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Classé dans (Je suis Charlie) par Agnès Dibot le 16-01-2015

"Une" de Charlie Hebdo - Le Premier ministre turc dénonce "la liberté d’insulter"

Merci à mes zélèves, tous, de toutes classes confondues, qui, hier et ce matin, ont accueilli avec bienveillance mon petit prophète de papier (la Une de Charlie Hebdo) affiché sur mon panneau “revue de presse” dans ma salle de cours : “j’ai crucifié mon petit prophète de papier” (avec des punaises blanches pour respecter l’harmonie de la page) et nul n’a trouvé provocant cet affichage.

Dans mon collège REP+, on peut donc, une semaine après les attentats, estimer avoir assez débattu avec nos zélèves pour que ceux-ci aient compris le sens des mots “liberté d’expression” et “humour”, “tolérance”… Un grand pas, au regard de ce qui a pu se passer, si l’on en croit les journaux, dans d’autres établissements scolaires, en France.

Cet affichage a permis de relancer, une fois encore, le débat : ce petit prophète-là n’a rien de provocant, il pardonne. Il est Charlie.  Et nombreux sont les zélèves qui disaient, ces jours-ci, que ce sont les terroristes qui insultent l’Islam, et non pas les Unes de Charlie Hebdo. Nous n’avons pas pu faire l’économie d’une explication de la garde à vue de Dieudonné, le parallèle étant soulevé par quelques-uns, mais mes zélèves ont l’intelligence de suivre les événements avec leur coeur. Qu’ils soient croyants ou non, ils respectent tous la même valeur : la vie est sacrée. Et aujourd’hui, ils savent à quel point la liberté d’expression l’est aussi.

Et si d’aucuns ont tiqué, c’est sur l’expression “petit prophète de papier crucifié” (sur le panneau) : une référence à un autre prophète mis à mort sur la croix, un clin d’oeil qu’il faut prendre pour ce qu’il est : un clin d’oeil.

Notre petit prophète de papier peut donc témoigner jusqu’à la prochaine revue de presse de la liberté d’expression sous le regard bienveillant d’adolescents. Sa seule présence délie les langues : ils ont besoin qu’on réponde à leurs questions, nos zados. Et notre rôle est de le faire avec distance, sans l’émotion qui nous étreint encore au souvenir de celles et ceux qui sont tombés sous les balles des fanatiques.