http://www.youtube.com/watch?v=2US0CfOFelA
Si le film de dimanche me propulsa au théâtre, celui de lundi soir fut un véritable concerto. Bercé par l’accent de l’incomparable Scott-Thomas, charmé par la diction de Luchini, interpellé par la douceur de la voix de ce nouvel acteur qui joue Claude, je fus bercé tout au long du film par les sons les plus suaves et plaisants à mes oreilles. Quant au film, à l’histoire, à la mise en scène, je fus étourdi par un flot d’émotion qui me submergea.
C’est décidé, je vais revoir ce film ( enfin, si les réunions sans fin au collège m’en laissent le temps) et je le place dans mon panthéon personnel, à côté des j’ai tué ma mère, single man et autre CRAZY .
Ozon, le réalisateur, nous livre ici une merveilleuse histoire de manipulations croisées. L’élève manipule le prof, qui croit se servir de l’élève, qui instrumentalise un ami qui etc. Le jeu des regards, des gestes, la maîtrise parfaite de la langue font de ce film une merveille d’orfèvrerie psychologique. Les sentiments, les troubles qu’ils suggèrent ou produisent, tant de choses sont abordées. Certes, on regrette la brièveté du film pour le coup, on eût souhaité qu’il se prolongea et dévoilà encore bien des secrets.
On entre dans la maison comme on entre dans le film, comme on entre dans les pensées des personnages, de manière discrète, presque timide, puis on prend ses aises, pour finir dépendant, en attente, nous aussi, nous sommes suspendus aux “à suivre” qui cadencent les rédactions de l’élève.
Il est impératif que quelques bonnes âmes se dévouent pour aller voir ce bijou, de la sorte, nous aurons l’occasion d’en débatte et j’aurai le plaisir de revivre ce film en en parlant.
Le film de ce soir est de Resnais, 90 ans. Il me fit penser par certains aspects à ce film de Rohmer, l’anglaise et le duc.
Ce sont en effet deux films qui franchissent assez joyeusement la frontière entre théâtre et cinéma. Ce soir, ce fut en effet véritablement du théâtre que j’eus l’occasion de voir et, disons-le, avec une délectation certaine. Il faut dire que Resnais sait s’entourer de ses acteurs fétiche, que j’affectionne moi aussi particulièrement, mais, un peu moins que ceux du film de demain, et que ces derniers ne déçoivent jamais. De plus, il s’agissait en grande partie, de la pièce Eurydice, d’Anouilh, là aussi une valeur sûre. L’ Antiquité et ses drames, ici Orphée et Eurydice, permet toujours des moments de retour sur soi et de réflexion, avec, ici, des textes brillants, tout aussi brillamment servis. Je doute que cela puisse jamais plaire aux zélèves, cet exercice de style, de yo-yo, est bien mené et réussi, mais je crains qu’il ne provoque qu’ennui et lassitude dans de jeunes esprits plus enclins au mouvement qu’à la réflexion. Cependant, que de choses auraient ici à puiser nos amoureux de 15 ans persuadés de redécouvrir toujours le sens de l’Amour et de ses ravages. Il demeure dans ces textes une forme d’éternité qui me plait toujours beaucoup, ils évoquent les sentiments les plus hauts dans ce qu’ils ont parfois de plus bas et font confiner l’amour de la vie aux ravages inéluctables de la mort. Toujours on se trouve sur ce chemin de crête entre eros et thanatos, toujours on se trouve confronté à ce que l’on croit si bien connaître, la vie, nos vies, pour se rendre compte qu’il y a malgré tout encore des choses à découvrir. Rien que pour cela, c’est un film à voir, car vous n’en avez encore rien vu.
C’est parce qu’une remarque d’un de mes anciens du Nord me marqua que je suis allé voir ce film. Selon cet ancien élève donc, monsieur Lazhar et moi nous ressemblerions. Le film est beaucoup plus complexe que ne le laisse transparaître la bande annonce qui n’évoque que très discrètement 2 éléments essentiels, l’un qui concerne les élèves, l’autre monsieur Lazhar. Pour autant, que le héros et moi soyons comparés me convient. Il me semble qu’en effet nous avons des vues similaires sur l’éducation, certes, des vues assez dépassées, mais qui ont toujours à coeur le progrès humain et intellectuel.
