11. février 2020 · Commentaires fermés sur Ecrivain et voyageur : Sylvain Tesson dans les forêts de Sibérie · Catégories: Seconde · Tags:

Sylvain Tesson est un écrivain et voyageur français.
Géographe de formation, il est titulaire d’un diplome de géopolitique. Il effectue en 1991 sa première expédition en Islande, suivie en 1993 d’un tour du monde à vélo . C’est là le début de sa vie d’aventurier. Il traverse également les steppes d’Asie centrale à cheval , sur plus de 3000 km du Kazakhstan à l’Ouzbékistan. En 2003-2004, il reprend l’itinéraire des évadés du goulag . Ce périple l’emmène de la Sibérie jusqu’en Inde à pied.
En 2010, il réalise un projet souvent évoqué auparavant, en allant vivre six mois (de février à juillet) en ermite dans une cabane au sud de la Sibérie, sur les bords du lac Baïkal. Il relate cette expérience solitaire dans son journal publié l’année suivante sous la forme d’un essai autobiographique intitulé : “Dans les forêts de Sibérie”, qui est adapté au cinéma par Safy Nebbou en 2016.
Passionné d’escalade, il chute accidentellement d’une maison à Chamonix en août 2014, juste après avoir transmis à son éditeur le manuscrit de “Bérézina” et est placé en coma artificiel. Il a depuis retrouvé la santé. “Bérézina”, qui sort en janvier 2015  conte le récit de son voyage en side-car sur les traces de la Grande Armée lors de la retraite de Russie. En 2016, il publie un récit autobiographique, “Sur les chemins noirs”.

Assez tôt, j’ai compris, explique-t-il, que je n’allais pas pouvoir faire grand-chose pour changer le monde. ” Je me suis alors promis de m’installer quelque temps, seul, dans une cabane. Dans les forêts de Sibérie. J’ai acquis une isba de bois, loin de tout, sur les bords du lac Baïkal. là, pendant sis mois, perdu dans une nature démesurée, j’ai tâché de vivre dans la lenteur et la simplicité? Je crois y être parvenu? Deux chies,s un poêle à bois, une fenêtre ouverte sur un lac suffisent à l’existence. Et si la liberté consistait à posséder le temps? Et si la richesse revenait à disposer de solitude, d’espace et de silence, toutes choses dont manqueront les générations futures ? Autant d’interrogations existentielles qui sont posées à travers l’écriture de cet écrivain-philosophe . Son roman est bien plus qu’un simple carnet de voyages : il est surtout une méditation sur la condition humaine.A son retour de ces quelques mois passés à méditer au bord du lac Baïkal, Sylvain tesson accorde un entretien à un magazine ; Il y donne quelques réponses aux questions que nous pouvons nous poser : pourquoi part-on? Que cherche-t-on à travers le dépaysement : fuir ou se retrouver ou un peu les deux ? Le paradis pour Sylvain Tesson ressemble à un endroit froid, très froid et désert d’où il “pouvait capter les tressaillements de la nature ” Il avoue s’être métamorphosé et  avoir réussi à apprivoiser le temps; Il a noté ses pensées dans un cahier qu’il nomme un “journal d’ermitage ” .  Dès la première page , le lecteur est frappé par des détails qui peuvent sembler étonnants comme le fait de trouver “une quinzaine de variétés de sauces ” de la marque Heinz dans un supermarché d’Irkoutsk. Ce petit rappel surprenant  évoque la mondialisation de notre société de consommation et la diffusion de certaines habitudes alimentaires à l’échelle de la planète. L’écrivain , justement , nous fait partager son désir de fuir cette société . Et de se fondre dans une Nature qu’il admire tout particulièrement. Pourtant ce n’est pas sans une certaine appréhension qu’il s’apprête à s’installer dans sa petite cabane au fond des bois. Il cite Malevitch en guise d’avertissement  ” Quiconque a traversé la Sibérie ne pourra plus jamais prétendre au bonheur” . Ce qu’il considère comme un vieux rêve va pourtant se réaliser et  il va pouvoir commencer sa retraite , c’est à dire son retrait du monde et de la civilisation pour devenir une sorte d’ermite . Notes du 18 février ” Je voulais régler un vieux contentieux avec le temps. J’avais trouvé dans la marche à pied matière à le ralentir. L’alchimie du voyage épaississait les secondes. Celles passées sur la route filaient moins vite que les autres; Il me fallait des horizons nouveaux. ….

28. janvier 2020 · Commentaires fermés sur Médée trahie par Jason : les conséquences tragiques d’une passion. · Catégories: Lectures linéaires, Première · Tags: , ,
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Jason à la conquête de la Toison 

En 1635, un jeune dramaturge, Pierre Corneille décide de construire une pièce de théâtre  en exploitant certains aspects du mythe de Médée . Il reprend des éléments utilisés par le grec Euripide et  le latin Sénèque et met l’accent sur la dimension spectaculaire de l’intrigue. Blessée par l’abandon de Jason qui est décidé à épouser sa nouvelle fiancée Créüse , Médée va se venger d’une manière terrible en empoisonnant la robe de sa rivale et en provoquant la mort du père  de cette dernière; le roi Créon. Toutefois, Corneille place le spectateur face à une figure de femme poussée par  sa vengeance meurtrière. Alors que dans la tragédie antique, la fatalité semblait peser sur les hommes et les accabler, dans la tragédie baroque, les personnages se trouvent confrontés à  des choix cruciaux et prennent des décisions qui engagent leur destin. Ainsi Corneille  choisit de mettre en scène le suicide de Jason à la fin de sa pièce comme pour montrer que le traître n’a pas survécu à sa trahison et à l’assassinat de ses enfants.  Fidèle au principe de catharsis défini par Aristote, Corneille tente de provoquer la pitié du spectateur en montrant une femme qui souffre et en tentant de justifier ses agissements .  

Le passage que nous étudions se situe à la fin du premier acte et complète les éléments d’exposition. La magicienne s’ adresse aux Dieux et les implore de l’aider à accomplir  sa vengeance contre celui qui l’a trahie. Ses origines divines et monstrueuses sont rappelées par Corneille qui la présente toutefois comme une femme bafouée et blessée. Ce sont ces deux aspects qui composent la tragédie intime de Médée. La lecture linéaire commencera , au dernier tiers du texte , à partir du  vers Tu t’abuses Jason ..elle comportera 28 vers

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1 . C’est d’abord  une femme monstrueuse et dangereuse 

Ses  origines maléfiques sont rapelées dans le premier mouvement de la tirade .

La colère de Médée éclate dès le début de sa tirade et elle en appelle à ses” soeurs”  “les Furies” . En effet, la mère de Médée, Idyie était la soeur de la célèbre magicienne Circé qui transformait les hommes en porcs . Toutes deux sont filles d’un Titan et elles représentent la génération des anciens Dieux qui précèdent les Olympiens. Médée est également fille d’un roi , celui de Colchide, Aétés et elle s’enfuira avec Jason et la Toison d’Or  bravant la colère d’Aetés. Elle ira jusqu’à découper son propre frère en morceaux pour ralentir la poursuite du roi lancé à leurs trousses. Les déesses qui sont invoquées  par la magicienne sont toutes maléfiques : elles sont des sorcières “troupe savante en noires barbaries” et poursuivent les criminels comme les Furies. En effet, dans la mythologie romaine, les Furies sont l’équivalent des Erynies chez les Grecs , divinités persécutrices infernales qui apparaissent souvent sous la forme de hideux spectres comme les larves et les pestes. Les Erynies sont trois avec Mégère à leur tête: on les représente sous la forme de femmes aux cheveux de serpent et aux yeux rouges .  Corneille mentions d’ailleurs les serpents  et les enfers au vers  Quant aux filles de l’Acheron, elle sont comme Médée, des Océanides car l’Acheron est un Dieu fleuve qui a été précipité aux Enfers par Zeus car il a étanché la soif des Titans. Il est le fils de la Terre Gaîa et du Soleil Hélios.  .  Médée a donc un aspect effrayant pour le spectateur à cause de ses origines maléfiques et sa dimension infernale est rappelée à plusieurs reprises . Sa colère pourrait donc aisément être mortelle ce qui apporte une première dimension tragique à ce passage .

 2 Mais c’est aussi une femme meurtrie qui souffre 

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Les Erynies

 Rappelons tout d’abord les faits : Médée est bien mal récompensée de l’aide apportée à Jason car elle lui a apporté une aide précieuse à plusieurs reprises; Il lui doit la vie et un amour envoyé par Vénus la lie à lui.

La colère mortelle de Médée peut, en partie, être justifiée par le rappel des faits : Jason s’est montré parjure et déloyal comme l’indique l’adjectif perfide a. Médée rappelle le rôle qu’elle a joué lors de la conquête de la Toison  : elle a en effet, utilisé sa magie pour que Jason puisse affronter le feu du dragon  en fabriquant pour lui un onguent qui le met à l’abri des blessures des flammes ; Elle a accompli “tant de bienfaits “   et Corneille met à la rime ce mot avec le parallélisme de construction au vers suivant “tant de forfaits ” ; On a l’impression que Jason a remercié la jeune femme de tout ce qu’elle a accompli pour lui,  en la trahissant et en la délaissant pour une autre . Médée n’avait pas hésité à sacrifier son propre frère, qu’elle a découpé en morceaux pour ralentir la poursuite menée par leur père , et toujours dans le but permettre la fuite de Jason . Incontestablement, elle se trouve ainsi, bien mal récompensée des meurtres accomplis contre son propre sang. On peut noter également que dans sa vengeance, elle fera périr sa rivale en la brûlant , punition symbolique inverse de ce qu’elle a accompli pour protéger Jason. 

Elle se veut menaçante lorsqu’elle rappelle l’étendue de ses pouvoirs : “ sachant ce que je suis, ayant vu ce que j’ose, croit-il que m’offenser ce soit si peu de chose ? ” Les questions rhétoriques ici ont pour but d’effrayer les spectateurs et de leur faire prendre conscience des pouvoirs du personnage . En effet, la tragédie baroque ne cherche pas à écarter le surnaturel mais se propose plutôt ici de considérer la dimension surnaturelle de cette femme et de la mettre en scène en tant que magicienne puissante. C’est un autre aspect tragique de  cette scène : la souffrance de la magicienne est liée à une trahison amoureuse.  L’amour malheureux est souvent associé au registre tragique.

