’enseignement ? Faire triompher le mensonge est-il moral ? Non bien sûr ! Mais montrer que les puissants dominent la société et que le mensonge devient la seule arme efficace pour leurs victimes  , c’est écrire en moraliste soucieux de faire réfléchir ses contemporains. Le spectacle de Perrette qui perd en quelques secondes, à cause de son imagination, le produit d’un dur labeur, n’est pas fait pour nous réjouir ni pour nous désoler mais pour illustrer la puissance de l’imagination et peut -être, aussi,  les dangers de perdre de vue la réalité; Toute l’habileté de La Fontaine consiste à ne pas faire entendre  directement sa voix mais il s’arrange pour nous montrer ce qu’il souhaite que nous ne perdions pas de vue . C’est un moraliste qui ne s’appesantit pas sur les défauts des hommes même s’il leur accorde une place importante au sein de son recueil qui se veut quand même didactique ; le choix de la fable comme forme littéraire   et celui de l’humour comme tonalité, rendent les leçons et les prescriptions plus digestes et moins lourdes pour le lecteur.

Madame de La Fayette, durant la même période, adopte une autre position de moraliste : elle dépeint un monde corrompu , gangrené par l’ambition et dans lequel la galanterie, loin d’être simplement un art d’aimer, s’apparente davantage à un art de la tromperie; Ses personnages souffrent tous de passions malheureuses et l’amour , en dehors du mariage, loin d’épanouir les individus, semble les condamner irrémédiablement , à se perdre.

Deux personnages , a priori, paraissent différents : Madame de Chartres qui  a fait le choix d’éduquer elle-même sa fille et de la mettre en garde contre les séductions mais aussi contre les dangers de l’amour , et la princesse, héroïne du roman , qui se livre à un combat intérieur dont sa vertu finit par triompher , au détriment de son bonheur personnel . Que doit -on comprendre des agissements des personnages  de ce roman qui se termine de manière tragique ? Quelles sont leurs valeurs morales  déployées dans le récit et quelles sont celles de l’auteure ? Que nous apprend le destin tragique de l’héroïne ? qu’il faut renoncer à ce que notre coeur nous dicte ou qu’il ne faut pas écouter ce que nous dicte notre coeur car c’est une puissance trompeuse? Est-ce une condamnation de la Cour, de ses faux-semblants , de l’ambition permamente qui semble motiver chaque action . La sincérité des aveux de la Princesse a des conséquences terribles ! Et si chacun se fixait comme objectif d’aimer son mari et d’en être aimé, en irait-il autrement ? Autant de questions morales qui demeurent en suspens dans ce récit écrit par une femme qui paraît savoir ce dont elle parle ; sans doute pour l’avoir, en partie, vécu.

 Toujours à la même époque, un autre écrivain poursuit, à sa manière ,  des ambitions de moraliste , en mettant en scène des spectacles tragiques qui effraient et tentent d’émouvoir les spectateurs. Pour pouvoir évoquer la dimension  morale dans la tragédie de Racine, Phèdre, on doit, là encore, établir une différence entre les agissements des personnages et les pensées du dramaturge . Racine cherche à incarner sur scène  des effets tragiques à travers notamment le choix des caractères : il justifie dans ses nombreuses Préfaces, le choix de  “monstres gentils ” ; Il a besoin que Phèdre se rende coupable mais qu’elle puisse , sur certains points, paraître innocente , ou tout au moins victime d’une fatalité qui la dépasse; En articulant la malédiction divine et  une passion humaine, le poète nous permet de ressentir de la pitié pour cette femme condamnée à l’avance par les Dieux; Nous sommes ainsi d’autant plus sensibles à sa souffrance qui ne semble pas feinte même si l’objet de son amour peut paraître immoral . On peut ,d’ailleurs, se demander si la référence à la fatalité ne constitue pas une sorte d’alibi pour cette amante qui ne peut pas être considérée comme entièrement responsable de son choix . Les souffrances de Phèdre, malheureuse dans son mariage avec Thésée, sont une preuve de la condamnation de la passion mais également une preuve de sa puissance; dans le combat que l’homme doit mener quotidiennement afin de faire triompher la Raison de l’emportement de ses passions, la victoire est lojn d’être assurée, constate Racine . Convaincu de la justesse de certains aspects du jansénisme, Racine ne semble pas se montrer plus confiant que la Fontaine, son ami, dans la capacité de l’Homme à effectuer les bons choix et à prendre les bonnes décisions, Madame de La Fayette est-elle aussi pessimiste ?

11. janvier 2020 · Commentaires fermés sur La Fontaine : le roi des animaux ? · Catégories: Dissertations sur oeuvre, Première · Tags: ,

Très souvent, lorsqu’on évoque l’univers des Fables, on pense tout naturellement aux animaux humanisés : le loup et sa cruauté, le renard qui déploie mille ruses,  et le lion qui entend régner sans partage sur ses courtisans; on va parfois jusqu’à oublier qu’un tiers des fables environ, ne contient pas de figures animales. Bêtes de la ferme ou animaux plus sauvages, on trouve un bestiaire varié dans les Fables ;  Les bêtes y sont les seules héroïnes ou partagent la vedette, parfois,  avec des humains . Nous pouvons donc nous interroger sur les rôles que jouent les animaux dans la fable : sont-ils des éléments indispensables  pour nous faire réfléchir ou de simples amusements pour charmer les enfants ? Pour répondre à cette question, nous montrerons tout d’abord la variété du monde animal et les caractéristiques de leurs portraits . Ensuite nous étudierons le fonctionnement de l’anthropomorphisme . Enfin nous nous pencherons sur la société formée par la gent animale .

Même si la plupart des animaux (une soixantaine ) sont connus des lecteurs, la présence de certains peut nous surprendre . En tant que maître des eaux et forets, La Fontaine a pu observer le comportement de nombreux animaux et ses remarques sont souvent conformes à ce qu’on imagine : ainsi le coq est orgueilleux et monte sur les toits pour chanter sa victoire ( Poule et 2 coqs ) ; le chien tente de rester fidèle à son maître et joue soit les gardiens comme dans Le loup et le chien soit le serviteur du maitre  ,  par exemple comme  dans le chien qui porte à son cou le diner de son maitre ; Il se laisse aussi guider sa conduite par la faim, celle qui pousse presque tous les animaux à s’affronter .

Si certains animaux sont des figurants épisodiques et font une ou deux apparitions dans les fables, comme le milan, la souris, les petits poissons, la perdrix, l’araignée , le serpent, l’huître, le léopard , certains semblent jouer un rôle plus important  et deviennent des acteurs à part entière. On pense au lion et à ses courtisans :  ours et tigres qui incarnent les puissants comme dans Les Animaux malades de la peste ; loups et renards sont comme des frères ennemis, le plus souvent en concurrence  et remplissent chacun, aux côtés du roi, des rôles parallèles comme dans le lion, le loup et le renard ; Souvent le fabuliste se sert de différents membres d'une même espèce et il leur prête des caractéristiques semblables comme , par exemple, les oiseaux prédateurs avec le milan, le vautour, qui peut aussi devenir un faucon ou un héron  ou un chat-huant ( variante du hibou ) à la recherche de son déjeuner : petits poissons , goujon ou limaçon pour le premier et souris ou belette  ou petits lapins pour le second ; ces volatiles s'opposent aux poules, perdrix, canards et autres chapon le plus souvent condamnés à finir mangés .

Les petites bêtes ne sont pas oubliées avec une araignée, une mouche et quelques rats qui vivent en ermite  ou même des souris qui subissent des métamorphoses et finissent par épouser des rats ; la Fontaine construit donc un univers animal  vraisemblable en respectant le plus souvent la place des animaux cités dans la chaîne alimentaire : certains y sont d’ailleurs, tour à tour, prédateurs et victimes .

Les portraits des animaux sont, eux aussi, conformes à certains éléments naturels qui les rendent reconnaissables : l’éléphant est particulièrement lent et lourd : il est décrit comme une  “pesante masse ” , le héron possède “un long bec emmanché d’un long cou” et le coq porte une crête ; le loup est “quelque peu clerc ” (Animaux malades ) ; le rat vit  retiré dans un “fromage de Hollande ” ; le lion , en bon prince ” à ses sujets étalait sa puissance ” ; le peuple vautour a un bec retors et une tranchante serre ; la mouche fait entendre son bourdonnement et le jeune lapin passe sa matinée à brouter et à trotter parmi le thym et la rosée ( chat, belette et petit lapin ) ; en quelques adjectifs, le fabuliste construit un portrait en actions de l’animal et ce dernier s’anime sous nos yeux .

