Avec cette citation de Joseph Joubert, contemporain de Chateaubriand, que ce dernier appréciait, ce qui est à signaler, lorsqu’on connaît le caractère du vicomte François-René, je trouve la transition entre le thème précédent et ce qui, la semaine prochaine, mettra un terme à notre repos estival à tous, à la rubrique citation des vacances et permettra un retour du mot du vendredi, nouvelle version.
Nous avons eu l’occasion d’amorcer une réflexion, empreinte de nostalgie, sur l’amour et l’amitié. Bien souvent furent mises en avant des oppositions et, tout aussi souvent, des points communs. Il paraît évident que, lorsque les points communs existèrent, ce fut lorsque l’amour n’était pas pensé comme passion. Ainsi, un amour existant depuis un certain temps cesse-t-il, d’ordinaire, d’être passion pour devenir tendresse, ce qui ne saurait en aucun cas altérer le sentiment, tout au plus, comme pour le vieillissement du corps faut-il voir là une évolution naturelle qu’il faut accepter et savoir aimer. Cela ne fait que révéler un paradoxe de plus, à l’égard du comportement amoureux, proche de ce qu’évoque Pascal lorsqu’il affirme qu’ “ainsi s’écoule toute la vie. On cherche le repos en combattant quelques obstacles ; et si on les a surmontés, le repos devient insupportable”.
Eternelle insatisfaction de l’être donc, qui ne cesse de courir après ce qu’il n’a pas et s’en ennuie sitôt trouvé. Il en est de même avec le sentiment amoureux, dans certains cas, mais nous nous approchons ici… dangereusement de ce que Choderlos de Laclos décrit dans ses magnifiques Liaisons dangereuses, à lire impérativement avant que de les voir en film. Notons au passage que l’amitié est exempte de ce dédain “post-obtention”. Lorsqu’on recherche une amitié, ce n’est jamais pour s’en détourner une fois que cette dernière est obtenue. Il n’y a pas ici d’ouverture à la duperie, et c’est heureux.
Doublement heureux car “le véritable bien se trouve dans le repos de la conscience”, nous dit Sénèque, et ce sage Grec avait mille fois raison. D’une manière populaire cela se traduit d’ordinaire en disant que l’on peut se regarder dans la glace le matin sans honte ni trouble au visage. Ce repos de la conscience est à rechercher par dessus tout, y compris, et surtout, dans les relations amoureuses, et plus encore à l’adolescence où, pour beaucoup, jouant Marivaux sans le savoir, la vie est pour eux Le jeu de l’amour et du hasard.
Faudrait il alors que, pour vivre en toute ataraxie, on découvre que “le repos de l’âme consiste à ne rien espérer” ainsi que le dit un proverbe oriental, ainsi qu’on le trouve écrit dans le captivant livre de Lenoir La promesse de l’ange? J’avoue que je fus surpris de lire cette phrase et de découvrir qu’il s’agissait d’un proverbe oriental car j’ai fait, depuis bien des années, cette devise mienne, dans le cadre de mes relations à autrui. Je n’envisage pas de réclamer des droits d’auteur mais suis frappé, une fois de plus, de constater qu’il peut exister une certaine universalité de pensée, surtout, je constate que je ferais donc, moi aussi, sans le savoir, preuve d’une certaine sagesse toute orientale.
Enfin, et car la rentrée est à notre porte, sachez, comme le disait le duc de Levis, que “rien n’assure mieux le repos du coeur que le travail de l’esprit”. Conseillons donc à toutes celles et à tous ceux qui désespéreront au cours des mois à venir, suite à quelque respectable amour de jeunesse déçu, de s’oublier, un temps au moins, dans un salvateur travail, le temps que le Temps fasse son oeuvre et que, garçon ou fille, vous puissiez repartir à l’assaut du monde et de l’Amour afin d’atteindre l’empyrée.