3.  Et c’est surtout une femme qui se venge 

Le déferlement de colère est la caractéristique de  la fin ce passage qui révéle le caractère passionné de Médée.

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La trahison de Jason est bien présentée comme la cause de la colère de la magicienne ; Le faux serment rappelle son mensonge et sa trahison: alors qu’il a juré un amour éternel à la jeune femme après lui avoir fait deux enfants, il la répudie pour épouser Créüse. Et la mort semble bien le prix à payer pour cette trahison amoureuse comme : “la mort de ma rivale et celle de son père ” sont  deux actions présentées par la magicienne comme seules capables d’apaiser le courroux de Médée. Quant à Jason, il est  condamné à l’exil et à la solitude éternelle “ qu’il courre vagabond de province en province ” ;  rappelons toutefois que pour les Grecs, l’exil était considéré comme un châtiment plus dur que la mort car le criminel expiait plus longtemps ses fautes . On se souvient d’Oedipe exilé après la découverte de  son double crime (il a tué accidentellement son père et provoqué le suicide de sa mère ) et d’ Oreste poursuivi sans repos par les Furies après le meurtre de sa mère Clytemnestre.  Le sort  tragique de Jason est prédit : ” banni de tous côtés, sans bien et sans appui / accablé de frayeur de misère et d’ennui ” . L’énumération et la gradation montrent ici un personnage poursuivi par d’éternels remords et qui vit un véritable enfer. C’est ce qui est rappelé  avec ce présent dramatique : ” Jason me répudie ” et qui l’aurait pu croire ?  Le spectateur paraît ici partager l’étonnement de la jeune femme , sa stupéfaction. La colère de la magicienne éclate à grands coups d’imprécations : elle prend d’abord les Dieux anciens comme appuis et les appelle à l’aide pour accomplir sa vengeance. Ainsi elle se définit comme l‘éternel bourreau de Jason qu’elle compte bien poursuivre d’ailleurs  jusqu’à la mort , figurée ici par le tombeau

Analysons maintenant la dernière partie de la tirade qui fait l’objet de la lecture linéaire : le premier vers peut s’entendre comme une menace et la magicienne y rappelle ses pouvoirs. “je suis encore moi-même “ manifeste son orgueil et sa puissance.L’adjectif à la rime “extrême ” qui qualifie l’amour de Médée  est une périphrase pour désigner la passion désormais transformée en haine au   début du  vers suivant. Les verbes de volonté sont nombreux ce qui met en lumière la détermination sans faille de Médée : “je veux” dit-elle au vers 4 ; le dramaturge met en relation , grâce aux antithèses, le passé et le présent  : après avoir tué pour Jason et pour faciliter leur union , elle va désormais commettre un “forfait ” synonyme de crime , pour entériner leur séparation. ” Sépare ” et “joints” sont opposés au vers 4 ainsi que mariage et sanglant divorce aux vers suivants. La relation d’égalité est invoquée au début du vers 6 “s’égale ”  afin d’unir le présent et le passé dans l’abomination; Médée s’apprête à réitérer d’horribles crimes à l’image de ceux qu’elle a déjà commis et qu’elle ne cesse de rappeler aux spectateurs . La même idée est reprise avec l’identité du “commencement” de leur union et de sa fin pareille au vers 8; On remarque d’ailleurs que Racine mentionne la fin avant le début car c’est bien de ce dont il s’agit sur scène. La faute de Jason apparait une fois encore : le pronom tu est ici accusateur : ton changement au vers 7, est bien à l’origine de la rupture . L’idée de vengeance est alors complète . De plus; cette  sorte de vengance paraît suivre une logique implacable  qui va s’accomplir avec préméditation et calcul. L’abomination du crime est précisée au vers 9 et constitue une sorte d’acmé dans la scène : il s’agit de déchirer l’enfant aux yeux du père ” ; rien de moins qu’un infanticide présenté comme la première étape du plan :  l’expression “le moindre effet  de ma colère” tend à minimiser l’ampleur de ce qui va être accompli et le spectateur redoute alors bien pire; Corneille livre ici, comme il l’explique dans sa Préface une Médée “toute méchante ” ; Cette femme semble monstrueuse et redoutable ; Elle décrit d’ailleurs ses anciens meurtres abominables comme des ” coups d’essai”  au vers 11 ; ce qui laisse présager une nouvelle montée dans l’horreur avec le “chef d’oeuvre ” qu’elle promet au vers 13. Le dramaturge étonne ici le spectateur avec l’utilisation de termes mélioratifs sur le plan artistique pour rendre compte de la “perfection d’une criminelle ” ; Médée devient une virtuose dans le Mal et s’apprête à montrer ce qu’elle sait faire ; Le verbe savoir en fin de vers “sai” donne du personnage l’image d’une experte qui s’est d’abord initiée avec un “faible apprentissage “ au vers 14. Elle devient ainsi une exécutante avec un projet de grande envergure , une sorte d’héroïne chargée de l’extrême dans le Mal;  pour le moraliste, la Passion amène l’individu à adopter des positions extrêmistes et pour le dramaturge, l’héroïne qui se laisse diriger par sa passion, devient un monstre au sang froid. La dernière partie de la tirade est un retour au divin: Médée y sollicite, à nouveau , l’aide des Dieux mais cette fois, elle ne s’adresse plus aux Dieux chtoniens, des Enfers ; elle invoque et implore son ancêtre le Soleil; En effet, ce projet est tellement démesuré qu’elle a besoin de “grands secours ” ; les feux des Enfers ne suffisent pas pour son projet car ils torturent le plus souvent les ombres, c’est à dire les morts voués aux flammes des Enfers; elle a besoin du Soleil qui est présenté, à la fois comme l’auteur de sa naissance donc son ancêtre et l’auteur du jour, périphrase qui le désigne souvent dans la mythologie; La mention du Char du Soleil fait référence au mythe qui explique qu’Hélios, le Dieu soleil ,effectue chaque matin et chaque nuit le tour de la terre avec son quadrige pour ramener le jour et apporter la nuit . Elle implore son grand-père de lui venir en aide car un “affront “ est fait ” à sa race ” au vers 21 : en effet, chez les Grecs, la notion de génos, de lignée , était primordiale . De plus, le terme affront présente le projet de la magicienne comme une vengeance de sa famille , ce qui donne une forme de légitimité à sa propre vengeance : on dépasse ainsi le cadre strictement individuel pour aborder une dimension collective.  Médée nomme sa soif de meurtre “désir bouillant “: l’adjectif désigne ; à la fois, l’intensité de son désir et par métaphore, rappelle le feu , qui sera , dans un premier l’arme du  double crime ; elle va enflammer Créüse sa rivale avec un cadeau empoisonné, une robe; cette robe qui va prendre feu tuera également  le père de cette dernière Créon , qui va tenter de sauver sa fille qui brûle sous ses yeux et ensuite  elle mettra le feu à leur palais . La jeune femme se fait implorante en demandant au Dieu de lui accorder une “grâce “ : le Soleil ne prête pas volontiers ses chevaux car les conduire nécessite un véritable savoir-faire et les quelques mortels qui ont essayé, ont provoqué des catastrophes. La fin de la tirade la montre en action: elle s’imagine , en train de réaliser sa vengeance: “je veux choir sur Corinthe” : Racine évoque ainsi, par anticipation, la tragédie qui va s’abattre sur la totalité de la ville ; la passion de Médée se transforme en folie meurtrière et elle s’apprête à détruire une ville toute entière par déception amoureuse; On mesure ici à quel point la passion sera funeste pour les Corinthiens;  Afin de rassurer son grand-père, Médée précise qu’elle limitera sa destruction aux murs de la cité corinthienne . Les “odieux murs”  (on note ici la personnification de la ville  à travers la métonymie des murailles ) marquent les  limites de sa vengeance de femme blessée. Elle conclut en ajoutant qu’elle agit, mue par un “juste courroux ” : elle cherche à nouveau à justifier ses futurs meurtres et à les présenter comme la conséquence logique de la trahison de Jason, qui passe ainsi pour le véritable coupable. Le caractère inexorable de ce dénouement funeste est marqué par l’emploi de l’adjectif “implacable” : rien ne semble pouvoir arrêter Médée et faire obstacle à sa volonté.

 En conclusion de cette partie , la colère vengeresse de Médée sera l’objet du reste de la tragédie et le spectateur  qui sait que Jason a réussi à s’enfuir dans le mythe antique, sera étonné de voir que Corneille le fait mourir à la fin de sa version . C’est Médée qui, après avoir égorgé leurs enfants, réussit à s’enfuir dans un char envoyé par son aïeul, le Soleil. On peut donc définir cette Médée baroque  comme une tragédie de la vengeance qui s’abat sur un homme coupable, à ses yeux, de la plus haute des trahisons : avoir méprisé son amour passionnel et l’avoir quittée pour une autre femme . La trahison initiale de Jason est présentée comme la cause de tous ces tourments . L‘amour extrême de Médée  se transforme alors en haine et elle va s’efforcer de lui rendre la monnaie de sa pièce. Les meurtres à venir s’inscrivent comme l’envers de ceux qu’elle a commis autrefois pour préserver son époux; Le sacrifice du frère deviendra infanticide et au lieu de le protéger, il détruira l’homme que désormais elle hait plus que  tout. Avec Médée , Corneille a mis en scène une passion destructrice .