Mais l’une des caractéristiques les plus intéressantes, c’est l’ utilisation de l’anthropomorphisme . Les animaux parlent comme dans les modèles antiques des fables  et ont des caractéristiques humaines et c’est ce qui contribue au plaisir que nous avons de  les découvrir dans  les fables : à qui vont-ils ressembler ? à quels types de personnages vont-ils être associés ? Certains sont savants et deviennent professeurs comme le singe qui est qualifié de “maître es arts” dans  Le lion Le singe et les deux ânes ,  et qui va donner une leçon de gouvernement à son monarque ; le lion,  lui aussi dans son rôle de monarque justement , écrit des lettres à ses vassaux  ; il fait envoyer “une circulaire écriture avec son sceau ” pour informer les animaux qu’il tient cour plénière   ; certains tiennent de longs discours et se montrent fort convaincants comme le cochon dans la charrette qui l’emmène au marché pour y être vendu et mangé . ( Chèvre cochon mouton )  D’autres se montrent obséquieux comme de véritables courtisans à l’image, une fois de plus du singe dans La Cour du lion. En définitive, seuls leur habitat et leur nourriture les distinguent vraiment des humains que nous rencontrons dans les fables . Lorsqu’ils sont d’ailleurs associés aux hommes, comme par exemple dans Le loup et le chasseur ou dans la fable Le héron la fille , il leur arrive les mêmes mésaventures et la leçon à en tirer, pour les lecteurs, est identique : l’animal et l’humain se comportent de la même manière, commettent les mêmes erreurs . En effet, le fabuliste , non seulement les dote de caractéristiques humaines qu’il mélange avec les caractéristiques animales attendues et il les fait correspondre, ainsi, à des types humains facilement  identifiables par le lecteur . L’ours se bouche la narine de dégoût ce qui est une attitude humaine; la lionne rugit de douleur à la perte de son lionceau comme une mère éplorée dans La lionne et l’ourse ; des coqs dans la basse-cour se montrent "incivils et peu galants ” comme de jeunes hommes mal polis et mal éduqués  dans La perdrix et les coqs. Le fabuliste montre ici avec humour , le jugement d’une princesse étrangère à la Cour qui s’étonne de voir ce peuple cependant fort souvent en furie . Le détour par l’animal permet ici à la satire politique d’être adoucie : on peut ainsi sourire ce ce qui paraît pourtant grave ; en effet, cette perdrix reçoit “d’horribles coups de becs ” avant de réaliser que ces ennemis se battent également continuellement entre eux comme “une troupe enragée” ; le terme enragé s’applique, à la fois, à la dimension animale mais en même temps il désigne les humains ; le fabuliste joue ainsi avec la polyvalence de certains qualificatifs qu’il choisit avec soin . Ce procédé d’écriture contribue à renforcer les liens entre la dimension animale et le plan humain.

Ainsi , chaque animal  ou chaque représentant d’une espèce animale sera plus ou moins associé au type humain dont le fabuliste dresse un portrait satirique dans les fables; Les courtisans, par exemple, apparaissent sous différents aspects: si les ours et les tigres reflètent simplement les grands seigneurs, puissants pour les uns grâce à leur force physique et pour les autres , grâce à leurs titres, les flatteurs sont représentés par, au moins,  trois animaux différents : le renard bien sûr est le courtisan rusé et conscient des dangers de la Cour : il est  celui qui se méfie et connaît les usages  ; Il manie , pour sa survie, l’art du langage ou l’art du silence selon les cas et triomphe, le,plus souvent, de ses rivaux et de la plupart des animaux qu’il parvient à piéger ; Le loup symbolise l’arriviste prêt à écraser les autres pour se rapprocher du monarque: délateur , il maîtrise également l’éloquence mais son discours est, le plus  souvent trompeur et haineux ; Dans Les Animaux malades, il est celui qui anime la foule contre l’âne et contribue à sa pendaison. Le singe est parfois plus habile mais lorsqu’il en fait trop, il subit lui aussi la colère du roi comme dans la Cour du lion. Le léopard représente l’arrogance des seigneurs qui se parent et s’enorgueillissent de leurs titres de noblesse mais ne songent pas à briller par leur esprit. Enfin on pourrait évoquer , également , le fonctionnement de  l’ensemble de cette société animale, qui par bien des points, nous tend un miroir de nos sociétés humaines.

Si l’on raisonne maintenant à l’échelle collective, on se rend compte que La Fontaine fabrique un véritable monde animal avec ses forts et ses faibles, ses puissants et ses victimes ; Cette société  animale nous permet de mieux comprendre celle des hommes et son fonctionnement ; Tout d’abord, le fabuliste montre l’importance de la nourriture chez les animaux , et de de l’intérêt en général  : que ce soit pour avoir la meilleure part ou obtenir une proie que convoitent d’autres prédateurs ,certains animaux déploient toute leur habileté et mettent au point des stratégies , plus ou moins efficaces .  Le vieux cormoran au ventre vide qui ne peut plus pêcher car il est devenu aveugle  devient un grand démagogue et tient un discours  trompeur aux poissons en prétendant “sauver leur République ” ( cormoran et poissons )  . Il leur tend un piège pour pouvoir manger : où est le Mal ?  Choisir des animaux permet également de nous faire réfléchir à la manière dont nous nous comportons face aux plus faibles.  Lorsqu’on évoque les injustices, on pense aussi à la manière d’exercer la Justice dans cette société animale.

Il est fréquent, en effet, que la notion de justice ou de jugement soit convoquée : incapables de résoudre leurs conflits, certains animaux font appel à des juges pour les mettre d’accord . L’âne est sacrifié au terme d’une parodie de procès ; le lapin qui s’est fait voler son terrier se fait manger par le juge , un chat ; le loup qui voudrait être aimé fait le procès de la cruauté des bergers et la couleuvre qui risque d’être tuée par l’homme lui montre à quel point son espèce est cruelle ; A travers tous ces exemples, on mesure l’importance du thème de la justice, à la fois parce que La Fontaine veut dévoiler les injustices constitutives de son époque mais également parce qu’il fait le procès des hommes dont il souligne d’ailleurs, à plusieurs reprises, la cruauté, face au monde animal . L’homme parait , au final, comme la plus cruelle des espèces .

De plus, La Fontaine se sert des animaux, à la fois sur le plan individuel  comme nous l’avons montré ,  mais également sur le plan collectif et philosophique comme d’un instrument puissant au service de son projet satirique d’une part, mais aussi au service de la morale ; Par le biais de l'animal, il dénonce plus facilement ce qu'il entend combattre ou simplement , mettre en lumière et notamment l'impuissance des plus faibles . Petits poissons mangés parce que c'est leur sort, espèces à la merci de leurs prédateurs naturels, comme l'araignée face à l'hirondelle ou la souris face au chat, ils craignent l'homme par dessus-tout; Et surtout, ils ne s'embarrassent pas de morale; En effet, choisir des animaux, c’est montrer la loi de l’instinct : manger ou être mangé ; aucune place pour la gratitude, les cas de conscience, les hésitations; L’animal semble, habituellement, au-dessus de la morale et des scrupules ; Il doit se nourrir et ne porte pas de jugement sur ce qu’il accomplit à l’exception justement du loup devenu philosophe dans Le loup et les bergers :Un loup rempli d’humanité /(s’il en est de tels dans le monde )/ Fit un jour sur sa cruauté /quoiqu’il ne l’exerçat que par nécessité/, une réflexion profonde ” On mesure ici l’écart qui sépare le monde animal du monde des hommes : et le fabuliste utilise justement cet écart pour nous permettre de réfléchir à la manière dont nous nous serions comportés , à la place des animaux  ou si nous étions des animaux . Dans Les deux perroquets , le roi et son fils, il joue avec cette fausse ressemblance entre l’animal et l’humain : un roi tue le fils de son perroquet car ce dernier au cours d’un jeu, a blessé l’autre oiseau préféré du  fils  du monarque, un moineau; Pour venger la mort de son enfant, le père perroquet va crever les yeux du jeune prince provoquant le désespoir de son père, le Roi ; La notion de vengeance est totalement étrangère aux animaux et on voit pourtant ici que le poète  l’utilise pour créer une situation d’enseignement moral ; Le vieux perroquet se réfugie alors  dans un arbre et "goûte sa vengeance” Lorsque le roi tente de le faire revenir en prétendant oublier “la haine la vengeance et le deuil “, le perroquet se méfie de ce profane langage  qui selon lui, sert d’appât et demeure perché dans son arbre car il sait que “la vengeance est un morceau de roi ” et il ne croit pas à la sincérité des paroles du monarque.

 Pour conclure , l’animal joue un rôle important dans les fables car il nous fait sourire de nos travers et le fabuliste joue beaucoup à nous rapprocher ou parfois à montrer ce qui peut nous séparer ;  L’animal, au sein de la fable,  est une sorte de médiateur pour que nous comprenions  les  différences entre  nos deux mondes et que nous soyons en mesure de cerner notre humanité..En rendant les animaux humains , le fabuliste nous tend notre image et suscite le jugement moral : ce qui est excusable chez un fauve l’est-il également chez un monarque ? la cruauté est -elle une caractéristique spécifiquement humaine ? le monde des hommes est-il, tout simplement, gouverné par la loi du plus fort ? que peuvent les lois humaines face à nos instincts de prédateur ?  et surtout comment se fait entendre la Voix de la Raison à travers ces ces deux mondes ?

Si vous voulez vous préparer efficacement pour l’épreuve de dissertation ou la présentation de l’oeuvre durant l’entretien oral, réalisez une fiche sur laquelle vous notez le plan détaillé de cette dissertation avec le titre des parties, des sous-parties et surtout les fables utilisées en guise d’illustrations; Vous pouvez d’ailleurs vous exercer à en trouver d’autres et à en ajouter à l’intérieur du plan. Pour l’introduction et la conclusion, ne notez que les mots-clés… vous pouvez aussi retenir la liste des animaux présents dans les fables étudiées et les classez en familles selon leurs emplois.

