08. février 2025 · Commentaires fermés sur Les aveux d’une passion tragique : le face à face Phèdre -Hippolyte II, 5 · Catégories: Lectures linéaires, Première · Tags: , ,

( Voir l’introduction proposée sur le digipad Badine ) 

La tragédie racinienne libère la parole amoureuse qui marque souvent une  forme de transgression :  La longue  tirade de Phèdre commence par une déclaration d’amour à Thésée qui , par glissements successifs, finit par révéler , sa passion pour le “charmant” Hippolyte. Le jeune homme , honteux , pense tout d’abord qu’il s’est mépris et qu’il a accusé , à tort sa belle-mère d’être amoureuse de lui .  Alors qu’il souhaite se retirer , Phèdre entreprend  de le détromper et avoue, cette fois sans détour, son amour . Elle ne joue pas avec les mots et dévoile les plus sombres secrets de son coeur .

 Texte : De ” Ah cruel, tu m’as trop entendue..à délivre l’univers d’un monstre qui t’irrite.” Comment Phèdre exprime-t-elle ici, à la fois , les souffrances de sa passion  et son caractère monstrueux ?  Comment sa parole se libère-t-elle et met-elle son coeur à nu ?
Le premier  mouvement présente , une fois de plus , Phèdre comme la  victime d’une fatalité incontrôlable, le jouet de Dieux cruels.

L’émotion est ici poussée à son paroxysme, comme le montrent les points d’exclamation et l’interjection « Ah », ainsi que le terme d’adresse « Cruel » qui paraît ici  désigner ici le jeune homme  .  On entend davantage la cruauté d’un amour non réciproque et la cruauté de la souffrance qu’il inflige, malgré lui , à sa belle-mère, par sa simple vue.  La ponctuation expressive marque ici  la violence verbale et annonce la violence  physique.- La présence de verbes injonctifs semble  traduire l’ emportement de l’héroïne contre la fatalité de cette passion. .  Phèdre a désormais le pouvoir, celui de la parole libératrice : « Connais », « ne pense pas » : le temps n’est plus à la réflexion. Et la parole de Phèdre s’apparente à une révélation qui montre ce qu’on ne devait pas voir, qui met à jour ce qui était dans l’ombre . –  D’ailleurs le terme ” fureur” qui peut être considéré comme  manifestation de l’Hybris, cet orgueil humain  démesuré, propre à la tragédie, est également une manière de rendre visible ce qu’on ne voyait pas  : Phèdre est à présent hors de contrôle. La fureur désigne donc l’emportement du personnage : elle semble poussée par une force incontrôlable, propre à la passion . Le contraste est particulièrement frappant avec son aveu , qui tient en 2 mots : « J’aime ». et qui, pour le coup, est d’une grande sobriété alors que le mouvement précédent annonçait une montée en puissance . Cette sorte de chute , d’adoucissement , montre que  c’est bien là l’essentiel de ce qu’elle voulait dire . Et pourtant, ce « J’aime »  ressemble à une bombe à retardement. La  précision en fin de vers « je t’aime » paraît touchante et fait résonner aux deux extrémités de l’alexandrin l’amour de Phèdre . Pourtant , très vite il apparaît que cet amour doit être combattu car il a un  caractère infamant (dégradant )  : « fol amour », « trouble ma raison », « lâche complaisance », « poison », « feu fatal ». On retrouve ici le champ lexical de l’aliénation provoquée par la passion qui, pour les anciens, est assimilée à une malédiction divine .
Phèdre se présente  ici comme une victime de la malédiction de Vénus, lancée contre toute sa lignée. Le terme « dieux » revient par trois fois, renforcé par la métaphore « vengeances célestes » et la métonymie «contre tout mon sang ». – Pour insister sur le caractère odieux de la machination dont elle est victime, elle se qualifie de « faible mortelle », sorte d’antithèse qui vient en contrepoint de « dieux » et qui démontre son impuissance ; Le registre pathétique est déployé pour faciliter la compassion du spectateur,  qui , avec la terreur , est  le ressort essentiel du spectacle tragique comme le démontre Aristote . Le spectateur, pour pouvoir s’émouvoir du sort de Phèdre doit   considérer l’héroïne tragique comme une victime d’une fatalité qui la dépasse.  Le personnage explique donc l’origine de cette passion incontrôlable , pour mieux tenter de se justifier aux yeux du spectateur et présente  cet amour qui lui fait horreur comme le montre l’acmé de ce premier mouvement : « Je m’abhorre encore plus que tu ne me détestes » :  formule frappante où on note , à la  fois une gradation descendante et  des effets d’ hyperbole. le verbe abhorrer signifiant un rejet très fort d’elle-même : elle se juge elle même coupable et se dégoûte.
–  On retrouve également dans cette tirade l’idée que Phèdre a tenté de se prémunir contre cette passion  mais que ces précautions ont été inutiles “ inutiles soins  ”  ce qui renforce l’ironie tragique : elle est justement confrontée avec cette arrivée à Trézène à ce qu’elle voulait “fuir ” : la tragédie devient  un piège qui se referme sur un personnage et plus il cherche à éloigner le péril, plus le filet se resserre autour de lui  . On voit donc ici qu’elle mène une lutte inutile contre elle-même. –  Alors que le présent dominait le premier mouvement, c’est le  passé qui est dès lors employé (passé composé + imparfait). : Phèdre se remémore la façon dont elle a cherché à lutter et fuir cet amour qui s’imposait à elle.- Elle cherche ainsi à prouver qu’elle n’est pas à l’origine de ses sentiments monstrueux, qu’elle n’a pas subi passivement le feu de la passion qui s’est mis à la consumer : elle a tenté d’agir en chassant le jeune homme ; Le champ lexical de la haine montre qu’elle l’a persécuté : «fuir », «chassé », «odieuse », «inhumaine », «j’ai recherché ta haine », « tes malheurs ». Cette idée est corroborée par le verbe « résister »  mais la femme de Thésée a échoué avec cette stratégie ” Tu me haïssais plus, je ne t’aimais pas moins ”  Le dramaturge a  combiné  ici trois procédés d’écriture pour obtenir un effet maximal ; l’effet de chiasme avec ce croisement Je  et Tu , l’ antithèse avec l’opposition haïr et aimer et enfin , la litote car ” je ne t’aimais pas moins ” signifie qu’elle ne parvient pas à chasser cet amour  ;  ce vers illustre  ainsi les limites de cette lutte interne. Racine montre ensuite , de manière assez traditionnelle, les manifestations physiques de cette passion destructrice : ” J’ai langui, j’ai séché, dans les feux , dans les larmes ”  Un nouveau chiasme ( languir est associé à larmes et signifie être triste et le verbe sécher est associé à l’action du feu ) matérialise  les douleurs de Phèdre .- Malheureuse, elle inspire la pitié et elle implore Hippolyte ; La proposition subordonnée circonstancielle  de condition « Si tes yeux un moment pouvaient me regarder » a des allures de prière.   Cette didascalie interne laisse imaginer l’attitude du jeune prince : en effet, on peut imaginer qu’il a détourné les yeux, sous le coup de cette révélation ; La honte qu’il ressent est d’avoir pu, à son corps défendant, inspirer cette passion à celle qu’il respecte comme étant l’épouse de son père .