22. janvier 2020 · Commentaires fermés sur Phèdre : une trahison triplement mortelle · Catégories: Première · Tags:
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 Jean Racine est un dramaturge du dix-septième siècle dont les pièces s’inspirent à la fois du théâtre antique et des théories jansénistes . D‘Aristote, il s’efforce de respecter les règles des trois unités , de la bienséance et met en scène la catharsis , ce mélange pour le spectateur de terreur et de pitié qui doit purger ses passions et le libérer  de leur  violence . Des Anciens, il reprend les  mythes , récits symboliques chargés d’enseignement pour ses contemporains mais il les modifie afin qu’ils soient plus proches des théories jansénistes dont il est le défenseur. A la différence du catholicisme,  inspiré des jésuites, qui  considère que l’homme dispose d’une liberté de choix, les jansénistes croient en la prédestination et pensent que tous les hommes n’ont pas la possibilité de sauver leur âme; Certains sont donc fatalement voués à la damnation . Racine s’accorde,en partie, avec la fatalité antique mais il va toutefois infléchir le déroulement de l’intrigue .  Ainsi  l’héroïne Phèdre, dans la tragédie éponyme de Racine, se suicide bien à la fin de la pièce, comme dans la version antique  mais seulement après avoir longuement  exprimé ses remords et avoué ses fautes et  son mensonge. Dans les versions d’Euripide et de Sénéque, Phèdre s’empoisonne certes mais sans jamais avoir avoué qu’elle a menti . Racine atténue donc , en quelque sorte, la noirceur du personnage afin de la rendre un peu moins coupable et surtout repentante, aux yeux du spectateur . 

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Phèdre parait surtout victime d’une vengeance de la part de Vénus; cette dernière qui trompait  régulièrement son mari le Dieu Vulcain avec un autre Dieu, Mars, le Dieu de la guerre, a été dénoncée par le grand-père de Phèdre, Hélios, le Dieu soleil, qui a découvert les deux amants . La déesse de l’amour , vexée décide  alors de se venger sur la descendance d’Hélios; elle a puni la mère de Phèdre , Pasiphaé en l’ensorcelant pour qu’elle s’accouple avec un taureau dont elle enfantera le Minotaure, ce monstre qui ravagera la Créte . Elle punit également Phèdre en lui insufflant un passion mortelle et coupable pour son beau-fils, le jeune Hippolyte, fruit de l’union de Thèsée et d’Antiope, la reine des Amazones. C’est d’ailleurs en combattant le Minotaure que Thésée va faire la rencontre d’Ariane, la soeur de Phèdre à laquelle il promet de l’épouser en échange du fil d’ Ariane, avant de finalement l’abandonner sur une île sur le chemin du retour. 

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Au moment où la tragédie débute, Thèse est parti depuis de longues années et sa jeune épouse souffre d’un amour qui lui empoisonne la vie : elle est tombée amoureuse de son beau-fils, retrouvant dans sa jeunesse les traits de son père à son âge. Cet amour peut être vu comme une sorte de malédiction divine et , le retour soudain de Thésée, coup de théâtre au début de l’acte IV, va précipiter le dénouement funeste. Phèdre laisse sa  confidente Oenone calomnier Hippolyte, l’accusant d’avoir tenté d’abuser de sa belle-mère. Phèdre est alors folle de jalousie car elle vient d’apprendre que le jeune homme, qui a repoussé ses avances , partage un amour réciproque mais impossible avec Aricie l’unique survivante des Pallantides, le peuple ennemi exterminé par Thèse avant de prendre le trône de Trézène. Racine réussit donc ici à concilier différents motifs tragiques de l’amour impossible .

Au début de la scène que nous étudions , Thésée qui vient d’apprendre le crime de son fils, laisse éclater sa colère et implore le Dieu Poséidon de l’aider à accomplir sa vengeance . Aux premiers regards échangés, Thésée peine à voir la trahison d’Hippolyte et voit plutôt la vertu sur le front de son fils. Il pose alors une question essentielle : à quel signes reconnait-on à coup sûr, la trahison : “ Ne devrait-on pas , à des signes certains / Reconnaître le coeur des perfides humains ? ” Tragédie amoureuse, Phèdre est également tragique à cause d’une erreur de jugement . Le père s’est fié à la parole d’une confidente , de son épouse et n’a pas pris en considération les dénégations de son propre fils qu’il condamne hâtivement , sous le coup d’une fureur qu’il peine à contrôler . 

Nous pouvons , dans cet extrait montrer comment la trahison apparaît et de quelle manière la colère de Thésée devient un instrument tragique ; 

La trahison

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Le mot perfide au vers 1 désigne à cette époque celui qui agit sournoisement, avec l’intention de nuire, en paroles ou en actions . Souvent associé  par métonymie comme adjectif à des parties du corps (regard perfide, gestes perfides) il peut désigner la personne toute entière  et devenir un substantif. Il est immédiatement suivi du mot monstre qui désigne celui qui n’appartient plus au genre humain ou qui se comporte de manière inhumaine.  Hippolyte est ensuite comparé à un ” reste impur des brigands ” triple dévalorisation ici ; Le mot reste , en effet, révèle des origines douteuses ; le qualificatif impur renvoie à la souillure de la trahison et remet en cause la naissance de cet enfant ; Son sort peut ainsi apparaître semblable à celui des brigands dont Thésée a purgé le pays; On voit à travers l’ emploi du verbe purger que la vengeance qui va s’exercer est justifiée par la monstruosité de l’acte commis ; Le roi mentionne  ensuite,au vers 4, un amour plein d’horreur et le mot fureur à la rime de l’alexandrin suivant , dresse un portrait peu flatteur de ce fils meurtrier monstrueux

La Punition du “traître ” 

Le vers 6 identifie Hippolyte comme une tête ennemie ce qui connote une hostilité du père et il lui reproche son infamie , mot utilisé pour qualifier des actes ignobles. La condamnation est l’exil qui frappe les criminels les moins pardonnables car les Anciens pensaient que le bannissement et l’opprobre, c’est à dire le fait d’être rejeté par tous, étaient des châtiments plus durs que la mort qui délivrait le coupable de ses tourments. La souffrance infligée par l’exil s’accompagne souvent d’une vengeance des Dieux qui poursuivent les criminels avec , par exemple, les Furies ou Erynies ( comme Oreste et Oedipe ) . L’ignominie du fils entache toute la lignée et le déshonneur va nécessairement rejaillir sur Thésée comme l’indiquent les vers 14 et 15 . S’il devient infanticide  et tue son fils de ses propres mains, Thésée déshonore son nom et craint qu’on ne retienne de lui que cet acte odieux : il a peur qu’en tuant son enfant cela ‘vienne souiller sa gloire “ . Sa réputation serait doublement ternie : elle l’est déjà à cause de ce “fils si criminel ” . Thèse menace alors Hippolyte et l’enjoint de fuir : l’anaphore de l’impératif aux vers 10,16 et 20 insiste sur la nécessité d’un décret immédiat et “sans retour “(vers 20) . Pour el spectateur, il est facile d’imaginer la fuite  éperdue du jeune homme ; c’est en fuyant pour avoir la vi sauve que le monstre marin va le précipiter vers sa fin de manière tragique te non sans faire preuve une dernière fois de bravoure.  Sa mort va alors attirer la compassion du spectateur qui le sait innocent du crime dont son père l’accuse. Le récit du messager Théramène qui rapporte à Thésée la mort de son fils est un des moments d'”émotion de la tragédie . En nous faisant revivre cet épisode , avec comme principal spectateur le père éploré , Racine emploie ici la double énonciation propre au spectacle théâtral. 

Une intercession divine : le prix de la vengeance 

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La colère de Thésée fait place à une invocation de la colère divine : le père furieux se tourne alors vers les Dieux pour qu’ils accomplissent sa vengeance en récompense des actes héroïques commis en leur honneur; Il s’agit d’une sorte d’échange de bons procédés et Thésée rappelle qu’il rendit service à Neptune en tuant “d’ infâmes assassins” et que le Dieu lui doit donc une faveur ” pour prix de mes efforts heureux / tu promis d’exaucer le premier de mes voeux ” Cette idée selon laquelle les Dieux s’engagent auprès des hommes et sont liés par leurs serments, contraste avec l’idée d’une fatalité aveugle et implacable; Neptune agit ici à la demande du père et parce qu’il lui doit un service. Le spectateur peut se douter que la promesse sera exaucée et il sait que le jeune homme est perdu doublement ; " j’abandonne ce traître à toute ta colère / étouffe dans son sang ses désirs effrontés . ”  Cette imprécation est véritablement tragique car d’une part, elle signe la mort d’Hippolyte injustement : il  est innocent du crime pour lequel son père l’a condamné et d’autre part, la trahison et le mensonge de Phèdre ont eu des conséquences tragiques : cette dernière se donnera la mort , suivant ainsi celle d’Oenone qui s’est jetée dans la mer en réalisant ce que sa fausse accusation avait déclenché .

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En conclusion, la colère du roi a ici des conséquences tragiques . Alors qu’il pense punir un traitre, Thésée sacrifie un fils innocent et n’ a pas démasqué la véritable trahison : celle de son épouse. Aveuglé par la colère et le ressentiment , il s’abandonne à ses passions et perd la raison en déclenchant le courroux des Dieux . La tragédie classique montre à quel point il est dangereux de suivre ses sentiments et de se laisser emporter par ses passions . Les Dieux finissent toujours par triompher et se vengent de ceux qui les ont offensés ; Vénus punit , à travers  la passion coupable de  Phèdre, les descendants d’ Hélios . Et Thésée paraît ici puni pour son orgueil démesuré et ses crimes passés. L’ironie tragique réside dans le fait que c’est à sa propre demande que s’empresse de répondre Neptune  en tuant son fils et en accomplissant une vengeance inutile. 

21. janvier 2020 · Commentaires fermés sur Les pouvoirs de la parole : qui domine dans un dialogue ? · Catégories: Spécialité : HLP Première

Peut-on dominer l’Autre en lui parlant, en s’adressant à lui ? Comment la parole peut-elle marquer une forme de domination sociale ? Exerce-t-on une forme de pouvoir sur autrui rien qu’en prononçant certains mots  ? La parole peut-elle devenir une arme ? Le philosophe Jean Paul Sartre a déclaré qu’il ne croyait plus vraiment au pouvoir de la parole face aux actions ; “j’ai longtemps pris ma plume pour une épée, écrivit-il , à présent je connais notre impuissance. ” Son autobiographie Les Mots , parue en 1964 reflète un constat d’impuissance des mots mais pourtant le philosophe poursuit en affirmant qu’il faut continuer à écrire des livres car cela peut avoir quand même une utilité. Au théâtre, justement , les mots sont les armes principales des échanges entre les comédiens. Les mots sur scène montrent autant qu’ils disent . Examinons ce qui se joue dans cette scène entre Georges Dandin et ses beaux-parents, des nobles ruinés qui lui ont donné sa fille à épouser car , même s’ il est d’origine paysanne , il a fait fortune; Ce mariage va ainsi redorer le blason de cette famille noble qui  témoigne  ici son mépris pour ce gendre qui n’est pas du même milieu qu’eux.