07. janvier 2020 · Commentaires fermés sur Déclarations d’amour : mode d’emploi · Catégories: Spécialité : HLP Première

Déclarer sa flamme, avouer ses sentiments, mettre son coeur à nu : autant d’expressions imagées qui traduisent l’idée de déclarer son amour . Moment codifié, la déclaration demeure une étape conventionnelle dans le discours amoureux même lorsqu’on tente de la rendre originale. Si l’on fait un sommaire des déclarations que vous avez choisies, en musique, force est de constater qu’elles ont toutes des points communs ; Petit tour d’horizon … en musique et en paroles.

Avant d’analyser les formes de déclarations amoureuse, il faut se se souvenir que même s’il existe différentes manières de dire à quelqu’un qu’on l’aime, les outils stylistiques qui vont être mobilisés appartiendront souvent au registre épidictique; celui qui utilise l’éloge dans le but de flatter l’amour propre de la personne aimée .

Il s’agit d’un langage de la séduction dans lequel on tente de convaincre l’autre de la force de nos sentiments et de la sincérité de nos propos. En effet, dans le domaine de la parole  plane toujours le soupçon du mensonge et de la manipulation : l’autre cherche t-il à me séduire avec des paroles trompeuses ou exprime-t-il un sentiment véritable?. La lancinante question de l’adéquation entre le mot et le sentiment exprimé, demeure posée . Les mots reflètent-ils toujours avec exactitude ce qu’on éprouve réellement ou peut-on les utiliser pour feindre et ainsi tromper l’autre, pris au piège de paroles mielleuses ? Comment avoir la certitude que ce qui est dit , est pensé ? Dans le domaine de l’expression des sentiments, on peut également évoquer l’usure de certains clichés et un effort est accompli, à chaque siècle, pour tenter de renouveler l’arsenal poétique des métaphores amoureuses.

Les poètes et les chansonniers rivalisent alors d’imagination ; Voici quelques unes de vos trouvailles : je t’aime à l’envers ; je suis comme un radeau échoué en pleine mer qui évoquent le bouleversement de la séparation ; je pourrais me vendre à Lucifer : image qui revisite l’idée d’un pacte avec le diable pour obtenir la femme qu’on aime;  selon la légende médiévale, Faust a vendu son âme à Méphistophélès en échange de l’amour de Marguerite . Les douleurs liées à l’amour peuvent être suggérées par des images de coeur qui saigne, qu’on arrache ou qui se brise : le coeur ici est la métonymie qui désigne le siège des émotions amoureuses.  L’expression “elle  a brisé son coeur sur moi ” est quelque peu étonnante car elle inverse l’image classique ; Dans un même ordre d’idées, il est fréquent de désigner la froideur de la femme aimée mais le paradoxe “ta douceur tue” montre également avec la paronomase “d‘où sors-tu ? ” un jeu intéressant avec le cliché .

De nombreuses déclarations actuelles continuent à utiliser un vocabulaire symbolique : on peut penser notamment au symbolisme des saisons avec les associations entre l’amour naissant et le printemps par exemple; de même les métaux précieux, les pierres précieuses comme le diamant, le saphir, les matières précieuses , les bijoux , reviennent fréquemment en association avec une déclaration amoureuse . ils donnent ainsi de la valeur à l’être aimé, magnifié par le regard de l’amant , parfois transfiguré par le sentiment amoureux.

Les déclarations font également la part belle aux blessures amoureuse et pour décrire l’action de la passion, certaines métaphores classiques sont encore vivaces comme celles de la chasse, celles du piège; On retrouve parfois les références mythologiques à Cupidon avec les flèches de ce jeune dieu ailé, son carquois, ses traits empoisonnés ; le fait qu’il décoche ses flèches au hasard et que la blessure amoureuse soit ainsi assimilée à une piqure . L’une des déclarations amoureuses avait pour objet un jeune enfant qui vient de naître et la flèche se transformait alors en sarbacane ; le poète -chansonnier évoque “les repaires secrets ” les refuges où se réfugient les amoureux , ici un père et sa fille ; “le ciel prétend qu’il te connaît” suggère un lien avec  l’amour divin et la nudité de l’enfant se rapporte à la nudité originelle; la dimension charnelle de ce lien est implicite . Le sentiment se diffuse alors à travers la Nature, le paysage se fait l’écho de ce que ressent le poète dans une forme d‘animisme ; ce concept de paysage état d’âme apparait avec la naissance du romantisme au dix-neuvième siècle.

Le décor , est, fréquemment, une composante importante de la déclaration amoureuse: on choisit avec soin le moment et l’endroit pour faire sa déclaration.  En cas de séparation, on peut alors évoquer avec nostalgie le temps des amours passées, avec une pointe d’élégie et un soupçon de pathétique. Assonances et allitérations, figures de sonorités, viennent ajouter un peu de poésie : ainsi cet amant parle de ramasser les pots cassés et de faire le point sur ce qu’elle lui a laissé : impayés, impostures et ratures. On mesure ici l’amertume de celui qui aime et n’est plus aimé en retour. A la manière de Ghérasime Luca , une chanson mêle les sens et les significations dans des synesthésies comme à fleur de toi et la métaphore filée du parfum laisse son empreinte olfactive .

L’être aimé , par un curieux paradoxe, est à la fois le poison qui nous tue et le seul remède qui peut nous guérir. L’amour s’affranchit également du temps dans une sorte d’éternité comme la déclaration “I will always love you ” et les multiples “for ever” . On peut également citer ” I see my future in your eyes ” ou le fameux ” I’m still loving you “

A votre tour , vous allez devoir fabriquer une déclaration d’amour qui répondra à ces trois critères

a) elle sera la plus originale possible notamment sur le plan du langage

b) elle sera poétique

c) elle sera un dévoilement progressif et ne révélera l’identité de l’objet ou de l’ être aimé que dans les dernières phrases .

Pour vous aider, voici deux blasons surréalistes

L’union libre

Ma femme à la chevelure de feu de bois
Aux pensées d’éclairs de chaleur
A la taille de sablier
Ma femme à la taille de loutre entre les dents du tigre
Ma femme à la bouche de cocarde et de bouquet d’étoiles de
dernière grandeur
Aux dents d’empreintes de souris blanche sur la terre blanche
A la langue d’ambre et de verre frottés
Ma femme à la langue d’hostie poignardée
A la langue de poupée qui ouvre et ferme les yeux
A la langue de pierre incroyable
Ma femme aux cils de bâtons d’écriture d’enfant
Aux sourcils de bord de nid d’hirondelle
Ma femme aux tempes d’ardoise de toit de serre
Et de buée aux vitres
Ma femme aux épaules de champagne
Et de fontaine à têtes de dauphins sous la glace
Ma femme aux poignets d’allumettes
Ma femme aux doigts de hasard et d’as de coeur
Aux doigts de foin coupé
Ma femme aux aisselles de martre et de fênes
De nuit de la Saint-Jean
De troène et de nid de scalares
Aux bras d’écume de mer et d’écluse
Et de mélange du blé et du moulin
Ma femme aux jambes de fusée
Aux mouvements d’horlogerie et de désespoir
Ma femme aux mollets de moelle de sureau
Ma femme aux pieds d’initiales
Aux pieds de trousseaux de clés aux pieds de calfats qui boivent
Ma femme au cou d’orge imperlé
Ma femme à la gorge de Val d’or
De rendez-vous dans le lit même du torrent
Aux seins de nuit
Ma femme aux seins de taupinière marine
Ma femme aux seins de creuset du rubis
Aux seins de spectre de la rose sous la rosée
Ma femme au ventre de dépliement d’éventail des jours
Au ventre de griffe géante
Ma femme au dos d’oiseau qui fuit vertical
Au dos de vif-argent
Au dos de lumière
A la nuque de pierre roulée et de craie mouillée
Et de chute d’un verre dans lequel on vient de boire
Ma femme aux hanches de nacelle
Aux hanches de lustre et de pennes de flèche
Et de tiges de plumes de paon blanc
De balance insensible
Ma femme aux fesses de grès et d’amiante
Ma femme aux fesses de dos de cygne
Ma femme aux fesses de printemps
Au sexe de glaïeul
Ma femme au sexe de placer et d’ornithorynque
Ma femme au sexe d’algue et de bonbons anciens
Ma femme au sexe de miroir
Ma femme aux yeux pleins de larmes
Aux yeux de panoplie violette et d’aiguille aimantée
Ma femme aux yeux de savane
Ma femme aux yeux d’eau pour boire en prison
Ma femme aux yeux de bois toujours sous la hache
Aux yeux de niveau d’eau de niveau d’air de terre et de feu.
André Breton, Clair de terre (1931 )