Ce film est aussi l’occasion d’une réflexion sur une école que je qualifie d’aseptisée. J’avoue ne pas comprendre une société de laquelle on bannirait les marques émotionnelles, positives ou négatives. L’Homme, abrité par sa raison, serait donc pur esprit et serait le seul animal de la création à refuser tout geste de compassion, toute marque de sympathie face à la douleur de la séparation, tout signe d’énervement. Même moi je ne tombe pas dans cet écueil intellectuel.
Merci donc à monsieur Lazhar, un peu dépassé, un peu perdu, un peu à côté de la plaque, de continuer, tout simplement, à faire preuve d’humanité et d’écoute, afin de nous offrir une belle histoire, pétrie de bons sentiments, qui ne sera pas un grand film mais un moment de quiétude, de réflexion sur la mort expliquée aux petits, de douceur, tout simplement.
Détail, la directrice est jouée par une actrice québécoise que j’aime beaucoup et qui, en son temps, fut la mère de Zac, dans le film CRAZY.
Une fois n’est pas coutume, un film dont les zélèves ne pourront pas dire que c’est un film de vieux! Dans ce dernier film de Gondry, une sorte de huis clos, dans un bus aux Etats-Unis, plus précisément dans un quartier de la Grosse Pomme, le Bronx, quartier noir, de mauvaise réputation, le jour des grandes vacances.
Ces garçons et filles qui me semblent plus vieux que vous affichent leur quotidien, avec leurs soucis d’ado, leur vulgarité, leur irrespect, leur violence, leurs fragilités, leurs faiblesses leurs complexes etc. C’est donc une étude du microcosme ado, dans un endroit et un temps bien spécifique, qui permet de dresser une typologie.
Je ne suis pas sorti enthousiasmé, je ne m’attendais pas à l’être, mais ce fut très intéressant, très enrichissant. Surprenant aussi, de voir par exemple que l’homosexualité puisse s’afficher dans de tels endroits sans déclencher de haine, je ne sais si cela est réaliste ou bien l’expression d’un idéal fantasmé, mais ce fut pour moi un des moments les plus surprenants du film. Car pour le reste, il faut bien avouer que l’on trouve de grandes similitudes entre les deux rives de l’Atlantique.
J’eus aimé un regard de jeune sur ce film, il y en avait dans la salle, 3 je crois, mais aucun que je ne pouvais interroger sans risquer de passer pour un dangereux névropathe! Avis donc aux zélèves, afin qu’ils comblent mon désir de voir un autre regard que le mien se porter sur les films à l’affiche.
Il va de soi que les parents des zélèves sont aussi priés de donner leur avis, si, j’insiste, vos enfants ont cafté, on sait que vous allez au ciné!
Ce cheval noir se montre, dès l’affiche, ou bien les premières mesures de la bande annonce, de rose flamboyant. De là à en faire un film pour notre cuisinière du Torchon ou pour quelques Pink Paillettes égarées, je ne sais.
Ce film me fit penser à Big Fish. Je n’ai pas aimé Big Fish.
Le thème, attrayant, un adulte ado attardé rencontrant une dépressive, est vu de manière surréaliste à travers les rêves du héros. Si ces derniers sont amusants et intéressants, ce sont eux qui portent l’essentiel de la réflexion, il n’en demeure pas moins qu’ils font perdre à l’ensemble du film sa lisibilité.
Il y a donc de vrais éléments de réflexion, qui ont une véritable valeur interrogative, mais tout cela est noyé sous l’irrationnel. Sentiment d’inachevé, voire, de gâché.
Lorsque, comme moi, on arrive à l’automne de sa vie, sans même avoir vu que le printemps, puis l’été, se profilaient et défilaient, vous laissant simple spectateur de votre existence, passée à contempler ou scruter celles des autres, usant et abusant de cette mémoire qui, telle un don attribué par quelque bonne fée au dessus de votre berceau, vous semblait devoir être vôtre ad vitam aeternam, un film comme celui de ce soir, vu au terme d’une journée rendue mélancolique par les prémices d’un automne astronomique à peine sonné, ne pouvait que m’ interpeller, à plus d’un titre.