GEORGE DANDIN.Puisqu’il faut parler catégoriquement, je vous dirai, Monsieur de Sotenville, que j’ai lieu de…

M. DE SOTENVILLE.Doucement, mon gendre. Apprenez qu’il n’est pas respectueux d’appeler les gens par leur nom, et qu’à ceux qui sont audessus de nous il faut dire Monsieur tout court.

GEORGE DANDIN.Hé bien, Monsieur tout court, et non plus Monsieur de Sotenville, j’ai à vous dire que ma femme me donne…

M. DE SOTENVILLE.Tout beau. Apprenez que vous ne devez pas dire ma femme, quand vous parlez de notre fille. GEORGE DANDIN.J’enrage. Comment, ma femme n’est pas ma femme?

MME DE SOTENVILLE.Oui, notre gendre, elle est votre femme, mais il ne vous est pas permis de l’appeler ainsi, et c’est tout ce que vous pourriez faire, si vous aviez épousé l’une de vos pareilles.

GEORGE DANDIN.Ah! George Dandin, où t’estu fourré? Et de grâce, mettez pour un moment votre gentilhommerie à côté et souffrez que je vous parle maintenant comme je pourrai. Au diantre soit la tyrannie de toutes ces histoireslà. Je vous dis donc que je suis mal satisfait de mon mariage.

M. DE SOTENVILLE.Et la raison, mon gendre?

MME DE SOTENVILLE.Quoi, parler ainsi d’une chose dont vous avez tiré si grand avantage?

GEORGE DANDIN.Et quels avantages, Madame, puisque Madame y a? L’aventure n’a pas été mauvaise pour vous, car sans moi, vos affaires, avec votre permission, étaient fort délabrées, et mon argent a servi à reboucher d’assez bons trous<span style="left: 459.883px; top: 837.717px; font-size: 18.4px; font-family: sans-serif; transform: scaleX(0.911742);">; mais moi de quoi y aije profité, que d’un allongement de nom, et au lieu de George Dandin, d’avoir reçu par vous le titre de Monsieur de la Dandinière?

MOLIÈRE, George Dandin ou le Mari confondu, acte I, scène 4, 1668

Question d’interprétation littéraire  : Selon vous, qui domine dans le dialogue cidessus?

Question de réflexion philosophique  La parole peutelle être une arme sociale?

Pour construire votre réponse, vous vous référerez au texte cidessus, ainsi qu’aux lectures et connaissances, tant littéraires que philosophiques, acquises durant l’année.

  Le contenu complet du corrigé est publié sur eduscol « Selon vous, qui domine dans le dialogue ci-dessus ? »On distingue, dans les remarques suivantes, la réflexion du professeur, qui doit prendre en considération la variété des traitements possibles, et le travail de l’élève, qui trouve un fil, une intuition, et qui n’a évidemment pas à maîtriser l’ensemble du panorama.L’analyse du texte pourrait donner lieu à une réflexion essentiellement contextuelle : le public du XVIIème siècle, d’un divertissement joué à la Cour, ne pouvait guère hésiter quant au ridicule de Dandin, si bien que la supériorité sociale de ses beaux-parents et adversaires dans le dialogue ne fait alors aucun doute, quelque caricaturés que soient les Sotenville.Cependant, les ambiguïtés du texte sont réelles, et encore soulignées par le découpage : aussi bien n’attend-on pas ici des élèves des connaissances générales de l’œuvre, mais au contraire une lecture attentive de l’extrait choisi.La formule « Selon vous », qui ouvre la question d’interprétation, n’est pas un simple appui rhétorique et mérite d’être prise au sérieux. Comme l’ont rappelé les indications données dans l’introduction aux ressources, c’est bien une parole personnelle qui est attendue. La diversité des réponses ne constitue sur ce point aucun frein à l’évaluation. On peut en effet attendre, dans des développements eux-mêmes susceptibles d’adopter des formes et des progressions variées :a. soit que ce sont les nobles qui dominent (comme le montre l’empêchement de progression de la parole de Dandin, notable dès les premières répliques, qui ne peut faire entendre son discours, constamment contesté et réprimandé quant à ses formes et usages) ; l’argument d’histoire littéraire (et sociale) peut alors corroborer cette analyse, de même que d’autres éléments du texte également (le ridicule de son titre, la grossièreté de ses usages) <strong>;b. soit que Dandin finalement domine : même s’il est au début malmené, il parvient non pas à se soumettre à l’ordre discursif des bienséances, mais à faire éclater une vérité économique de dépendance de ceux qui prétendent l’éduquer ; le découpage choisi et la fin de l’extrait rendent cette lecture très nette ; c. soit une réponse attentive aux effets de symétrie et finalement d’égalité dans la scène de querelle, renvoyant les deux camps dos à dos et niant même l’idée de domination discursive : la parole de l’un est inadéquate et ridicule ; la position des autres ruine l’impression de supériorité dans laquelle ils s’installent, mais pour laquelle ils ne sont finalement pas crédibles ; l’onomastique met aussi à égalité le ridicule entre « M. de la Dandinière » et de plus anciens aristocrates toutefois appelés « M. et Mme de Sotenville » La formule même d’ « arme sociale » pourra conduire les élèves à une certaine forme d’étonnement : il ne va pas de soi en effet, ni que la société soit un champ de bataille (de quelle bataille s’agit-il alors et quelles en sont les formes ?), ni que la parole puisse être une arme (le terme d’ « arme » doit-il être compris au sens propre ou en un sens figuré ? Et relativement à quel type d’affrontement ?). l’attention portée grâce au texte lui-même, à l’instabilité et à la mobilité des positions respectives des personnages : que serait une arme qui se retournerait sans cesse contre son utilisateur ? ne manquerait-elle pas d’efficacité ? qui domine en réalité dans ce passage ? On peut imaginer que certains élèves seront sensibles à l’orientation même du texte et à sa dynamique propre : Dandin se voit couper la parole ; mais il la reprend, et la tirade finale ajoute à l’affrontement une dimension de manifestation et de dévoilement qui pourrait participer, sinon d’un retournement, en tout cas d’un équilibrage des positions.– 

 

15. janvier 2020 · Commentaires fermés sur Les moralistes du siècle classique et la satire des courtisans. · Catégories: Première

La Fontaine, Madame de La Fayette, La Bruyère et La Rochefoucauld, ainsi que Molière et Racine ont vécu au dix-septième siècle et ont fréquenté la Cour du Roi ; Ils ont observé le manège des courtisans et les moeurs de ceux qui gravitent autour de la famille royale. Chacun à leur manière, ils ont dénoncé certains aspects de la Cour et certains défauts des Grands.  Mais leur méthode et leurs objectifs varient.

En effet, La Fontaine, en choisissant la forme de la fable et l’anthropomorphisme, dresse des tableaux plaisants des manigances des nobles pour entrer dans les bonnes grâces du roi; Il montre également la peur qu’inspire Louis XIV à ses courtisans et dépeint un roi cruel, colérique et capricieux , sous la figure d’un lion tyrannique, mais aussi un roi fort, qui cherche à exercer le pouvoir royal du mieux possible pour préserver les intérêts du royaume et de ses sujets . Nous rions des déboires de l’âne , du cerf et du loup, tout en songeant à la part de cruauté que révèlent ces pratiques.  Sous l’habit du singe ou du léopard, Le fabuliste épingle l’ambition des seigneurs prêts à tout pour plaire ,allant jusqu’à la servilité et l’hypocrisie  .

En choisissant le roman d’analyse psychologique, même s’il demeure dans un cadre historique, Madame de La Fayette prend elle aussi, ses distances par rapport aux travers de ses contemporains, En effet, elle situe l’action de son roman un siècle plus tôt , au temps de Henri II et de son successeur François II; Elle s’intéresse, à la fois, aux intrigues amoureuses et à leurs conséquences politiques et démontre qu’amour et ambition sont inextricablement liés; A travers le regard et les mésaventures de son héroïne, elle met en évidence les dangers de la Cour et la nécessité d’en décrypter les codes, d’en comprendre le fonctionnement .  Elle fustige particulièrement la dissimulation et la galanterie qui semblent régner: la jeune femme réussira à faire triompher la Vertu mais elle paraît bien seule dans cet univers de faux-semblants, régi par les lois de la dynastie et la place que chacun occupe dans la hiérarchie des grandes familles. Plus »

07. janvier 2020 · Commentaires fermés sur Déclarations d’amour : mode d’emploi · Catégories: Spécialité : HLP Première

Déclarer sa flamme, avouer ses sentiments, mettre son coeur à nu : autant d’expressions imagées qui traduisent l’idée de déclarer son amour . Moment codifié, la déclaration demeure une étape conventionnelle dans le discours amoureux même lorsqu’on tente de la rendre originale. Si l’on fait un sommaire des déclarations que vous avez choisies, en musique, force est de constater qu’elles ont toutes des points communs ; Petit tour d’horizon … en musique et en paroles.

Avant d’analyser les formes de déclarations amoureuse, il faut se se souvenir que même s’il existe différentes manières de dire à quelqu’un qu’on l’aime, les outils stylistiques qui vont être mobilisés appartiendront souvent au registre épidictique; celui qui utilise l’éloge dans le but de flatter l’amour propre de la personne aimée .