Plus proche de nous, ce poème étrange de Ghérasime Luca intitulé Prendre Corps

je te flore /

tu me faune /

je te peau / je te porte / et te fenêtre /

tu m’os / tu m’océan / tu m’audace / tu me météorite /

je te clé d’or / je t’extraordinaire / tu me paroxysme / tu me paroxysme / et me paradoxe / je te clavecin / tu me silencieusement / tu me miroir / je te montre / tu me mirage / tu m’oasis / tu m’oiseau / tu m’insecte / tu me cataracte / je te lune / tu me nuage / tu me marée haute / je te transparente / tu me pénombre / tu me translucide / tu me château vide / et me labyrinthe / tu me parallaxes / et me parabole / tu me debout / et couché / tu m’oblique / je t’équinoxe / je te poète / tu me danse / je te particulier / tu me perpendiculaire / et sous pente / tu me visible / tu me silhouette / tu m’infiniment / tu m’indivisible / tu m’ironie / je te fragile / je t’ardente / je te phonétiquement / tu me hiéroglyphe / tu m’espace / tu me cascade / je te cascade à mon tour / mais toi / tu me fluide / tu m’étoile filante / tu me volcanique / nous nous pulvérisable / nous nous scandaleusement / jour et nuit / nous nous aujourd’hui même / tu me tangente / je te concentrique / concentrique / tu me soluble / tu m’insoluble / en m’asphyxiant / et me libératrice / tu me pulsatrice / pulsatrice / tu me vertige / tu m’extase / tu me passionnément / tu m’absolu / je t’absente / tu m’absurde / je te marine / je te chevelure / je te hanche / tu me hantes / je te poitrine / je buste ta poitrine / puis ton visage / je te corsage / tu m’odeur / tu me vertige / tu glisses / je te cuisse / je te caresse / je te frissonne / tu m’enjambes / tu m’insupportable / je t’amazone / je te gorge / je te ventre / je te jupe / je te jarretelle / je te peins / je te bach / pour clavecin / sein / et flûte / je te tremblante / tu m’as séduit / tu m’absorbes / je te dispute / je te risque / je te grimpe / tu me frôles / je te nage / mais toi / tu me tourbillonnes / tu m’effleures / tu me cerne / tu me chair cuir peau et morsure / tu me slip noir / tu me ballerine rouge / et quand tu ne haut talon pas mes sens / tu es crocodile / tu es phoque / tu es fascine / tu me couvres / et je te découvre / je t’invente / parfois / tu te livres / tu me lèvre humide / je te délivre / je te délire / tu me délire / et passionne / je t’épaule / je te vertèbre / je te cheville / je te cil et pupille / et si je n’omoplate pas / avant mes poumons / même à distance / tu m’aisselle / je te respire / jour et nuit / je te respire / je te bouche / je te baleine / je te dent / je te griffe / je te vulve / je te paupière / je te haleine / je t’aime / je te sens / je te cou / je te molaire / je te certitude / je te joue / je te veine / je te main / je te sueur / je te langue / je te nuque / je te navigue / je t’ombre / je te corps / je te fantôme /

je te rétine / dans mon souffle / tu t’iris /

je t’écris /

tu me penses

Quels sont les procédés d’écriture particuliers dans ces deux déclarations amoureuses adressées aux femmes aimées ?

07. janvier 2020 · Commentaires fermés sur Quel moraliste est La Fontaine ? Auour des morales des fables et de sa position de moraliste · Catégories: Dissertations sur oeuvre, Première · Tags: , ,

Si vous choisissez de disserter sur une oeuvre du programme, vous aurez probablement à fabriquer un plan à partir de l’analyse d’un sujet; Aidez-vous des mots clés et prenez le temps de bien comprendre la citation parfois, ou la phrase qui va servir de point de départ à votre réflexion sur les Fables . Voici quelques  exemples de constructions de plans de dissertations .

La Fontaine prétend faire oeuvre de moraliste mais que nous enseigne-t-il ? un monde où triomphent le mensonge et la cruauté? Est-ce ce que nous voulons enseigner à nos enfants ? Etes vous d’accord avec cette citation ?

Disserter va d’abord consister à analyser les mots clés de la phrase afin de bien comprendre comment utiliser notre connaissance des fables ; cela revient à se demander sous quel angle aborder l’oeuvre . Le jugement paraît sévère avec le terme “prétend faire ” qui invite le lecteur à penser que La Fontaine n’est pas un “bon moraliste ” ; Autrement dit qu’il ne faut pas suivre son enseignement ou que ses idées sont dangereuses pour la morale . Il importe donc, de donner une définition du terme moraliste tel qu’il est employé à cette époque; “écrivain qui souhaite qu’on tire une enseignement de son travail” ;  Si on suit cette définition, alors La Fontaine est incontestablement un moraliste On aurait pu formuler la citation autrement ” La Fontaine est-il un moraliste ? ” La réflexion aurait porté sur le même aspect des fables mais dans notre citation, nous disposons d’un élément supplémentaire ; la critique de la manière dont il dispense son enseignement : l’auteur critique , en effet, son usage constant du mensonge et de la cruauté. Il va donc falloir démontrer, dans noter dissertation si oui ou non les fables contiennent beaucoup de mensonges et si elles reflètent bien une forme de cruauté. Cela pourrait être notre thèse : elle donnerait ainsi, en partie raison, à l’auteur de notre citation.  Un point important va consister , ensuite , à examiner la nature de cette cruauté; s'agit-il pour le fabuliste de constater que le monde est cruel et de nous mettre en garde ou de fabriquer des morales où triomphe la cruauté ; Même raisonnement pour le mensonge : effectivement beaucoup de fables exploitent ce thème du mensonge mais pour montrer quoi et peut-on différencier la nature des mensonges : ceux qui sont des mensonges de défense par exemple pour tenter d’atténuer la cruauté des plus forts ou des plus puissants . On va ainsi articuler les deux notions de mensonge et de cruauté pour prouver qu’elles sont étroitement liées par des liens de causalité. C’est parce que le monde  que peint le fabuliste est désespérement cruel que , souvent,les plus faibles sont amenés à mentir pour échapper à leurs prédateurs ; L’intelligence et la ruse suppléent, en partie, à ces inégalités constitutives de la société de l’ancien Régime.

La critique, comme on est maintenant en mesure de le voir, porte davantage sur les aspects que La Fontaine a choisi de mettre en lumière . On lui reproche souvent de montrer le côté sombre de l’humanité et son pessimisme parfois peut avoir un effet négatif sur de jeunes enfants auxquels on aimerait faire croire que l’homme est une créature bonne et généreuse et qu’il faut faire confiance à son prochain.

Si on y regarde d’un peu plus près, on s’aperçoit que La Fontaine ne fait pas toujours l’éloge du mensonge ; au contraire il condamne celui des courtisans par exemple et celui des commères ; On remarque également qu'il montre le monde sans fard et qu'il présente , non sans les critiquer, les abus des puissants ou des forts; certes, nous voyons leurs victimes parfois innocentes, périr sous leurs griffes   , ce qui peut nous sembler cruel; Il nous enseigne ainsi à voir le monde tel qu'il est et pas tel que nous voudrions qu'il soit. De plus, il faut noter que La Fontaine condamne toujours le mensonge quand il est utilisé pour nuire aux autres et l’animal qui ment est puni à la fin de la fable, le plus souvent .

On pourra néanmoins réfléchir , dans une dernière partie,à certaines fables qui pourraient heurter des valeurs morales et sembleraient faire triompher le Mal ; On citera sans doute Les Animaux malades de la Peste, L’araignée et l’hirondelle, Les poissons et le berger qui joue de la  flûte ; Dans cette dernière, l'enseignement parait , en effet, ambigu car le berger a tenté d'abord de pêcher les poissons en les charmant avec un doux chant ; face à son échec, il a alors employé la force en lançant son filet ; Sa morale s'adresse aux Rois et le fabuliste leur conseille d'utiliser la force mais dans un cas bien précis " Rois qui croyez gagner par raison les esprits d’une multitude étrangère, servez-vous de vos rets la puissance fait tout ; Eloge de la force certes mais également constat d'une impuissance de la raison dans certaines situations ; Est-ce immoral ? Ce constat  de la faiblesse de la raison est fait par de nombreux autres moralistes comme Pascal par exemple, qui montre à quel point elle est fragile face à l'imagination .

On prouvera, également, dans ce travail de dissertation que La Fontaine cherche à nous inculquer des valeurs morales essentielles et positives comme la valeur de la Sagesse, la valeur et l’importance de l’amitié , la nécessité d’agir avec mesure en toutes choses : il condamne notamment le désir lorsqu’il nous pousse à commettre des folies ( on peut penser à la Tortue qui veut voler ou aux chiens qui boivent l’eau de la rivière pour manger l’animal qui y flotte ) . On pourrait également utiliser la morale du loup et du chasseur qui apparaît ici comme une double condamnation des attitudes extrêmes “la convoitise perdit l’un / l’autre périt par avarice ”

  Pour conclure , si certains reprochent au fabuliste de noircir la réalité et de faire la part belle aux bas instincts et à la cruauté ambiante, il se contente peut- être simplement de montrer le monde tel qu’il le voit et s’il en exagère la noirceur, c’est pour mieux nous en révéler les dangers permaments; Mais il le fait avec le sourire: pas dans l’espoir de nous voir  faillir mais en nous assurant que nous sommes à l’avance pardonnés,  toujours avec le sourire, car la tâche est ardue et nous ne sommes que des hommes …

Les plans pourraient s’articuler autour de ces notions :

Les fables sont le reflet du monde , un miroir fidèle donc elles comportent beaucoup de cruauté et de mensonges ( qui peuvent triompher )

Mais le but du fabuliste est de nous mettre en garde et de nous enseigner la prudence ainsi que certaines vertus (un “vrai moraliste chrétien)

Néanmoins son regard diffère parfois de celui de la morale traditionnelle (libre-penseur, parfois libertin et surtout philosophe partagé entre épicurisme et stoïcisme; prêt à nous pardonner nos fautes ..)

