Nov
30

Qui aime bien taquine bien (selon Zinabidine) 😉

L’ado, ça me connaît : du lundi au vendredi, du lundi au vendredi, et du lundi au vendredi (après ça, qui oserait nous contester notre droit à 16 semaines de vacances ?) : donc, du lundi au vendredi, je pratique l’observation de l’ado.

Dans le cadre scolaire, la pire condition qui soit : l’ado n’est pas heureux d’être là. Il ne sourit pas  avant la récréation de dix heures. Avant dix heures, il végète : il termine sa nuit, commencée après une heure du matin et interrompue par la sonnerie du réveil parental et un petit déjeuner. Ah non, l’ado ne petit déjeune pas. les céréales, il les grignotte à 23 heures, devant son écran. L’ado est nictalope : il ne fait pas tomber de miettes sur le clavier !

L’ado est malheureux : du moins fait-il semblant d’en adopter les symptômes : assis, chauffé, nourri, il trouve encore le moyen de soupirer que “la vie, c’est esclavant” avant de re-sombrer sans sa léthargie coutumière. Soupir.

Donnez à l’ado une tâche : tentez l’expérience. Une tâche dure : inscrire dans l’agenda le travail à faire pour le lendemain. L’ado a des réflexes innés : “Quoi ? M’dame, on a déjà un DM en Histoire !”. Soupir. (tentez l’expérience en sixième : le sixième, qui n’en est qu’au stade de pré-adolescent, ne négogierait jamais un travail : le sixième obéit, applique, et avec le sourire.) Crayon (geste lent : ah oui, l’ado est agaçant…). Agenda. Echarpe : l’outil de travail essentiel dans la panoplie de l’ado. Soupir. (bis, ter) Pendant ce temps, la sonnerie a retenti, l’ado s’est envolé (le temps de dire au revoir à la classe : plus un élève) L’ado est capable de rapidité dans le sens descendant de l’escalier : pour descendre en récréation, il déploie des qualités insoupçonnées, faisant appel à des muscles qu’il n’avais pas sollicités à l’aller. Pour monter en cours, l’ado traîne des pieds, des jambes, des bras : la gravitation universelle l’attire irrémédiablement vers le bas : le rez-de-chaussée.

Au rez-de-chaussée, on peut échapper au cours : on peut passer par l’infirmerie…

Croit-on. Car l’ado est crédule.  Mais l’infirmière, cette adolescente repentie (comme le sont tous les adultes du collège) maîtrise à la perfection l’art de l’esquive dont elle sait déceler chez l’ado les signes avant-coureurs : bobo le ventre, bobo la tête, bobo le dos…

L’ado est un être jeune, en devenir, il doit être épuisant d’attendre d’être grand : la période de latence semble un calvaire. A les voir ainsi,  ils souffrent réellement. Soyons compréhensifs, ne parlons pas trop fort,  n’exigeons pas de travail personnel le week-end “Oh, bah non, M’Dame : on a déjà un DM en maths et c’est l’anniversaire d’Hugo. C’est abuser…”

L’ado n’a que ce mot à la bouche “abuser”.

Mais s’il n’existait pas, il faudrait l’inventer, car l’ado est touchant. Ne le dites à personne, mais dans notre jargon d’enseignants, on le dit “attachiant”.