Il s’agit d’un langage de la séduction dans lequel on tente de convaincre l’autre de la force de nos sentiments et de la sincérité de nos propos. En effet, dans le domaine de la parole  plane toujours le soupçon du mensonge et de la manipulation : l’autre cherche t-il à me séduire avec des paroles trompeuses ou exprime-t-il un sentiment véritable?. La lancinante question de l’adéquation entre le mot et le sentiment exprimé, demeure posée . Les mots reflètent-ils toujours avec exactitude ce qu’on éprouve réellement ou peut-on les utiliser pour feindre et ainsi tromper l’autre, pris au piège de paroles mielleuses ? Comment avoir la certitude que ce qui est dit , est pensé ? Dans le domaine de l’expression des sentiments, on peut également évoquer l’usure de certains clichés et un effort est accompli, à chaque siècle, pour tenter de renouveler l’arsenal poétique des métaphores amoureuses.

Les poètes et les chansonniers rivalisent alors d’imagination ; Voici quelques unes de vos trouvailles : je t’aime à l’envers ; je suis comme un radeau échoué en pleine mer qui évoquent le bouleversement de la séparation ; je pourrais me vendre à Lucifer : image qui revisite l’idée d’un pacte avec le diable pour obtenir la femme qu’on aime;  selon la légende médiévale, Faust a vendu son âme à Méphistophélès en échange de l’amour de Marguerite . Les douleurs liées à l’amour peuvent être suggérées par des images de coeur qui saigne, qu’on arrache ou qui se brise : le coeur ici est la métonymie qui désigne le siège des émotions amoureuses.  L’expression “elle  a brisé son coeur sur moi ” est quelque peu étonnante car elle inverse l’image classique ; Dans un même ordre d’idées, il est fréquent de désigner la froideur de la femme aimée mais le paradoxe “ta douceur tue” montre également avec la paronomase “d‘où sors-tu ? ” un jeu intéressant avec le cliché .

De nombreuses déclarations actuelles continuent à utiliser un vocabulaire symbolique : on peut penser notamment au symbolisme des saisons avec les associations entre l’amour naissant et le printemps par exemple; de même les métaux précieux, les pierres précieuses comme le diamant, le saphir, les matières précieuses , les bijoux , reviennent fréquemment en association avec une déclaration amoureuse . ils donnent ainsi de la valeur à l’être aimé, magnifié par le regard de l’amant , parfois transfiguré par le sentiment amoureux.

Les déclarations font également la part belle aux blessures amoureuse et pour décrire l’action de la passion, certaines métaphores classiques sont encore vivaces comme celles de la chasse, celles du piège; On retrouve parfois les références mythologiques à Cupidon avec les flèches de ce jeune dieu ailé, son carquois, ses traits empoisonnés ; le fait qu’il décoche ses flèches au hasard et que la blessure amoureuse soit ainsi assimilée à une piqure . L’une des déclarations amoureuses avait pour objet un jeune enfant qui vient de naître et la flèche se transformait alors en sarbacane ; le poète -chansonnier évoque “les repaires secrets ” les refuges où se réfugient les amoureux , ici un père et sa fille ; “le ciel prétend qu’il te connaît” suggère un lien avec  l’amour divin et la nudité de l’enfant se rapporte à la nudité originelle; la dimension charnelle de ce lien est implicite . Le sentiment se diffuse alors à travers la Nature, le paysage se fait l’écho de ce que ressent le poète dans une forme d‘animisme ; ce concept de paysage état d’âme apparait avec la naissance du romantisme au dix-neuvième siècle.

Le décor , est, fréquemment, une composante importante de la déclaration amoureuse: on choisit avec soin le moment et l’endroit pour faire sa déclaration.  En cas de séparation, on peut alors évoquer avec nostalgie le temps des amours passées, avec une pointe d’élégie et un soupçon de pathétique. Assonances et allitérations, figures de sonorités, viennent ajouter un peu de poésie : ainsi cet amant parle de ramasser les pots cassés et de faire le point sur ce qu’elle lui a laissé : impayés, impostures et ratures. On mesure ici l’amertume de celui qui aime et n’est plus aimé en retour. A la manière de Ghérasime Luca , une chanson mêle les sens et les significations dans des synesthésies comme à fleur de toi et la métaphore filée du parfum laisse son empreinte olfactive .

L’être aimé , par un curieux paradoxe, est à la fois le poison qui nous tue et le seul remède qui peut nous guérir. L’amour s’affranchit également du temps dans une sorte d’éternité comme la déclaration “I will always love you ” et les multiples “for ever” . On peut également citer ” I see my future in your eyes ” ou le fameux ” I’m still loving you “

A votre tour , vous allez devoir fabriquer une déclaration d’amour qui répondra à ces trois critères

a) elle sera la plus originale possible notamment sur le plan du langage

b) elle sera poétique

c) elle sera un dévoilement progressif et ne révélera l’identité de l’objet ou de l’ être aimé que dans les dernières phrases .

Pour vous aider, voici deux blasons surréalistes

L’union libre

Ma femme à la chevelure de feu de bois
Aux pensées d’éclairs de chaleur
A la taille de sablier
Ma femme à la taille de loutre entre les dents du tigre
Ma femme à la bouche de cocarde et de bouquet d’étoiles de
dernière grandeur
Aux dents d’empreintes de souris blanche sur la terre blanche
A la langue d’ambre et de verre frottés
Ma femme à la langue d’hostie poignardée
A la langue de poupée qui ouvre et ferme les yeux
A la langue de pierre incroyable
Ma femme aux cils de bâtons d’écriture d’enfant
Aux sourcils de bord de nid d’hirondelle
Ma femme aux tempes d’ardoise de toit de serre
Et de buée aux vitres
Ma femme aux épaules de champagne
Et de fontaine à têtes de dauphins sous la glace
Ma femme aux poignets d’allumettes
Ma femme aux doigts de hasard et d’as de coeur
Aux doigts de foin coupé
Ma femme aux aisselles de martre et de fênes
De nuit de la Saint-Jean
De troène et de nid de scalares
Aux bras d’écume de mer et d’écluse
Et de mélange du blé et du moulin
Ma femme aux jambes de fusée
Aux mouvements d’horlogerie et de désespoir
Ma femme aux mollets de moelle de sureau
Ma femme aux pieds d’initiales
Aux pieds de trousseaux de clés aux pieds de calfats qui boivent
Ma femme au cou d’orge imperlé
Ma femme à la gorge de Val d’or
De rendez-vous dans le lit même du torrent
Aux seins de nuit
Ma femme aux seins de taupinière marine
Ma femme aux seins de creuset du rubis
Aux seins de spectre de la rose sous la rosée
Ma femme au ventre de dépliement d’éventail des jours
Au ventre de griffe géante
Ma femme au dos d’oiseau qui fuit vertical
Au dos de vif-argent
Au dos de lumière
A la nuque de pierre roulée et de craie mouillée
Et de chute d’un verre dans lequel on vient de boire
Ma femme aux hanches de nacelle
Aux hanches de lustre et de pennes de flèche
Et de tiges de plumes de paon blanc
De balance insensible
Ma femme aux fesses de grès et d’amiante
Ma femme aux fesses de dos de cygne
Ma femme aux fesses de printemps
Au sexe de glaïeul
Ma femme au sexe de placer et d’ornithorynque
Ma femme au sexe d’algue et de bonbons anciens
Ma femme au sexe de miroir
Ma femme aux yeux pleins de larmes
Aux yeux de panoplie violette et d’aiguille aimantée
Ma femme aux yeux de savane
Ma femme aux yeux d’eau pour boire en prison
Ma femme aux yeux de bois toujours sous la hache
Aux yeux de niveau d’eau de niveau d’air de terre et de feu.
André Breton, Clair de terre (1931 )

Plus proche de nous, ce poème étrange de Ghérasime Luca intitulé Prendre Corps

je te flore /

tu me faune /

je te peau / je te porte / et te fenêtre /

tu m’os / tu m’océan / tu m’audace / tu me météorite /

je te clé d’or / je t’extraordinaire / tu me paroxysme / tu me paroxysme / et me paradoxe / je te clavecin / tu me silencieusement / tu me miroir / je te montre / tu me mirage / tu m’oasis / tu m’oiseau / tu m’insecte / tu me cataracte / je te lune / tu me nuage / tu me marée haute / je te transparente / tu me pénombre / tu me translucide / tu me château vide / et me labyrinthe / tu me parallaxes / et me parabole / tu me debout / et couché / tu m’oblique / je t’équinoxe / je te poète / tu me danse / je te particulier / tu me perpendiculaire / et sous pente / tu me visible / tu me silhouette / tu m’infiniment / tu m’indivisible / tu m’ironie / je te fragile / je t’ardente / je te phonétiquement / tu me hiéroglyphe / tu m’espace / tu me cascade / je te cascade à mon tour / mais toi / tu me fluide / tu m’étoile filante / tu me volcanique / nous nous pulvérisable / nous nous scandaleusement / jour et nuit / nous nous aujourd’hui même / tu me tangente / je te concentrique / concentrique / tu me soluble / tu m’insoluble / en m’asphyxiant / et me libératrice / tu me pulsatrice / pulsatrice / tu me vertige / tu m’extase / tu me passionnément / tu m’absolu / je t’absente / tu m’absurde / je te marine / je te chevelure / je te hanche / tu me hantes / je te poitrine / je buste ta poitrine / puis ton visage / je te corsage / tu m’odeur / tu me vertige / tu glisses / je te cuisse / je te caresse / je te frissonne / tu m’enjambes / tu m’insupportable / je t’amazone / je te gorge / je te ventre / je te jupe / je te jarretelle / je te peins / je te bach / pour clavecin / sein / et flûte / je te tremblante / tu m’as séduit / tu m’absorbes / je te dispute / je te risque / je te grimpe / tu me frôles / je te nage / mais toi / tu me tourbillonnes / tu m’effleures / tu me cerne / tu me chair cuir peau et morsure / tu me slip noir / tu me ballerine rouge / et quand tu ne haut talon pas mes sens / tu es crocodile / tu es phoque / tu es fascine / tu me couvres / et je te découvre / je t’invente / parfois / tu te livres / tu me lèvre humide / je te délivre / je te délire / tu me délire / et passionne / je t’épaule / je te vertèbre / je te cheville / je te cil et pupille / et si je n’omoplate pas / avant mes poumons / même à distance / tu m’aisselle / je te respire / jour et nuit / je te respire / je te bouche / je te baleine / je te dent / je te griffe / je te vulve / je te paupière / je te haleine / je t’aime / je te sens / je te cou / je te molaire / je te certitude / je te joue / je te veine / je te main / je te sueur / je te langue / je te nuque / je te navigue / je t’ombre / je te corps / je te fantôme /

je te rétine / dans mon souffle / tu t’iris /

je t’écris /

tu me penses

Quels sont les procédés d’écriture particuliers dans ces deux déclarations amoureuses adressées aux femmes aimées ?