Mouvement 2 : une nouvelle étape dans cet aveu  : Phèdre revient sur la force qu’elle subit comme une fatalité . Les questions rhétoriques montrent qu’elle n’agit pas cette fois, de son plein gré  mais poussée par des circonstances exceptionnelles . ” cet aveu si honteux, le crois-tu volontaire ? ” le ton ici n’est plus celui de la supplique . La reine  fait retour sur sa situation qui  vient d’évoluer et met en avant son rôle de mère protectrice; En effet, en apprenant la  “fausse “mort de Thésée son mari , elle craint  les luttes pour le pouvoir; elle a peur que son beau-fils cherche à éliminer d’autres héritiers potentiels les  jeunes enfants qu’elle a eux avec Thésée. Elle venait donc le prier “de ne le point haïr ” . On retrouve ainsi, un parallélisme de situation: elle le supplie , en quelque sorte, deux fois: une première fois en tant que mère et une seconde fois, en tant que femme amoureuse . Cette situation rappelle que les tragédies de Racine sont toujours sous-tendues par des drames politiques : l’amour n’y joue pas un rôle de premier plan.La ponctuation exclamative  marque à nouveau l’effervescence qui anime la jeune femme. L’interjection « Hélas » souligne la perte de toute forme d’illusion et ne laisse à Phèdre que l’espoir d’une mort libératrice. 

Mouvement 3 : Un nécessaire sacrifice sur l’autel de la passion  . Elle conjure Hippolyte d’abréger ses souffrances grâce à de nouveaux verbes à l’impératif qui forment un parallélisme et une antithèse : « Venge-toi » / « Punis-moi » : de victime, elle devient coupable et présente sa mort comme une solution avantageuse alors que quelques instants plus tôt, elle venait plaider pour la protection de ses enfants; On remarque la contradiction du personnage en proie à un accès de folie passionnelle ; Souvent , sous l’effet de la passion, les sentiments se mêlent et et le discours peut paraître incohérent.   Sa prière fait appel aux qualités héroïques du jeune homme qui en la tuant, accède au même rang que son père et répète les exploits de ce dernier; On se souvient, en effet que Thésée est un chasseur de monstres célèbre et qu’il a accompli de nombreux exploits comme le fait de tuer le Minotaure . Hippolyte peut ainsi , symboliquement, se hisser au même rang que son père dont il devient le digne fils  . Le vers suivant  contient cette idée  « Délivre l’univers » est une hyperbole qui accentue la monstruosité de Phèdre et permet au jeune homme de “devenir un digne fils de héros ” c’est à dire d’agir, à son tour , en héros. En se jetant sur son épée, Phèdre fait appel, à la fois à son orgueil et à son sens du devoir . Le  champ lexical de l’amour  trouve encore sa place dans une sorte de gradation tragique  « un cœur trop plein de ce qu’il aime », « un odieux amour»: on assiste à une métamorphose de cet amour, qui correspond à la métamorphose monstrueuse de Phèdre elle-même : elle fait corps avec ses sentiments.  Le  vers résonne comme une sentence irrévocable.  Notons enfin qu’elle emploie une périphrase pour se désigner «  la veuve de Thésée » mettant en lumière  ainsi son statut de belle-mère. Elle se présente non seulement comme un “monstre  affreux “mais  ses paroles sont autant d’appels à la haine. Comme si, par ses mots, elle tentait de convaincre Hippolyte de passer à l’acte . Le tour présentatif “Voilà mon coeur” est à prendre à la fois au sens propre comme une didascalie interne : elle désigne sa poitrine comme cible. Mais on peut également y lire la thématique de l’aveu dans le sens où elle a mis son coeur à nu .Elle adopte une attitude héroïque en es déclarant “impatiente” de mourit pour pouvoir expier sa faute ; On retrouve ici la valeur chrétienne de l’expiation et du châtiment des offenses. Elle s’avance ici au devant de son trépas en demandant au jeune homme d’être l’instrument de sa mort ; Ce qu’il va refuser et son refus obliger aPhèdre à recourir au suicide . le rejet “Frappe ” donne uen allur etragique à cet impératif . Cependant l’héroïne anticipe un possible refus et se déclare , dès lors, prête à utiliser elle-même l’épée . Les trois raisons invoquées se complétent et sont quelque peu redondantes  : indigne de tes coups, ta haine , un sang trop vil ” ; On retrouve l’idée que la souffrance doit être supérieure à la mort et qu’un héros ne se salit pas les mains en tuant un ” monstre ” ; elle ne mérite pas de mourir de la main de son beau-fils et devra donc se tuer elle-même.  Cette scène se termine par la sortie précipitée de Phèdre qui , à la demande d’Hippolyte, entre dans le palais pour se cacher: ce qui met un terme à leur face à face. Ils ne se reparleront plus jamais jusqu’à la fin de la pièce. Après la mort du jeune homme, Phèder avouera alors à son époux toute la vérité avant de mourir , sosu l’effet du poison qu’elle a avalé.

