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Classé dans (C'est dangereux, une draisienne) par la Vieille Garde le 08-06-2016

A l’heure où l’on ne parle que de football, comme si cela pouvait avoir un intérêt quelconque, comme si ce sport pouvait avoir un intérêt, il me semble capital de parler d’une discipline olympique essentielle: le croquet.

J’ai en mémoire plusieurs boîtes de madeleines, et le croquet est rangé dans l’une de ces dernières. J’ai des souvenirs merveilleux de longues parties en plein air, en compagnie de la reine de coeur, naturellement, ou parfois simplement de mes cousins, sur pelouse ou sur terrain sablé. On entend encore beaucoup parler de croquet, enfin, quand on lit ou regarde Alice au pays des merveilles, sans quoi, il est exact que c’est plus, disons, confidentiel.

Cependant, je me précipite, avant d’exposer la quintessence  de cet art, sur la confusion que vos jeunes esprits ne manquent pas de faire entre croquet et cricket. Je ne me soucie pas de possibles confusions dans les vieux esprits puisque je n’évoque ici que des souvenirs antédiluviens, de ce fait, la mémoire de nos lecteurs âgés, fussent-ils en pleine dégénérescence cérébrale, retrouvera automatiquement leurs souvenirs de jeunesse. Afin de me montrer concis et néanmoins précis, je me contenterai de dire que le croquet et le cricket n’ont tout simplement rien de commun. Dans le premier, tout est question de dignité, de mesure, de retenue, de force et de violence policée et contenue, d’esthétisme, n’ayons pas peur de le dire. Dans le second, eh bien, étant de mauvaise foi, je dirai qu’il n’y a rien de tout cela.

Passons à une rapide histoire du croquet et à son côté indéniablement visionnaire. Il semblerait qu’il soit dérivé d’un jeu pratiqué dans les campagnes françaises du Moyen-âge, qui, modifié par les uns et les autres, donna le billard cher à Louis XIV, le golf et le croquet à proprement parler chez les anglo-saxons qui réalisaient ici le tour de passe-passe qu’ils reproduiraient avec le jeu de paume devenu tennis. Avouez que la chose est cocasse.

Ce jeu, désormais pratiqué surtout en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis et au Canada, eut son heure de gloire en France entre 1850 et 1940, ce qui explique que j’ai pu y jouer enfant, voire adolescent, ayant toujours été un grand enfant. Le croquet fut, j’y reviens, en 1900, discipline aux jeux olympiques d’été et les Français raflèrent TOUTES les médailles, y compris celles de la catégorie féminine puisque ce fut le premier sport féminin aux JO. Ah, on rigole moins n’est ce pas! Vous comprenez pourquoi je milite au sein du CPLRDCAJO (comite pour la réintroduction du croquet aux Jeux Olympiques) puisque la France a beaucoup plus de chances de gagner au croquet qu’à l’euro de football.

La pratique en est simple: à l’aide d’un maillet en bois on fait passer sous des arceaux une boule en bois, en buis normalement, pour aller d’une extrémité du terrain à l’autre. De nombreuses variantes existent, mais, le plus amusant est lorsqu’on “croque” une boule: il s’agit de mettre une boule sous son pied, de poser une autre boule à côté et de donner un violent coup dans celle sous le pied afin d’envoyer l’autre hors du terrain de jeu. Attention, il faut savoir bien viser si l’on tient aux os de son pied.

Quoi qu’il en soit, je joins ici deux images qui illustrent parfaitement la douceur de ce jeu. Maintenant, fermez les yeux, imaginez.. un peu plus loin, la table ronde, une nappe damassée, un pichet de sirop d’orgeat, quelques madeleines, une abeille qui bourdonne, entre les verres en cristal et les assiettes en Limoges, vous sortez votre mouchoir en lin pour vous éponger le front en cette belle journée de juillet, au loin, sous le kiosque, la fanfare joue une valse dont quelques mesures vous parviennent, perçues au travers des éclats de rire, ô temps suspends ton vol, …vous êtes au paradis…

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