04. janvier 2020 · Commentaires fermés sur Voyages, voyages : du récit aux carnets …suivez le guide · Catégories: Seconde · Tags:

 Qui n’a jamais rêvé de découvrir  de nouveaux horizons, de nouveaux paysages , de nouvelles terres et de nouvelles populations . Durant quelques semaines, vous allez vous transformer en explorateurs et vous présenterez à la classe votre parcours et vos recherches sous la forme d’un exposé (évaluation n° 1 ) , d’un carnet de voyages (évaluation n° 2 )   qui comportera plusieurs objets , des souvenirs originaux et notamment une lettre rédigée par un explorateur.  (évaluation n°3 ) ; Commençons donc par la première étape ..Votre travail va consister à résumer et à présenter  un récit de voyage. .Tout d’abord , vous allez devoir choisir un voyage réel ou imaginaire et pour vous aider, commencez à effectuer des recherches documentaires  voyages terrestres ou voyages spatiaux, voyages dans le passé ou voyage dans le futur. Suivez le guide …

Choisissez rapidement  un récit , en fonction de vos goûts et de vos centres d’intérêt et présentez le , par exemple sous forme de diaporama  en indiquant obligatoirement :

le contexte historique du voyage (dates de début , de fin ) et les événements principaux

le pays ou le territoire exploré , découvert, conquis et dans quelles circonstances (expédition terrestre, maritime, spatiale )

les caractéristiques des habitants ou du territoire ou les particularités des populations observées ( humaines, ou animales )

N’oubliez pas de préciser les conditions météorologiques..

Résumez les principales différences observées entre les habitants de ces contrées et les moeurs des voyageurs, résumez les principales observations des explorateurs , leurs contacts avec les autochtones à partir de leurs notes

Critères d’évaluation : précision des renseignements donnés, respect des différentes rubriques

Quelques pistes pour trouver des récits de voyage…  le choix devra me parvenir avant le 27 janvier .. début de la réalisation des carnets

Tout d’abord au CDI du lycée, vous trouverez différents livres consacrés à des récits de voyage : pour ceux qui veulent se lancer dans une lecture personnelle ..

Les 7 sceaux : un chasseur de sorcières et son fils en l’an 999 R MEY s     F

Isabella Bird : une femme exploratrice au Japon en BD MAN SAS        F

To tour Eternity de Oima Yoshitoki , l’arrivée d’un immortel sur terre   MAN Yos      F

Intrwriew d’Ulysse Mallasagna et son carnet de voyage au Japon        F et R

Carnets de voyage en Amérique latin: Chili, Patagonie et Pérou en 1950 791.4 SAL

Trois Orients de Claudio Magnis R magt            R

Voyage au pays des Kiribati, un archipel de micronésie  919.6 PIC       R

Le désert des déserts avec les bédouins , derniers nomades  R THE d       R

Maintenant quelques grands classiques du récit de découverte :

 les ancêtres : Marco Polo Livre des Merveilles écrit au treizième siècle.

à la Renaissance :

Montaigne , Des cannibales   F 

Jean de Léry, Histoire du Brésil  R

Christophe Colomb, Journal  R

Umberto Eco, Baudolino , F

au dix-septième siècle

à l’époque des Lumières

Les lettres Persanes de Montesquieu

L’Ingénu de Voltaire

Zadig ou la Destinée de Voltaire

Micromégas de Votaire

Supplément au Voyage de Bougainville de Diderot

au dix-neuvième siècle

Jules Verne  Voyage au centre de la Terre  ou Vingt Mille lieues sous les mers  F ou beaucoup d’autres comme  L’Ile mystérieuse  , Le tour du monde en 80 jours, De la terre à la lune

plus près de nous : quelques écrivains voyageurs comme Blaise Cendrars

Voyage avec un âne dans les Cévennes de Robert Louis Stevenson

Pierre Loti,  Pecheur d’islande 

Into the wild de Jon Krakauer : un jeune homme perdu dans la Nature Sauvage..

L’Odyssée de l”Endurance : une expédition en Antarctique en 1914 par Ernest Henry Shackleton

Longue marche de Bernard Ollier , 4 ans à travers la Chine et les plateaux d’Anatolie

La panthère des neiges de Sylvain Tesson

 Activité n° 2  : Réalisation d’un carnet de voyages

De ce voyage, vous devrez rapporter quelques souvenirs qui prendront la forme d’un carnet de voyage ; vous présenterez le résultat de vos recherches sous une forme originale (dans un sac par exemple, ou une boîte )

Vous devrez réunir : deux objets qui symbolisent ce voyage / une photo qui évoque un moment important de ce voyage ou un document iconographique comme par exemple une carte qui matérialise physiquement ce pays et une lettre manuscrite adressée , dans une enveloppe à une personne de votre choix . Cette lettre contiendra les impressions de voyage  de l’explorateur , quelques jours ou quelques semaines après son arrivée … vous respecterez les critères donnés dans votre présentation initiale (  coïncidence des dates, contexte historique respecté, observations précises effectuées )

Critères de réussite : La totalité des pièces devra être réunie pour le 10 février   ( un contenant, deux ou trois objets souvenirs, un  ou deux documents photo ou dessin,  et une lettre ) ; vous devrez présenter chaque élément de votre sac-souvenir..soyez créatifs !

Evaluation 3 : la lettre

Critères de réussite : ce document comportera environ 500 mots ; il sera rédigé avec soin et sera écrit à la première personne du singulier , il contiendra de nombreux éléments de comparaison entre ce qu’il observe et ce qu’il connaissait ; il comportera des indications précises sur la faune, la flore ou les moeurs des autochtones.

Bons voyages à tous ..

 

 

04. janvier 2020 · Commentaires fermés sur Le voyage de Candide : à la découverte des malheurs du monde . · Catégories: Seconde

Lorsque François Marie Arouet, qui porte comme pseudonyme Voltaire , écrit en 1759, son conte philosophique intitulé Candide et sous-titré L’optimisme, il entend vulgariser une partie de son système philosophique qui s’oppose fortement à celui enseigné par Leibniz dont la devise est la suivante : Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles . Mais comment rendre accessible à un large public des idées philosophiques , des concepts métaphysiques et une vision du monde progressiste ? L’écrivain décide alors de créer une forme littéraire qui lui permette d’atteindre cet objectif ambitieux ; plaire avec une histoire pleine de rebondissements et illustrer, au moyen des mésaventures de quelques personnages ,  les dangers de du providentialisme . Voyons en détails comment se déroule le voyage de Candide..

Le point de départ des aventures du jeune héros naïf est la Wetsphalie: Voltaire s’amuse à se moquer du déclin des aristocrates allemands et Candide est chassé du château de son enfance pour avoir embrassé Cunégonde, la fille du baron . Il s’enrôle , sans vraiment le savoir, dans l’armée bulgare et Voltaire critique alors fortement la guerre en exposant ses conséquences désastreuses; Candide réussit à s’enfuir et devient un déserteur ; Il fait alors la connaissance d’un généreux protestant avec lequel il va s’embarquer pour Lisbonne ; Il découvrira , à cette occasion, la cruauté des hommes et leur ingratitude avec la noyade de Jacques, le tremblement de terre de Lisbonne et le procès de l'inquisition dont Voltaire démontre les méthodes iniques ; Il lui faut encore s'enfuir et aidé par la Vieille,  qui va raconter ses nombreux malheurs ,il retrouve Cunégonde mais devient un assassin en tuant les deux hommes qui la retenaient captive et se la partageaient : Don Issachar et le grand Inquisiteur . Le voyage se poursuit en Amérique du Sud avec de nombreuses péripéties : les Oreillons du Paraguay représentent les hommes sauvages tels que se les imaginaient les savants de cette époque . Candide arrive jusqu’à un pays légendaire : l’Eldorado où l’argent n’a plus aucune valeur et où les hommes semblent enfin heureux. Mais après avoir perdu leur fortune au cours de la traversée, les personnages sont à nouveau séparés ;  Candide et son fidèle valet Cacambo vont se retrouver confrontés à un esclave moribond, en entrant au Surinam. Le philosophe dénonce alors violemment l’esclavage et ceux qui le pratiquent à l’image du méchant Vanderdendur. Retour sur le vieux continent avec une étape française et une étape anglaise  L’étape vénitienne et la rencontre avec le désabusé Pococuranté a pour but de montrer que pour vivre heureux, il faut garder du désir et de l’enthousiasme .

Le chapitre final nous transporte en Turquieà Constantinople, à la porte de l’Orient , là où un bon vieillard leur enseigne la voie de la sagesse et peut être aussi celle du bonheur : ne pas se mêler des affaires politiques pour ne pas finir assassiné, vivre en autarcie pour ne dépendre de personne et cultiver son jardin. Tous  les personnages se retrouvent alors pour former une mini-société où chacun est utile à la communauté : l’ancienne prostituée Pâquette brode , la Vieille  est devenue lingère, frère Giroflée menuisier et Cunégonde une excellente pâtissière.