 En conclusion : Phèdre, en se déclarant à Hippolyte, vient de franchir un point de non-retour. Déclenchant , à plusieurs reprises , la pitié du spectateur  elle s’inscrit dans cet aveu monstrueux comme une véritable héroïne tragique, victime de la fatalité et de l’hybris.  A la fois victime et  coupable, elle fait corps avec ses sentiments et envisage la mort comme remède à ses tourments.  Les paroles de Phèdre seront lourdes de conséquences et la tragédi eest en marche .   Cette épée  qui devait servir à tuer Phèdre va ensuite jouer un rôle crucial dans la tragédie car elle va servir de preuve à la tentative de viol dont Oenone, la confidente de Phèdre, va accuser Hippolyte .   Le quatrième acte s’ouvre, en effet , avec l’entrevue entre  Thésée et  Oenone qui accuse Hippolyte  : le roi reconnait l’épée de son fils entre les mains de la nourrice ” j’ai reconnu le fer, instrument de sa rage/ ce fer dont je l’armai pour un plus noble usage .” Thésée   convoque son fils et convaincu de sa culpabilité , il lui lance  ” il fallait en fuyant ne pas abandonner le fer , qui dans ses mains aide à te condamner . Un monstre marin sortdes flots à la demande de Neptune et tue le jeune homme innocent .La tragédie est en marche, et rien ne pourra plus l’arrêter. Cette épée est devenue l’agent du destin d’Hippolyte . Les paroles de Phèdre ont déclenché l’engrenage tragique.  

05. novembre 2023 · Commentaires fermés sur L’île des esclaves : une utopie sociale inventée par Marivaux · Catégories: Lectures linéaires, Première · Tags: , , ,

En  1725 ,lorsqu’il met en scène L’ile des esclaves, cette comédie philosophique,  Marivaux a déjà connu le succès au théâtre avec ses comédies sentimentales :  La Surprise de l’amour  et La double inconstance ; Il y analyse les rouages des relations amoureuses et tente de faire découvrir à ses personnages ce qu’est une relation sincère , qui ne se fonde ni sur les apparences ni sur la vénalité ou l’intérêt mais simplement sur les mouvements et le langage du coeur; Observateur avisé de ses semblables , le dramaturge se lance avec l’Ile des Esclaves, dans une comédie sociale: il s’agit de critiquer la manière dont les aristocrates traitent leurs domestiques et de leur apprendre , grâce à un renversement des rôles, à se montrer plus humains et plus respectueux .  Plus »

02. février 2023 · Commentaires fermés sur Les types de comique ou comment faire rire les spectateurs ? · Catégories: Seconde · Tags: ,
Comment faire rire les spectateurs: déclencher le rire n’est pas une chose facile; Connaître les sources du comique et  ses principaux procédés peut aider les auteurs à construire leurs spectacles mais les réactions du public sont parfois imprévisibles. On distingue donc au moins trois grands types de comique : le comique de geste repose sur des effets visuels; Au cinéma, il s’apparente souvent à des gags et peut découler d’une situation particulière ; D’ailleurs comique de geste et comique de situation sont souvent associés ; Grimaces, tics nerveux, gestuelle désordonnée, maladresse qui conduit à des catastrophes sont des recours faciles et qui ont fait leurs preuves.

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17. janvier 2023 · Commentaires fermés sur Cendrillon de Pommerat : 5 scènes à la loupe · Catégories: Première, Seconde · Tags: , ,

Après avoir visionné la pièce  et après l’avoir lue, il est temps maintenant de nous exercer à la lecture linéaire et au commentaire littéraire . Voilà des documents pour vous entrainer à travailler autour de la scène de l’arrivée de la fée , des tours de magie plus ou moins réussis ou plus ou moins ratés et de la rencontre entre la très jeune fille et le très jeune prince . Une  arrivée et une rencontre  toutes deux renversantes.   Plus »

03. septembre 2021 · Commentaires fermés sur Malentendu, méprise, quiproquo: écrire pour le théâtre · Catégories: Seconde · Tags:

Les dramaturges exploitent sur scène  des procédés d’écriture afin de provoquer des situations inattendues. Comme le disait un philosophe et dramaturge français des années 1950, Jean- Paul Sartre , écrire au  théâtre consiste à fabriquer des situations et à placer les acteurs et personnages face à des choix qui vont  . ” Pour remplacer le théâtre de caractères nous voulons un théâtre de situations ; notre but est d’explorer toutes les situations qui sont les plus communes à l’expérience humaine, celles qui se présentent au moins une fois dans la plupart des vies. Les personnages de nos pièces différeront les uns des autres non pas comme un lâche diffère d’un avare ou un avare d’un homme courageux, mais plutôt comme les actes divergent ou se heurtent, comme le droit peut entrer en conflit avec le droit. En cela on dira à juste titre que nous nous rattachons à la tradition cornélienne. Plus »

