Les badauds badent-ils? Existerait-il un lien entre les deux mots? Oui, manifestement puisque, en Poitou, bader se dit des petits oiseaux qui réclament leur nourriture en ouvrant un large bec, en veillant à ne pas faire tomber leur proie! Les badauds qui ont parfois pour synonyme le terme de gobe-mouche sont donc assurément les héritiers de ces oisons poitevins. Il ne sont pas les seuls, à bayer aux corneilles, encore une proche expression avec un verbe similaire à celui de bader, je connais bien des élèves qui demeurent bouche ouverte, bouche bée, lors de nos cours et ils ne sont pas toujours fascinés par nos propos! Le plus souvent ils baillent, tout simplement, non pas qu’ils s’ennuient, non, c’est impossible, mais victimes de leurs détestables habitudes de vie qui les font se coucher fort tard. Là aussi je crains que ce soit plus pour jouer ou regarder la télévision, et pas Arte, naturellement, que pour réviser longuement les devoirs du lendemain, qui, d’ailleurs, ne sont pas notés sur leur agenda!
Nombreux sont donc les élèves qui badent lors de nos cours, presque si nombreux que ceux qui bavardent, autre fléau de nos salles de cours s’il en est. D’aucuns érigent cela en art de vivre, en profession, je ne dénigre pas les concierges, et bader peut avoir son pendant mondain, on devient alors dilettante, ce qui sonne tout de suite bien mieux! Quoi qu’il en soit, avant de bader il me semble nécessaire de se cultiver, afin de pouvoir, oisivement, profiter de l’existence, de ce qu’elle nous offre à contempler, analyser et comprendre. Bader n’est pas anodin, bader c’est d’abord se nourrir et si les nourritures terrestres sont essentielles et parfois savoureuses, il en va de même pour celles de l’esprit.