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Petite remarque insistante de notre très cher Melvin D, élève de 3ème, à la fin de la projection du très rude documentaire Nuit et Brouillard, vendredi après-midi (juste au moment de la digestion, avouons à la décharge de Melvin que l’instant était mal choisi…).

Ah, le perfide 😉 Melvin sait très exactement lancer sa flèche en plein talon d’Achille : non, en effet, a priori, en qualité de professeur de français, ce n’est absolument pas mon rôle, et j’en ai prévenu les zélèves. De la même façon, ils ont été prévenus de la dureté du documentaire.

Mais… Mais ces zélèves vont, lundi, rencontrer Ida Grinspan, rescapée d’Auschwitz, et seuls quelques-uns ont lu son autobiographie J’ai pas pleuré.  Et à la question “Que savez-vous de l’univers concentrationnaire ?”, je n’avais obtenu qu’un silence gêné. Le programme d’enseignement de l’Histoire de la Shoah s’étant réduit, année après année, à peau de chagrin, les connaissances des zélèves sur ce qu’étaient les conditions de survie ainsi que l’extermination des juifs et des tziganes sont… peu de chose.

Alors, accompagner une classe entendre Ida Grinspan, alors que les zélèves n’auraient pas conscience de ce que cette petite dame pétillante a traversé à leur âge ?

Non, il faut raconter, expliquer, présenter, et ne pas laisser croire que les images du camp de Birkenau sous le soleil d’avril, avec ses prairies verdoyantes et ses visiteurs et leurs lunettes de soleil reflètent ce lieu de mise à mort dont Ida va leur parler.

Nuit et Brouillard, ce sont des images insoutenables, qu’on explique, un documentaire dont on accompagne la projection : à votre âge, chers zélèves, nous nous le sommes nous aussi pris en plein visage : puis nous avons lu. Primo Levi. Jorge Semprun.  Elie Wiesel. Pour savoir plus. Pour savoir mieux.

Enfin, mon très cher collègue d’Histoire Mastorgio m’avait donné son aval en levant les yeux au ciel : si j’ai bien compris, à votre âge, il avait dû voir Nuit et Brouillard au moins trois fois déjà, à raison d’une fois par an. Autres temps, autres moeurs… O tempora, ô mores 😉