Le thème général du film est celui de l’euthanasie. Pour des raisons personnelles, je suis contre. Intellectuellement, je comprends parfaitement les motivations de ceux qui peuvent y recourir, comme l’héroïne, qui, par bien des aspects, me fit penser à une personne qui m’était très chère et qui souffrait des mêmes symptômes, qu’elle endura jusqu’à ce terme, qu’ici, Yvette, ne veut pas avoir à aborder.
Il y a beaucoup à étudier dans ce film, une histoire d’amour entre quadragénaires, une histoire d’amitié entre septuagénaires, la difficile relation mère/fils, le caractère des deux héros, Yvette et Alain, son fils, deux êtres de granit. Ce que mon coeur et mon esprit me poussent, ce soir, à mettre en avant, c’est le comportement de la mère vis-à-vis d’elle même et face à la mort. Yvette est rigide bien avant d’être morte. Peut-être même est-elle un peu morte, avant que la maladie ne l’achève. Elle m’interrogea profondément sur le sens que nous pouvons ou devrions donner à nos vies respectives.
Consciente de sa maladie, de la fin inéluctable et proche qui est la siennes, Yvette ne laisse rien transparaître, la maladie le lui permet: pas de signes visibles, tout au plus quelques accès de faiblesse, aisément dissimulés par cette femme qui semble ne pas avoir eu une vie des plus agréables. Mais voilà, elle est de cette génération où l’on endure stoïquement, de ces femmes de devoir qui font et sont ce qu’elles doivent avant que de penser à elles. Tout doit être “comme il faut”, aussi, la maison est-elle propre, aussi est-elle parfaite voisine. Fut-elle bonne mère? Je vous laisse le découvrir.
Il y a quelque chose de royal dans cette femme qui semble régner hautainement sur sa vie, qui refuse la douleur, mais qui souffre et, parfois, en silence, en secret, pleure. La maladie ne saurait lui imposer la déchéance, elle choisira l’heure de sa mort. Elle veut, jusqu’au dernier moment, tout contrôler, ou en avoir l’illusion, que peut-on contrôler dans nos vies? Du tréfonds de la solitude abyssale qui est la siennes elle ne trouve personne vers qui crier, pas plus Dieu qu’ Homme, puisqu’elle est dramatiquement seule. Mais, seule, elle a cette phrase au milieu du film, qui éclaire, si elle ne justifie, ses actes, s’exprimant au sujet de son désir d’en finir avec la vie elle dit à son fils: ” au moins ça fait une chose que j’ai décidée”. Désespérante lucidité. Retour bref, laconique, intensément dramatique et réflexif sur toute une vie.
Royal, vous-dis-je que cette femme, si simple, qui préserve les apparences, sa rigueur, jusqu’au moment ultime, aussi bien que Louis XIV ou Richelieu sur leurs lits de mort, aussi bien que la grand-mère de brasse-bouillon dans vipère au poing, aussi bien que ces myriades d’anonymes de tous âges, de tous rangs qui, par amour, crurent qu’il fallait dissimuler qu’ils aimaient. On fait parfois tant de choses de travers en voulant bien faire. On sait si mal se comporter envers les autres. On se comporte si mal envers soi. Pourtant, au milieu de ces hivers de nos vies, parvenus au terme de nos fugaces et douloureuses existences, je demeure persuadé que nous saurons nous retourner et y retrouver quelques heures de printemps. Ce seront celles où nous aurons su aimer et nous laisser aimer.
Je ne retrouve plus mon exemplaire du Petit Prince, mais, de tête, je voudrais terminer ici avec une citation de la Rose, qui, ce me semble, illustre parfaitement le film et la relation mère/fils: “adieu et tâche d’être heureux, on est tellement bête à vouloir cacher tous ses sentiments, voilà que tu pars, j’aurais dû te dire, depuis si longtemps, que je t’aime tant”.
Dans la mesure où l’ensemble des zélèves de media furent informés vendredi passé de mes névroses habituelles, il faut ici, afin que mon choix de film soit éclairé, présenter une de mes grandes passions: la réflexion sur le métier d’enseignant, dans un sens large.
