Avec ce film il me semble voir d’un jour nouveau la cornélienne citation se référant à “l’obscure clarté qui tombe des étoiles”.
Vous savez que j’apprécie peu Duris, sachez désormais que j’ai beaucoup d’affection pour Yolande Moreau, que je découvrai, dans le Nord, avec son merveilleux “quand la mer monte”, il y a de cela…7 ans. Cette femme qui semble à certains si peu expressive ou dynamique parvient, pour moi, à faire passer bien des choses à travers, il est vrai, une économie de mots et de gestes. Martin Provost la dirige ici une seconde fois, après le génial “Séraphine” et c’est à nouveau une réussite. Il y a quelque chose de profondément grec dans ce jeu, nous sommes dans une tragédie, cela aide, mais il y a quelque chose d’Electre dans cette femme, au sens étymologique, la lumineuse, alors que tout, y compris la manière de filmer est assez obscure.
Cette femme battue, si longtemps soumise, qui commet l’irréparable avec son mari, qui tente de réparer avec son fils, découvre la cruauté chez les uns et les autres et en premier chez ce personnage de journaliste que je ne puis m’empêcher de détester. Un peu comme si son désir de changement et de liberté dérangeait tous ceux habitués à la voir souffrir en silence et qui préservaient ainsi leur confort et leurs consciences.
Le fait qu’elle suscite d’étranges appuis en sa faveur ne peut que me réconforter dans l’espérance en la persistance de la générosité et de l’altruisme chez certains de nos contemporains. Surtout, je retiens une leçon de courage, née du désespoir, d’une forme de folie, de la lassitude, qui peut le dire? Changer, être quelqu’un d’autre, tout recommencer, nous en rêvons souvent. Parfois nous le tentons. Est-ce la bonne solution? Faut-il se résigner au contraire à sa condition?
Autant de questions qui n’ont pas de réponse et c’est très bien ainsi. A nous, dans chacune de nos existences, de trouver et d’apporter nos solutions en nous rendant pleinement “maîtres de (nos) destins, et capitaine de( nos) âme”, comme on le dit dans Invictus.