Avr
08

“Trash”, ce Misanthrope ? Est-ce ainsi que vous le vîtes ? Certains, à la sortie du théâtre, n’hésitaient pas à clamer leur émoi : “Trop érotique”, “vulgaire”, “c’est choquant, M’Dame, deux hommes qui s’embrasent”… etc… Réactions à la mesure de l’ambiance de la salle cet après-midi, au Nouveau Théâtre : une séance scolaire, une majorité de lycéens (pas tous très mûrs, semble-t-il), quelques collégiens, et beaucoup de bruit. Pour rien ? (Anissa lisant Shakespeare, elle reconnaîtra l’allusion).

Tiens, tiens, nos zélèves, qui regardent des films ultra-violents, ou bien jouent à des jeux vidéos guerriers, partagent un langage des moins châtiés, seraient “choqués” par une mise en scène somme toutes… réaliste ? Contemporaine. Vous êtes jeunes, et n’allez pas assez souvent au théâtre, sans doute : vous avez été surpris par l’audace des jeux de scène. Du spectacle : c’était du spectacle. Et un jeu d’acteurs repoussant les limites de la mise en scène. Du très bon théâtre, à mon sens, mais ce n’est là que mon avis sur cette représentation. Du Misanthrope, celui de Molière, on retrouve quelques vers, parsemés ici ou là, au gré des répliques. Et le thème : la place de l’homme dans une société du paraître, des faux-semblants, l’amour… Etre soi. Au milieu des autres. C’est ce que vous disait cette représentation : soyez vous-même, qui que vous soyez. D’ailleurs, qui êtes-vous ? Ce thème de l’identité sexuelle était très moderne, non ? Trop, peut-être : en tant que bons zélèves, vous vous attendiez à une mise en scène classique, en costumes, et au texte original. Pourtant, vous saviez qu’il s’agissait d’une adaptation…

Nos personnages étaient en quête d’eux-mêmes, en quête d’amour : celui de l’homme, celui de la femme, celui du public. En quête d’identité : qui sommes-nous, ou comment nous voit-on ? Altesse renonce à Celimane, malgré l’amour qu’elle lui porte, pour se retrouver elle-même. Elle reste fidèle à ses valeurs, à sa conception du monde : Celimane, prêt à tous les compromis, n’aimant peut-être que lui-même, reste seul. Et Sisi est à terre, clouée par une révélation : Célimane n’aime qu’Altesse. Vous n’avez pas vu, dans cette pièce, qu’on parlait d’amour ? Les mots vous choquent ? Le choix  de la violence des mots, de la nudité des corps (une prouesse d’acteurs, au théâtre…), vous a contrariés ? Il était question d’amour, de l’amour au XXIème siècle. Vous avez la pudeur de vos quinze ans, respectons-la. Mais entendez que ce spectacle nous ait, à nous, adultes, plu, et en rien choqués. La poésie était présente dans les vers de Molière comme dans le jeu de scène : c’est elle que nous avons vue, plus que les images des corps offerts, métaphores de l’amour.

Lenny a dit avoir aimé la pièce : je lui laisse la parole ! 😉