10. juin 2020 · Commentaires fermés sur Les bonnes, histoire d’une pièce et scène d’exposition · Catégories: Seconde · Tags: ,

 

Jean Genet a choisi de mettre en scène une histoire tragique de domination et d’humiliation. Avez-vous été  attentifs à la mise en scène ? Deux domestiques, Claire et Solange s’accusent mutuellement d’être responsables de l’échec de leur tentative . Le coup de fil apprend au public que Monsieur est sorti de prison : ce qui provoque la colère de Solange contre la justice corrompue; En effet, pour éloigner son patron, elle  a écrit une lettre de dénonciation qui a conduit à son arrestation et à son emprisonnement. Genet rappelle ainsi les accusations anonymes et les nombreuse délations auxquelles se livrèrent certains français durant la seconde guerre mondiale ; L’absence de Monsieur devait leur permettre d’organiser le crime de Madame mais Solange n’a pas réussi à empoisonner sa patronne; Elle a préparé du tilleul mais Madame n’a pas voulu le boire comme on peut le voir dans l’extrait précédent.  Le texte de la pièce contient des allusions au jeu théâtral avec par exemple la phrase .. reprendre le jeu ” Les deux bonnes pensent que leur forfait va être découvert car elles ont laissé des traces  ; elles avaient pris l’habitude de mettre les robes de Madame, de se déguiser en enfilant les belles tenues de leur patronne et en l’imitant ; En effet, la pièce commence par un numéro des deux soeurs : l’une est déguisée en Madame et l’imite  . Ce dispositif permet au dramaturge de nous faire réfléchir sur l’identité et sur la relation ambivalente qui unit les trois personnages .

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08. juin 2020 · Commentaires fermés sur Les bonnes de Jean Genet : la mise en scène de la relation de domination · Catégories: Seconde · Tags: ,

Voici un extrait de la pièce de Jean  Genet , écrite en 1947 .  Elle met en scène un duo de domestiques , deux soeurs, Claire et Solange, toutes les deux au service d’un personnage appelé Madame. Cette dernière affiche une attitude volontairement condescendante qui parodie la manière dont les membres de la grande bourgeoisie traitent leurs employés de maison. Pour composer cette pièce, le dramaturge s’est inspiré d’un fait divers tragique : Christine et Léa Papin ont tué leurs patronnes en 1933 en les empoisonnant et leur procès a fait la une de tous les journaux de l’époque. 

Pourtant la pièce de Genet n’est pas simplement la reconstitution d’un drame : c’est aussi une réflexion sur cette relation ambigüe qui lie le domestique son maître; Genet puise dans la tradition théâtrale de la comédie de moeurs et poursuit l’exploration du potentiel comique du couple maître /valet ; ici les deux domestiques se font le miroir des complexités du crime ancillaire. Etudions , à travers les différents extraits ,comment la mise en scène peut traduire cette relation dominé/dominant . 

 

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Symboliquement comment construire visuellement cette relation à travers un couple maître /domestique ? Comment les différentes mises en scène mélangent-elles le comique et le tragique ?
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Voilà maintenant un extrait du texte de la pièce : comment apparait alors , à travers les mots, la relation de domination ? Comment le langage peut il traduire la domination d’un personnage sur un autre ? Qu’est -ce qui vous frappe dans cette première scène ?  Cherchez des éléments  pour rédiger l’introduction du commentaire  littéraire de ce texte ?
CLAIRE
Disposez mes toilettes. La robe blanche pailletée. L’éventail, les émeraudes.
SOLANGE
Tous les bijoux de Madame ?
CLAIRE
Sortez-les. Je veux choisir. (Avec beaucoup d’hypocrisie.) Et naturellement les souliers vernis. Ceux que vous convoitez depuis des années.
Solange prend dans l’armoire quelques écrins qu’elle ouvre et dispose sur le lit.
Pour votre noce sans doute. Avouez qu’il vous a séduite ! Que vous êtes grosse ! Avouez-le !
Solange s’accroupit sur le tapis et, crachant dessus, cire des escarpins vernis.
Je vous ai dit, Claire, d’éviter les crachats. Qu’ils dorment en vous, ma fille, qu’ils y croupissent. Ah ! ah ! vous êtes hideuse, ma belle. Penchez-vous davantage et vous regardez dans mes souliers. (Elle tend son pied que Solange examine.) Pensez-vous qu’il me soit agréable de me savoir le pied enveloppé par les voiles de votre salive ? Par la brume de vos marécages ?
SOLANGE, à genoux et très humble.
Je désire que Madame soit belle.
CLAIRE, elle s’arrange dans la glace.
Vous me détestez, n’est-ce pas ? Vous m’écrasez sous vos prévenances, sous votre humilité, sous les glaïeuls et le réséda. (Elle se lève et d’un ton plus bas.) On s’encombre inutilement. Il y a trop de fleurs. C’est mortel. (Elle se mire encore.) Je serai belle. Plus que vous ne le serez jamais. Car ce n’est pas avec ce corps et cette face que vous séduirez Mario. Ce jeune laitier ridicule vous méprise, et s’il vous a fait un gosse…
SOLANGE : Oh ! mais, jamais je n’ai…
Jean Genet, Les Bonnes (1947), éditions gallimard.
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01. juin 2020 · Commentaires fermés sur Quand le théâtre fait débat : petit tour d’horizon · Catégories: Seconde · Tags: ,
24. mai 2020 · Commentaires fermés sur Ecriture pour le théâtre : les particularités de l’écriture pour le théâtre · Catégories: Fiches méthode, Seconde · Tags:
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Plus l’histoire du théâtre se rapproche de nous et plus les dramaturges utilisent les didascalies, ces indications scéniques précieuses pour le metteur en scène ; Dans les tragédies classiques ou dans les comédies de Molière, peu de traces de ce type d’écriture ; La plupart des didascalies en effet, sont internes (elles sont mentionnées à l’intérieur des échanges des personnages ) ; En revanche, des écritures comme celles d’Eugène Ionesco ou de Samuel Beckett, deux dramaturges du théâtre de l’absurde, sont basées sur une large utilisation des didascalies externes ; Voyez cela par vous-même ….avec les extraits suivants …

