La liberté ne serait-elle qu’une illusion, un rêve? Fichtre, voilà une question digne de celle que le chat posait à cette pauvre Alice, de l’autre côté du miroir. Tout découle de cette cruciale question: “choisissons-nous véritablement ce que nous faisons? Tout à trac le jeune Lenny nous répond que oui, ainsi, le naïf, reconnait devant ses professeurs qu’après être rentré chez lui, après avoir fait ses devoirs, ouf, il regardera la télévision. Cependant, ce goût pour la télévision, pour telle ou telle couleur, tel ou tel vêtement, ne serait-il pas plutôt le résultat d’une initiation, d’une influence qui nous viendrait, à notre insue, de ce qui nous fut transmis par nos parents? Nous penserions ainsi aimer telle ou telle chose, vouloir agir ainsi ou comme cela, nous croyant seuls maîtres de nos destins, capitaines de nos âmes, et nous ne serions in fine que les fruits d’un déterminisme, représentants de l’influence durable de nos milieux respectifs. Il faut en effet reconnaître que, par exemple, lors de l’adolescence, on souhaite s’affranchir des règles et de l’autorité des parents, on en vient à souhaiter, à vivre, une rupture avec eux. Mais, si je choisis, demain, de devenir “gothique”, sachant que cela horripilera ma mère, qui ne jure que par le rose à paillettes, je vais devoir me soumettre aux règles vestimentaires du mouvement gothique, ma quête de liberté n’en devient donc que plus illusoire, puisque pour tenter de me libérer je dois suivre des règles. Déception.
C’est alors que nous entreprîmes la lecture d’un texte de Spinoza (1632-1677), philosophe extrêmement marquant, capable par sa pensée de pousser à une révision de toute la philosophie, rien de moins. Pour lui, nous sommes donc déterminés, nous avons subi un mouvement initial, comme si nous étions une pierre jetée au loin par une main inconnue, qui nous insuffle, voire nous impose, une manière de faire, de vivre. Il s’oppose donc à Rousseau qui pense, lui, que l’Homme, à la différence de l’animal, n’est pas soumis à son instinct, mais réfléchit et opère des choix conscients.
Fuse alors cette nouvelle et essentielle question, pour tous les individus qui philosophent ensemble salle 305, posée par le pertinent Vincent: “êtes-vous rousseauiste ou spinoziste?”
Lenny est foncièrement rousseauiste, Alexandre pencherait plus pour Spinoza, Vincent lui est totalement spinoziste. Cependant, est soulevé le problème, à l’instar de ce que fit Sartre, de savoir si, étant déterminés, nous nous trouvons encore responsables de nos actes?! Si je suis déterminé, par mon milieu, mon éducation, ma religion etc, on peut dire que je ne suis pas responsable de ce que je fais, déterminé que je suis, il est impossible que j’agisse autrement que de la manière dont j’agis. Imaginons alors un criminel usant de cet argument pour sa défense… d’où le fait que dans certains cas des psychiatres soient précisément amenés à déterminer si tel ou tel suspect se trouvait maître de ses facultés et capable de décider, s’il peut être considéré responsable de ses actes.
Pour conclure, il est très nettement apparu qu’être totalement spinoziste ou rousseauiste conduisait à une forme de radicalisme qui n’est pas une bonne chose, il nous faudrait donc parvenir, en nos vies, à faire cohabiter, harmonieusement, les préceptes de ces deux grands penseurs, vaste programme, oeuvre d’une vie.