Au retour de ma sortie du samedi à la bibliothèque, je suis perplexe.
La façade de l’ancien théâtre est restaurée, c’est une pure merveille, allez voir aussi les deux statues ajoutées dans les niches, ce sont des reproductions des statues de terre cuite qui se trouvaient là jusque dans les années 70. J’ai déjà une place réservée pour le premier spectacle, dans 1 an, peu importe ce qu’il sera, je n’irai que pour m’émerveiller des décors, des dorures, des velours, des lustres, afin de me sentir revivre en plein XIXè siècle. Je devrais donc être heureux.
Cependant, c’est aussi hier que s’achevaient 3 semaines de fouilles sur le site de l’ancien hôpital. On y découvrit des vestiges du XIIIè et d’autres du XVIIè, des fortifications. Tout cela fut relevé, photographié et est…détruit pour l’éternité, afin que le nouveau cinéma puisse s’élever, et même si j’aime le cinéma, j’ai un pincement à ce qui me tient lieu de coeur.
On ne peut conserver tout tout le temps. Ce théâtre restauré, que j’admire, fut construit dans une chapelle du XIIIè que j’eus assurément préféré voir demeurer intacte. Les belles demeures du XIXè que j’observe furent construites sur d’anciennes maisons du XVIIIè qui s’étaient érigées suite à la destructions de demeures de la Renaissance, lesquelles n’avaient pu voir le jour que par la destruction des maisons gothiques qui les précédaient etc.A chaque fois, je pense que j’aurais adoré voir ces demeures qui précédaient, mais cela reviendrait à vouloir définitivement figer une ville et le Temps. Impossible.
Je suis donc lucide, mais aussi perplexe. Entre les deux mon coeur ne cesse de balancer, je voudrais pouvoir tout conserver de notre patrimoine, cela est impossible, la Vie en décide autrement. Les Hommes, le Temps, les modes, tout cela fait que des choses sont, l’espace d’un temps, puis disparaissent, retournent au néant. Seule la mémoire, parfois des actions de préservation, le hasard aussi, tout simplement, font que des vestiges demeurent, il faut savoir s’en contenter.
Il me semble que je crains de n’être qu’un vestige. Je crains les disparitions, je redoute les fins. Fichtre, que tout cela est angoissant. Fort heureusement, les Archives départementales existent, lorsqu’on s’y trouve, on a le sentiment, illusoire, de pouvoir lutter contre les ravages du Temps en exhumant, pour un temps seulement, ce qui fut et disparut. Il y a dans tout cela quelque chose de cyclique profondément métaphysique, non? Ne peut-on ici tisser un lien avec des angoisses de nature existentielles et religieuses? Vite, un philosophe à la rescousse!