Il s’agit du début de la pièce de Ionesco Le roi se meurt  qui met en scène le destin tragique d’un roi qui refuse de mourir mais dont le royaume rétrécit peu à peu au fur et à mesure que sa maladie augmente …les indications scéniques à elles seules méritent d’être analysées ..

Salle du trône, vaguement délabrée, vaguement gothique. Au milieu du plateau, contre le mur

du fond, quelques marches menant au trône du Roi. De part et d’autre de la scène, sur le devant, deux trônes plus petits qui sont ceux des deux Reines, ses épouses.

A droite de la scène, côté jardin, au fond, petite porte menant aux appartements du Roi. A gauche de la scène, au fond, autre petite porte. Toujours à gauche, sur le devant, grande porte. Entre cette grande porte et la petite, une fenêtre ogivale. Autre petite fenêtre à droite de la scène, petite porte sur le devant du plateau, du même côté. Près de la grande porte, un vieux garde, tenant une hallebarde.

Avant le lever du rideau, pendant que le rideau se lève et quelques instants encore, on entend une musique dérisoirement royale, imitée d’après les Levers du Roi du XVIIe siècle.

LE GARDE, annonçant. Sa majesté, le Roi Bérenger Ier. Vive le Roi ! 

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Le roi se meurt 

Le Roi, d’un pas assez vif, manteau de pourpre, couronne sur la tête, sceptre en main, traverse le plateau en entrant par la petite porte de gauche et sort par la porte de droite au fond.

LE GARDE, annonçant. Sa Majesté, la reine Marguerite, première épouse du Roi, suivie de Juliette, femme de ménage et infirmière de Leurs Majestés. Vive La Reine !

Marguerite, suivie de Juliette, entre par la porte à droite premier plan et sort par la grande porte. 

Ionesco précise tout d’abord quelques éléments de décor symboliques pour désigner la royauté : les trônes des personnages et la mention  de musique royale  ainsi que le costume symbolique pourpre , sceptre et couronne ; l’accessoire la hallebarde nous renvoie plutôt à une époque médiévale ainsi que la fenêtre ogivale qui rappelle celle des châteaux ; En revanche le délabrement de la salle et l’adverbe dérisoirement peuvent nous faire penser que la royauté va être un objet de dérision de la part du dramaturge; L’écriture théâtrale cherche à rendre visible la dimension symbolique  d’un cadre; 

Application pratique : si vous voulez faire visualiser une maison à la campagne  ou un appartement en ville ,quels éléments de décor pourront référer symboliquement à cet univers ? quels costumes connotent l’opulence et la richesse ou au contraire le dénuement et la pauvreté ?

Examinez ce second exemple tiré de la scène d’exposition de En attendant Godot de Beckett : la pièce montre deux vagabonds Vladimir et Estragon qui attendent en vain un mystérieux personnage nommé Godot, dont on peut penser qu’il s’agit de Dieu ; Pour tromper le vide de leur existence , ils passent leur temps à se quereller pour rien .

Route à la campagne, avec arbre.
Soir.
Estragon, assis sur une pierre, essaie d’enlever sa chaussure. Il s’y acharne des deux mains, en ahanant. Il s’arrête, à bout de forces, se repose en haletant, recommence. Même jeu.
Entre Vladimir.

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Vladimir et Estragon 

ESTRAGON (renonçant à nouveau) : Rien à faire.
VLADIMIR (s’approchant à petits pas raides, les jambes écartées) : Je commence à le croire. (Il s’immobilise.) J’ai longtemps résisté à cette pensée, en me disant, Vladimir, sois raisonnable. Tu n’as pas encore tout essayé. Et je reprenais le combat. (Il se recueille, songeant au combat. A Estragon.) Alors, te revoilà, toi.
ESTRAGON : Tu crois ?
VLADIMIR : Je suis content de te revoir. Je te croyais parti pour toujours.
ESTRAGON : Moi aussi.
VLADIMIR : Que faire pour fêter cette réunion ? (Il réfléchit.) Lève-toi que je t’embrasse. (Il tend la main à Estragon.)
ESTRAGON (avec irritation) : Tout à l’heure, tout à l’heure.
Silence. 
VLADIMIR (froissé, froidement) : Peut-on savoir où monsieur a passé la nuit ?
ESTRAGON : Dans un fossé.
VLADIMIR (épaté) : Un fossé ! Où ça ?
ESTRAGON (sans geste) : Par là.

Cette exposition est déroutante pour le spectateur car les indications données sont parfois vagues  , parfois même contradictoires ; elles traduisent les difficultés de communication entre les deux personnages qui du coup paraissent étranges ; cependant le dramaturge nous fait visualiser un jeu avec la chaussure d’un des vagabond et cet élément visuel sera repris durant toute la pièce.