Si vous voulez vous exercer et prolonger la réflexion , cherchez quelles fables et quelles morales vous pourriez insérer dans cette ébauche de dissertation ; Constituez -vous une fiche: La Fontaine moraliste  avec des titres , des morales et des thèmes communs.

04. janvier 2020 · Commentaires fermés sur Voyages, voyages : du récit aux carnets …suivez le guide · Catégories: Seconde · Tags:

 Qui n’a jamais rêvé de découvrir  de nouveaux horizons, de nouveaux paysages , de nouvelles terres et de nouvelles populations . Durant quelques semaines, vous allez vous transformer en explorateurs et vous présenterez à la classe votre parcours et vos recherches sous la forme d’un exposé (évaluation n° 1 ) , d’un carnet de voyages (évaluation n° 2 )   qui comportera plusieurs objets , des souvenirs originaux et notamment une lettre rédigée par un explorateur.  (évaluation n°3 ) ; Commençons donc par la première étape ..Votre travail va consister à résumer et à présenter  un récit de voyage. .Tout d’abord , vous allez devoir choisir un voyage réel ou imaginaire et pour vous aider, commencez à effectuer des recherches documentaires  voyages terrestres ou voyages spatiaux, voyages dans le passé ou voyage dans le futur. Suivez le guide …

Choisissez rapidement  un récit , en fonction de vos goûts et de vos centres d’intérêt et présentez le , par exemple sous forme de diaporama  en indiquant obligatoirement :

le contexte historique du voyage (dates de début , de fin ) et les événements principaux

le pays ou le territoire exploré , découvert, conquis et dans quelles circonstances (expédition terrestre, maritime, spatiale )

les caractéristiques des habitants ou du territoire ou les particularités des populations observées ( humaines, ou animales )

N’oubliez pas de préciser les conditions météorologiques..

Résumez les principales différences observées entre les habitants de ces contrées et les moeurs des voyageurs, résumez les principales observations des explorateurs , leurs contacts avec les autochtones à partir de leurs notes

Critères d’évaluation : précision des renseignements donnés, respect des différentes rubriques

Quelques pistes pour trouver des récits de voyage…  le choix devra me parvenir avant le 27 janvier .. début de la réalisation des carnets

Tout d’abord au CDI du lycée, vous trouverez différents livres consacrés à des récits de voyage : pour ceux qui veulent se lancer dans une lecture personnelle ..

Les 7 sceaux : un chasseur de sorcières et son fils en l’an 999 R MEY s     F

Isabella Bird : une femme exploratrice au Japon en BD MAN SAS        F

To tour Eternity de Oima Yoshitoki , l’arrivée d’un immortel sur terre   MAN Yos      F

Intrwriew d’Ulysse Mallasagna et son carnet de voyage au Japon        F et R

Carnets de voyage en Amérique latin: Chili, Patagonie et Pérou en 1950 791.4 SAL

Trois Orients de Claudio Magnis R magt            R

Voyage au pays des Kiribati, un archipel de micronésie  919.6 PIC       R

Le désert des déserts avec les bédouins , derniers nomades  R THE d       R

Maintenant quelques grands classiques du récit de découverte :

 les ancêtres : Marco Polo Livre des Merveilles écrit au treizième siècle.

à la Renaissance :

Montaigne , Des cannibales   F 

Jean de Léry, Histoire du Brésil  R

Christophe Colomb, Journal  R

Umberto Eco, Baudolino , F

au dix-septième siècle

à l’époque des Lumières

Les lettres Persanes de Montesquieu

L’Ingénu de Voltaire

Zadig ou la Destinée de Voltaire

Micromégas de Votaire

Supplément au Voyage de Bougainville de Diderot

au dix-neuvième siècle

Jules Verne  Voyage au centre de la Terre  ou Vingt Mille lieues sous les mers  F ou beaucoup d’autres comme  L’Ile mystérieuse  , Le tour du monde en 80 jours, De la terre à la lune

plus près de nous : quelques écrivains voyageurs comme Blaise Cendrars

Voyage avec un âne dans les Cévennes de Robert Louis Stevenson

Pierre Loti,  Pecheur d’islande 

Into the wild de Jon Krakauer : un jeune homme perdu dans la Nature Sauvage..

L’Odyssée de l”Endurance : une expédition en Antarctique en 1914 par Ernest Henry Shackleton

Longue marche de Bernard Ollier , 4 ans à travers la Chine et les plateaux d’Anatolie

La panthère des neiges de Sylvain Tesson

 Activité n° 2  : Réalisation d’un carnet de voyages

De ce voyage, vous devrez rapporter quelques souvenirs qui prendront la forme d’un carnet de voyage ; vous présenterez le résultat de vos recherches sous une forme originale (dans un sac par exemple, ou une boîte )

Vous devrez réunir : deux objets qui symbolisent ce voyage / une photo qui évoque un moment important de ce voyage ou un document iconographique comme par exemple une carte qui matérialise physiquement ce pays et une lettre manuscrite adressée , dans une enveloppe à une personne de votre choix . Cette lettre contiendra les impressions de voyage  de l’explorateur , quelques jours ou quelques semaines après son arrivée … vous respecterez les critères donnés dans votre présentation initiale (  coïncidence des dates, contexte historique respecté, observations précises effectuées )

Critères de réussite : La totalité des pièces devra être réunie pour le 10 février   ( un contenant, deux ou trois objets souvenirs, un  ou deux documents photo ou dessin,  et une lettre ) ; vous devrez présenter chaque élément de votre sac-souvenir..soyez créatifs !

Evaluation 3 : la lettre

Critères de réussite : ce document comportera environ 500 mots ; il sera rédigé avec soin et sera écrit à la première personne du singulier , il contiendra de nombreux éléments de comparaison entre ce qu’il observe et ce qu’il connaissait ; il comportera des indications précises sur la faune, la flore ou les moeurs des autochtones.

Bons voyages à tous ..

 

 

04. janvier 2020 · Commentaires fermés sur Le voyage de Candide : à la découverte des malheurs du monde . · Catégories: Seconde

Lorsque François Marie Arouet, qui porte comme pseudonyme Voltaire , écrit en 1759, son conte philosophique intitulé Candide et sous-titré L’optimisme, il entend vulgariser une partie de son système philosophique qui s’oppose fortement à celui enseigné par Leibniz dont la devise est la suivante : Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles . Mais comment rendre accessible à un large public des idées philosophiques , des concepts métaphysiques et une vision du monde progressiste ? L’écrivain décide alors de créer une forme littéraire qui lui permette d’atteindre cet objectif ambitieux ; plaire avec une histoire pleine de rebondissements et illustrer, au moyen des mésaventures de quelques personnages ,  les dangers de du providentialisme . Voyons en détails comment se déroule le voyage de Candide..

Le point de départ des aventures du jeune héros naïf est la Wetsphalie: Voltaire s’amuse à se moquer du déclin des aristocrates allemands et Candide est chassé du château de son enfance pour avoir embrassé Cunégonde, la fille du baron . Il s’enrôle , sans vraiment le savoir, dans l’armée bulgare et Voltaire critique alors fortement la guerre en exposant ses conséquences désastreuses; Candide réussit à s’enfuir et devient un déserteur ; Il fait alors la connaissance d’un généreux protestant avec lequel il va s’embarquer pour Lisbonne ; Il découvrira , à cette occasion, la cruauté des hommes et leur ingratitude avec la noyade de Jacques, le tremblement de terre de Lisbonne et le procès de l'inquisition dont Voltaire démontre les méthodes iniques ; Il lui faut encore s'enfuir et aidé par la Vieille,  qui va raconter ses nombreux malheurs ,il retrouve Cunégonde mais devient un assassin en tuant les deux hommes qui la retenaient captive et se la partageaient : Don Issachar et le grand Inquisiteur . Le voyage se poursuit en Amérique du Sud avec de nombreuses péripéties : les Oreillons du Paraguay représentent les hommes sauvages tels que se les imaginaient les savants de cette époque . Candide arrive jusqu’à un pays légendaire : l’Eldorado où l’argent n’a plus aucune valeur et où les hommes semblent enfin heureux. Mais après avoir perdu leur fortune au cours de la traversée, les personnages sont à nouveau séparés ;  Candide et son fidèle valet Cacambo vont se retrouver confrontés à un esclave moribond, en entrant au Surinam. Le philosophe dénonce alors violemment l’esclavage et ceux qui le pratiquent à l’image du méchant Vanderdendur. Retour sur le vieux continent avec une étape française et une étape anglaise  L’étape vénitienne et la rencontre avec le désabusé Pococuranté a pour but de montrer que pour vivre heureux, il faut garder du désir et de l’enthousiasme .

Le chapitre final nous transporte en Turquieà Constantinople, à la porte de l’Orient , là où un bon vieillard leur enseigne la voie de la sagesse et peut être aussi celle du bonheur : ne pas se mêler des affaires politiques pour ne pas finir assassiné, vivre en autarcie pour ne dépendre de personne et cultiver son jardin. Tous  les personnages se retrouvent alors pour former une mini-société où chacun est utile à la communauté : l’ancienne prostituée Pâquette brode , la Vieille  est devenue lingère, frère Giroflée menuisier et Cunégonde une excellente pâtissière.

