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Classé dans (Le mot du vendredi) par la Vieille Garde le 21-09-2012

Dans la famille Creuzé, je demande les cousins.

Les zélèves et autres lecteurs de notre Torchon national ne m’en voudront pas de me montrer, pour une fois, plus prolixe que d’ordinaire, mais, avec le C, je ne pouvais laisser passer l’occasion de placer ici quelques informations, recyclées de mes recherches sur cette auguste famille de Châtellerault. N’ayez cependant crainte, je vous épargnerai le pire et me contenterai d’évoquer 3 personnages à peu près contemporains, tous cousin, et qui eurent sur le plan local et national, un rôle.

Débutons avec Jacques-Antoine Creuzé de la Touche (1749-1800). Fils du capitaine-concierge de la ville de Châtellerault, c’est à dire celui qui avait les clefs de la ville, et lui même capitaine-concierge, cet avocat de formation, après avoir occupé divers postes, se retrouva Lieutenant général civil et criminel de la sénéchaussée de Châtellerault, c’est à dire le plus haut magistrat de cette unité administrative d’alors. Député de la ville, pour le Tiers-Etat, en 1789, Jacobin, donc à gauche, en faveur de la vente des biens d’Eglise, ayant voté le bannissement du roi en 1792, il fut membre en 1793 du Comité de Salut Public, le plus haut organe de décision nationale d’alors, rédigea la Constitution du Directoire, décida en 1796 de la création de la bibliothèque du Corps législatif. Après avoir été au conseil des Anciens, il entra à celui des Cinq cents, fut en faveur du coup d’Etat de Napoléon en Brumaire et entra au Sénat, avant de mourir, jeune. Parcours fulgurant d’un homme qui, religieusement, après avoir eu des ancêtres catholiques, puis protestants, était revenu au catholicisme, avant de s’essayer, sous la Révolution à la Théophilanthropie et d’être, peut-être, franc-maçon, alors que sa nièce, Sophie Creuzé-Dutems, simulait une grossesse pour ne pas se voir offrir le rôle de la déesse raison, lors des fêtes liées à ce nouveau culte.

 Qu’aurait-il pensé de nos débats tournant autour du religieux, lui qui, avant tout, voyait le bien de l’Homme?

Poursuivons avec Michel-Pascal Creuzé du Fresne (1736-1804) Officier de finances à Paris, puis à Saint-Domingue, où, comme d’autres habitants du Châtellerault d’alors, il possédait une plantation. Il en revint juste avant la Révolution et fut maire de Poitiers en 1791. En 1789, il fut aussi député aux Etats généraux, mais pour la noblesse. Ayant lui aussi voté le bannissement du roi en 1792, il fut membre de la commission des colonies durant de longues années.

Qu’aurait-il pensé de ces questions de nationalité qui, trop souvent, sont utilisées pour faire se lever les peuples les uns contre les autres?

Achevons avec le baron Augustin Creuzé de Lesser (1771-1839) Fils d’un payeur des rentes de l’Hôtel de ville, anobli par cette charge, il débuta en littérature dès 1796. Ami du 3è consul, Lebrun (le 1er étant Bonaparte), il servit de secrétaire d’ambassade à ce dernier lors de son séjour à Palerme, au royaume de Naples. Revenu en France, sa carrière politique de sous-préfet et de préfet le conduisit à Autun, en Charente, dans l’ Hérault  aussi, où il lui fallut lutter contre les étudiants en médecine toujours très agités. Il fut fait baron en 1818, sous la Restauration. Cependant, tout au long de ces années, il écrivit, il écrivit…: des comédies, des livrets d’opéra comique, et surtout, surtout, dès 1813, il se lance dans une littérature de style troubadour qui fait de lui le précurseur du mouvement romantique en France, rien de moins.

Qu’aurait-il pensé de nos querelles actuelles entre anciens et modernes de tous ordres, de ces oppositions estudiantines et des revendications de la jeunesse? Son cousin Creuzé de Lisle, inspecteur d’Académie  sous le premier Empire aurait peut-être mieux répondu?

Parvenus au terme de ces quelques éléments de biographie, vous conviendrez, je pense, que la ville de Châtellerault et le Poitou, n’ont pas à rougir de ces individus qui, tous trois, surent apporter leur pierre à la construction de l’édifice national et à la renommée de leur cité, bien que cette ingrate l’ait oublié désormais. Cela constitue donc une réponse à un de nos journalistes en herbe qui me demandait si Châtellerault était une ville connue, je voudrais ajouter qu’elle mériterait de l’être plus. A vous, ô chers zélèves, de poursuivre en suivant ces exemples et de vous illustrer, dans des domaines qu’il vous reste à choisir, afin d’inscrire votre nom et celui de votre ville dans les dictionnaires et au panthéon des gloires locales.

Mais avant tout, réfléchissez, interrogez-vous! Quels sont vos idéaux, quelles idées voulez-vous défendre, quels combats voulez-vous mener, pour qui, ou pour quoi, êtes vous prêts à prendre des risques? Qui ou qu’est ce qui vous tient le plus à coeur, que faut-il défendre contre tout et tous? C’est en sachant ce pour quoi l’on est prêt à mourir que l’on sait ce pour quoi l’on est prêt à vivre.