Voici un troisième exemple toujours pour le théâtre moderne : il s’agit de la première scène de la pièce La Leçon de Ionesco; Un professeur très étrange, d’abord extrêmement gentil et patient,devient  de plus en plus exaspéré par la bêtise de son élève et les cris de douleur de la jeune fille qui a très mal aux dents : il  devient fou de rage et la tue sur scène; On apprend à la fin de la pièce qu’il assassine, en fait, plusieurs élèves chaque jour.

Au lever du rideau, la scène est vide, elle le restera assez longtemps. Puis on entend la sonnette de la porte d’entrée. On entend la voix de

LA BONNE (en coulisse): Oui. Tout de suite.

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La leçon 

précédant la Bonne elle-même, qui, après avoir descendu, en courant, des marches, apparaît. Elle est forte; elle a de 45 à 50 ans, rougeaude. La Bonne entre en coup de vent, fait claquer derrière elle la porte de droite, s’essuie les mains sur son tablier, tout en courant vers la porte de gauche, cependant qu’on entend un deuxième coup de sonnette.

Patience. J’arrive.

Elle ouvre la porte. Apparaît la jeune élève, âgée de 18 ans. Tablier gris, petit col blanc, serviette sous le bras.

Bonjour, Mademoiselle.
L’ÉLÈVE: Bonjour, Madame. Le Professeur est à la maison?
LA BONNE: C’est pour la leçon?
L’ÉLÈVE: Oui, Madame.
LA BONNE: Il vous attend. Asseyez-vous un instant, je vais le prévenir
L’ÉLÈVE: Merci, Madame.
Elle s’assied près de la table, face au public; à sa gauche, la porte d’entrée; elle tourne le dos à l’autre porte par laquelle, toujours se dépêchant, sort la Bonne, qui appelle

: LA BONNE: Monsieur, descendez, s’il vous plaît. Votre élève est arrivée.
Voix du PROFESSEUR (plutôt fluette): Merci. Je descends … dans deux minutes
La Bonne est sortie; l’Élève, tirant sous elle ses jambes, sa serviette sur ses genoux, attend, gentiment; un petit regard ou deux dans la pièce, sur les meubles, au plafond aussi; puis elle tire de sa serviette un cahier, qu’elle feuillette, puis s’arrête plus longtemps sur une page, comme pour répéter la leçon, comme pour jeter un dernier coup d’œil sur ses devoirs. Elle a l’air d’une fille polie, bien élevée, mais bien vivante gaie, dynamique; un sourire frais sur les lèvres; au cours du drame qui va se jouer, elle ralentira progressivement le rythme vif de ses mouvements, de son allure, elle devra se refouler; de gaie et souriante, elle deviendra progressivement triste, morose; très vivante au début, elle sera de plus en plus fatiguée, somnolente; vers la fin du drame sa figure devra exprimer nettement une dépression nerveuse; sa façon de parler s’en ressentira, sa langue se fera pâteuse, les mots reviendront difficilement dans sa mémoire et sortiront, tout aussi difficilement, de sa bouche; elle aura l’air vaguement paralysée, début d’aphasie; volontaire au début, jusqu’à en paraître agressive, elle se fera de plus en plus passive, jusqu’à ne plus être qu’un objet mou et inerte, semblant inanimée, entre les mains du Professeur si bien que lorsque celui-ci en sera arrivé à accomplir le geste final, l’Élève ne réagira plus; insensibilisée, elle n’aura plus de réflexes; seuls ses yeux, dans une figure immobile, exprimeront un étonnement et une frayeur indicibles; le passage d’un comportement à l’autre devra se faire, bien entendu, insensiblement.

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LE PROFESSEUR entre. Il porte une longue blouse noire de maître d’école, pantalons et souliers noirs, faux col blanc, cravate noire. Excessivement poli, très timide, voix assourdie par la timidité, très correct, très professeur. Il se frotte tout le temps les mains; de temps à autre, une lueur lubrique dans les yeux, vite réprimée.

Au cours du drame, sa timidité disparaîtra progressivement, insensiblement; les lueurs lubriques de ses yeux finiront par devenir une flamme dévorante, ininterrompue; le Professeur deviendra de plus en plus sûr de lui, nerveux, agressif, dominateur, jusqu’à se jouer comme il lui plaira de son élève, devenue, entre ses mains, une pauvre chose. Evidemment la voix du Professeur devra elle aussi devenir de plus en plus forte, et, à la fin, extrêmement puissante et éclatante, tandis que la voix de l’Élève se fera presque inaudible. Dans les premières scènes, le Professeur bégaiera, très légèrement, peut-être. 

On note , dans cette présentation, l’importance des didascalies qui non seulement nous renseignent sur le décor et les personnages mais également nous présentent l’évolution de l’action sur scène ; pour le metteur en scène, on peut noter la difficulté à représenter fidèlement les idées du dramaturge ; D’ailleurs Ionesco sera mécontent la plupart du temps de l’adaptation de se pièces sur scène car il jugera que les metteurs en scène déforment ses intentions et ne respectent pas ses notes.  Il s’est exprimé à ce sujet dans son ouvrage théorique dont je vous livre ci-dessous un extrait :

Ionesco Notes et contre-notes, 1966.

Si l’on pense que le théâtre n’est que théâtre de la parole, il est difficile d’admettre qu’il puisse avoir un langage autonome. Il ne peut être que tributaire des autres formes de pensée qui s’expriment par la parole, tributaire de la philosophie, de la morale. Les choses sont différentes si l’on considère que la parole ne constitue qu’un des éléments de choc du théâtre. D’abord le théâtre a une façon propre d’utiliser la parole, c’est le dialogue, c’est la parole de combat, de conflit. Si elle n’est que discussion chez certains auteurs, c’est une grande faute de leur part. Il existe d’autres moyens de théâtraliser la parole : en la portant à son paroxysme, pour donner au théâtre sa vraie mesure, qui est dans la démesure ; le verbe lui-même doit être tendu jusqu’à ses limites ultimes, le langage doit presque exploser, ou se détruire, dans son impossibilité de contenir les significations.