Chaque étape du voyage géographique du héros lui a permis d’avancer dans son éducation : au fur et à mesure, il a ouvert les yeux et cessé de croire à l’enseignement de son maître Pangloss qui prétendait que tout est toujours pour le mieux . Voltaire a donc utilisé ici le thème du voyage comme un support pour des découvertes philosophiques . En effet, voyage va souvent de pair avec découverte : parfois découverte de soi-même comme dans les voyages initiatiques, parfois découverte des autres civilisations comme dans les voyages des explorateurs, parfois découverte d’autres mondes et d’autres formes de vie comme dans les voyages dans l’espace ou dans le futur . Pour en savoir plus, lisez le billet consacré aux voyages aux pays des merveilles …

02. janvier 2020 · Commentaires fermés sur La Fontaine : les fables sont-elles les fragments d’une pensée éparpillée ou forment-elles un système global ? · Catégories: Dissertations sur oeuvre, Première · Tags: ,

Disserter à partir d’une citation consiste tout d’abord à analyser cette dernière avant d’en présenter une reformulation la plus précise possible. En effet,de la qualité de cette analyse préalable dépendra souvent la qualité du plan élaboré pour présenter la réflexion  et donc, la qualité  du traitement du sujet . Revenons sur la citation : Pour définir la fable, la Fontaine la compare à une abeille : ” Je suis chose légère et vole à tout sujet : je vais de fleur en fleur et d’objet en objet” . Comment comprendre le mot légèreté : par opposition sans doute au mot gravité , au sérieux de certaines entreprise littéraires  ; la fable adopterait ainsi un style léger, celui de la plaisanterie et de la satire.Le burlesque des situations, l’anthropomorphisme des personnages , la présence de nombreux   jeux de mots contribuent à créer cet  esprit  “léger ” par contraste avec le style sérieux et le ton solennel des moralistes et des essayistes . Voyons maintenant les autres éléments qui composent la citation…

On note la présence d’une comparaison  avec l’abeille qui pourra être réutilisée dans le cadre de la dissertation. Le second mot qui retient notre attention est celui de sujet . Il pourrait indiquer que les fables ne respectent pas une  véritable organisation et qu’une fable succède à une autre de manière aléatoire, sans véritable projet d’architecture. Il est indéniable que la succession des fables présente un caractère désordonné et il peut sembler facile  de le démontrer. On a ainsi l’impression que le fabuliste, comme l’insecte , passe d’un sujet à l’autre et d’une fleur à l’autre au gré de ses envies . Ainsi, on pourra choisir d’évoquer la diversité  des thèmes lorsqu’on passe d’une fable à l’autre  : satire de la cour, l’amitié, le mariage, le voyage, la loi du plus fort. La difficulté ici réside dans la connaissances de la localisation des thèmes ; toutefois , sous une diversité de surface, on constate assez rapidement que les fables offrent une vision du monde assez homogène de leur auteur ; Il sera possible de le démontrer en se basant sur les thèmes récurrents comme la satire de l’orgueil , l’incitation à la prudence , à la mesure et à la sagesse dans tous les domaines ; Ainsi, que ce soit dans le domaine social, politique ou même lorsqu’il s’agit d’évoquer la religion, les fables condamnent les excès . 

La seconde difficulté dans la conception de cette rédaction consiste sans doute à bien choisir les fables qui vont servir d’illustrations et surtout de se contenter d’en citer un résumé sans trop entrer dans les détails du récit .

On peut donc proposer le plan suivant :

I Oui les fables proposent  , à première vue , des fragments de pensée

a) le choix de la forme courte et l’absence de continuité

b) diversité des thèmes abordés

c) diversité des tons et des registres  (burlesque , satirique )

II Mais sous cette diversité , on retrouve des récurrences et une pensée globale

a) les valeurs fondamentales à travers les morales

b) critiquer pour amuser mais surtout pour instruire

c) une unité de sens : la vision du monde homogène ?

Quelques exemples de démonstrations sous forme de paragraphes  plus ou moins rédigés:

I a) Le choix de la forme de la fable condamne le poète à des développements brefs et parfois, à esquisser simplement le traitement d’un sujet : comment, en  effet, évoquer la peur de la mort en quelques vers ? C’est pourquoi le fabuliste reprendra à plusieurs reprises ,  à travers des anecdotes différentes , des questions autour de la relation entre l’homme et la mort ; On a alors l’impression de passer d’un sujet à l’autre mais peut être s’agit-il, tout simplement, de différents aspects d’un même sujet ; On peut citer, comme exemple, la mort des courtisans dans la Cour du lion, punition de leur flagornerie qui contraste avec celle de l’âne dans Les animaux malades de la Peste ,  animal sacrifié qui est désigné comme une victime par les puissants , heureux de sauver leur propre vie ; au delà de leur différence , ces  morts posent le problème de l’injustice et soulignent les dangers de la vie à la Cour; Une fable comme La Mort et le mourant aborde, cette fois, sur un plan plus philosophique, la préparation à la mort . On peut alors penser qu’il s’agit d’un autre sujet car il est abordé , sans le truchement des animaux, par un autre biais : celui d’une personnification et d’un dialogue entre la mort sous la forme d’une allégorie et un Vieillard qui se plaint de devoir quitter la vie. La mort tente alors de le raisonner et de lui faire accepter son sort. Ce sont bien ici dse fragments de pensée rassemblés autour de l’idée de la Mort.

I b)  Dans le livre VII, on passe respectivement avec Les Animaux maladeés de la Peste, d’une dénonciation de la loi du plus fort et des injustices qui règnent à la Cour, à une réflexion sur les difficultés du mariage avec Le Mal Marié ; ensuite et sans transition, La Fontaine critique l'égoïsme de certains ordres religieux avec Le Rat qui s’est retiré du monde; Dans le Héron et la fille, quatrième fable du livre, il dénonce cette fois, l’insatisfaction chronique qui mène à la déception , en prenant d’abord le cas d’un animal qui dédaigne ses proies et ensuite celui d’une jeune fille qui cherche le mari parfait. Enfin la cinquième fable intitulée Les Souhaits nous introduit dans un univers merveilleux avec un follet qui accorde trois voeux à une famille . Cette dernière finit par choisir la sagesse. La fable suivante ressemble à la première avec une nouvelle critique des abus de pouvoir du monarque et les difficutés rencontrées par les courtisans dans l’usage,notamment de la flatterie. On voit bien ici que le poète comme l’abeille, passe de fleur en fleur, c’est à dire change de sujet quasiment à chaque fable .

I b) Il est bien difficile de dire quel est le sujet principal  des fables car La Fontaine aborde de nombreux thèmes dans ses recueils : la dimension politique s’efface de temps à autre au profit d’une approche philosophique de la nature humaine ; questions de société et références à certains événements contemporains  alternent avec des questionnements plus généraux sur les défauts de la Nature humaine .

II c) Certes , La Fontaine emploie très souvent le registre satirique mais il l’utilise essentiellement comme un instrument au service d’un objectif pédagogique, celui d’enseigner aux hommes comment échapper aux dangers de leur condition. Ainsi , ce qui pouvait apparaître comme une forme de légéreté, aide à faire passer l’enseignement sans la lourdeur du sermon ou de l’essai. On peut le voir, par exemple, dans Perrette et le pot au lait ou Le Curé et le mort : le portrait des personnages , leur mésaventure plaisante et triste à la fois, aide à nous faire comprendre les dangers de l’imagination. Perrette perd son lait pour avoir trop rêvé à ce qu’elle en tirerait comme profit alors que le Curé perd la vie pour avoir voulu se servir, à des fins égoïstes , de celle de ses ouailles;  Au delà des différences de traitement du sujet ,  les deux rêveurs sont punis et la leçon est identique pour le lecteur : il ne faut pas parier sur l’avenir, toujours incertain.

Pour conclure, le fatras apparent des fables peut paraître , à première vue, un obstacle pour y déceler une vision du monde cohérente mais néanmoins, au terme de notre lecture du second livre des fables , nous avons le sentiment de percevoir l’unicité et la singularité d’une pensée :celle d’un poète qui a choisi de ne pas s’appesantir  sur la gravité du monde mais de voyager léger avec ces fables comparables à des fleurs des champs éparses qui forment un bouquet coloré . Il passe certes de sujet en sujet et il lui arrive même de se montrer quelque peu contradictoire mais il construit une vision du monde personnelle qui parvient, le plus souvent ,  à unifier les dissonances .

19. décembre 2019 · Commentaires fermés sur La Belle personne: quelle adaptation pour le roman de Madame de La Fayette ? · Catégories: Première

Adapter une oeuvre littéraire au cinéma nécessite d’y opérer des choix. Si le sens général de l’ouvrage est souvent conservé, Certains personnages sont amenés à disparaître , parfois à changer de nom ou de fonction.Lorsque Christophe Honoré décide d’adapter le récit imaginé au dix-septième siècle par une des aristocrates de la Cour , c’est surtout dans l’intention de démontrer à ceux qui en doutent, que ce roman peut encore concerner un public contemporain. Voyons comment il a créé Une belle personne, en 2008, à partir du scénario de La Princesse de Clèves.