Chaque étape du voyage géographique du héros lui a permis d’avancer dans son éducation : au fur et à mesure, il a ouvert les yeux et cessé de croire à l’enseignement de son maître Pangloss qui prétendait que tout est toujours pour le mieux . Voltaire a donc utilisé ici le thème du voyage comme un support pour des découvertes philosophiques . En effet, voyage va souvent de pair avec découverte : parfois découverte de soi-même comme dans les voyages initiatiques, parfois découverte des autres civilisations comme dans les voyages des explorateurs, parfois découverte d’autres mondes et d’autres formes de vie comme dans les voyages dans l’espace ou dans le futur . Pour en savoir plus, lisez le billet consacré aux voyages aux pays des merveilles …

07. décembre 2019 · Commentaires fermés sur Apprendre à conclure : la conclusion d’une dissertation · Catégories: Fiches méthode · Tags:

Conclure une dissertation s’effectue sous la forme d’un paragraphe distinct du développement (on vous conseille de sauter une ligne ) ;  La conclusion comporte deux étapes : tout d’abord, on reprend la question de départ, celle qui a servi de base au travail de réflexion et on reformule , rapidement, les différentes parties  du plan ( le plus souvent on ne reprend que les grands axes ) ; Ensuite, on rédige son avis personnel sur la question et on peut tenter de faire une ouverture sur un sujet plus large qui a un rapport direct avec le point étudié . Attention toutefois aux ouvertures artificielles qui ne prolongent pas la réflexion mais introduisent d’autres sujets .

 Lisons quelques exemples de conclusions rédigées sur les fables ..

Sujet : les fables permettent -elles de penser l’homme ? variante  : les fables peuvent  elles être considérées comme un instrument de réflexion sérieux qui permettrait de penser l’homme et le monde dans lequel il évolue ? 

Conclusion : Nous venons donc de voir que , grâce à leurs morales, le plus souvent  identifiables qui donnent des conseils ou des leçons, les fables permettent de réfléchir vraiment à la nature humaine; de plus, le fabuliste construit des histoires dans le but de nous apprendre des vérités morales . Grâce aux situations choisies et aux actions des personnages, nous en tirons des conséquences  immédiates . Cependant , il arrive que certaines morales soient ambivalentes ou laissent paraître des vérités dérangeantes . De plus, La fontaine laisse volontairement certaines questions sans réponse afin justement de déclencher , peut être , une réflexion chez le lecteur. Néanmoins, les fables nous montrent un univers assez manichéen où tout semble joué d’avance et où les personnages n’évoluent pas vraiment; Ils se contentent de jouer leur rôle . Ainsi, les fables apparaissent davantage comme des sortes de miroirs grossissants, des  loupes qui permettent d’éclairer certains défauts des hommes mais les questions qu’elles soulèvent demeurent assez limitées; C’est en ce sens qu’un essai ou un traité philosophique paraît plus indiqué pour penser l’homme et le monde qui l’entoure .

Sujet pensez vous que les fables s’adressent avant tout aux enfants ? 

Conclusion : S’il est vrai que le premier recueil des fables a été dédicacé au Dauphin, le jeune Duc de Bourgogne, et que La Fontaine se plait à créer un univers peuplé d’animaux expressifs et même de créatures fantastiques , dans le second recueil, le fabuliste évoque davantage des thèmes comme la mort et l’ injustice qui parlent peut être moins à un jeune public; D’autre part, certaines fables semblent bien peu éducatives et comportent des morales ambivalentes assez éloignées des valeurs qu’on cherche à inculquer aux enfants. Si au départ, le genre de l’apologue a pu séduire la Fontaine par son aspect “enfantin” , il l’a très vite transformé et utilisé comme un instrument de réflexion pour montrer des vérités cachées que les enfants ne peuvent pas percevoir . Néanmoins, chacun, à chaque âge et en fonction de son expérience, peut trouver dans une fable de quoi  simplement sourire ou parfois de quoi réfléchir et sans doute, à l’occasion, de quoi désespérer ! Si Rousseau déconseillait vivement la lecture des fables aux enfants, c’est parce qu’il redoutait qu’ils n’en retiennent que certains aspects négatifs et pessimistes. Mais la variété  des fables va permettre à un enfant d’y trouver avec plaisir des animaux qui parlent . 

 

25. novembre 2019 · Commentaires fermés sur Le thème du mensonge dans Les Fables : dissertation .. · Catégories: Dissertations sur oeuvre, Première · Tags: ,

Vérité et mensonges dans les Fables .

Cette dissertation consiste à examiner la place des mensonges dans les Fables au programme cette année afin d’ en déterminer à la fois l’importance et la variété. La première étape du travail de la dissertation consiste donc à faire l’inventaire des différents mensonges rencontrés dans les récits; Ensuite, il convient de se demander quel rôle joue le mensonge, qui ment et quelles sont les conséquences des mensonges pour les forces en présence; On peut également classer les mensonges : on séparera, par exemple, les mensonges bénéfiques et ceux qui nuisent à autrui ou qui ont des conséquences graves .  Une fois ce travail effectué, on pourra commencer à réfléchir à une organisation qui deviendra un plan :  I Mensonge de la fiction: la fable est un mensonge au service des vérités  II Mensonges dans les fables: une arme redoutable  III Existe-t-il des mensonges positifs ? C’est une idée d’organisation mais ce n’est pas le seul plan possible … voyons d’abord notre stock de mensonges prêts à être utilisés comme illustrations dans une dissertation ….

Vérité et mensonges dans les Fables

Liste des mensonges dans Les fables ( 19 fables soit une sur quatre environ comportent au moins  une référence explicite au mensonge ) 

Les Animaux ..: le renard ment en atténuant la gravité des actions du roi (flatterie du courtisan , mensonge pour plaire aux puissants )

La cour du lion : le renard ment en feignant ne plus avoir d’odorat, mensonge pour sauver sa vie, situation du courtisan habile qui est hypocrite sans trop en faire ( singe trop menteur ) : « ne soyez… ni parleur trop sincère »

Le chat la belette et le petit lapin : le chat appelé pour départager les deux animaux qui se battent pour la possession du terrier les croque ; il les attire à lui par un mensonge; il prétend être sourd pour qu’ils soient à portée de griffe ( mensonge pour nuire à autrui, le plus fort ment au plus faible pour le croquer, synonyme de ruse ?  )

Un animal dans la lune : le fabuliste y lance un débat philosophique ; l’homme doit -il se fier à se sens «  mes yeux ne me trompent jamais en me mentant toujours » ..réflexion sur le phénomène d’illusion optique

Le lion, le loup et le renard : le loup médit de l’absence du renard  à la cour ; ce dernier prétexte un pèlerinage ( souvent la religion sert de prétexte ) et ment en prétendant qu’une peau de loup est un remède à la vieillesse ; il a menti pour tuer son adversaire ; Mensonge à des fins politiques : légitime défense ?

Les femmes et le secret : un époux ment pour révéler la véritable nature de son épouse, incapable de garder un secret : un mensonge pour enseigner ou pour faire découvrir une vérité

Dans Le  rieur et les poissons, un convive réussit à se faire servir un très gros poisson  à table en inventant un habile mensonge: il fait semblant d’interroger les poissons sur le sort d’un de ses mais disparu en mer et on le croit. On lui apporte un plus gros poisson qui , selon lui, en saura forcément plus : mensonge dans le but d’obtenir ce qu’on désire, mensonge qui rétablit une sorte d’équilibre entreponts et faibles .

Les obsèques de la lionne : le cerf ment habilement pour sauver sa peu et son mensonge, qui ressemble à un songe miraculeux, lui vaut même les faveurs du roi (mentir par nécessité, pas de conséquences négatives sur autrui )

Le faucon et le chapon : un chapon se méfie des hommes qui cherchent à l’attraper pour le manger  et lui mentent en prétendant le nourrir ; il explique au faucon qu’il n’obéit pas à l’appel de son maître car il ne veut pas finir à la broche ; l’homme lui tient ici un langage mensonger .

Le chat et le rat : le rongeur a accepté de délivrer son ennemi le chat d’un piège mais il se méfie des paroles mensongères du chat qui cherche à l’attirer pour le manger : on ne doit pas croire son ennemi . Le mensonge ici nous donne une leçon .

Le dépositaire infidèle :  le fabuliste déclare avoir mis dans ses fables « des légions de menteurs » « Tout homme ment, dit le Sage. »  Tous tant que nous sommes , nous mentions, grands et petits .Qui mentirait comme Esope comme Homère un vrai menteur ne serait . Le doux charme de maint songe /par leur bel art inventé/ sous les habits du mensonge/ nous  offre la vérité. Trompé par un marchand qui ment ne disant que des rats ont mangé le fer , un trafiquant enlève le fils de ce dernier et invente un mensonge : un hibou l’a emporté. Le trafiquant qui a compris la ruse , rend alors l’argent dérobé.

Le loup et le chien maigre : le chien, pour sauver sa peau, ment au loup qui l’épargne en pensant venir le rechercher quand il aura grossi . La Fontaine souligne la sottise du loup qui a cru sa proie et l’ a laissée filer par appât du gain.

Discours à Madame de la Sablière : dans cette longue fable, La Fontaine démontre que les animaux ont des sentiments et qu’il sont bien loin de n’être que des machines; par ironie, il évoque un roi polonais et prétend  que « jamais un roi ne ment »

Les poissons et le cormoran : le vieil oiseau ment par nécessité;Son mensonge est cru et la morale proposée est de ne pas se fier «  en ceux qui sont mangeurs de gens » . Un menteur qu’on ne parvient pas totalement à détester car il est présenté comme un pauvre animal qui souffre de disette.

L’Enfouisseur et son compère : un homme réussit grâce à un habile mensonge à confondre celui qui lui vole son argent et à récupérer ce qui lui appartient ; L’autre s’est laissé tenté par l’appât du gain. Ce mensonge doit lui servir de leçon . ‘l’autre fut sage , il retint tout chez lui «  et au lieu de se montrer avare et d’entasser son argent, il décide alors de le dépenser.

Le berger et le roi;  Un berger est nommé , grâce à son bon sens, Juge souverain mais les courtisans , jaloux, complotent contre lui  et l’ accusent faussement de posséder un trésor . La Fontaine les qualifie «  de machineurs d’impostures »    Leurs mensonges sont des calomnies et visent à nuire à celui qu’il considèrent comme un rival.

Dans Les poissons et le berger qui joue de la flûte comme dans Les deux perroquets le roi et son fils, le fabuliste dénonce le langage trompeur: douces paroles miellées du berger qui veut attraper les poissons et «  le leurre de l’appât d’un profane langage » Un leurre est un mensonge qui va piéger sa victime .