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Mais il n’y a pas que la parole : le théâtre est une histoire qui se vit, recommençant à chaque représentation, et c’est aussi une histoire que l’on voit vivre.

Le théâtre est autant visuel qu’auditif. Il n’est pas une suite d’images, comme le cinéma, mais une construction, une architecture mouvante d’images scéniques.

Tout est permis au théâtre : incarner des personnages, mais aussi matérialiser des angoisses, des présences intérieures. Il est donc non seulement permis, mais recommandé, de faire jouer les accessoires, faire vivre les objets, animer les décors, concrétiser les symboles.

De même que la parole est continuée par le geste, le jeu, la pantomime, qui, au moment où la parole devient insuffisante, se substituent à elle, les éléments scéniques matériels peuvent l’amplifier à leur tour. L’utilisation des accessoires est encore un autre problème. (Artaud en a parlé.)

À propos de Rhinocéros aux États-Unis

“Le succès public de Rhinocéros à New York me réjouit, me surprend et m’attriste un peu, à la fois. J’ai assisté à une répétition seulement, à peu près complète, avant la générale, de ma pièce. Je dois dire que j’ai été tout à fait dérouté.

J’ai cru comprendre qu’on avait fait d’un personnage dur, féroce, angoissant, un personnage comique, un faible rhinocéros : Jean, l’ami de Bérenger. Il m’a semblé également que la mise en scène avait fait d’un personnage indécis, héros malgré lui, allergique à l’épidémie rhinocérique, de Bérenger, une sorte d’intellectuel lucide, dur, une sorte d’insoumis ou de révolutionnaire sachant bien ce qu’il faisait (le sachant, peut-être, mais ne voulant pas, nous expliquer les raisons de son attitude).

J’ai vu aussi, sur le plateau, des matches de boxe qui n’existent pas dans le texte et que le metteur en scène y avait mis, je me demande pourquoi. J’ai souvent été en conflit avec mes metteurs en scène: ou bien ils n’osent pas assez et diminuent la portée des textes en n’allant pas jusqu’au bout des impératifs scéniques, ou bien ils « enrichissent » le texte en l’alourdissant de bijoux faux, de pacotilles sans valeur parce que inutiles. Je ne fais pas de littérature. Je fais une chose tout à fait différente; je fais du théâtre. Je veux dire que mon texte n’est pas seulement un dialogue mais il est aussi « indications scéniques ». Ces indications scéniques sont à respecter aussi bien que le texte, elles sont nécessaires, elles sont aussi suffisantes.

Si je n’ai pas indiqué que Bérenger et Jean doivent se battre sur le plateau et se tordre le nez l’un à l’autre c’est que je ne voulais pas que cela se fît.

Ce texte polémique de Ionesco soulève donc un certain nombre de problèmes liés aux difficultés d’adaptation et de mise en scène de la parole théâtre et du respect des didascalies; Pour le dramaturge, la parole théâtrale est non seulement dialogue mais tout autant didascalies.

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15. mai 2020 · Commentaires fermés sur La comédie au siècle des Lumières : quel type de comique ? · Catégories: Seconde · Tags: , ,

Les pièces de Molière ont connu un très grand succès au dix-septième siècle mais les goûts du public ont évolué avec les changements de la société et des mentalités et le spectacle théâtral change avec de nouveaux thèmes ou plutôt une réécriture de certains thèmes comme par exemple, le mariage contrarié qui est à la base de beaucoup de comédies de Molière .

1. Le cadre historique : une société en évolution

a) Beaumarchais invente Figaro

Deux dramaturges sont en vedette à cette époque : Beaumarchais qui invente le personnage de Figaro qui connaîtra un très grand succès ; Figaro est un valet “savant ” qui a exercé tous les métiers: médecin, ou plutôt vétérinaire dans les écuries du roi, journaliste, poète et bien sûr, barbier à domicile, ce qui va donner son titre à la première partie de la trilogie Le barbier de Séville . Il deviendra , par la suite, régisseur, et homme à tout faire de son patron le Comte Almaviva ; Les deux hommes préparent, chacun à leur manière, Le Mariage de Figaro dans la pièce qui inspirera de nombreux artistes. Le personnage de Figaro est considéré comme le symbole de l’ascension du Tiers- Etat dans la société et la fin des privilèges de la noblesse; Les accents prérévolutionnaires de la pièce, jouée quelques années avant la Révolution Française , ont été souvent commentés mais l’humour n’est pas seulement celui des revendications et l’affrontement entre le maître et le valet a lieu sur un fond de rivalité amoureuse; Chacun cherche à définir sa place et son rôle dans un monde où les femmes elles aussi s’affranchissent de certaines contraintes , à l’image de la Comtesse qui tend un piège à son mari. Les effets comiques dans le théâtre de Beaumarchais reposent beaucoup sur l’art du déguisement et du travestissement. Le Comte doit dissimuler sa véritable identité pour séduire Rosine, prisonnière de son tuteur et figaro se montre habile pour organiser son évasion et tromper le vieillard . Ensuite , le Comte devra reconquérir sa femme et révéler ses véritables sentiments.