 Le synopsis : Junie, seize ans, change de lycée en cours d’année suite à la mort de sa mère. Elle intègre une nouvelle classe dont fait partie son cousin Mathias (alias le Vidame ? ) . Il la présente à ses amis : Marie et son frère Henri qui a Catherine pour petite amie… qui couche aussi secrètement avec Mathias qui sort avec Esther. Junie est  très rapidement courtisée par deux garçons du groupe : Jacob le photographe et Otto alias Le Prince de Cmèves . Elle consent à devenir la fiancée de ce dernier.

Mais elle est bientôt confrontée au grand amour, celui de Nemours, son professeur d’italien. Celui-ci est déjà l’amant de la jolie professeure d’histoire , Florence Perin . Nemours est aussi l’amant de Marie, l’une des élèves de la bande. (  alias la Dauphine ? ) Le regard de Nemours sur elle et bouleverse Junie qui s’enfuit de la classe. Elle laisse sur son bureau la photo d’elle prise par Jacob ( alias duc de Guise )  et sait que Nemours la lui a volée.Au CDI, Otto lui raconte les amours secrètes de la documentaliste avec les professeurs de sport et de mathématiques Estouteville et Sancerre. Il conclut que l’on ne connaît jamais bien ceux que l’on aime.Nemours avoue à Nicole, la patronne du café Sully, puis à Estouteville son amour pour Junie et rompt avec Marie et Florence.Lors d’une sortie à la cinémathèque , une lettre s’égare sur un fauteuil et tous pensent qu’il s’agit d’une lettre d’amour de Nemours. Junie en est , une fois de plus,bouleversée. Il s’agit pourtant d’une lettre reçue par Mathias et écrite par Martin. Mathias demande à Nemours de reconnaître la lettre pour sienne car il craint que Henri, qui ne supporte pas de le savoir avec Martin, n’use de représailles et révèle de manière scabreuse à tous leur homosexualité en publiant une photo compromettante sur le site du lycée.

Nemours accepte de récupérer la lettre auprès de Junie et convainc celle-ci qu’il n’en est pas l’auteur. Avec elle et Mathias, ils rédigent une fausse lettre. Junie fuit le cours d’Italien et s’en va avouer à Otto qu’elle va quitter le lycée car elle craint de succomber à un amour qui la détruira. Nemours surprend leur conversation ( comme dans la scène d’aveu inventée par Madame de LaFayette )

Pendant ce temps dans sa classe Henri se bat Mathias et tente de le poignarder d’un coup de ciseau. Il est arrêté par la police. Catherine s’en vient prendre de ses nouvelles au commissariat. Henri est finalement libéré puis vraisemblablement acquitté. Il ne reviendra pas au lycée. Jacob récupère sa photo et console Esther.

Junie apporte une bande dessinée pour enfants à Otto où un ours qui porte son nom est le héros. Sur le mur, elle se déshabille devant lui. Otto est inquiet et la fait surveiller par Henri qui lui rapporte qu’elle a embrassé Nemours. De désespoir,Otto se suicide.Junie se refuse à Nemours car l’amour ne dure qu’un temps et, un jour, il l’abandonnera. Refusant cette douleur future qu’elle ne peut supporter ni aujourd’hui ni le moment venu, elle préfère s’éloigner. Nemours est décidé à ne pas renoncer . Junie lui donne rendez-vous à pour le surlendemain à 17 heures mais c’est  Mathias qui explique à Nemours que Junie est partie très loin et qu’elle ne veut plus jamais le revoir. Sur le pont d’un ferry, Junie voit s’éloigner la côte. (dans le roman , la Princesse se réfugie dans les Pyrénées )

Quelques éléments à retenir si vous devez évoquer ce film .

 

Les épisodes les plus connus du livre : le vol du portait, les amours de madame de Tournon avec le comte de Sancerre et Destouteville, la lettre, la retraite de Coulommiers, l’aveu au mari, la mort du prince, la fuite de la princesse sont repris dans le film. La princesse refuse un amour qu’elle sait limité par les contingences terrestres au nom d’un idéal plus grand. Chez madame de La Fayette il s’agissait surtout d’une accusation de l’amour comme corrupteur de l’honneur qui ferait perdre sa “vertu” à la princesse. Pour Junie c’est surtout la brièveté de l’amour  charnel qu’elle refuse , au nom d’un amour  qui serait éternel. La mort de  la mère celle qui devait transmettre les valeurs morales à sa fille, a lieu avant le début du film  Le prénom de  Junie a été emprunté au personnage de la tragédie de  Racine qui, amoureuse de Britannicus et  pour échapper à Néron, finit vestale. “Je me protège de quelqu’un d’ici, de quelqu’un que je ne veux pas aimer. Voilà, la vérité c’est que je prends la fuite”.

Les points communs des  personnages de La princesse de Clèves.

L’aventure de Mathias rappelle celle du vidame de Chartres qui multiplie les liaisons et fait de faux serments.  Otto raconte aussi avec l’histoire de la documentaliste celle de Mme de Tournon avec Estouteville et Sancerre.Ce sont des amours où se mêlent sincérité et tromperies.Otto est aussi torturé que le Prince de Clèves et l’aveu de l’amour de celle qu’il aime pour un autre tue en lui ce qui restait de vie.

Jacques Nemours est un professeur idéal : beau, intelligent, amusant et apprécié de ses élèves il connaît le succès amoureux aussi bien avec les professeurs (Florence Perrin) qu’avec les élèves (Marie). Il connaît cette sorte de destin supérieur que lui envient Estouteville et Nicole, la patronne du café Sully. Il rompt avec ses anciennes relations amoureuses pour faire place nette à son nouvel amour pour Junie. Dans le roman, il lui vole son portrait ici se sera sa photo. Peut-être toutefois n’a-t-il pas les qualités exceptionnelles que lui prête le roman qui voit en lui le futur mari d’Elisabeth d’Angleterre.

Quelques critiques

On a pu dire ici ou là que les lycéens d’Honoré n’étaient pas crédibles. Probablement ne représentent-ils qu’une infime minorité des jeunes tout comme la morale de la Princesse ou de Junie ne concerne qu’une minorité. Cette exigence d’élévation spirituelle ne peut concerner que des adolescents sensibles à la grâce comme le figure peut-être ces plans où, dans l’attente de l’arrivée de leur professeur, ils contemplent un plafond peint sur la création du monde ou celui de Léa debout à demi- nue en contre-plongée sur un mur du lycée. Le réalisateur utilise , en fait , de nombreux symboles dans son film : retrouvez-en quelques uns et analyser leur signification.

 
07. décembre 2019 · Commentaires fermés sur La Fontaine : l’école buissonnière , un livre d’Erik Orsenna .. pour découvrir la vie du fabuliste · Catégories: Le livre du mois · Tags:

Je vous résume ici des extraits du roman d’ Erik Orsenna ( membre de l’Académie Française ) consacré à Jean de La Fontaine . 

Un petit garçon est né à Château Thierry,  la porte de la Champagne , l’année où le cardinal de Richelieu voit son pouvoir augmenter  ; Le jeune Lousi XIII est alors âgé de 20 ans et la France n’échappe pas cette manie de la guerre perpétuelle ; Le roi entend bien écraser les protestants réfugiés dans le Sud de la France ; la Nouvelle -Amsterdam ne s’appelle pas encore New-York .

Jean est l’aîné d’une famille bourgeoise qui tire ses  petits revenus des terres qu’ils ont achetées au fil des années . Toute sa vie, il sera partagé entre être un rat des champs et être un rat des villes ; A l’école il est décrit comme un bon garçon,  fort sage et fort modeste .  En 1641, il entre au couvent pour devenir prêtre mais renonce à la vocation ecclésiastique et commence des études de droit à Paris.

Il lit beaucoup :  son livre préféré est un roman fleuve : l’Astrée qui raconte  en 5000 pages les amours  compliquées d’un berger Céladon et d’une bergère  nommée Astrée. Au coeur du quartier latin, il rencontre un groupe de jeunes provinciaux comme lui qui vont devenir ses amis : Furetière, Tallemant des Réaux, Maucroix . Le père de La Fontaine presse son fils de se marier et de trouver  enfin un travail car il a tendance à dépenser tout l’argent que lui donne ses parents . Mais le poète ne semble guère pressé de se ranger ..son père le contraint  pourtant à épouser une jeune fille de 14 ans, Marie, qui lui apporte une grosse dot  mais elle a , semble-t-il, un fort long nez… A 31 ans La Fontaine achète une charge de maitre des Eaux et Forêts mais surveiller ses terres et notamment lutter contre les braconniers ne l’amuse guère ..il doit juger les contentieux et tenir les registres des ventes de bois et de la pêche. Le poète va devoir se partager entre des séjours à Paris avec ses nouveaux amis Boileau, Molière et Racine et sa province natale. Il finit toujours par revenir sur ses terres à Château-Thierry où l’attend son épouse qui s’ennuie ferme et bientôt son fils pour lequel il ne sera pas un père présent. A Paris,  le poète vit sa vie..il  a de nombreuses maîtresses et  il trouvera normal que sa femme entretienne elle aussi  une liaision avec un soldat qui l’avaiit autrefois demandé en mariage; Il se montre très compréhensif et accueille même l’amant sous son toit  ce qui déclenche des rumeurs au village ; Il ne connait donc pas le sentiment de jalousie. 

