Mar
30
Classé dans (Le mot du vendredi) par la Vieille Garde le 30-03-2012

D’après Alcofribas Nasier, plus connu sous le nomde François Rabelais, le rire serait le propre de l’Homme, il reprend en cela une idée émise bien avant lui, par Aristote. Pourtant, à en croire un des personnages du Nom de la Rose, d’Umberto Eco, le rire serait au contraire un trait de bestialité puisqu’une perte de contrôle de soi provoquant une hideuse déformation du visage. Nonobstant une apparence parfois revêche, je le concède et confesse volontiers, je penche plus pour la vision aristotélicienne de la chose.

Allant encore plus loin j’accorde même au rire une valeur éducative au sens large, me faisant ainsi disciple de Molière et me retrouvant en sa devise: castigat ridendo mores, laquelle, pense-t-on pourrait elle aussi venir de l’Antiquité à travers une remarque d’Horace, mais peu importe. Il me semble en effet possible de chatier les moeurs en usant du rire, à la condition sine qua non que l’on sache avant tout rire de soi, naturellement, sans quoi, le rire n’est plus produit de l’humour, du jeu de mots, du calembour mais uniquement d’une gratuite méchanceté. Le rire devient alors moquerie et peut humilier, blesser, dégrader. Cela n’est pas acceptable.

Cependant, le rire est naturellement une arme, je ne parle pas ici des éclats de rire, lesquels n’ont aucune chance de vous couper, bien que certains puissent altérer votre capacité auditive en raison du fort volume qui peut être le leur. Le rire est une arme car il désarme. Comment en vouloir à quelqu’un qui rit de bon coeur, comment haïr un individu qui vous fait rire? Allons plus loin, il faut cultiver le rire, de sérieuses études scientifiques, il faut toujours qualifier les études de sérieuses, cela comble les scientifiques, prouvent que rire apporte autant qu’un steak, oui, mais quelle est la nature de l’apport? Je préfère donc le cultiver à la manière de Beaumarchais et de son Figaro, je m’empresse de rire de tout de crainte d’avoir à en pleurer. Mais voici que telles des  hallebardes, je sens pleuvoir sur moi  les remarques: on ne peut pas rire de tout! Ne peut-on pas plutôt penser, comme Pierre Desproges, qu’on ne peut pas rire avec tout le monde et qu’il faut savoir réserver certains traits d’humour à certaines catégories de personnes? Cela expliquerait l’existence de ce fameux humour anglais, si…. anglais, auquel le film Ridicule, en sa scène finale, fait admirablement référence.

Quoi qu’il en soit et afin de créer le consensus de manière indubitable autour de mes assertions, je pense pouvoir dire que tout le monde aime rire, que cela nous procure toujours beaucoup de plaisir, remercions au passage notre endorphine qui se libère lors de ces moments, que c’est un élément essentiel de communication non-verbale tout autant que de cohésion sociale et qu’en dehors du Schtroumpf grognon, je ne connais personne qui n’aime  rire.

Quant au lien qui peut exister, au terme de mon propos, avec le mot mit en exergue à son début, sachez que les zygomatiques sont les muscles qui nous permettent de rire, tout simplement.

Ainsi, ô lecteur, s’achève, sur le sujet bien sérieux qu’est le rire, ce tour d’horizon des mots du vendredi. Retiens tes larmes, calme ton désespoir, tel le phénix cette rubrique ne disparaît ce jour que pour mieux revenir la semaine prochaine, toute autre et cependant semblable à elle-même, pour ton plus grand bonheur, ta plus grande détente, ta plus grande culture. 

(je m’autorise à donner cette ultime précision afin d’éviter que des millions de mails, déferlant de tous les points de la planète, ne parviennent à la rédaction du Torchon, tous plus désespérés les uns que les autres, à la crainte de voir disparaître leur rubrique préférée.)