2. Marivaux et la troupe des comédiens italiens

Marivaux écrit lui aussi des comédies sentimentales et il montre dans ses spectacles des personnages qui tentent de savoir si l’amour qu’on leur porte est véritable.  Marivaux écrit ses pièces pour la troupe des comédiens italiens et reprend des éléments traditionnels de la commedia dell’arte, un théâtre de rue  populaire avec des personnages aux noms italiens et aux rôles définis à l’avance : Arlequin est le valet rusé et impertinent, souvent porté sur la bouteille . Les premières comédies de Marivaux ont des intrigues amoureuses fondées sur les effets de surprise et les déguisements; des jeunes gens pour tester les sentiments de leurs amoureux tentent de les prendre au piège en mentant sur leurs identités et le spectateur est complice de la supercherie. Il s’attend ainsi à voir les personnages se trahir mais dans la plupart des cas, leur amour est véritable et les sentiments authentiques finissent par triompher, pour le plus grand plaisir du public.   “j’ai guetté dans le coeur humain toutes les niches différentes où peut se cacher l’amour, lorsqu’il craint de se montrer et chacune de mes comédies a pour objet de le faire sortir d’une de ces niches. ”  Cette citation nous montrer que le dramaturge s’intéresse particulièrement à la naissance du sentiment amoureux et certains de ces personnages tentent de cacher qu’ils ont des sentiments pour un autre personnage. Cependant dans l’Ile des esclaves , écrite te jouée en 1725, la réflexion du dramaturge est davantage fondée sur les relations au sein de la société , entre les maîtres et les valets.

3. L’île des esclaves : une comédie politique ?

L’habileté de Marivaux consiste dans cette pièce à avoir inventé une situation de départ qui permet aux spectateurs de réfléchir à l’évolution de la relation entre les maîtres  :  à cette époque les aristocrates comme Iphicrate , et leurs domestiques, ici représentés par le personnage d’Arlequin.Marivaux a imaginé que ce duo débarque sur une île étrange dans laquelle il y a eu autrefois une révolution et dans cette ile, on a inversé les rôles ; Les domestiques sont devenus les maîtres et les anciens aristocrates sont désormais à leur service; L’idée de Marivaux est de dénoncer , à travers ce renversement de situation, les abus commis par ceux qui ont actuellement le pouvoir et qui maltraitent leurs serviteurs. Mais comment rendre cette situation comique ?

4. Les effets comiques de la pièce 

Tout d’abord , Arlequin se moque de la peur de son maître et il savoure sa revanche; Il ne semble pas du tout le plaindre et commence à lui désobéir car il le sait ne position de faiblesse; Lorsque ce dernier lui demande de le suivre, il ment en disant qu’il a mal aux jambes et ne peut marcher; L’attitude insolente du valet déclenche la colère d’Iphicrate qui apparaît avec l’aparté “le coquin abuse de la situation, j’ai mal fait de lui dire où nous sommes ” . Le comique de caractère est assuré par la moquerie du valet et la  colère du maître qui tente de le frapper, le menace et finit par lui courir après, l’épée à la main. Le personnage du valet Arlequin est issu du théâtre traditionnel italien : il ne pense qu’à boire ce qui a un effet comique te es moque ouvertement des dangers encourus par son maître ; De plus il lui fait remarquer qu’il se comportait mal avec lui et montre ainsi au public qu’il a conscience de l’hypocrisie d’Iphicrate ” comme vous êtes civil et poli, c’est l’air du pays qui fait cela” ; En temps normal, son maître le rudoie, le frappe parfois ” à coups de gourdin ” alors que cette fois, il se montre aimable et veut bénéficier de son aide “ et ne sais tu pas que je t’aime ” ; Mais son hypocrisie est démasquée par le valet  “oui mais les marques de votre amitié tombent toujours sur mes épaules “ ; Il dénonce ici les châtiments qu’il reçoit lorsque son maître est mécontent; Ces  menaces de coups sont une constante dans le théâtre de Molière : on les retrouve, par exemple, dans la scène de dispute de l’avare avec son valet; Marivaux ajoute toutefois une réflexion plus philosophique à cette confrontation maître /valet, fondée sur un rapport de forces. La pièce poursuit un but moral: dénoncer la cruauté de certains maîtres et les inciter à mieux se comporter avec leurs domestiques.

5.Ecriture d’appropriation

Ecrivez les didascalies initiales d’une pièce de théâtre dans laquelle vous allez imaginer un moyen de faire comprendre à un personnage qu’il a mal agi ; Vous préciserez dans quel décor la pièce va se jouer au lever de rideau: pourquoi cet endroit, quelle est la mise en scène . Vous expliquerez les circonstances exactes dans le cadre d’un dialogue sur scène entre deux personnages ; Vous direz précisément dans les didascalies internes où se trouvent les personnages et ce qui va se passer ; vous  aurez précisé qui ils sont en quelques lignes avec leurs caractéristiques principales dans les didascalies initiales externes – L’un des deux aura peur et l’autre se moquera de lui et lui rappellera ses mauvaises actions passées.  Le but n’est pas de le tuer mais de lui faire prendre conscience de ce qu’il a fait et de rendre cet échange drôle . Vous pouvez écrire la scène à deux ; Chacun joue et écrit le rôle d’un personnage . 3 scènes seront retenues, retravaillées  et jouées en classe à la reprise . Votre travail se présentera de la manière suivante; Un des critères d’évaluation de votre travail sera son caractère réalisable. Pad d’effets spéciaux, des moyens faciles à mettre en scène , des situations drôles et sans danger . Le jeu doit consister à essayer d’échapper à la punition/sanction /correction   en utilisant les différentes émotions comme le fait Iphicrate tantôt poli, gentil, affectueux, mais aussi en colère ,

page 1 (recto – ) les didascalies

page 2 ( verso)  l’échange entre les personnages acte 1, scène 1

ou vous pouvez également utiliser l’intérieur d’une copie double avec à gauche les didascalies et à droite le dialogue.

 

 

 

 

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