Le loup et le renard : le fabuliste montre que le renard bien qu’expert en « tours pleins de matoiserie »  n’a pas toujours l’avantage . Piégé par le reflet de la lune qu’il prend  pour un fromage, il est obligé de piéger le loup pour se sortir du puits dans lequel il est tombé ? Ce dernier  est qualifié de sot .

Quelques exemples maintenant d’insertion des illustrations au sein d’un raisonnement argumentatif. 

Après avoir démontré que sous une enveloppe mensongère , celle de la fiction, la fable donne parfois accès à certaines vérités , voyons maintenant comment la fable parvient elle à exprimer des vérités sur le plan politique .

L’une des illustrations la plus claire nous est fournie par Le Pouvoir des fables; En effet, dan cet apologue, un orateur qui ne parvient pas à se faire entendre de son public , décide d’inventer une fable pour attirer leur attention et ainsi, les alerter d’un danger imminent pour la cité; Le mensonge de la fiction  a facilité la parole politique, celle de l’orateur , et a permis , de déguiser , sous le masque d’une histoire , une véritable menace pour l’ambassadeur de France .

En effet, certaines fables sont politiquement engagées . Par le biais des animaux, le fabuliste  lance  même , souvent ,des accusations contre les hommes . Ainsi, dans Les animaux malades de la Peste, il nous fait assister à une parodie de justice ; L’âne, animal faible, avoue une peccadille qui lui vaut d’être pendu alors que le lion, qui a avoué des crimes répétés, n’est pas jugé coupable . La morale de la fable «  Selon que vous serez puissant ou misérable / les jugements de cour vous rendront blancs ou noirs » critique explicitement l’injustice qui règne à la cour de louis XIV

Dans Le Singe et le Léopard, le fabuliste nous  donne un autre avis politique sous la forme d’un avis  personnel : il préfère les gens d’esprit aux gens qui se contentent d’être bien nés et se vantent de leurs titres; Ces courtisans orgueilleux sont dépeints sous les traits d’un léopard fier de sa peau tachetée . La vérité apparait alors : «  ils n’ont que l’habit pour tous talents “; La fable nous a permis d’y voir plus clair et de démasquer la vérité cachée sous des apparences mensongères.

Si la plupart des fables n’ affichent pas clairement une lecture politique, on peut toutefois lire certaines situations comme une réflexion sur l’art de gouverner; Ainsi dans Le lion, le singe et les deux ânes, La Fontaine reprend l’un des rôles du singe chez Esope, celui qui donne des conseils au roi . Derrière la situation mensongère de la fable, on devine aisément que le fabuliste adresse une forme d’avertissement à Louis XIV en le montrant sous le masque d’un «  terrible sire »; Il lui conseille de se méfier de son orgueil , qui fait prendre de mauvaises décisions aux souverains .

La présence d’un mensonge , à l’intérieur de  la Fable, peut  se lire , de temps à autre,  comme un instrument de perfectionnement . Il permet souvent de se sortir d’un mauvais pas . De ce point de vue, il peut être assimilé à la métis des grecs , cette ruse qui permet de vaincre ses ennemis et de sauver sa vie ou, tout simplement ,  de faire triompher ses intérêts . C’est le cas du cerf, dans Les obsèques de la lionne. Ce dernier, dénoncé par des courtisans malveillants , risque de mourir pour avoir été sincère et ne pas  avoir fait semblant d’être triste  à la mort de la lionne. Grâce à un fabuleux mensonge où il prétend que la reine lui est apparue en songe  ,il sauve sa vie et obtient  même une récompense  . On remarque d’ailleurs que songe , au sens où l’entendent les moralistes du siècle classique,  est souvent synonyme de mensonges ; Le rêve, en effet, fait partie de l’imaginaire et éloigne l’homme du chemin de la Vérité sur lequel sa raison doit le guider.

Le mensonge peut même avoir un statut formateur et servir d’enseignement ; Ainsi dans Les femmes et le secret, c’est au moyen d’un mensonge qu’un mari met en évidence l’incapacité de as femme à garder un secret; Il a mis son épouse à l’épreuve et  son stratagème a permis de révéler ce qui est présenté comme une sorte de vérité générale: nous avons beaucoup de mal à garder un secret quelqu’il soit.

Dans Le dépositaire infidèle , un premier mensonge déclenche des conséquences terribles qui vont servir de leçon au menteur; ce dernier dissimulé le vol de l”argent derrière une cause mensongère , en expliquant qu’un rat a dévoré l’argent ; Pour lui rendre la monnaie de sa pièce, ce dernier enlève son fils et raconte un mensonge aussi énorme : il aurait été enlevé par un hibou; le voleur ne peut que comprendre ici, la leçon donnée à ses dépens.

Les mensonges des fables ont également pour but de révéler des vérités cachées sous des apparences trompeuses . Le mensonge  des hypocrites est parfois démasqué comme celui du singe dans La Cour du lion</b> ; sa sotte flatterie causera sa perte ; le fabuliste démontre ainsi que la la Cour est un milieu impitoyable où chacun doit dissimuler ses véritables sentiments sans tomber dans une flagornerie trop facilement décelable.

Les mensonges permettent , de temps à autre ,de démasquer la cruauté de l’homme et de révéler qu’il est un véritable prédateur pour tous les autres animaux auxquels il se juge supérieur . Avec L’homme et la couleuvre, le fabuliste montre clairement l’ingratitude de l’espèce humaine qui exploite, à son profit, les espèces animales.

Le mensonge a donc un statut ambivalent dans les fables : instrument de tromperie au service des méchants, il est aussi une arme pour les victimes ; Ainsi dans Le loup, le lion et le renard, le loup l’emploie pour se débarrasser de son rival le renard, et ce dernier l’emploie à son tour pour lui rendre la monnaie de sa pièce . Le renard  prétend qu’il connaît un remède miraculeux contre la vieillesse : une peau de loup écorché vif et le vieux roi l s’empresse alors de faire exécuter le loup afin de prendre sa peau . Le renard est d’ailleurs expert en mensonges de toutes sortes: sa parole flatte les puissants ; Maître dans l’art de la démagogie, il sait aussi se taire et ne pas répondre ; Ainsi dans La cour du Lion, il préfère mentir en prétextant en rhume qui le prive d’odorat, plutôt que de devoir se prononcer sur l’odeur qui règne au palais.

Le renard n’est pas le seul animal à savoir mentir : le chemin ment parfois pour sauver sa peau comme par exemple dans l loup te le chien maigre : pour échapper au oui, il lui fait croire que c’est préférable de le laisser engraisser avant de revenir le chercher ; Le loup le croit et lorsqu’il se présente pour réclamer sa proie, le chien lui envoie un dogue féroce qui le fait fuir . Le loup a été berné et  ici, la sympathie du lecteur va plutôt au menteur ; Ce qui peut sembler immoral mais il s’agit d’un mensonge « pour une bonne cause » ;

Le mensonge du cormoran dans Les poissons et le cormoran s’apparente-t- il à celui du chien ? Vieux, mal voyant et affamé , « lorsque le long âge eût glacé le pauvre animal » , l’oiseau qui ne peut plus pêcher , doit se résoudre à mentir et à tromper les poissons pour pouvoir se nourrir . Le fabuliste précise que « le besoin (est ) docteur en stratagème » ; Ce vers nous indique qu’il ment iniquement par nécessité et que c’est la situation critique dans laquelle il se trouve , une « disette extrême »  qui l’ a obligé à inventer une ruse mensongère pour attirer les poissons dans un endroit où ils seront à sa portée . Le mensonge a été une leçon pour les poissons: il ne faut pas croire leur prédateur ; La Fontaine enseigne ainsi , grâce au mensonge , plusieurs choses et notamment de ne pas nous fier à nos ennemis.

Dans Le chat et le rat , nous voyons que le rat a fait alliance avec son ennemi, le chat par nécessité car il était menacé par deux autres de ses prédateurs ; Une fois qu’il a libéré le chat de son piège, il ne se fie pas aux paroles trompeuses de ce dernier qui cherche sans doute à l’attirer pour le manger et il garde soigneusement ses distances . Les mensonges du chat sont rendus ici inopérants grâce à la prudence et à la sagesse du rat. Donc le mensonge ne triomphe pas toujours et c’est plutôt porteur d’espoir.

Et voici maintenant un exemple de conclusion avec deux ouvertures littéraires ..

En conclusion , choisir la forme mensongère de la fable, permet à La Fontaine de révéler de nombreuses vérités à ses contemporains . De plus, il n’hésite pas à introduire de nombreux mensonges au sein des histoires . On note ainsi la fréquence, la diversité et la variété des utilisations du mensonge dans les Fables ; Le mensonge n’est pas seulement réservé aux plus faibles ou aux victimes , il peut également être employé par ceux qui veulent donner une leçon à leurs pairs. Les fables nous enseignent , en outre, que l’art de la dissimulation , est parfois très utile . Le mensonge s’apparente parfois à la parole trompeuse et en cela, il rejoint la flatterie des courtisans .  Dans un monde où triomphent hypocrisie et la loi du plus fort, les mensonges habiles , redistribuent les cartes et compensent, en partie, pour certains, les inégalités de la société ou les injustices dont ils sont victimes. Mais pour d’autres, le mensonge est le piège dans lequel ils s’apprêtent à tomber ; parfois, il sert d’alibi  ou de substitut  à la force brutale.  Les prédateurs cachent  alors sous leurs paroles mensongères leur désir de rendre plus facile la capture d’une proie que tout désigne. Les moralistes classiques comme Pascal et La Rochefoucauld nous enseignent à nous défier des attraits du mensonge , parole flatteuse qui nous dit ce que nous voulons entendre . L’amour-propre devient alors un guide trompeur pour l’homme.Mais un roman comme La Princesse de Clèves nous révèle également  que la dissimulation règne au sein de la Cour : on se ment à soi-même en même temps qu’on cache ses véritables sentiments aux autres .  Il semblerait que le mensonge fasse partie du la nature humaine .