Ce film présente la relation qui se noue entre Terri, ado américain assez classique (en dépit d’un visage et d’une coupe de cheveux qui font de lui un Dorian Gray contemporain), et un de ses professeurs, à mi-chemin entre proviseur et CPE. Ce dernier veille plus particulièrement sur tout ce que son établissement peut compter d’éclopés divers, à tel point que dans un premier temsp Terri se sent mis au rang des “monstres” de son établissement. Il n’en est rien, tout cela est simplement lié au fait que son professeur eut à endurer une scolarité difficile et que, de la sorte, il tente d’éviter aux nouvelles générations ce qu’il eut lui même à supporter. Il y a de la part de l’adulte une forme de transfert, de règlement de compte aussi avec le système éducatif. Tout cela dans une période difficile pour Terri, ah, le complexe du homard cher à Françoise Dolto, et un contexte qui l’est tout autant: la prise en charge de son oncle malade, alors que Terri n’a pas d’autre famille que lui.
Pas de pathos dans ce film, de bons sentiments qui peuvent parfois faire craindre de tomber dans le mièvre, mais le film évite. Il aurait aussi pu éviter deux scènes qui mettent en avant une forme de découverte de la sexualité, non essentielles à l’entendement de l’histoire, même s’ il est vrai que cela fait aussi partie de ce qui peut troubler et interroger les adolescents à cet âge.
Je retiens du film la bonne volonté évidente de tous les héros, englués pourtant dans ces vies au long desquelles il font tant d’erreurs, adultes en premier. Comme ils est dit à un moment “je fais des conneries, car tout le monde en fait, mais cela ne m’empêche pas de toujours tenter de faire de mon mieux”.
Il me semble, mais tout le monde le sait, que c’est essentiel. Nous commettons tous des erreurs, de pleine bonne foi qui plus est. Nos erreurs ne font pas de nous des monstres, nous valons plus que nos actes, mais le regard des autres doit aussi nous aider à surmonter nos culpabilités face auxdites erreurs, cela, quel que soit l’âge de la vie.
A DMI RA BLE!
Ce soir, pris d’une soudaine inspiration et bien que fort peu renseigné sur ce film, sorti du matin dans les salles, je me suis rendu au ciné A, intrigué par le titre, par le thème et la vision qui devait en être proposée, longtemps après que Coppola eut traité le même sujet.
Par les hasards de l’impossible, Camille, 40 ans, se retrouve revivre ses 16 ans, sans avoir perdu aucun de ses souvenirs. Vous voyez déjà pourquoi j’ai pu aimer ce film, pourquoi, une fois de plus, ma névrose temporelle fut titillée. Ici ce n’est pas tant le fait de rajeunir qui m’a parlé que la possibilité de revivre sa vie en sachant ce qui va se passer. Peut-on souhaiter cela? A première vue, il y aurait là quelque chose d’agréable, mais…
Savoir quel jour et à quelle heure nos parents vont mourir, ne rien pouvoir faire pour l’empêcher. Peut-on simplement vivre avec cette idée en tête? Certes, il existerait pour nous la possibilité de changer, ou du moins de tenter de changer certains points de déroulement de notre existence. En effet, si j’ai aimé une personne une première fois, peut-on s’interdire de l’aimer une seconde fois, sous prétexte que l’on saurait que cette histoire est condamnée, dans 10, 15, 25 ans à l’échec? Tout cela renvoie à quelque chose de bien plus profond que le film aborde, trop rapidement, peut-être, la question de savoir si nous sommes tout simplement prêts à vivre.
Vivre. Qu’est-ce?
A un moment un des personnages, l’horloger, est-ce un hasard, vraisemblablement ancien alcoolique, cite-t-il la phrase essentielle des cures de désintoxication (qui serait initialement d’ailleurs de Marc-Aurèle, empereur romain du IIème siècle) :
donnez moi le courage de changer les choses que je peux changer, la sagesse d’accepter les choses que je ne peux pas changer, le discernement afin de faire la différence entre les deux.
N’est ce pas tout simplement une phrase à méditer et à tenter de vivre?