A 36 ans et assez désargenté, La Fontaine a l’idée d’envoyer un long poème de 600 vers à Nicolas Fouquet, jeune surintendant des finances . Il le flatte au moyen d’hyperboles et obtient, grâce à son talent ou à ses louanges,  une généreuse pension. Fouquet va devenir son “soleil” et son mécène. Après la somptueuse fête que son ministre  donne dans son récent château de Vaux le Vicomte , Louis XIV décide de le faire arrêter car il lui fait de l’ombre et c’est d’Artagnan qui vient le mettre aux arrêts sur ordre du souverain, offusqué qu’un de ses serviteurs puisse briller avec autant d’éclat. Il restera 19 ans en prison et tous ses amis le trahiront pour aller servir Louis XIV à Versailles ; Tous sauf la Fontaine qui se retrouve sans un sou et doit vendre la maison de son père .. il a presque  40 ans lorsqu’il commence à écrire les fables . Le dictionnaire de cette époque propose la définition suivante : chose feinte inventée pour instruire et pour divertir.  Le fabuliste ajoutera dans sa préface : l‘apologue est composé de deux parties dont on peut appeler l’une le corps, l’autre l’âme. le corps est la fable; L’âme , la moralité. L’autre couple à l’oeuvre dans les fables est celui que forment le mensonge et la vérité. Le mensonge ( affabulation ) pour dire la vérité : c’est une définition qu’on pourrait donner de la fable sans doute. 

En 1667 le premier livre est édité : on y trouve  beaucoup d’animaux comme la cigale et la fourmi, le renard et le corbeau et la grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le boeuf. La Fontaine va présenter son livre au roi qui donne un repas en son honneur et lui offre une grosse somme d’argent . Pour composer ses fables, le poète s’inspire d’Esope et de Phédre, qui tous deux dans l’Antiquité furent d’abord des esclaves avant de gagner leur liberté par leurs oeuvres , mais également de la tradition du récit animalier et notamment du roman de Renart, grand succès au Moyen-Age . D’ailleurs ce qui plait beaucoup lorsque nous lisons les fables, c’est ce dialogue qui s’instaure , à de nombreuses reprises, entre les hommes et les animaux . “Tout parle en mon ouvrage et même les poissons / Ce qu’ils disent s’adresse à tous tant que nous sommes / je me sers d’animaux pour instruire les hommes.” Mais quels enseignements tire-t-on , au juste de notre lecture des fables ? la question a traversé les siècles .

En écrivant plus de 240 fables, La Fontaine a créé un monde et pour reprendre une citation de Barbey D’ Aurevilly ; écrivain du dix-neuvième siècle : ” plus nous avons grandi, plus il a grandi avec nous . Plus nous avons avancé dans la vie, plus nous avons trouvé de charme et  de solidité dans ces fables qui sont la vérité, dans ces drames où les bêtes sont les personnages et qui racontent si délicieusement et si puissamment la vie humaine ”  Car enfin qui était vraiment La Fontaine? à la fois  un campagnard qui fréquentait les salons parisiens, un amoureux de la solitude qui aimait être entouré , un mari qui avait de l’amitié pour sa femme et qui collectionnait les aventures , un philosophe épris de sagesse et de plaisir, un homme qui a toujours couru après la Fortune tout en déplorant les dangers d’être riche ..

En 1670, La Fontaine accepte de préfacer un ouvrage d’un de ses anciens amis de l’Oratoire ; ce livre contient des poésies chrétiennes et son auteur M de Brienne, ancien ministre de Louis XIV, le destine à une certaine duchesse à laquelle il cherche à plaire .. plaire aux femmes : ce fut une mission pour le fabuliste . Madame de La Sablière fut l’une de ses amies… femme d’un collecteur général des impôts donc fort riche et très libérale,  elle était surnommée par Madame de Sévigné: la tourterelle car elle passait , soi disant, son temps à roucouler avec les Messieurs qui fréquentaient ses salons. Elle hébergera La Fontaine 20 ans dans sa maison  : elle fut pour lui une bonne fée, comme il le disait à ses amis. 

En 1683 , la mort de Colbert libère une place à l’académie Française et La Fontaine qui gardait rancune à Colbert d’avoir poussé le roi à faire condamner Fouquet , était heureux de pouvoir prendre son siège d’académicien. Hélas un de ses amis se met aussi sur les rangs pour obtenir le siège : c’est Nicolas Boileau; le vote  des académiciens est favorable au fabuliste à 13 voix contre 7 mais le roi le fait attendre et il ne deviendra académicien que lorsqu’un nouveau siège se libérera ; Le nouveau vote lui est encore favorable mais le roi, rancunier, exige que Boileau soit nommé. Et accepte que La Fontaine le rejoigne…le jour de son admission, il s’engage solennellement à devenir plus vertueux  et à servir le Prince..à 60 ans, La Fontaine semble renoncer à critiquer le pouvoir royal pour faire partie des  24 Sages et rejoindre ses collègues de l’Académie Française, lui qui n’a plus de maison et qui ne voit plus sa famille depuis longtemps.

L’amitié est un thème abordé dans les fables et La Fontaine savait de quoi il parlait car il a connu une amitié très forte avec Jean Racine : il est plus vieux de 18 ans que son jeune cousin (éloigné mais parents par leurs mères ) et a connu un succès moins spectaculaire que le sien. Au théâtre, les gens se lèvent pour applaudir les tragédies  et la gloire de Racine sera très rapide alors que La Fontaine connaîtra un succès plus limité à certains cercles mondains; Toutefois, une femme aurait pu les séparer : la Champmeslé, l’actrice dont Racine fut longtemps amoureux et qui se montrait fort infidèle; Elle eut, parait-il un penchant pour le fabuliste .. Racine n’en voudra pas à son cousin et tous deux continuèrent à briller, côte à côte .. cependant le fabuliste n’est pas aussi doué  pour faire carrière que le jeune dramaturge  qui deviendra historiographe du roi , travail illustre et fort bien payé surtout  !  La Fontaine pour vivre s’est mis au service de la veuve du frère de Lousi XIII, Marguerite du Lorraine dont il est le “gentilhomme ” c’est à dire le serviteur : il lui porte ses messages, lui fait ses course et même lui promène ses chiens. La Fontaine dog-sitter , ça lui va bien ! Il est plus cigale que fourmi ..vous l’avez bien compris ! 

laf127.jpgA la veille de sa mort, son confesseur l’abbé Pouget,  l’exhorte d’avouer ses fautes passées et le fabuliste, qui souhaite rejoindre le paradis et sauver son âme, s’exécute. Il faut l’imaginer sur son lit , en train de lire à ses amis, sa confession; Miracle aurait-il pensé  : la santé lui revient quelques temps .  Mais on sait qu’à la fin de sa vie, le poète s’infligera  même des châtiments corporels pour obtenir le pardon de ses fautes; Quand on le dévêtit pour le mettre en terre, on vit son corps lacéré par le port du cilice, une chemise de fer qui entaille les chairs et que portaient les religieux pénitents.

La Fontaine ne touchera jamais aucun droit d’auteur pour ses livres ; Il a dilapidé l’argent de sa famille , vendu tout ce qu’il pouvait et à la mort de Madame de La Sablière, il se retrouve sans toit . C’est alors qu’un banquier protestant M Herwarth lui offre l’hospitalité; Louis XIV qui connaissait son dénuement n’a pas levé le petit doigt pour l’aider : à l’époque le roi est sous la coupe de Madame de Maintenon qui a évincé Madame ed Montespan et qui fait régner à la Cour un vent de pudibonderie; Devenue femme de roi, elle ne lui pardonna jamais d’avoir écrit les  70 Contes érotiques  et  d’avoir vanté publiquement  les mérites de la Volupté.  

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Madame de Maintenon 

Qui peut expliquer aujourd’hui la magie La Fontaine ?  les sourires que font naître les fables et les traces qu’elles laissent dans notre mémoire individuelle et collective ? Le poète a choisi ces quelques vers en guise d’épigraphe pour son tombeau : “Jean s’en alla comme il était venu/ mangea  le fonds avec le revenu / Tint les trésors chose peu nécessaire / Quant à son temps, bien  le sut  dispenser / deux parts en fit, dont il soulait passer / l’une à dormir et l’autre à ne rien faire . ”  Il donne volontiers de lui pour la postérité cette image de papillon du Parnasse  : “Je suis chose légère et vole à tout sujet; je vais de fleur en fleur et d’objet en objet. ”  Cet autoportrait ne dit pas les heures de travail passées à raturer, corriger les fables; pas plus qu’il ne dit les heures passées à observer, mettre en mots et en musique , faire chanter les mots et trouver une langue à chaque animal , une situation pour chaque circonstance de la vie, une morale qui résume sa pensée et demeure fidèle à ses convictions. 

L’auteur conclut son livre en disant ” depuis 60 ans que je lis et relis la Fontaine, c’est d’abord une leçon d’acquiescement que je retiens; Oui à la Nature malgré ses sauvageries. Oui aux frères et soeurs humains malgré leurs ridicules , malgré leur rapacité foncière. Oui à eux car nous sommes sur le même bateau, et pour le meilleur ou pour le pire, du même équipage” Et sourire, car sourire c’est encore acquiescer . ”  Pensez vous vous aussi , à la lecture des fables , qu’elles disent  oui à la vie….

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Vaux le Vicomte : demeure de Fouquet