Enfin, il semble que la merveilleuse Barbara et ses chansons ne cessent de me poursuivre, ces derniers temps, accompagnées d’ une foule de souvenirs et de visages, auxquels je ne cesse de penser. Ici, deux des héros se choisissent, dans une des scènes qui met aussi en avant une réflexion sur l’amour et les frontières, ou limites, de ce dernier, une chanson, qui est celle mise à la fin. On y trouve cette phrase, “dis au moins le sais tu que tout le temps qui passe ne se rattrape guère”. Ici, naturellement, la mémoire se trouve submergée, par les références à Proust, à Ronsard, à tant d’autres qui nous mirent en garde face au fait que vivre, c’est ici et maintenant et surtout pas ni hier, ni demain.
Ce film, merveilleux appel à la vie, sublime appel à l’amour, touche à l’essentiel. Il est bouleversant car il révèle toutes nos peurs, nos angoisses, nos attentes face au temps et à l’amour. Il est d’une admirable richesse que je ne laisse pas ici soupçonner, faites-moi la grâce de me le pardonner et de ne pas vous priver d’aller le voir.
Après l’avoir vu, deux solutions: sombrer dans la dépression face à l’inéluctable de nos vies: la mort, ou bien, regonflés à bloc, repartir, vers la Vie, afin de la vivre et de ne pas simplement se contenter d’être spectateurs de nos existences. Il y aura toujours autant d’ennuis autour de nous, mais, changer de point de vue, parfois, cela change tout. Soyez rassurés, vous ne manquerez pas de choisir la seconde solution.
Pour les foules qui suivent mes élucubrations et qui ont le courage de lire mes modestes contributions au génialissime Torchon, personne ne sera étonné du fait que je me sois rendu, en ce premier dimanche post-rentrée, en mon cinéma favori, afin d’y retrouver, à la fois, des acteurs que j’aime et des thèmes qui me touchent. Bacri, Scott-Thomas, Rich, pour les premiers, l’amour, les relations familiales, pour les seconds.
Alors que je regardai le générique de fin, il m’est venu à l’esprit que ce film était comme un tableau de Seurat, un tableau pointilliste. Il s’agit de juxtaposer de multiples petites touches de couleur, très proches les une des autres, mais toujours séparées par le blanc de la toile. De près, de trop près, cela ne donne rien, de loin, tout se révèle. Je rentrai chez moi, réfléchissant à cela, par les rues calmes d’un Châtellerault assoupi sous la torpeur vespérale, se préparant à l’obscurité de la nuit, de ces nuits de dimanche qui préfigurent les lundis de travail et laissent, parfois, un goût de nostalgie, d’inassouvi, écoutant les vols de pigeons passer au dessus de ma tête, lorsque me revint aussi en tête cette citation de Forest Gump “maman me disait toujours que la vie c’est comme une boîte de chocolat: on ne sait jamais sur quoi on va tomber”.
Le film de ce soir est à la conjonction de ces deux images. Tous les personnages jouent fort bien leur partition, individuellement, l’effet rendu, collectivement, est parfait. De ces pages de vies se dégagent quelques lignes écrites en gras, qui sont autant de magnifiques citations sur lesquelles on peut réfléchir: “je t’aime mais je ne coucherai pas avec toi”, “au milieu de nul part cela me va très bien”, “méditer c’est le contraire de rêver”, “je n’ai pas cette minute à te consacrer” etc.
Le film, avec ses musiques guillerettes qui accompagnent des errances méditatives sombres, avec ses touches d’humour qui enrobent des sujets humains, personnels, amoureux, fort graves, comme autant de papiers multicolores peuvent dissimuler des caramels durs, avec ces personnages aux formes rondes, aux caractères anguleux, est une merveilleuse boîte de chocolats. Les trois héros adultes me firent en effet penser à ces chocolats aux formes géométriques, recouverts d’une ganache de chocolat noir, durs, luisants, parfois un peu amers, qui renferment un coeur de praliné, fondant, non exempt de quelques éclats de noisette, durs, qui, parfois, se logent entrent les dents et agacent, tant que l’on ne les a pas délogés.
Tous les trois, ils sont en apparence si lisses dans leurs existences si brillantes de réussite artistique, culturelle, politique. Ils en paraissent durs, ils le sont, avec leurs proches, il y a même parfois une inhumaine froideur dans les relations familiales. Pourtant, ce sont des coeurs tendres, prêts à s’émouvoir, à s’enflammer, contre toute attente, contre toute convenance, mais avec tant de profondeur, ou de légerté, donc d’humanité, toujours, qu’ils n’en émeuvent que plus.
Au final, ces vies si différentes, si colorés, si inattendues, rassemblées, juxtaposées, contre toute logique, en apparence, ici, au sein de ce film, c’est tout simplement la vie, nos vies. Et cette conjonction, ce rassemblement des plus grandes improbabilités, de goûts, de saveurs, de textures si différentes, c’est bel et bien une merveilleuse boîte de chocolats que l’on peut, en 1h40, dévorer, sans aucune crainte d’indigestion et dont je reprendrai bien avec plaisir.
Qu’il est agréable de se faire submerger, de manière inattendue et contradictoire, par un flot d’émotions, tel que ce film en déversa sur la salle des 400 coups cet après-midi.
Admirable travail, plein de sensibilité, d’humour, de gravité, servi par des acteurs de tous âges absolument époustouflants. J’ai adoré. Naturellement, lorsqu’il y a une réflexion sur la mort, je suis enthousiasmé et ici, voir que cette enfant pouvait avoir des craintes et des espérances sur la mort, qu’elle découvre, tout comme le vieillard que je suis, j’ai beaucoup aimé. Ensuite, au risque de la jouer psychanalyse, comme dans certains épisodes du film, en plus de la mort, elle découvre l’amore, eros et thanatos, merci Freud, sont liés, tout le monde le sait, donc disais-je, elle découvre l’amour, alors que les adultes autour d’elle s’interrogent, autrement, sur les mêmes thèmes. En plus, elle voit surgir l’amitié, l’amitié dans toute sa puissance libératrice, et Dieu sait que Rachel a besoin de se libérer, de la culpabilité, de la peur, de ce qu’elle sait ou ne sait pas sur Ochvizt (Auschwitz) etc.
Voir abordés ici tous ces thèmes intimement liés, ainsi que je tentai de le faire cet été lors des mots du vendredi, m’a fait à nouveau voir à quel point notre Torchon est à la pointe de l’actualité et de l’information!
J’ajoute que la bande son, des années 70/80 me plut beaucoup, plus que celle de Laurence anyways, mais, comme j’eus l’occasion d’en discuter longuement devant un café, hier, avec un ancien de GS, désormais à l’orée de sa vingtaine, c’est tout simplement lié au fait que cela résonne en moi comme un vestige de l’enfance, aussi, expliquant que lui ait adoré la bande son de Laurence anyways.
D’ailleurs, la dernière chanson de la bande son est celle mise ici, cette merveilleuse interprétation de la grande Barbara, qui me fit me rendre compte à quel point le fauteuil voisin du mien était vide. C’est d’ailleurs le seul reproche, purement subjectif, que je puis faire à ce film qui me porta si bien et si haut tout au long de la projection: une fin un peu mélancolique. Curieux, surtout lorsque l’on sait à quel point la mélancolie me comble d’ordinaire, mais, ce jour, je me sentais décidé d’être peu mélancolique. Cependant, comme ce que chante Barbara est vrai, comme c’est tristement vrai, si ce n’est que contrairement à elle, je fais tout pour rester au temps de mon enfance, quitte à en supporter les funestes conséquences évoquées. Passons.
Fort heureusement et ainsi que le signalait madame de la Vieille Rédaction, sorti, j’eus le plaisir de pouvoir m’asseoir en ville sur un banc afin de discuter avec deux jeunes lycéennes passées entre nos murs, histoire d’oublier un instant que mon enfance est loin, car, voyez-vous, “toutes les grandes personnes ont d’abord été des enfants, mais très peu s’en souviennent…” ce que vous redira notre pièce de théâtre de cette année, en représentation le 14 juin 2013!
(cliquer sur le petit sigle youtube en bas à droite pour accéder à l’image et au son)
http://www.youtube.com/watch?v=LrFfXPATUzw